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phique de la musculature du tronc, la structure de
l’étude incluait certains instruments de mesure
éprouvés, afin d’évaluer la douleur et la fonction
musculaire. L’étude, présentée au comité d’éthique
local, en a reçu l’approbation.
Méthode
La méthode de l’ultrasonographie Doppler tissu-
laire (tissue Doppler imaging, TDI) est très répan -
due en cardiologie pour la mesure du mouvement
des tissus [3]. L’avantage de cette méthode réside
dans la propriété de pouvoir mesurer les mouve-
ments tissulaires les plus fins s’approchant ou
s’éloignant de la sonde, traduits en codes couleurs,
à l’aide d’une fréquence d’échantillonnage élevée
(333 Hz) dans le mode M. On peut ainsi repré-
senter des déroulements temporels du mouvement
avec une résolution de l’ordre de la milliseconde.
Dans le cadre de cette étude, nous avons examiné
la fiabilité à différents instants, ainsi que la vali-
dité de cette méthode dans le domaine de la mus-
culature du tronc.
Résultats
Nous avons pu valider cette nouvelle méthode avec
succès (fig. 1 x). Le Doppler tissulaire (fig. 2 x)
a permis de mesurer la musculature du tronc
pendant la phase d’activation en tant qu’unité
fonctionnelle – non différenciée selon les couches
musculaires. De plus, nous avons pu établir une
corrélation significative entre les résultats du
Doppler tissulaire et ceux de l’électromyographie
intramusculaire. Les conditions étaient ainsi réa-
lisées pour tenter d’utiliser cette méthode dans
l’examen de la musculature du tronc dans les cas
de patients souffrant de dorsalgies chroniques non
spécifiques.
Initialement, l’étude devait comparer 200 patients
de différents centres thérapeutiques à un groupe
de contrôle adapté. Cependant, après l’examen
d’un quart des patients prévus, nous avons obtenu
des résultats qui nous conduisirent à interrompre
l’étude dès la phase pilote, plutôt que de soumet-
Programme national de recherche PNR 53
«Santé musculosquelettique –
douleurs chroniques»
Contexte
La musculature du tronc stabilise la colonne ver-
tébrale, principalement la colonne lombaire. Celle-
ci comprend diverses couches musculaires, parmi
lesquelles les muscles suivants occupent une im-
portance primordiale du point de vue de la stabi-
lisation: le muscle oblique externe, le muscle
oblique interne et le muscle transverse de l’ab-
domen. Lors de mouvements du tronc, ces mus-
cles entrent en action de manière préventive afin
d’assurer un support supplémentaire à la colonne
vertébrale [1]. Les déductions faites à partir d’élec-
tromyographies intramusculaires ont laissé sup-
poser que chez les patients souffrant de douleurs
rachidiennes chroniques, il pourrait s’agir d’une
dysfonction de la musculature du tronc, et plus
particulièrement du muscle transverse de l’abdo-
men [2]. Toutefois la technique nécessaire à ces
investigations est très coûteuse, et de plus elle est
invasive. C’est pourquoi il n’a pas été possible
jusqu’ici de réaliser à plus grande échelle des
études cliniques thérapeutiques concernant ce
problème.
Objectifs
Les rachialgies non spécifiques occupent une
place importante au point de vue sociomédical.
Raison pour laquelle nous nous sommes décidés
à effectuer une étude sur une nouvelle méthode
d’analyse dans le cadre du PNR 53. Elle devait
ouvrir la voie à un examen non invasif des patients
souffrant de maux de dos en cours de traitement,
ce traitement consistant en des exercices de stabi -
lisation de la colonne vertébrale. Par l’électromyo -
graphie intramusculaire, il s’agissait pour nous
en particulier de confirmer la méthode d’ultra-
sonographie Doppler tissulaire en tant que base
pour des recherches portant sur les traitements
non invasifs. En plus de l’examen ultrasonogra-
Sur la trace des muscles du tronc1
Haiko Sprotta, Natascha Pulkovskia, Anne F. Manniona, b
aRheumaklinik und Institut für Physikalische Medizin, Universitätsspital Zürich, bSpine Unit, Schulthess-Klinik, Zürich
1Projet PNR 53: Doppler tissulaire: une nouvelle méthode
non invasive permettant d’examiner la fonction de la
musculature du tronc. Numéro de projet: 4053–104787.
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d’autres études, nos observations démontrent que
les patients souffrant de rachialgie chronique ont
une tendance à activer leur musculature du tronc
plus rapidement que les bien-portants, indépen-
damment de leurs symptômes. Comment expliquer
ce résultat? Notre hypothèse est la suivante: le pa-
tient rachialgique «expérimenté» a su développer
des stratégies qui se déroulent dans son subcons -
cient; elles incitent manifestement la muscula-
ture stabilisatrice du tronc à s’activer en antici-
pant le mouvement prévu, afin de diminuer, voire
d’éliminer le potentiel de douleur. Depuis, d’au-
tres chercheurs ont émis des hypothèses sem-
blables [4]. Nous n’avons pas pu reproduire les
données publiées par le groupe de Hodges [2]:
ces chercheurs avaient découvert des indices
selon lesquels les rachialgies chroniques seraient
liées à une dysfonction de la musculature stabili-
satrice du tronc, resp. du muscle transverse de
l’abdomen.
Conclusion pratique
La rachialgie chronique non spécifique est un pro-
blème largement répandu dans notre société. Les
patients et les médecins traitants sont souvent
déçus par les mesures diagnostiques et thérapeu -
tiques, ainsi que par leur caractère peu spécifique.
Grâce à l’ultrasonographie Doppler tissulaire,
l’unité fonctionnelle de la musculature du tronc
peut être caractérisée de manière très précise et
non invasive, sans toutefois pouvoir distinguer
l’évolution temporelle de chacun des muscles. Elle
a aussi permis de montrer que la musculature du
tronc est activée en général plus rapidement chez
les patients affectés de rachialgie chronique – et
non pas plus lentement, comme le prétendent les
études se basant sur l’électromyographie. Il faut
toutefois noter que ce paramètre de contrôle de
la musculature du tronc ne présente pas de cor-
rélation avec l’intensité des rachialgies, et qu’il
ne se modifie pas après une série d’exercices de
stabilisation de la colonne vertébrale.
L’ultrasonographie Doppler tissulaire n’est donc
pas indiquée pour contrôler les résultats d’une
thérapie visant à diminuer la douleur. De nom-
breuses études ont cependant montré que les
exer cices de stabilisation de la colonne vertébrale
sont encore et toujours une mesure thérapeutique
valable pour les patients souffrant de rachialgies
chroniques. Il est probable que ces exercices im-
pliquent des mécanismes qui n’ont pas été envi-
sagés jusqu’à présent.
Perspectives
Les questionnaires ou les tests de la fonction dor-
sale sont des instruments éprouvés permettant un
suivi de la diminution de la douleur et de l’amé-
lio ration du fonctionnement musculaire. L’ultra-
tre les 200 patients à un examen avant et après le
traitement. En effet, l’analyse de la musculature
du tronc par ultrasonographie Doppler tissulaire
ne permet pas de distinguer les malades des bien-
portants et elle ne satisfait pas aux critères exi-
gés pour un test diagnostique. Contrairement à
Figure 1
Examen debout, sonde à ultrasons fixée: le patient doit lever rapidement son bras – à l’opposé de la
sonde à ultrasons – dans la direction indiquée lorsqu’il reçoit un signal visuel généré aléatoirement.
Le tronc s’en trouve déséquilibré. Le Doppler tissulaire permet d’enregistrer l’activation de la
musculature stabilisatrice du tronc.
Figure 2
Coloration des mouvements musculaires après activation (du rouge au bleu), dans une représen-
tation obtenue par Tissue Doppler Imaging (TDI) ultrasonore en mode M (noir-blanc à l’arrière-plan).
La ligne verte dans la zone inférieure représente la durée d’activation pour la contraction de la
musculature du tronc, qui est ici arbitraire.
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Message clé
L’ultrasonographie Doppler tissulaire est une nou-
velle méthode permettant d’observer le comporte -
ment de la musculature du tronc de façon détaillée
et non invasive. Elle ne permet toutefois pas le
suivi de l’évolution de la douleur durant les exer-
cices de stabilisation de la colonne vertébrale.
sonographie Doppler tissulaire permet à son tour
d’objectiver l’activation de la musculature du tronc.
Toutefois, les résultats de notre étude suscitent
une controverse quant au rôle que pourrait jouer
la dysfonction de la musculature du tronc chez les
patients affectés d’une rachialgie chronique. Une
étude plus approfondie s’impose afin d’éclaircir
ce phénomène.
Références
1 Hodges P, Kaigle HA, Holm S, Ekstrom L, Cresswell A, Hans-
son T. Posteroanterior stiffness of the lumbar spine is increased
by contraction of transversus abdominis and the diaphragm:
porcine studies. In: World Confederation for Physical Therapy.
Barcelona, Spain. 2003.
2 Hodges PW, Richardson CA. Inefficient muscular stabilisation
of the lumbar spine associated with low back pain. A motor
control evaluation of transversus abdominis. Spine. 1996;21:
2640–50.
3 Moran CM, McDicken N, Groundstroem KWE. Potential ap-
plications of colour-Doppler imaging of the myocardium in
assessing contractility and perfusion. In: Advances in echo
imaging using contrast enhancement. Nanda NC, Schlief R
(eds). 1993.
4 Grenier SG, McGill SM. Quantification of lumbar stability by
using two different abdominal activation strategies. Arch
Phys Med Rehabil. 2007;88:54–62.
Correspondance:
PD Dr Haiko Sprott
Rheumaklinik und Institut
für Physikalische Medizin
Universitätsspital
CH-8091 Zürich
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