1 Action de Steinitz et aspects topologiques. Définition 1. Soient K

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Action de Steinitz et aspects topologiques.
Définition 1. Soient K un corps et n, m ∈ N∗ , A, B ∈ Mn,m (K) sont dites équivalentes noté
A ' B si et seulement si elles codent la même application linéaire φ ∈ L(Km , Kn ), ce qui équivaut
à ce qu’il existe P, Q) ∈ GLn (K) × GLm (K) tel que B = P AQ−1 .
Objectif 1. Caractériser l’ensemble de ces matrices en termes d’actions de groupes.
Théorème 1. Action de Steinitz
Soit G = GLn (K) × GLm (K), alors G Mn,m (K) par conjugaison via (P, Q).A = P AQ−1 .
1. A ' B ⇐⇒ A et B ont le même rang ⇐⇒ Orb(A) = Orb(B)
F
2. Mn,m (K) =
Or où Or désigne l’orbite des matrices de rang r dont un repré0≤r≤min(n,m)
Ir 0
sentant particulier est la matrice Jr =
.
0 0
Pour K = R, C et Mn,m (K) muni de sa structure usuelle d’espace vectoriel normé :
F
Or =
Ok où r ∈ [[0, min(n, m)]]
0≤k≤r
Démonstration. Vérifions brièvement que l’action de Steinitz est bien définie. Pour A ∈ Mn,m (K)
et (P1 , Q1 ), (P2 , Q2 ) dans G, on a :
• (In , Im ).A = A
−1
−1
• (P1 , Q1 ).((P2 , Q2 ).A) = P1 (P2 AQ−1
= (P1 P2 , Q1 Q2 ).A
2 )Q1 = (P1 P2 )A(Q1 Q2 )
Etape 1 : Supposons A ' B, alors A et B représentant la même application linéaire u, elles ont
le même rang rg(A) = rg(B) = rg(u) (le rang d’une matrice est invariant par multiplication à
gauche ou à droite par une matrice inversible.)
Inversement, supposons rg(A) = rg(B) = r. Pour montrer que A ' B, il suffit (par transitivité
de la relation ') de montrer qu’elles sont toutes deux équivalentes à une même matrice, en
l’occurence à la matrice Jr définie par :
Ir 0
Jr =
où Ir désigne la matrice identité de taille r.
0 0
Objectif : Montrer que Jr code les application linéaires uA ,uB canoniquement associées à A,B
c’est-à-dire qu’il existe des bases e1 , e2 de Km et f1 , f2 de Kn dans lesquelles :
Mate1 ,f1 (uA ) = Jr = Mate2 ,f2 (uB )(∇)
Traitons le cas de uA . Par le théorème du rang, on a dim(Ker(uA )) = dim(Ker(A)) = m − r et
il existe une base (ei )r+1≤i≤m de Ker(uA ), de cardinal m − r, puis par le théorème de la base
incomplète, une famille libre (e1 , . . . , er ) telle que :
e1 = (ei )1≤i≤m soit une base de Km .
On a ainsi construit une base e1 de Km adaptée au noyau de uA . Il reste désormais à construire
une base f1 de Kn telle que la matrice de uA dans les bases (e1 , f1 ) soit de la forme requise (∇).
On définit alors naturellement une famille libre de Kn de cardinal r par :
fi = uA (ei ) pour i ∈ [[1, r]], image de la famille libre (ei )1≤i≤r par l’injection uA
|
En effet, uA
|
vect(e1 ,...,er )
vect(e1 ,...,er )
.
est injective par construction même puisque :
Ker(uA
|
vect(e1 ,...,er )
) = Ker(uA ) ∩ vect(e1 , . . . , er ) = {0}
Ainsi, toujours d’après le théorème de la base incomplète, il existe une famille libre (fr+1 , . . . , fn )
telle que f = (fi )1≤i≤n soit une base de Kn , pour laquelle on a Mate1 ,f1 (uA ) = Jr =⇒ A ' Jr .
On a de même que B ' Jr et donc A ' B. Enfin, on en conclut alors directement d’après ce qui
précède que Orb(A) = Orb(B) ⇐⇒ rg(A) = rg(B), ce qui donne le point 1 du théorème.
Etape 2 : G Mn,m (K) permet de partionner Mn,m (K) en les orbites disjointes
sous cette
F
action. Par la caractérisation des orbites par le rang, on a : Mn,m (K) =
Or où Or
0≤r≤min(n,m)
désigne l’orbite des matrices de rang r dont un représentant particulier est la matrice Jr .
2
Etude topologique des orbites de l’action
F par conjugaison : dans la suite K désigne R ou
Ok . Nous allons procéder par double inclusion :
C. Notre objectif est de montrer que Or =
0≤k≤r
1. Montrer que
F
0≤k≤r
F
2. Montrer que
F
Ok est fermé, ceci prouvera que Or ⊂
Ok .
0≤k≤r
Ok ⊂ Or en prouvant que toute matrice de rang ≤ r est limite d’une
0≤k≤r
suite de matrices de rang exactement r.
S
Méthode : Si r = min(n, m) on a naturellement Omin(n,m) ⊂
Ok = Mn,m (K)
0≤k≤min(n,m)
F
et donc Omin(n,m) ⊂ Mn,m (K). Pour r ≤ min(n, m) − 1, montrons que
Ok est l’image
0≤k≤r
réciproque d’un fermé de K par une application continue. Soient I ⊂ [[1, n]] et J ⊂ [[1, m]] tels que
|I| = |J| = k où k ∈ [[0, min(n, m)]]. On note ∆I,J l’application définie par :
∆I,J :
Mn,m (K)
A = (ai,j )1≤i≤m,1≤j≤n
−→
7−→
K
det ((ai,j )i∈I,j∈J )
Par la caractérisation du rang en termes de déterminants extraits (voir rappel) on est amené à
considèrer l’application δr+1 définie par :
δr+1 :
Mn,m (K) −→
A
7−→
K
P
|∆I,J (A)|
I⊂[[1,n]],J⊂[[1,m]],|I|=|J|=r+1
L’application δr+1 est continue, par continuité du module et continuité du déterminant qui est
une fonction polynômiale en les coefficients de la matrice A. Ainsi, on a :
G
Ok =
{A ∈ Mn,m (K) | rg(A) ≤ r}
0≤k≤r
= {A ∈ Mn,m (K) | ∆I,J (A) = 0, ∀|I| = |J| ≥ r + 1}
= {A ∈ Mn,m (K) | ∆I,J (A) = 0, ∀|I| = |J| = r + 1}
=
Ainsi,
F
−1
δr+1
({0})
F
Ok est fermé et comme par construction, Or ⊂
0≤k≤r
0≤k≤r
Ok , on a Or ⊂
F
Ok .
0≤k≤r
Inversement, soit A de rang k ≤ r ≤ min(n, m), on va prouver que A est limite d’une
suite d’éléments de Or . C’est clair si rg(A) = r, supposons donc rg(A) = k ≤ r − 1. Comme
Jk ∈ Orb(A), on a :
∃(P, Q) ∈ G, A = P Jk Q−1
et commençons par montrer que Jk est limite d’une suite de matrices de Or . Dans Mn,m (K)
muni de sa topologie usuelle d’espace vectoriel normé, toutes les normes sont équivalentes, il suffit
donc de montrer qu’il existe une suite de matrice de rang r qui converge vers Jk composantes
par composantes. Alors,


Ik
0
0
1


Ir−k 0 vérifie lim Bp = Jk
Bp =  0
p→∞
p
0
0
0
et par continuité de l’application φA : A 7−→ P AQ−1 , on a lim P Bp Q−1 = P Jk Q−1 = A soit
p→∞
F
F
Ok ⊂ Or et donc
Ok = Or
0≤k≤r
0≤k≤r
Application 1.
1. La seule orbite fermée est l’orbite maximale O0 = {0}.
2. La seule orbite ouverte est l’orbite maximale Omin(n,m) .
3
Démonstration. :
1) D’après ce qu’on vient de voir, il est clair que si k ≥ 1, alors Ok n’est pas fermée. Dans ce cas,
O0 = {0} est bien la seule orbite fermée.
2) Etape 1 : Supposons k < min(n, m) et montrons que Ok n’est pas ouverte. Pour ce faire, on
va prouver que Jk n’est pas intérieur à Ok . Toutes les normes étant équivalentes sur Mn,m (K),
travaillons avec la norme définie par : kAk =
max
|ai,j |. Soit ε > 0. Alors,
1≤i≤n,1≤j≤m
Ik
0
0
!
ε
∈ BO(Jk , ε) car kB − Jk k = mais
2
Ik
0
0
!
ε
ε
6∈ Ok
In−k
In−k
2
2
Donc pour tout ε > 0, BO(Jk , ε) 6⊂ Ok et donc Ok n’est pas ouverte si k < min(n, m).
B=
Etape 2 : montrons que Omin(n,m) est ouverte. Soit I = J = [[1, min(n, m)]], l’application ∆I,J
est continue et ∆I,J (Jmin(n,m) ) = 1 6= 0. Il existe alors un voisinage ouvert U de Jmin(n,m) sur
lequel ∆I,J ne s’annule pas et donc un voisinage ouvert de Jmin(n,m) composée de matrices de
rang min(n, m), le rang ne pouvant pas augmenter plus, soit U ⊂ Omin(n,m) . Pour A ∈ Omin(n,m) ,
il existe (P, Q) ∈ G tel que A = P Jmin(n,m) Q−1 et l’application
ΦP,Q : M 7−→ P M Q−1
étant naturellement un homéomorphisme (continue car polynomiale en les coefficients de M ,
bijective, d’inverse M 7−→ P −1 M Q, elle aussi continue car polynomiale), elle transforme un
voisinage de Jmin(n,m) en un voisinage de A. Alors, ΦP,Q (U ) est un voisinage de A tel que l’on
ait toujours ΦP,Q (U ) ⊂ Omin(n,m) et donc Omin(n,m) est ouverte.
Rappel 1. A et B ∈ Mn,m (K) codent la même application linéaire φ de L(Km , Kn ) si et
seulement s’il existe des matrices (P, Q) ∈ GLn (K) × GLm (K) telles que B = P −1 AQ.
Démonstration. :
Etape 1 : Supposons que A et B représentent la même application linéaire u ∈ L(Km , Kn ). Il
existe alors des bases e1 , e2 de Km et f1 , f2 de Kn telles que Mate1 ,f1 (u) = A et Mate2 ,f2 (u) = B.
Soit x ∈ Kn . On note alors :
• X1 = Mate1 x et X2 = Mate2 x
• Y1 = Matf1 u(x) et Y2 = Matf2 u(x)
• P = Pass(e1 , e2 ) et Q = Pass(f1 , f2 )
Puisque X1 = P X2 , Y1 = QY2 on a Y1 = AX1 et Y2 = BX2 soit :
Y2 = Q−1 Y1 = Q−1 AX1 = (Q−1 AP )X2 et comme Y2 = BX2 on a B = Q−1 AP
et comme Y2 = BX2 on a B = Q−1 AP .
Etape 2 : Supposons que B = Q−1 AP . On note e, f les bases canoniques respectivement de Kn
et Km . Alors les vecteurs colonnes de P exprimés dans la base canonique e de Kn définissent une
nouvelle base e2 de Kn puisque P est inversible et donc P = Pass(e, e2 ). De même, les vecteurs
colonnes de Q définissent une nouvelle base f2 de Kn , ce qui donne Q = Pass(f, f2 ). On a alors
d’après l’étape 1 :
A = Mate,f (uA ) et B = Mate2 ,f2 (uA ) =⇒ A ' B.
[O-A]
Rappel 2. A est de rang r si et seulement si tous les déterminants extraits de A de taille r + 1
sont nuls et s’il en existe un de taille r qui n’est pas nul.
Supposons que les mineurs d’ordre r + 1 de A soient nuls. Intéressons nous à l’ordre r + 2, les
sous-matrices de A sont emboités et on peut écrire une matrice d’ordre r + 2 sous la forme :
4

×
...
 ..
.
a01,1

.
..
 ..
.
× a0r+1,1
...
×

...
a01,r+1
..
.
...
a0r+1,r+1





En développant le déterminant selon la première ligne, on obtient une combinaison de mineur
d’ordre r + 1 qui sont tous nuls et donc une sous-matrice de taille r + 2 a un déterminant nul.
De proche en proche, on montre par une récurrence fini que tous les mineurs d’ordre ≥ r + 1 de
A sont nuls si ceux d’ordre r + 1 le sont.
Références :
• Objectif Agregation pages 155 à 157.
• Gourdon 1 algèbre page 185.
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