Anesthésie locorégionale 145
La formation d’un hématome, lorsqu’il n’est pas compressif est généralement considéré
comme sans conséquence. Une étude portant sur plus de 1 000 anesthésies du plexus
brachial par voie trans-artérielle, a montré une incidence de neuropathie postopératoire
faible [38]. Le biais de cette étude est qu’elle ne porte que sur les premiers jours
postopératoires et ignore totalement le risque tardif de neuropathie engainante [39]. Même
avec un taux de succès satisfaisant, une technique ponctionnant délibérément une artère
ne saurait être recommandée [40].
3.2. TRAUMATISME
Le traumatisme nerveux par l’aiguille peut être responsable d’une atteinte neurologique
post-anesthésique. L’influence de la technique (mode de repérage, type d’aiguille..) est
certainement forte, mais il n’existe actuellement dans la littérature aucune donnée formelle
et la controverse reste importante [41-57]. La prévention du traumatisme nerveux peut se
résumer à trois points : éviter le contact nerveux, choisir une aiguille non vulnérante,
éviter l’injection intra-neurale.
Repérer les nerfs sans les toucher, semble à priori la meilleure technique pour éviter
le traumatisme nerveux, ce qui condamne le repérage par recherche délibérée de
paresthésie. Les techniques de repérage d’espace ont montré leur efficacité en
rachianesthésie, un peu moins en péridurale. Pour les blocs périphériques, les techniques
de perte de résistance ou de franchissement de fascia sont moins performantes. La
neurostimulation paraît la technique à préconiser, son efficacité étant démontrée [58-62],
et son innocuité devant l’être rapidement, grâce à son utilisation de plus en plus fréquente.
Un autre avantage de la stimulation est de prévenir de la présence d’un nerf qui ne devrait
pas se trouver devant l’aiguille (variation anatomique, erreur de repérage…). Cet argument
permet peut-être d’expliquer que c’est après rachianesthésie que l’on observe plus
fréquemment des séquelles neurologiques [1].
En multistimulation, un nerf qui vient d’être infiltré reste repérable [44, 61, 63], car
la perte de réponse immédiate à l’injection n’est que transitoire [47].
Choisir une aiguille qui, en cas de contact avec le nerf, provoque le minimum de
lésion paraît logique, et à la suite des travaux de Selander [53, 55], l’utilisation d’aiguilles
à biseau court semblait la règle de sécurité. En 1992 une étude remet en question le choix
du biseau pour une anesthésie locorégionale, montrant que sur une période d’observation
longue, les lésions les plus graves sont le fait des biseaux courts, surtout lorsqu’ils sont
introduits tangentiellement au nerf [48]. Ce travail a été à l’origine d’une grande
controverse dans la littérature [46, 49-51, 57]. Avec le recul, des biais dans les travaux de
Selander [53, 55] ont été mis en évidence. Mais le travail de Rice [48] n’est pas exempt
de reproches, en particulier il ne tient pas compte de la force de pénétration des aiguilles.
Il semble évident qu’il est plus difficile de pénétrer un nerf avec un biseau court et donc
qu’il en résultera des lésions plus graves. Un argument évoqué en faveur du biseau court
est qu’en l’absence de fixation du paquet nerveux, le nerf s’efface à l’arrivée de l’aiguille.
L’utilisation d’un biseau conique, avec trou d’injection latéral, s’est largement répandue
pour les rachianesthésie, pour la prévention des céphalées [64], mais son intérêt en
anesthésie périphérique reste à démontrer.
L’injection intra-neurale est la cause des neuropathies les plus graves, car au mécanisme
vulnérant, s’associe un effet de compression et d’ischémie par hématome [8]. L’injection
intra-neurale est douloureuse. La prévention de ce type d’accident implique d’arrêter
immédiatement toute injection douloureuse, surtout si le patient décrit à l’injection une