INTERVIEW: M ME ELISABETH SIMONIUS, PROPRIÉTÉ VEILLON AU CLOÎTRE À AIGLE «Nous, propriétaires, nous sommes rassurés lorsque nous gagnons le droit d'arborer les Lauriers d'Or sur nos bouteilles» Comme vous le savez, le label de qualité Terravin couronne chaque année les meilleurs vins du terroir vaudois, notamment avec les Lauriers d’Or. Nous nous intéressons bien sûr avant tout aux vins vaudois, mais aussi aux vins des autres régions. Quelle est votre opinion des vins suisses en général? Madame Simonius, je crois savoir que vous avez été vice-présidente du Parti libéral suisse et Bâle, que vous êtes consule de Belgique, également à Bâle, et qu'en ce qui concerne le vin, vous avez des liens étroits avec la Propriété Veillon au Cloître, à Aigle, dans le canton de Vaud. Voulez-vous nous parler un peu de votre parcours? J'ai effectivement été l'une des vice-présidentes du Parti libéral suisse et Bâle, et je suis consule de Belgique à Bâle. Dans le cadre de cette fonction, bien entendu, je n'ai rien à faire avec le vin - sauf que les Belges aiment aussi boire un bon verre de vin! Je trouve qu'il y a des vins qui se boivent très bien dans la région... mais quand vous les buvez ailleurs, ce n'est pas la même chose! Par exemple, dans la région nord-ouest où j'habite, la région de Bâle, il y a des produits qui sont très bien quand vous les buvez sur place, mais si vous les buvez ici, ils ne passent pas aussi bien. Quand on boit un vin, l'atmosphère joue un rôle et c'est toujours mieux quand on le boit dans la région d’où il provient. Cela dit, les vins vaudois – et c’est une exception – on peut les boire partout. Ça, c'est vraiment un avantage et une preuve de qualité! D'une manière générale, diriez-vous que les vins suisses sont bien connus ou pas très bien connus de vos collègues étrangers? Je dirais qu’ils savent qu'il existe des vins suisses, mais je pense que chacun boit surtout le vin de son pays. On a un tel choix de vins maintenant! Il y a beaucoup de personnes qui utilisent Internet et qui disent: «Ah, c'est intéressant, voici un vin Je suis mariée depuis plus de 40 ans avec l'un des trois propriétaires de la Propriété Veillon. Alors, quand on entre dans une telle famille, on prend ça très au sérieux! Au départ, je ne comprenais rien au vin. Je viens d'une famille qui buvait du vin et il y en avait toujours un peu sur la table, mais c'est autre chose quand on a une propriété! Alors j'ai fréquenté l'Ecole de Wadenswil pour comprendre un peu ce que ça signifie, la vigne, l'élevage de la vigne et du vin, encaver et vinifier. Nous participons à la sélection des Lauriers d'Or Terravin depuis des années avec notre team actuel. On est heureux de recevoir les Lauriers d'Or, et ça nous donne une certaine sûreté. Mais nous savons aussi que, même quand on a reçu les Lauriers d'Or, il faut toujours continuer à produire de la qualité. Il faut toujours faire des efforts, toujours voir ce qu'on peut encore faire mieux, définir combien investir pour pouvoir encore améliorer nos vins. Car la chose la plus importante pour nous, c'est la qualité de notre produit. production, ce n'est pas le «m'as-tu vu». La Propriété Veillon, c'est le vieux style, celui du vrai terroir! En Suisse alémanique, y a-t-il une bonne connaissance des vins de Suisse romande? J'en suis sûre, parce qu'à Zurich, on connaît bien les vins vaudois, on connaît bien la région! Et je pense que c'est aussi le cas en Suisse en général. Depuis une dizaine d'années, on fait de la publicité avec des journées «caves ouvertes». Chez nous, depuis le début, je suis toujours venue pour les caves ouvertes, et je vois qu'il y a maintenant beaucoup de gens de la région de Berne et aussi des Zurichois qui viennent. Et ça, c'est un signe que les vins du domaine sont connus bien au-delà du canton de Vaud! L'année passée, d'ailleurs, c'était toujours plein. Vous avez un point de vue particulièrement privilégié puisque vous voyez notamment ce qui se passe dans le canton de Vaud. Mais quelle est votre impression par rapport aux vins valaisans par exemple? Comment les gens voient-ils les vins vaudois par rapport aux vins valaisans? A l'époque où je suis entrée dans la famille, le vin valaisan n'était pas tellement apprécié, mais maintenant, ils ont fait des progrès énormes. Et je trouve qu’il y a beaucoup de bons vins en Suisse romande en général (Valais, Vaud, Genève, Neuchâtel). C'est important qu'il y ait de la concurrence. Quand il y a un seul bon vin dans une région, il est difficile de le vendre, parce que les gens disent: «Ah oui, il est bon, mais c'est une exception!» Mais si dans une r gion il y a beaucoup de vignerons qui font des vins de qualit , les gens vont dire: ˙Voil , c’est une r gion qui fait du bon vin!¨ Donc, pour nous, c'est important que tout le monde ici fasse du bon vin. Comme je l'explique dans les entreprises où je fais du conseil, il faut de la concurrence, c'est ça qui donne beaucoup d'énergie! d'Australie, voici un vin d'Amérique, goûtons-les!» Là, vous pensez plutôt aux Suisses? Oui, mais c'est aussi le cas sur le plan international. Il y a toute une génération «lifestyle» qui, parce qu'un vin coûte cher, veut absolument le goûter. Nous, nous ne sommes pas du tout comme ça. Pour nous, c'est la terre, c'est le vin, c'est la En ce qui vous concerne personnellement, quels sont les vins suisses que vous connaissez particulièrement bien? De quelles régions viennent-ils? Naturellement, ce sont les vins d'Aigle que je connais le mieux! On goûte par exemple ceux des voisins Emery & Moret durant les journées «caves ouvertes». Je connais les vins zurichois parce que j'étais à Wädenswil, et je connais aussi des vins genevois. J'ai été vice-présidente du Parti libéral suisse et, quand il y a eu un Genevois à la présidence, il a apporté du vin genevois. C'était très bien - il faut toujours voir ce que font les autres! Et il y a également des vins tessinois que j'aime beaucoup... Oui, depuis notre première participation, il y a 10 ans. A ce moment-là, on avait tout changé, on avait engagé un œnologue et un autre vigneron. Ce sont eux qui ont dit, à propos de Terravin: «Maintenant, on doit vraiment essayer!» Depuis lors, on participe chaque année, mais on se pose toujours la question: «Est-ce qu'on va y arriver?» Quand je vois ce que ça demande comme travail, et comme investissement, les vins vaudois, à mon avis, ne sont pas très chers. Parce que ce n’est pas de la Je trouve que le chasselas pur que nous chimie, c’est vraiment du vin pur! produisons, avec l’obligation de ?n’uti liser que des raisins de la r gion, Pensez-vous que les vins suisses - et donne un vin merveilleux. Bien vaudois - pourraient s’exporter davanentendu, il peut y avoir une grande diffétage? rence d’année en année. Mais je trouve et c’est aussi vrai pour les autres petits D'abord, pour l’exportation, vous devez vignerons - que le chasselas que nous avoir quelqu'un qui assure la représentaproduisons ici est un vin pur. Quand on tion à l'étranger! Il faut aller aux Foires des vend «Le Cloître», c'est vraiment le vin Vins, il faut avoir un canal de distribution. d'ici! A un endroit comme New York, par exemIl y a beaucoup de grands producteurs qui ple, il faudrait un restaurant suisse qui essaient d'avoir toujours le même goût fasse la fondue, la raclette et le saucisson, chaque année. Nous, nous ne faisons pas et qui offre les vins de la région. Mais ça ça. Nos vins sont toujours différents d'ancoûte cher, aussi bien au niveau du transnée en année. port que de la publicité. Dans une autre interview, quelqu’un A votre avis, y a-t-il plus d’intérêt de nous a dit que le chasselas était un nos jours pour les vins d'outre-mer cépage qui plaisait particulièrement (Etats-Unis, Australie, Nouvelleaux dames. Qu’en pensez-vous? Zélande, Afrique du Sud, Chili)? Ah oui? Je ne peux pas en juger! Dans Oui, je le pense, parce qu’il y a les Denner, cette maison, tout le monde adore le Coop, etc., qui vendent de bons vins chasselas! d'Australie ou de Nouvelle-Zélande. Et ils font également beaucoup de publicité. Les vins de la région, et en particulier Les gens trouvent que ces vins ne coûtent les vins vaudois, se sont-ils améliorés pas cher, et ils les essaient. C'est de la en qualité ces dernières années, à concurrence. Je ne la trouve pas fausse, votre avis? mais c'est vraiment de la concurrence! Oui, toute la région a fait beaucoup d'efA votre avis, les vins suisses ont-ils des forts, c'était nécessaire et ça le sera touchances contre ces concurrents? jours! Que représente à vos yeux la marque de qualité Terravin? Et ça s'est reflété dans les vins Terravin? Je la trouve très intéressante - et nous, propriétaires, nous sommes rassurés lorsque nous gagnons le droit d'arborer les Lauriers d'Or sur nos bouteilles. On sait de quoi on parle, on sait qu'il y a toujours des problèmes, qui commencent avec la plantation et qui finissent avec la mise en bouteilles. Mais lorsqu'on obtient les Lauriers d’Or Terravin, ça nous rassure, ça nous confirme qu’on est sur le bon chemin. Oui, la qualité s'est beaucoup améliorée. Il y a beaucoup de rigueur maintenant dans le travail à la cave. Et Terravin y est effectivement pour quelque chose, parce que ça nous donne une motivation supplémentaire. En ce qui concerne les vins vaudois, est-ce que vous préférez les vins blancs ou les vins rouges? Ou est-ce que vous aimez les deux? A Aigle, je préfère les vins blancs, mais j'aime bien un vin rouge qu'on produit depuis 3 ans, «L'Harmonie du Cloître», un assemblage cabernet franc, gamaret et merlot qui est devenu très bon. Quand je suis entrée dans cette famille, il n'y avait que du vin blanc. C'était la tradition, alors on continue! Il y a toujours du vin blanc sur la table. Et quand quelqu'un vient chez nous, à Bâle, il nous demande: «Estque tu as un vin blanc?» C'est vraiment la tradition! Je suppose que vous connaissez le nom Terravin depuis un certain temps déjà? Que pensez-vous du mode de sélection pour obtenir le label de qualité Terravin? J'ai compris que c'est une sélection absolument neutre faite par des gens de la profession. Je trouve très bien que les dégustations soient anonymes et qu'elles se fassent à l'aveugle. Ça entraîne quelques frais pour le producteur, mais ça en vaut vraiment la peine! S’il vous fallait citer un vin qui soit représentatif du canton de Vaud, quel serait-il? pensez-vous du chasselas, par rapport aux autres cépages? Vous en parlez avec vos clients? On en parle dans notre dépliant, on en discute. Et on explique aux clients que les Lauriers d’Or Terravin, c'est vraiment une qualification qui se fait d'une manière neutre. A votre avis, les vins suisses en général, et vaudois en particulier, sont-ils trop chers ou trop bon marché? Oui, absolument. Je trouve que les vins suisses sont fantastiques. La qualité est très très bonne. On dit que si les vins suisses sont un peu plus chers, c’est parce qu’ils prennent de la qualité! Parmi vos clients, vous avez plusieurs générations? Oui, et ce qui me fait grand plaisir, c'est que nos fils, qui ont entre 30 et 40 ans, ont beaucoup d'amis qui commandent du vin. Ce que je constate chez les jeunes, c'est qu'ils n'achètent plus tellement de grandes quantités, parce qu'ils ont de petits appartements, de petites maisons. Alors ils achètent plutôt un ou deux cartons, tous les ans, régulièrement. Avant, la génération des gens plus âgés que moi achetait cent bouteilles environ. La nouvelle génération achète peut-être aussi un carton de vins italiens et un carton de vins français, mais beaucoup sont très fidèles aux vins suisses. Et ça, c'est très sympathique! Que pouvez-vous ajouter sur les vins vaudois en général, et les vins Terravin en particulier? Je pourrais citer notre propre marque, naturellement, mais je dirais plutôt les vins de la région d'Aigle et d’Yvorne en général, qui sont tout simplement excellents! Je peux seulement répéter que ce sont des vins qui me plaisent beaucoup, et qui plaisent aussi à de nombreux clients et amis qui adorent venir dans la région et boire du vin vaudois. En ce qui concerne les vins blancs, que Madame Simonius, un grand merci!