Immuno-analyse
et
biologie
spécialisée
(2012)
27,
332—338
Disponible
en
ligne
sur
www.sciencedirect.com
REVUES
GÉNÉRALES
ET
ANALYSES
PROSPECTIVES
Quantification
de
l’antigène
HBs
:
intérêts
et
limites
dans
le
suivi
des
patients
infectés
par
le
virus
de
l’hépatite
B
Hepatitis
B
surface
antigen
quantification:
Clinical
implications
and
limits
in
monitoring
patients
with
chronic
hepatitis
B
E.
Bouthry,A.
Pivert, A.
Ducancelle,
F.
Lunel-Fabiani
Laboratoire
de
virologie,
département
des
agents
infectieux
et
pharmacologie—toxicologie,
CHU
Angers,
4,
rue
Larrey,
49933
Angers
cedex
9,
France
Rec¸u
le
6
juillet
2012
;
accepté
le
14
juillet
2012
KEYWORDS
Chronic
hepatitis
B;
HBsAg;
Quantification;
cccDNA;
Interests;
Limits
Summary
Hepatitis
B
surface
antigen
(HBsAg)
is
usually
used
as
a
qualitative
marker
for
the
diagnosis
of
hepatitis
B
virus
(HBV)
infection,
ant
its
persistence
for
more
6
months
defines
chronic
hepatitis
B
(CHB)
infection.
HBsAg
quantification
was
introduced
several
years
ago.
Commercial
quantitative
assays
are
now
available
and
studies
have
suggested
its
interest
for
the
monitoring
patients
with
chronic
hepatitis
B.
Indeed,
HBsAg
titers
can
correlate
with
intra-
hepatic
cccDNA
levels.
Several
studies
have
shown
that
HBsAg
titers
vary
in
the
different
phases
of
the
natural
history
of
the
CHB
infection.
The
kinetic
of
serum
HBsAg
seems
to
have
a
predic-
tive
value
of
HBsAg
clearance
after
treatment
or
of
reactivation,
in
the
case
of
lack
of
response
to
treatment.
However,
interpretation
has
to
take
into
account
the
phase
of
CHB
infection,
the
HBV
genotype,
HBeAg
status
and
serum
HBV
DNA.
©
2012
Elsevier
Masson
SAS.
All
rights
reserved.
MOTS
CLÉS
Hépatite
B
chronique
;
AgHBs
;
Quantification
;
ADNccc
;
Intérêts
;
Limites
Résumé
L’antigène
de
surface
du
virus
de
l’hépatite
B
(AgHBs)
est
le
marqueur
qualita-
tif
sérologique
utilisé
pour
le
diagnostic
d’une
infection
par
le
virus
de
l’hépatite
B
(VHB)
et
sa
persistance
pendant
plus
de
six
mois
définit
l’hépatite
chronique.
La
quantification
de
cet
AgHBs
a
été
évoquée
il
y
a
plusieurs
années,
la
disponibilité
récente
de
techniques
de
dosage
quantitatif
de
l’AgHBs
a
permis
de
suggérer
l’intérêt
de
ce
marqueur
dans
le
suivi
des
patients
infectés
par
le
VHB.
En
effet,
le
titre
sérique
de
l’AgHBs
serait
le
reflet
de
la
quan-
tité
d’ADNccc
présent
dans
l’hépatocyte.
Plusieurs
études
ont
montré
une
variation
du
titre
de
l’AgHBs
au
cours
des
différentes
phases
de
l’histoire
naturelle
du
VHB.
La
cinétique
de
sa
décroissance
semble
avoir
un
rôle
prédictif
dans
la
clairance
de
l’AgHBs
au
cours
de
l’histoire
naturelle
de
l’hépatite
B
ou
d’une
réactivation
virale,
dans
la
non-réponse
au
traitement.
Auteur
correspondant.
Adresse
e-mail
:
(E.
Bouthry).
0923-2532/$
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droits
réservés.
http://dx.doi.org/10.1016/j.immbio.2012.07.023
Quantification
de
l’antigène
HBs
333
Cependant,
l’interprétation
doit
se
faire
en
fonction
de
la
phase
de
l’hépatite
B,
du
génotype
viral,
du
statut
AgHBe
et
de
la
charge
virale
VHB.
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2012
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Tous
droits
réservés.
Introduction
L’hépatite
B
occupe
une
place
majeure
en
termes
de
santé
publique
mondiale.
Le
nombre
de
personnes
ayant
été
en
contact
avec
le
virus
de
l’hépatite
B
(VHB)
est
estimé
à
deux
milliards,
dont
environ
400
millions
sont
des
porteurs
chroniques
[1].
Ces
derniers
ont
un
risque
majeur
d’évoluer
vers
la
cirrhose
et
le
carcinome
hépatocellulaire.
Entre
520
000
et
1,2
million
de
personnes
décèdent
chaque
année
de
complications
liées
à
l’hépatite
B
[2].
Depuis
sa
découverte
par
Blumberg
en
1965
[3],
la
recherche
qualitative
de
l’antigène
de
surface
du
virus
de
l’hépatite
B
(AgHBs)
est
utilisée
comme
marqueur
pour
le
diagnostic
d’infection
par
le
VHB.
L’intérêt
de
la
quanti-
fication
de
l’AgHBs
a
commencé
avec
l’observation
d’une
éventuelle
corrélation
avec
le
titre
d’ADNccc,
la
forme
de
réplication
virale
dans
le
noyau
des
hépatocytes
[4].
Depuis,
de
nombreuses
études
portant
sur
la
quantification
de
l’AgHBs
ont
été
réalisées
pour
montrer
son
intérêt
éven-
tuel
dans
le
suivi
de
l’histoire
naturelle
et
la
prédiction
de
la
réponse
au
traitement
dans
l’hépatite
chronique
B.
La
quantification
de
l’AgHBs
est
maintenant
disponible,
réalisée
avec
des
techniques
rapides,
automatisées,
basées
sur
des
tests
immuno-enzymatiques
de
type
Enzyme
Linked
Immuno-Sorbent
Assay
(Elisa).
L’utilisation
d’un
standard
international
(UI/mL)
permet
en
outre
une
comparaison
des
techniques
disponibles
et
facilite
le
suivi
des
patients.
Actuellement,
deux
kits
sont
commercialisés
pour
la
quan-
tification
de
l’AgHBs
:
le
kit
Architect
HBsAg
QT
(Abbott
Laboratories)
et
le
kit
Elecsys
HBsAg
II
Quant
(Roche
Diagnostic).
Le
dosage
quantitatif
Architect
par
chimiolumi-
nescence
est
le
test
le
plus
largement
utilisé.
Il
permet
une
mesure
du
taux
d’AgHBs
de
0,05
IU
à
250
UI/mL.
Cependant,
une
dilution
manuelle
est
nécessaire
pour
la
quantification
des
hauts
titres.
Le
test
Elecsys
II
utilise
des
anticorps
mono-
clonaux
et
polyclonaux
permettant
une
amélioration
de
la
reconnaissance
de
l’AgHBs
et
des
mutants
AgHBs.
La
linéa-
rité
de
la
technique
Elecsys
II
s’étend
de
0,05
à
52
000
UI/mL
avec
une
dilution
automatique
intégrée.
Une
étude
récente
a
montré
une
bonne
corrélation
dans
la
quantification
de
l’AgHBs
entre
ces
deux
kits
[5].
Nous
proposons
ici
une
revue
des
intérêts
et
des
limites
de
cet
outil
virologique
dans
le
suivi
des
patients
infectés
par
le
VHB.
Intérêts
de
la
quantification
de
l’antigène
HBs
L’antigène
HBs
:
marqueur
quantitatif
de
l’infection
des
hépatocytes
Le
VHB,
qui
appartient
à
la
famille
des
Hepadnaviri-
dae,
est
un
petit
virus
à
ADN.
Son
génome
constitué
de
3200
nucléotides,
circulaire
partiellement
double
brin
possède
quatre
cadres
de
lecture
ouverts
codant
respective-
ment
pour
les
protéines
de
surface
(gènes
pré-S1,
pré-S2,
et
S),
les
protéines
de
capside
(gènes
pré-C
et
C),
la
poly-
mérase
(gène
P)
et
une
protéine
transactivatrice
de
gènes
cellulaires
et
viraux
(gène
X).
L’AgHBs
est
une
des
glycoprotéines
d’enveloppe
majori-
taire
du
virion
mature
du
VHB.
Cette
protéine
se
présente
sous
3
formes
codées
par
le
même
cadre
de
lecture
ouvert
S
(ORF
S)
du
génome
viral,
à
partir
de
trois
codons
d’initiation
différents
:
S
(Small)
pour
la
petite
protéine
majoritaire,
pré-S2
pour
la
protéine
moyenne
(Medium)
et
pré-S1
pour
la
grande
protéine
(Large).
Cet
antigène
circule
dans
l’organisme
sous
forme
de
particules
de
plusieurs
types
:
les
virions
matures
présentant
un
fort
potentiel
infectieux
(nommés
particules
de
Dane),
les
particules
défectives
non
infectieuses,
ne
contenant
pas
d’ADN
viral,
prenant
la
forme
de
sphères
ou
de
bâtonnets.
Ces
particules
sont
secrétées
en
large
excès
(102à
105fois
plus
élevé)
par
rapport
aux
virions
matures
et
sembleraient
jouer
le
rôle
d’un
leurre
pour
la
réponse
immunitaire
humorale
[6,7].
En
effet,
l’AgHBs
porte
un
déterminant
«a
»,
fortement
immunogène,
situé
sur
une
boucle
hydrophile
(aa
121—149),
cible
majeure
des
anti-
corps
neutralisants
anti-HBs
induits
par
la
vaccination
ou
l’infection
résolutive.
L’AgHBs
est
synthétisé
à
la
fois
par
traduction
de
l’ADN
superenroulé
(ADNccc
:
covalently
closed
circular
DNA),
qui
sert
de
modèle
de
réplication
et
par
la
transcription
de
l’ADN-VHB
intégré
au
génome
de
l’hôte
(Fig.
1).
L’ADNccc
existe
dans
le
noyau
de
l’hépatocyte
comme
un
mini-
chromosome
viral
et
sert
de
réservoir
intrahépatique
pour
le
VHB,
il
est
responsable
de
la
persistance
de
l’infection
dans
les
hépatocytes.
Il
est
le
reflet
le
plus
précis
du
nombre
d’hépatocytes
infectés.
Sa
concentration
est
généralement
plus
élevée
chez
les
patients
avec
un
antigène
HBe
(AgHBe)
sérique
positif
que
chez
les
patients
avec
un
AgHBe-négatif
(p
=
0,001)
[8].
Cependant,
son
identification
dans
les
tis-
sus
ne
peut
être
faite
que
par
PCR
spécifique
sur
biopsie
hépatique,
ce
qui
exclut
l’analyse
de
l’ADNccc
en
pratique
courante.
Par
conséquent,
il
est
intéressant
d’étudier
les
marqueurs
sériques
et
non-invasifs
pouvant
être
corrélés
au
taux
d’ADNccc.
Parmi
ces
marqueurs,
le
titre
sérique
de
l’AgHBs
serait
le
reflet
de
la
quantité
d’ADNccc
présent
dans
l’hépatocyte.
En
effet,
plusieurs
études
ont
montré
la
corrélation
entre
le
titre
de
l’AgHBs,
la
concentration
d’ADNccc,
le
taux
d’ADN-VHB
sérique
et
celui
de
l’ADN-
VHB
intrahépatique
[4,8,9].
Cependant,
cette
corrélation
n’a
été
retrouvée
que
chez
les
patients
AgHBe-positifs
[10].
Dans
une
étude
portant
uniquement
sur
des
patients
AgHBe-
négatifs,
une
corrélation
entre
le
taux
d’ADN-VHB
sérique
et
la
concentration
d’ADNccc
a
été
mise
en
évidence
(p
=
0,018)
mais
elle
n’est
pas
retrouvée
entre
le
titre
de
l’AgHBs
et
l’ADNccc
(p
=
0,97)
[11].
Une
variation
du
titre
de
l’AgHBs
a
été
observée
en
fonction
du
génotype
avec
un
titre
médian
significativement
plus
faible
chez
les
patients
infectés
par
334
E.
Bouthry
et
al.
Figure
1
Voies
de
synthèse
de
l’antigène
HBs
pendant
l’infection
par
le
virus
de
l’hépatite
B.
AgHBs
:
antigène
HBs
;
ADNccc
:
covalently
closed
circular
DNA.D’après
Liaw
[41].
un
génotype
B
que
celui
retrouvé
chez
les
patients
infectés
par
un
génotype
A,
C,
D
ou
E
(p
<
0,001)
[12,13].
La
quantification
de
l’antigène
HBs
(AgHBs)
:
outil
de
suivi
de
l’histoire
naturelle
de
l’infection
à
virus
de
l’hépatite
B
Le
passage
à
l’infection
chronique
se
définit
par
la
persis-
tance
de
l’AgHBs
au-delà
de
six
mois
après
l’infection
aiguë.
L’hépatite
B
chronique
peut
être
divisée
en
plusieurs
phases
qui
se
suivent
plus
ou
moins
chronologiquement
:
une
phase
de
tolérance
immunitaire,
qui
associe
un
fort
taux
de
réplication,
un
AgHBe
positif
et
des
transami-
nases
normales.
À
ce
stade,
les
lésions
histologiques
sont
absentes
ou
minimes
;
une
phase
d’immunoclairance
correspondant
à
la
lyse
des
hépatocytes
infectés
par
les
cellules
de
la
réponse
immu-
nitaire.
Cette
phase
s’accompagne
d’une
baisse
de
la
réplication
virale,
d’une
fluctuation
du
taux
des
transami-
nases.
L’incidence
de
la
perte
de
l’AgHBe
à
cette
phase
est
de
10
%
par
an
environ
en
fonction
du
génotype
(le
génotype
C
resterait
AgHBe
positif
plus
longtemps
que
le
génotype
B)
[14]
;
une
phase
de
portage
inactif,
caractérisée
par
une
dispa-
rition
de
l’AgHBe
avec
apparition
des
anticorps
anti-HBe,
une
charge
virale
très
basse
(<
2000
UI/mL)
et
des
trans-
aminases
normales.
Cet
état
reste
stable
chez
la
majorité
des
patients,
mais
il
peut
survenir
des
phases
de
réacti-
vation
[15]
;
une
phase
d’hépatite
chronique
AgHBe-négatif
répli-
cative,
caractérisée
par
une
réplication
virale
et
des
transaminases
fluctuantes.
Cette
phase
peut
suivre
la
phase
d’immunoclairance,
ou
la
phase
de
portage
inactif
en
cas
de
réactivation
et
c’est
à
ce
stade
que
la
réplica-
tion
des
mutants
précore
et
du
promoteur
basal
du
core
est
favorisée
par
la
pression
immunitaire
;
la
perte
spontanée
de
l’AgHBs
correspond
à
la
der-
nière
phase
mais
c’est
un
événement
rare
au
cours
de
l’histoire
naturelle
de
l’hépatite
B
chronique
(0,5
à
0,8
%
par
an).
Elle
confère
une
amélioration
du
pronos-
tic
des
malades,
avec
une
réduction
du
risque
de
cirrhose
et
de
carcinome
hépatocellulaire
[16].
Le
traitement
par
l’interféron
permet
d’augmenter
cette
clairance
de
l’AgHBs.
Plusieurs
études
ont
montré
une
variation
du
titre
de
l’AgHBs
au
cours
de
ces
différentes
phases
de
l’histoire
naturelle
du
VHB.
Dans
une
étude
européenne
comparant
226
patients
infectés
chroniquement
par
le
VHB,
le
titre
sérique
de
l’AgHBs
est
plus
élevé
chez
les
patients
en
phase
d’immunotolérance
(n
=
30)
ou
en
phase
d’immunoclairance
(n
=
48)
que
chez
les
patients
AgHBe-négatifs
faible-
ment
réplicatifs
(n
=
68)
ou
porteurs
inactifs
(n
=
68)
(4,96/4,37/3,09/3,87
log
UI/mL
respectivement
;
p
<
0,001)
[17].
Une
étude
asiatique
a
montré
qu’une
différence
significative
du
titre
de
l’AgHBs
entre
chaque
phase
de
l’histoire
naturelle
du
VHB
(p
=
0,001),
notamment
entre
la
phase
d’immunotolérance
et
la
phase
d’immunoclairance
(p
=
0,007),
permettrait
de
classer
les
patients
[18].
Chez
les
patients
AgHBe-positifs,
des
résultats
prélimi-
naires
d’études
montrent
que
le
titre
d’AgHBs
serait
le
seul
marqueur
indépendant
non
invasif
significatif
d’une
fibrose
avancée
[19].
Il
existe
une
forte
corrélation
entre
le
titre
Quantification
de
l’antigène
HBs
335
de
l’AgHBs
et
le
stade
de
fibrose
(p
<
0,0001),
montrant
une
diminution
du
titre
entre
F1
et
F4,
ce
qui
permet
d’identifier
les
patients
avec
une
absence
ou
une
fibrose
minime
(F0-F1)
de
ceux
avec
une
fibrose
modéré
à
sévère
F2-F4
(valeur
pré-
dictive
négative
[VPN]
90
%,
valeur
prédictive
positive
[VPP]
61
%)
[13].
Afin
de
différencier
une
phase
d’hépatite
chronique
B
AgHBe-négatif
réplicative
d’une
phase
de
portage
inac-
tif
(ADN
<
2000
UI/mL),
la
détermination
des
taux
sériques
de
l’ALAT
et
de
l’ADN-VHB
est
nécessaire.
Cependant,
l’identification
précise
est
difficile
car
certaines
fluctua-
tions
ont
été
observées
[20—22].
L’étude
de
Brunetto
et
al.
s’est
intéressée
à
l’intérêt
de
la
quantification
de
l’AgHBs
dans
le
diagnostic
des
différentes
phases
de
l’hépatite
chronique
chez
des
porteurs
asymptomatiques,
non
trai-
tés,
AgHBe-négatifs,
de
génotype
D.
La
combinaison
d’une
mesure
de
l’AgHBs
inférieure
à
1000
UI/mL
et
de
l’ADN-VHB
inférieure
à
2000
UI/mL
pourrait
permettre
une
identifica-
tion
précise
des
«vrais
»porteurs
inactifs
avec
une
VPP
de
88
%
et
une
VPN
de
97
%
[23].
Une
association
semblable
(AgHBs
<
2000
UI/mL
et
ADN-VHB
<
2000
UI/mL)
a
été
retrou-
vée
dans
une
étude
portant
des
patients
de
génotype
A
à
E
[24].
La
quantification
de
l’antigène
HBs
(AgHBs)
:
un
marqueur
prédictif
de
la
réactivation
virale
Le
titre
de
l’AgHBs
pourrait
être
utilisé
comme
marqueur
prédictif
d’une
réactivation
virale.
En
effet,
dans
l’étude
de
Jaroszewicz
et
al.
[17],
cinq
patients
faiblement
réplicatifs
ont
eu
une
réactivation
de
leur
hépatite
B
chronique
avec
une
augmentation
de
leur
ADN-VHB
de
plus
d’1
log
UI/mL.
Pour
quatre
d’entre
eux,
une
augmentation
du
titre
de
l’AgHBs
à
plus
de
trois
fois
sa
valeur
initiale
a
été
observée.
Une
valeur
seuil
à
3500
UI/mL
du
titre
de
l’AgHBs
a
été
pro-
posée
dans
le
but
d’identifier
les
patients
qui
risquent
une
réactivation
(VPN
95
%).
Dans
une
autre
étude,
la
sélection
de
mutants
résistants
à
la
Lamivudine
était
précédée
d’une
augmentation
transitoire
du
titre
de
l’AgHBs,
apparaissant
avant
l’ascension
de
la
charge
virale
[25].
La
quantification
de
l’AgHBs
associée
à
la
charge
virale
VHB
pourrait
per-
mettre
une
détection
précoce
des
souches
résistantes
lors
de
l’évaluation
de
la
réponse
au
traitement
par
analogues
nucléosidiques
(NUCs).
Les
limites
de
la
quantification
de
l’antigène
HBs
La
quantification
de
l’antigène
HBs
(AgHBs)
:
un
marqueur
prédictif
de
réponse
au
traitement
antiviral
?
La
définition
de
la
réponse
au
traitement
est
fonction
de
la
stratégie
thérapeutique
choisie.
Lors
d’un
traitement
par
interféron
pégylé,
la
réponse
virologique
est
définie
par
une
charge
virale
ADN-VHB
inférieure
à
2000
UI/mL
à
24
semaines
de
traitement.
Chez
les
patients
atteints
d’hépatite
B
chronique
avec
un
AgHBe
positif,
s’ajoute
une
réponse
sérologique
avec
une
séroconversion
HBe
à
la
fin
du
traitement.
Lors
d’un
traitement
par
des
NUCs,
la
réponse
virologique
se
définit
par
une
indétectabilité
de
l’ADN
viral
à
48
semaines
de
traitement.
Cependant,
quel
que
soit
le
traitement,
l’objectif
majeur
est
l’obtention
d’une
réponse
virologique
soutenue
(RVS)
définie
par
l’indétectabilité
de
l’ADN
viral
six
mois
après
l’arrêt
du
traitement.
La
prédic-
tion
précoce
de
cette
RVS,
notamment
par
la
quantification
de
l’AgHBs
permettrait
une
prise
en
charge
personnalisée
et
mieux
adaptée
des
patients.
Traitement
par
l’interféron
Chez
les
patients
AgHBe-positifs,
une
décroissance
signifi-
cative
du
titre
sérique
de
l’AgHBs
a
été
observée
chez
les
patients
répondant
au
traitement
par
interféron
avec
une
séroconversion
HBe
(p
<
0,001),
mais
non
retrouvée
chez
les
patients
sans
séroconversion
[26].
Plus
récemment,
une
étude
a
montré
que
les
patients
ayant
un
titre
d’AgHBs
infé-
rieur
à
1500
UI/mL
aux
semaines
12
et
24
d’un
traitement
PegInterféron
alpha-2a
(PEG-IFN-2a)
pendant
48
semaines
avaient
une
plus
forte
probabilité
d’obtenir
une
sérocon-
version
HBe
six
mois
après
l’arrêt
du
traitement,
avec
une
VPP
de
57
%
et
54
%
et
une
VPN
de
72
%
et
76
%
respective-
ment
[27].
Par
ailleurs,
aucune
séroconversion
HBe
n’a
été
observée
chez
les
patients
ayant
un
titre
d’AgHBs
supérieur
à
20
000
UI/mL
aux
mêmes
semaines,
suggérant
alors
un
arrêt
précoce
du
traitement
[28].
Dans
une
autre
étude,
la
combi-
naison
d’une
réduction
du
titre
d’AgHBs
supérieure
à
1
log
UI/mL
avec
un
titre
inférieur
à
300
UI/mL
à
six
mois
de
trai-
tement
est
associée
à
une
RVS
dans
75
%
des
cas,
contre
15
%
dans
les
cas
contraires
(p
<
0,001),
la
VPP
et
la
VPN
étant
de
75
%
et
85
%
respectivement
[29].
Dans
ce
contexte,
la
baisse
du
titre
de
l’AgHBs
sérique
aux
semaines
12
et
24
du
trai-
tement
interféron
pourrait
être
utilisée
comme
marqueur
prédictif
d’une
RVS
chez
les
patients
AgHBe-positifs.
En
général,
une
baisse
faible
de
l’AgHBs
à
S12
pourrait
prédire
une
non-réponse,
tandis
qu’une
baisse
significative
de
son
titre
à
S24
permettrait
de
prédire
une
réponse
au
traitement
par
l’interféron.
Chez
les
patients
AgHBe-négatifs,
l’étude
de
Moucari
et
al.
[30]
s’est
intéressée
à
la
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
chez
des
patients
traités
par
PEG-IFN-2a
pendant
48
semaines.
Il
semblerait
que
les
patients
ayant
atteint
une
réduction
du
titre
de
l’AgHBs
supérieure
à
0,5
log
UI/mL
à
S12
du
traitement
ont
une
forte
probabilité
de
réponse
(VPP
89
%,
VPN
90
%).
Il
en
est
de
même
pour
une
réduction
du
titre
supérieure
à
1
log
à
S24
de
traitement
(VPP
92
%,
VPN
97
%).
À
noter
que
l’analyse
de
la
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
au
cours
d’un
traitement
PEG-IFN-2a
±
lamivudine
en
fonction
du
génotype
a
montré
un
déclin
plus
prononcé
chez
les
patients
infectés
par
les
génotypes
A
et
B
(envi-
ron
0,8
log
UI/mL)
en
comparaison
de
celui
observé
chez
les
patients
infectés
par
un
génotype
D
(0,3
log
UI/mL)
[12].
À
S48
de
traitement,
un
titre
(bas)
de
l’AgHBs
semble
par
ailleurs
meilleur
qu’une
charge
virale
VHB
indétec-
table,
pour
prédire
une
clairance
de
l’AgHBs
trois
ans
après
l’arrêt
du
traitement.
En
effet,
les
patients
ayant
un
titre
d’AgHBs
inférieur
à
10
UI/mL
à
S48
ont
une
probabilité
de
52
%
d’avoir
un
AgHBs
négatif
trois
ans
après
l’arrêt
du
trai-
tement,
comparé
à
2
%
chez
les
autres
patients
(p
<
0,0001).
En
revanche,
chez
les
patients
ayant
un
ADN-VHB
inférieur
à
400
copies/mL
à
S48,
la
probabilité
de
clairance
de
l’AgHBs
n’est
que
de
9
%,
ce
qui
n’est
pas
significativement
différent
336
E.
Bouthry
et
al.
Tableau
1
Intérêt
de
la
quantification
de
l’AgHBs
au
cours
du
traitement
par
interféron
pégylé
[30,41—45].
Diminution
de
l’AgHBs
à
S12
Réponse
au
traitement
VPP
(%)
VPN
(%)
Patients
AgHBe-positifs
Absence
de
diminution 25 97
<
1500
UI/mL 46 86
<
1500
UI/mL 33 91
Patients
AgHBe-négatifs
Diminution
>
10
%
47
84
>
0,5
log
UI/mL
89
90
Absence
de
diminution
NA
100
AgHBs
:
antigène
HBs
;
VPP
:
valeur
prédictive
positive
;
VPN
:
valeur
prédictive
négative.
de
ce
qui
est
retrouvé
chez
les
patients
avec
un
ADN-VHB
supérieur
à
400
copies/mL
[12].
Une
autre
étude
réalisée
chez
des
patients
AgHBe-négatifs
montre
que
l’absence
d’une
décroissance
de
l’AgHBs
(pas
de
valeur
exacte)
asso-
ciée
à
un
déclin
de
la
charge
virale
VHB
inférieur
à
2
log
copies/mL
à
S12
de
traitement
par
PEG-IFN-2a,
permet
d’identifier
les
patients
qui
n’ont
pas
ou
peu
de
chance
d’avoir
une
RVS
au
terme
du
traitement
[31].
Ces
résul-
tats
sont
validés
essentiellement
chez
les
patients
infectés
par
le
génotype
D,
ce
qui
représente
en
Europe
la
plu-
part
des
patients
AgHBe-négatifs
[32].
Pour
tous
les
patients
AgHBe-négatifs
traités
par
PEG-IFN-2a,
une
règle
d’arrêt
précoce
du
traitement
à
S12
a
été
proposée
par
Chan
and
the
GP
group
[33]
à
partir
de
la
combinaison
de
la
décrois-
sance
de
l’AgHBs
et
de
celle
de
la
charge
virale,
avec
une
VPN
de
100
%
et
une
VPP
de
29
%,
pouvant
être
utilisée
en
pratique
clinique.
L’excellente
VPN
d’une
absence
d’une
diminution
significative
de
l’AgHBs
sous
traitement
par
PEG-
IFN-2a
paraît
justifier
l’utilisation
de
l’AgHBs
quantitatif
pour
orienter
la
stratégie
thérapeutique
vers
une
décision
d’un
arrêt
précoce
de
traitement
(Tableau
1).
Traitement
par
les
analogues
nucléosidiques
(NUCs)
La
clairance
de
l’AgHBs
est
un
événement
rarement
observé
chez
les
patients
traités
par
des
NUCs,
en
particulier
lorsqu’ils
sont
AgHBe-négatifs
[34].
Néanmoins,
une
étude
récente
chez
des
patients
répondeurs
à
long
terme,
le
trai-
tement
en
monothérapie
par
Lamivudine
pendant
cinq
ans
aboutit
à
la
suppression
virale
persistante
dans
la
plupart
des
cas
et
à
une
clairance
de
l’AgHBs
dans
11,7
%
des
cas
[35].
Cinq
ans
de
traitement
de
Ténofovir
Disoproxil
Fumarate
est
également
associé
à
une
RVS,
une
régression
significative
de
la
fibrose
et
de
la
cirrhose
et
une
perte
de
l’AgHBs
chez
11
%
des
patients
[36].
La
décroissance
de
l’AgHBs
sérique
est
lente
et
n’est
pas
corrélée
avec
le
taux
d’ADN-VHB
au
cours
du
traitement
par
les
NUCs.
Cepen-
dant,
dans
certains
cas,
la
décroissance
du
titre
permettrait
d’identifier
les
patients
qui
vont
perdre
leur
AgHBs
à
long
terme.
Chez
les
patients
AgHBe-négatifs
traités
par
des
NUCs,
la
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
semble
plus
lente
que
celle
observée
chez
les
patients
traités
par
interféron
pégylé.
Dans
une
étude
analysant
386
patients
AgHBe-négatifs
traités
par
PEG-IFN-2a
et/ou
lamivudine,
une
décroissance
significative
du
titre
de
l’AgHBs
a
été
observée
chez
les
patients
traités
par
PEG-IFN-2a
seul
ou
associé
(0,71
et
0,67
log
UI/mL
respectivement,
p
<
0,001),
cette
décrois-
sance
n’a
pas
été
retrouvée
chez
les
patients
traités
par
lamivudine
seule
(0,02
log
UI/mL)
[12].
L’analyse
de
la
cinétique
de
l’AgHBs
à
court
et
long
terme
lors
d’un
traite-
ment
par
les
NUCs
montre
que
la
décroissance
précoce
(six
mois)
du
titre
de
l’AgHBs
n’est
pas
prédictive
de
la
clair-
ance
de
ce
dernier
(p
=
0,34).
Seule
la
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
supérieure
à
0,5
log
UI/mL,
deux
ans
après
un
succès
virologique
(défini
par
une
charge
virale
inférieure
à
100
UI/mL)
est
associée
à
une
perte
de
l’AgHBs.
Cependant,
dans
cette
étude,
les
patients
n’ayant
rec¸u
aucun
traite-
ment
ont
une
cinétique
de
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
similaire.
Ces
données
suggèrent
l’impact
limité
des
NUCs
sur
la
clairance
de
l’AgHBs,
mais
soulignent
également
la
valeur
de
la
quantification
de
l’AgHBs
dans
la
prédiction
de
sa
clairance
[37].
La
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
pendant
un
traite-
ment
par
des
NUCs
chez
les
patients
AgHBe-positifs
semble
plus
évidente
à
court
terme
que
celle
observée
chez
les
patients
AgHBe-négatifs.
Une
étude
portant
sur
162
patients
AgHBe-positifs
a
montré
qu’un
traitement
par
Telbivudine
entraîne
une
diminution
lente,
progressive
du
titre
de
l’AgHBs
mais
significative
entre
le
début
du
traitement
et
S24
(p
<
0,0001).
La
perte
de
l’AgHBs,
après
trois
ans
de
trai-
tement
chez
huit
des
neuf
patients
est
associée
à
un
déclin
rapide
de
l’AgHBs
supérieur
à
1
log
UI/mL
à
S48
(p
=
0,0024)
[38].
Des
résultats
similaires
ont
été
observés
dans
une
étude
pivot
sur
le
Ténofovir
;
la
décroissance
du
titre
de
l’AgHBs
à
S24
est
plus
importante
chez
les
patients
ayant
perdu
leur
AgHBs
après
quatre
ans
de
traitement
(2,41
log
UI/mL
versus
0,20
UI/mL)
[39].
Une
différence
en
fonc-
tion
des
génotypes
a
également
été
notée,
avec
un
déclin
du
titre
de
l’AgHBs
plus
fort
et
continu
chez
les
patients
de
génotypes
A
et
D
par
rapport
à
ceux
de
génotypes
B
et
C
[40].
Conclusion
D’après
l’ensemble
de
ces
données,
la
quantification
de
l’AgHBs
et
plus
précisément
la
cinétique
de
décroissance
représente
un
nouveau
marqueur
de
suivi
virologique
des
hépatites
B
chroniques.
Elle
ne
doit
pas
remplacer
la
quan-
tification
de
l’ADN-VHB.
La
quantification
de
l’AgHBs
peut
être
utile
pour
estimer
la
probabilité
d’une
clairance
de
l’AgHBs
au
cours
de
l’histoire
naturelle
de
l’hépatite
B
ou
d’une
réactivation
virale
B
chez
un
sujet
à
risque.
Elle
per-
met
également
d’estimer
approximativement
la
phase
de
l’infection
chronique
dans
laquelle
se
trouve
un
patient
suivi
pour
une
hépatite
chronique
B.
Les
principales
limites
à
l’utilisation
de
ce
test
sont
que
l’interprétation
du
titre
d’AgHBs
doit
se
faire
en
fonction
de
la
phase
de
l’hépatite
B,
du
génotype
viral,
du
statut
AgHBe
et
de
la
charge
virale
VHB.
Son
rôle
prédictif
dans
la
réponse
au
traitement
reste
à
préciser
notamment
pour
les
NUCs.
C’est
pourquoi
il
n’y
a
pas
encore
de
recommandations
des
sociétés
savantes
pour
utiliser
ce
test
dans
le
suivi
ou
le
bilan
d’une
hépatite
B
chronique,
et
que
ce
marqueur
n’est
pas
mis
à
la
nomencla-
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