r e vu e d e p r e ss e Coordinateur : N. Milpied TRAITEZ AUSSI PAR LAMIVUDINE LES HÉPATITES B ANCIENNES (AGHBS–) SOUS CHIMIOTHÉRAPIE Traitez aussi par lamivudine les hépatites B anciennes (AgHBs–) sous chimiothérapie Grossesse et imatinib Les antagonismes entre alicaments et médicaments : interaction négative entre thé vert et bortézomib Séquençage complet du génome d’une cellule de LAM à caryotype normal La réactivation sous immuno-chimiothérapie du virus de l’hépatite B (VHB) lorsque l’antigène HBs est positif (AgHBs) est classique, mais celle d’une hépatite ancienne, AgHbs négatif et anticorps anti-HBc positif (AcHBc), est méconnue. Dans ce dernier cas, l’existence d’une réplication à bas bruit du VHB dans le foie et dans les cellules mononucléées circulantes est établie et des réactivations ont été documentées après greffe hépatique, auto- et allogreffes de cellules souches hématopoïétiques. Afin d’éclaircir ce point, une équipe de Hong Kong (75 % des patients infectés par le VHB vivent en Asie du Sud-Est) a suivi de façon prospective les patients atteints d’un lymphome B diffus à grandes cellules (LBDGC) inclus dans leur institution (hôpital Prince of Wales). Commentaire. Les patients sous immunochimiothérapie doivent être traités par lamivudine si leur AgHBs est positif, mais également si l’AcHBc est positif, a fortiori si l’AcHBs est négatif. Ce traitement préventif doit être commencé en même temps que la chimiothérapie et poursuivi au moins 6 mois après sa réalisation. Une attitude attentiste, consistant à traiter par lamivudine uniquement en cas de réactivation, peut s’avérer dangereuse et conduire au décès du patient. Une information majeure à faire passer ! S. Choquet, Paris. ❏ Yeo W, Chan TC, Leung NWY et al. Hepatitis B virus reactivation in lymphoma patients with prior resolved hepatitis B undergoing anticancer therapy with or without rituximab. J Clin Oncol 2008;27:605-11. GROSSESSE ET IMATINIB Patients et méthodes. De début 2003 à fin 2006, tous les LBDGC en première ligne ont été suivis avant, pendant et jusqu’à 9 mois après la fin du traitement, pour leur statut VHB, avec AgHBs, AcHBc IgG, AcHBc IgM, AcHBs, virémie et ALAT. Toutes les réactivations étaient traitées par lamivudine, leur diagnostic étant établi par la positivation de l’AgHBs, l’augmentation de la virémie et l’augmentation des ALAT. Le traitement était du CHOP 21, le R-CHOP 21 étant réservé aux patients pouvant s’offrir le rituximab, le coût de cet anticorps n’étant pas alors pris en charge… Résultats. Cent quatre LBDGC ont été diagnostiqués et traités ; parmi eux, 24 étaient AgHBs+ (23 %), 46 (44 %) étaient AgHBs-AcHBc+ dont 30 AcHBs+ et 16 AcHBs–. Sur les 46 patients AgHBs-AcHBc+, 25 ont été traités par CHOP et 21 par R-CHOP. Quatre hépatites se sont développées sous CHOP, mais aucune d’entre elles n’était reliée au VHB, versus 5 sous R-CHOP, toutes par réactivation VHB. Parmi ces 5 réactivations, une est apparue au premier cycle, une après le cinquième cycle et 3 après la fin du traitement, en médiane 98 jours après la fin des R-CHOP. Un patient est décédé de son hépatite. Les facteurs de risque de réactivation sont le sexe masculin (p = 0,0299), l’absence d’AcHBs (p = 0,0025) et l’utilisation du rituximab (p = 0,05). Correspondances en Onco-hématologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2009 L’imatinib (IM) a révolutionné la prise en charge et le pronostic de la leucémie myéloïde chronique (LMC). Cependant, aujourd’hui encore, ce traitement semble devoir être pris à vie et de façon ininterrompue. Se pose dès lors le problème de la maternité chez les femmes. S.M. Pye et al. rapportent la première série importante de grossesses (180) survenues sous IM. Sur les 146 patientes évaluables, 76 % étaient traitées pendant le premier trimestre de leur grossesse, et 26 % pendant toute la durée de celle-ci. Le devenir de la grossesse est connu pour 125 patientes. Parmi ces dernières, 28 % ont subi une interruption thérapeutique de grossesse, dont 3 pour anomalies congénitales, et 14,4 % ont fait une fausse couche. Concernant le devenir des fœtus, 9,6 % ont présenté une malformation congénitale et 9 enfants sur 12 sont vivants. Les auteurs nous rappellent également qu’aucune donnée n’est disponible sur la diffusion transplacentaire de l’IM, et que c-kit et surtout PDGF-R sont prégnants dans le développement fœtal. Alors que le taux de fausses couches ne paraît pas supérieur à celui observé dans la population générale, il semble en revanche que le risque de malformation soit largement majoré. Commentaire. Au vu de cette étude, il apparaît clairement que commencer une grossesse sous IM est totalement déconseillé. Le désir de 11 grossesse doit être évalué avec la patiente, et la grossesse doit être, au mieux, programmée. L’arrêt de l’IM pour une grossesse, comme l’ont montré P. Rousselot et al. (Blood 2007), ne semble pas être dommageable pour les patientes qui restent sensibles à l’IM à la reprise du traitement. De plus, l’IFN, une drogue qui revient sur le devant de la scène, peut aider à minimiser le risque. Quant aux grossesses survenues sous IM, si l’arrêt de traitement ne fait guère de doute, celui-ci devant être le plus précoce possible, la difficile question de l’interruption thérapeutique de grossesse se pose. L. Legros, Nice. ❏ Pye SM, Cortes J, Ault P et al. The effects of imatinib on pregmancy outcome. Blood 2008;111(12):5505-8. LES ANTAGONISMES ENTRE ALICAMENTS ET MÉDICAMENTS : INTERACTION NÉGATIVE ENTRE THÉ VERT ET BORTÉZOMIB Nous connaissions déjà l’action de certains aliments (pamplemousse, millepertuis) sur le métabolisme des médicaments, nous allons maintenant avoir à prendre également en compte les interactions possibles des alicaments sur l’action des médicaments. E.B. Golden nous en montre un exemple dans un prochain article de Blood dans lequel il nous démontre que certains composants du thé vert inhibent l’action intracellulaire du bortézomib. Le thé vert contient plusieurs antioxydants : les polyphénols. Parmi ces derniers, il y a l’épigallocatéchine gallate (EGCG) dont l’interaction avec des protéines impliquées dans la progression cancéreuse en fait un agent anticancéreux reconnu, notamment dans des modèles animaux. En effet, l’EGCG est capable d’inhiber la GRP78, une protéine aux multiples fonctions antiapoptotiques du réticulum endoplasmique. Il sensibilise ainsi la cellule cancéreuse à l’action des inhibiteurs de la topoisomérase II et aux agents alkylants. Le bortézomib, quant à lui, en inhibant le protéasome, initie une apoptose en particulier via le réticulum endoplasmique. Les auteurs, en combinant les deux molécules EGCG et 12 d e bortézomib, s’attendaient à voir un effet additionnel, voire synergique. Non seulement ils n’ont rien observé de tel, mais, au contraire, ils ont mis en évidence un antagonisme de ces deux molécules. Ce travail, certes réalisé sur des lignées de myélome ou sur des tumeurs implantées chez des souris nude, interpelle car il montre que l’EGCG bloque la cytotoxicité du bortézomib. La même observation a été faite sur des lignées de glioblastomes. C’est l’analyse chimique qui semble amener l’explication de ce phénomène : l’EGCG forme un complexe chimique stable avec l’acide boronique du bortézomib modifiant ainsi sa conformation. Ainsi, les auteurs appellent à une grande méfiance envers ces alicaments qui paraissent inoffensifs et sont présents dans la grande distribution. Ils déconseillent de prendre du thé vert pendant le traitement par bortézomib. L. Legros, Nice. ❏ Golden EB, Lam PY, Kardosh A et al. Green tea polyphenols block the anticancer effects of bortezomib and other boronic acid-based proteasome inhibitors. Blood 2009 (sous presse). SÉQUENÇAGE COMPLET DU GÉNOME D’UNE CELLULE DE LAM À CARYOTYPE NORMAL Le nombre et la séquence des événements à l’origine de la transformation d’un progéniteur hématopoïétique en cellule leucémique restent mal connus. La mise à disposition, aujourd’hui, de techniques de séquençage de l’ensemble du génome d’une cellule, à des coûts et dans des délais raisonnables, ouvre de nouvelles voies d’approche dans l’étude de la leucémogenèse. Les auteurs ont choisi d’étudier les blastes prélevés chez une patiente âgée de 50 ans présentant une leucémie hyperleucocytaire (105 000 leucocytes/mm3) typée M1 dans la classification FAB. Le caryotype médullaire était normal (46, XX). Cette patiente avait été mise en rémission complète (RC), mais a rechuté à 11 mois post-RC et est finalement décédée 24 mois après le diagnostic. À la rechute, une p r e ss e t(10;12)(p12;p13) était présente au caryotype. Le choix d’une LAM1 était ici justifié par l’absence d’anomalie cytogénétique récurrente identifiée comme spécifiquement associée à ce sous-groupe. L’étude de l’ADN leucémique a permis d’établir, avec une sensibilité de 5 kb, que le génome était essentiellement diploïde, sans amplifications géniques ou pertes d’hétérozygoties. Sa comparaison avec de l’ADN génomique provenant de la même patiente a permis d’exclure les polymorphismes et de retenir un total de 10 mutations acquises pouvant être impliquées dans le processus de transformation. Deux de ces mutations étaient déjà connues dans les LAM : une duplication interne en tandem de FLT3 et une mutation (insertion de 4 bases) de l’exon 12 du gène NPM1. Les huit autres mutations concernent des gènes non impliqués à ce jour dans les LAM. Quatre de ces gènes sont néanmoins impliqués dans d’autres cancers (PTPRT, CDH24, PCLKC, SLC15A1). Les quatre autres ne sont pas connus comme des gènes mutés dans des cellules cancéreuses ou leucémiques (KNDC1, GPR123, EBI2, GRINL1B), mais sont impliqués dans des voies métaboliques qui pourraient jouer un rôle dans la transformation d’une cellule. Toutes ces mutations (sauf celle de FLT3) étaient présentes dans la majorité des cellules leucémiques, aussi bien au diagnostic qu’à la rechute. Commentaire. L’intérêt principal de cette approche est d’identifier des mutations de gènes qui n’étaient pas candidats à une étude spécifique, et ainsi de découvrir de nouvelles voies de leucémogenèse. Dans l’absolu, doivent être vérifiés à la fois le caractère pathogène de ces mutations, par des études fonctionnelles, et aussi leur caractère récurrent sur une cohorte de patients LAM1. Il est clair que cette approche peut permettre d’identifier des gènes ayant un rôle majeur dans la transformation leucémique et, in fine, d’établir de nouvelles thérapies ciblées. T. Leblanc, Paris. ❏ Ley TJ, Mardis ER, Ding L et al. DNA sequencing of a cytogenetically normal acute myeloid leukemia genome. Nature 2008;456:66-72. Correspondances en Onco-hématologie - Vol. IV - n° 1 - janvier-février-mars 2009 hôpital VDZ/009/02-09-C r e v u e