Cours d’Algèbre II Prof. E. Bayer Fluckiger Bachelor Semestre 4 19 mars 2014 Série 17 Exercice 1. Soit A un anneau. (1) Soient e1 , e2 deux élément neutres pour la multiplication dans A. Montrer que e1 = e2 . (2) Soient a ∈ A, et b, c deux inverses de a. Montrer que b = c. Solution. (1) En utilisant successivement le fait que e2 est un élément neutre (à droite), puis le fait que e1 est un élément neutre (à gauche), on trouve que e1 = e1 e2 = e2 . (2) Par définition, ab = ba = ca = ac = 1, où e est l’élément neutre pour la multiplication dans R (unique par la première partie). Par conséquent, b = be = b(ac) = (ba)c = ec = c. Exercice 2. Soit n ≥ 2 un entier. Calculer l’ensemble des diviseurs de 0 dans Z/nZ. Solution. Premièrement, remarquons que si x ∈ Z/nZ est inversible, alors il ne s’agit pas d’un diviseur de 0. En effet, si y ∈ Z/nZ vérifie xy = 0, alors y = 1·y = (x−1 x)y = x−1 (xy) = 0. Plus généralement, le même argument montre que dans tout anneau aucun élément inversible n’est un diviseur de 0. Réciproquement, si x n’est pas un diviseur de zéro, alors il est inversible. En effet, l’ensemble E = {xy : y ∈ Z/nZ} a exactement Z/nZ éléments puisque si xy = xy ′ pour y, y ′ ∈ Z/nZ, alors x(y − y ′ ) = 0, d’où y = y ′ puisque x n’est pas un diviseur de zéro. En particulier, E = Z/nZ et il existe donc y ∈ Z/nZ tel que xy = 1. Ainsi, l’ensemble des diviseurs de zéro dans Z/nZ est Z/nZ − (Z/nZ)∗ . Plus généralement, le même argument montre que dans tout anneau fini, les diviseurs de zéro sont précisément les éléments non-inversibles. Exercice 3. On note ϕ l’indicatrice d’Euler. 2 (1) Soient p un premier et v ≥ 1 un entier. Montrer que ϕ (pv ) = pv−1 (p − 1). (2) Soit n ≥ 1 un entier. (a) Montrer que Aut (Z/nZ, +) et (Z/nZ)∗ sont deux groupes isomorphes. (b) En déduire #Aut (Z/nZ, +). Solution. (1) Rappelons que pour tout entier n ≥ 1, on a défini ϕ(n) comme étant le cardinal du groupe (Z/nZ)∗ . Par l’exercice 2 de la série 3, on sait aussi que pour tout n≥1 ϕ(n) = |{0 ≤ a < n : (a, n) = 1}|. Par conséquent, ϕ(pv ) est égal au nombre d’entiers 0 ≤ a < pv premiers à pv . Or, un entier a est premier à pv si et seulement si il n’est pas divisible par p. Ainsi, ϕ(pv ) = |{0, . . . , pv } − {p, 2p, . . . , pv−2 p}| = pv − pv−1 = pv−1 (p − 1). (2) Remarquons qu’un élément f ∈ Aut(Z/nZ, +) est déterminé par sa valeur en [1]n . En effet, pour tout entier x > 0, f ([x]n ) = f (x[1]n ) = f ([1]n ) + · · · + [1]n ) = f ([1]n ) + · · · + f ([1]n ) = xf ([1]n ) et pour tout entier x < 0, f ([x]n ) = −f ([−x]n ) = −((−x)f ([1]n )). En adoptant la notation g + · · · + g (m fois) si m > 0 mg = (−m)g si m < 0 0 si m = 0 pour m ∈ Z et g ∈ Z/nZ, on obtient que f ([x]n ) = xf ([1]n ) (1) pour tout x ∈ Z. Comme f est un automorphisme, on doit avoir f ([1]n ) ∈ (Z/nZ)∗ . En effet, puisque f est surjectif, il existe x ∈ Z tel que f ([x]n ) = [1]n . Par l’équation (1), ceci donne [1]n = xf ([1]n ) = [x]n f ([1]n ), c’est-à-dire que [x]n est l’inverse de f ([1]n ) dans Z/nZ. On peut donc définir une application ψ : Aut(Z/nZ) → (Z/nZ)∗ par f 7→ f ([1]n ). Il s’agit d’un homomorphisme de groupes puisque si f, g ∈ Aut(Z/nZ), alors (f ◦ g)([1]n ) = f (g([1]n )) = g([1]n )f ([1]n ). Par l’équation (1), cet homomorphisme est injectif. Il est de plus surjectif, puisque si g ∈ (Z/nZ)∗ , alors l’application f : Z/nZ → Z/nZ f ([x]n ) = [x]n g est un automorphisme, d’inverse [x]n 7→ [x]n g −1 , tel que ψ(f ) = g. 3 (3) Par les points précédents, | Aut(Z/nZ)| = |(Z/nZ)∗ | = ϕ(n). Exercice 4. Soient m1 , m2 ≥ 2 deux entiers premiers entre eux, et k1 , k2 ∈ Z. On considère le système de congruence n ≡ k1 mod m1 (⋆) n ≡ k2 mod m2 (1) Montrer que si n est une solution du système (⋆), alors l’ensemble des solutions du système (⋆) est la classe de congruence [n]m1 m2 . (2) En utilisant une relation de Bézout entre m1 et m2 , montrer que le système (⋆) a une solution n ∈ Z. (3) Retrouver les résultats des deux questions précédentes en utilisant seulement le lemme chinois. (4) Redémontrer le lemme chinois en utilisant les résultats des questions (1) et (2). n ≡ 3 mod 7 (5) Résoudre le système de congruences n ≡ 7 mod 10 Solution. (1) Si un entier m satisfait le système de congruence (⋆), alors n − m ≡ 0 (mod mi ) pour i = 1, 2. Par conséquent, il existe k1 , k2 ∈ Z tels que n − m = ki mi pour i = 1, 2, d’où k1 m1 = k2 m2 . Rappelons le résultat élémentaire suivant : Lemme 1 (Bézout). Soient a, b, c des entiers tels que a | bc. Si (a, b) = 1, alors a | c. Démonstration. Puisque a et b sont premiers entre eux, il existe une relation de Bézout ax+by = 1 pour x, y ∈ Z. Soit k un entier tel que bc = ka. En multipliant la relation de Bézout par kc, on obtient kc = kcax + kcby = ka(cx + ky) d’où c = a(cx + ky), i.e. a | c. Comme m1 | k2 m2 et (m1 , m2 ) = 1, on en conclut que m1 | k2 . Ainsi, n ≡ m (mod m1 m2 ). Réciproquement, si m est un entier tel que m ≡ n (mod m1 m2 ), alors m ≡ n (mod mi ) pour i = 1, 2, donc m est une solution de (⋆). (2) Puisque m1 et m2 sont premiers entre eux, il existe une relation de Bézout xm1 + ym2 = 1 pour x, y ∈ Z. Par conséquent, on a les congruences xm1 ≡ 0 ym2 ≡ 1 (mod m1 ) (mod m1 ) xm1 ≡ 1 (mod m2 ) ym2 ≡ 0 (mod m2 ). Ainsi, en posant n = k1 ym2 + k2 xm1 , on obtient une solution au système (⋆). 4 (3) Par le lemme chinois, l’application f : Z/(m1 m2 )Z → Z/m1 Z × Z/m2 Z [x]m1 m2 7→ ([x]m1 , [x]m2 ) est un isomorphisme de groupes. Le premier point est équivalent à l’injectivité de f : si n, n′ sont deux solutions de (⋆), alors f ([n]m1 m2 ) = ([k1 ]m1 , [k2 ]m2 ) = f ([n′ ]m1 m2 ), d’où n ≡ n′ (mod m1 m2 ) si f est injective, et réciproquement. D’autre part, le deuxième point est clairement équivalent à la surjectivité de f. (4) Comme dans le cours, on commence par montrer que l’application f ci-dessus est un homomorphisme de groupes bien défini. Or, on vient de montrer que la bijectivité de f était équivalente aux deux premiers points de l’exercice. Ainsi, f est un isomorphisme si l’on suppose ceux-ci. (5) On procède en suivant la preuve, constructive, du deuxième point de l’exercice. Une relation de Bézout entre 7 et 10 est par exemple 3 · 7 − 2 · 10 = 1. Par conséquent, une solution au système est donnée par n = 3·(−2)·10+7·3·7 = 87. Par le premier point de l’exercice, l’ensemble des solutions du système est la classe [87]70 = [17]70 = {17 + 70k : k ∈ Z}.