LEÇON N˚ 67 :
Formules de Taylor. Applications.
Pré-requis :
Théorème de Rolle, théorème des Accroissements Finis;
Intégration par parties;
Notations de Landau.
67.1 Résultats globaux
67.1.1 Formule de Taylor-Lagrange
Théorème 1 : Soient nN,f: [a, b]Rde classe Cntelle que f(n)soit dérivable sur ]a, b[.
Alors il existe c]a, b[tel que
f(b) =
n
X
k=0
(ba)k
k!f(k)(a) + (ba)n+1
(n+ 1)! f(n+1)(c).
démonstration :On définit la fonction ϕsur [a, b]par
ϕ(x) = f(b)
n
X
k=0
(bx)k
k!f(k)(x)A·(bx)n+1,
Aest un réel tel que ϕ(a) = 0.ϕest donc dérivable sur ]a, b[et vérifie aussi ϕ(b) = 0. Par le
théorème de Rolle, il existe donc un réel c]a, b[tel que ϕ(c) = 0. Or, pour tout x]a, b[, on a
ϕ(x) =
n
X
k=1
(bx)k1
(k1)! f(k)(x)
n
X
k=0
(bx)k
k!f(k+1)(x) + A·(n+ 1)(bx)n
=
n1
X
k=0
(bx)k
k!f(k+1)(x)
n
X
k=0
(bx)k
k!f(k+1)(x) + A·(n+ 1)(bx)n
=(bx)n
n!f(n+1)(c) + A·(n+ 1)(bx)n,
donc puisque ϕ(c) = 0, cette dernière égalité appliquée à x=cnous donne
f(n+1)(c)
n!=A·(n+ 1) A=f(n+1)(c)
(n+ 1)! ,
et le théorème est démontré.
2Formules de Taylor
Définition 1 : La quantité définie dans l’égalité ci-dessus, c’est-à-dire
(ba)n+1
(n+ 1)! f(n+1)(c),
est appelée reste de Lagrange.
Remarques 1 :
1. Le réel cn’est pas forcément unique. En effet, il provient du théorème de Rolle, et considérant par exemple la
fonction sin sur [0,2π], on voit bien effectivement que sin(π/2) = sin(3π/2) = 0.
2. Si l’on pose h=baet c=a+θ h avec θ]0,1[, le théorème donne l’égalité
f(b) =
n
X
k=0
f(k)(a)
k!hk+f(n+1)(a+θ h)
(n+ 1)! hn+1,
qui est aussi souvent utilisée.
3. Si a= 0, cette formule est ausi appelée formule de Mac-Laurin,et il en sera de même pour toutes les
formules qui suivront.
67.1.2 Formule de Taylor avec reste intégral (ou Taylor-Laplace)
Théorème 2 : Soient nN,f: [a, b]Rde classe Cn+1. Alors
f(b) =
n
X
k=0
(ba)k
k!f(k)(a) + Zb
a
(bx)n
n!f(n+1)(x) dx.
démonstration :On effectue une récurrence sur l’entier nN.
Initialisation : Si n= 0, l’égalité ci-dessus devient f(b)f(a) = Rb
af(x) dx, issue du théorème
fondamental de l’analyse.
Hérédité : On suppose fde classe Cn+2 sur [a, b]. On veut montrer que le résultat est encore vrai
au rang n+ 1, le supposant vrai au rang n, en procédant à une intégration par parties. On pose
u(x) = f(n+1)(x)qui est donc de classe C1sur [a, b], et
v(x) = (bx)n
n!v(x) = (bx)n+1
(n+ 1)! ,
avec vqui est alors aussi de classe C1sur [a, b]. Par intégration par parties,
Zb
a
(bx)n
n!f(n+1)(x) = (bx)n+1
(n+ 1)! f(n+1)(x)b
a
+Zb
a
(bx)n+1
(n+ 1)! f(n+2)(x) dx
=(ba)n+1
(n+ 1)! f(n+1)(a) + Zb
a
(bx)n+1
(n+ 1)! f(n+2)(x) dx.
Cette dernière égalité achève notre récurrence.
Formules de Taylor 3
67.1.3 Applications
Ordonner une fonction
Exercice : Ordonner la fonction x7−x39x2+ 7x+ 15 suivant les puissances de (x2).
Solution : On applique la formule de Taylor-Lagrange sur l’intervalle ]2,+[, en notant que f(4) 0sur cet intervalle :
f(x) = f(2) + f(2)(x2) + f′′ (2)
2(x2)2+f(3)(2)
3! (x2)3
= 1 17(x2) 3(x2)2+ (x2)3.
On aurait aussi pu poser f(x) = a(x2)3+b(x2)2+c(x2) + d, développer f(x)et faire une identification des coefficients
(c’est certainement la méthode qui aurait été utilisée en Terminale), mais cette méthode est beaucoup plus rapide (puisque même
les dérivées sont facilement calculables!).
Approximation d’une fonction par un polynôme
Si fest une fonction de classe Cn+1 sur [a, x]pour aRfixé et xR, alors
f(x)
n
X
k=0
f(k)(a)
k!(xa)k
6M·|xa|n+1
(n+ 1)! ,
M= sup
t[a,x]
|f(n+1)(t)|.
Exemple : Pour a= 0 et xR, on a, avec la fonction exp,
ex
n
X
k=0
xk
k!
6xn+1
(n+ 1)! exn→∞
0.
Exercice : Soit nN. Montrer que pour tout réel x>0,
ex=
n
X
k=0
xk
k!+Zx
0
(xt)n
n!etdt,
et en déduire l’encadrement ci-dessous :
1 + 1
1! +···+1
n!6e61 + 1
1! +···+1
n!+1
n!.
Solution : Pour montrer l’égalité, il suffit la formule de Taylor avec reste intégral à la fonction exp en 0à l’ordre nsur l’intervalle
[0, x]. En appliquant cette égalité à x= 1, on obtient alors
e=
n
X
k=0
1
k!+Z1
0
(1 t)n
n!etdt.
L’intégrale est clairement une quantité positive (puisque t[0,1]), ce qui suffit à justifier la première inégalité. Pour montrer la
seconde, on va montrer que (1 t)net61.
Posons f(t) = (1 t)netdéfinie sur [0,1], de sorte qu’elle y soit dérivable. On a ainsi f(t) = et(1 t)(n1)(n1 + t).
On constate que fest négative sur [0,1], donc fy est décroissante. Or f(0) = 1, ce qui implique que tout x[0,1] vérifie
f(x)61. Par suite,
e=
n
X
k=0
1
k!+Z1
0
(1 t)n
n!etdt6
n
X
k=0
1
k!+Z1
0
1
n!dt=
n
X
k=0
1
k!+1
n!,
et le résultat est ainsi démontré.
4Formules de Taylor
67.2 Résultat locaux
67.2.1 Formule de Taylor-Young
Théorème 3 : Soient Iun intervalle, f:IRune fonction nfois dérivable sur I, et aI. On
suppose fde classe Cnau point a. Alors, au voisinage de a,
f(x) =
n
X
k=0
f(k)(a)
k!(xa)k+o(xa)n.
démonstration :Procédons par récurrence sur l’entier nN.
Initialisation : Par continuité de fen a, on a l’égalité f(x)f(a) = o(1), qui correspond exactement
à l’égalité du théorème pour n= 0.
Hérédité : Supposons le résultat vrai jusqu’au rang n1. Soit fdérivable nfois en a. Alors fest
(n1) fois dérivable en a, et on peut lui appliquer l’hypothèse de récurrence :
f(x) =
n1
X
k=0
f(k1)(a)
k!(xa)k+o(xa)n1.
On définit alors la fonction Ψsur Ipar
Ψ(x) = f(x)
n
X
k=0
f(k)(a)
k!(xa)k,
et l’on remarque déjà que Ψ(a) = 0.Ψest dérivable sur Iet d’après ce qui précède,
Ψ(x) = f(x)
n
X
k=0
f(k)(a)
(k1)! (xa)k1=o(xa)n1.
Par définition, cela revient à écrire que pour tout ε > 0, il existe η > 0tel que |xa|< η
|Ψ(x)|6ε|xa|n1.Ψvérifie donc les hypothèses du théorème des accroissements finis, que
l’on applique ainsi sur [a, x]:
|xa|< η ⇒ |Ψ(x)|=|Ψ(x)Ψ(a)|6sup
I
|Ψ| |xa|6ε|xa|n,
ce qui prouve que Ψ(x) = o(xa)net achève ainsi notre récurrence.
Notons que la condition |xa|< η montre bien que cette formule est locale.
Exercice : Redémontrer cette formule en utilisant celle de Taylor-Lagrange.
On suppose alors adans l’intérieur de I. Il existe alors h, k > 0tels que [a, a +h[Iet ]ak, a]I. On ne raisonne que sur
l’intervalle [a, a +h[, l’autre se traitant de manière absolument identique. Soit alors x[a, a +h[, qui nous permet d’appliquer la
formule de Taylor-Lagrange sur l’intervalle [a, x][a, a +h[:
cx]a, x[|f(x) =
n1
X
k=0
f(k)(a)
k!(xa)k+f(n)(cx)
n!(xa)n.
Cette égalité est équivalente à
1
(xa)n f(x)
n
X
k=0
f(k)(a)
k!(xa)k!=f(n)(cx)f(n)(a)
n!.
Formules de Taylor 5
En passant à la limite lorsque xtend vers a, le réel cxtend vers a(car cx]a, x[), et le membre de droite tend vers 0par
continuité de f(n)en a(hypothèse du théorème). On en déduit alors que
f(x)
n
X
k=0
f(k)(a)
k!(xa)k=o(xa)n,
et le résultat est ainsi démontré.
67.2.2 Applications
Développements limités
Définition 2 : Soient Iun intervalle, f:IRet x0I. On dit que fadmet un développement
limité à l’ordre nNau point x0s’il existe a0,...,anRtels que pour tout xIon ait
f(x) =
n
X
k=0
ak(xx0)k+o(xx0)n.
La fonction polynomiale P(x) = Pn
k=0 ak(xx0)kest appelée partie principale du développement
limité de fà l’ordre nen x0.
Par cette définition, on constate facilement que la formule de Taylor-Young fournit des développements
limités pour des fonctions de classe Cndéfinies sur un intervalle contenant x0, outil surtout utilisé pour des
fonctions dont les dérivées ne sont pas dures à calculer.
On donne comme exemple les développements limités suivant (on pourra vérifier en exercice leur exacti-
tude...) à l’ordre nNau point 0(αR) :
ex= 1 + x+x2
2+x3
3! +···+xn
n!+o(xn) ;
cos(x) = 1 x2
2+x4
4! +···+ (1)nx2n
(2n)! +o(x2n) ;
ln(1 + x) = xx2
2+x3
3+···+ (1)n1xn
n+o(xn) ;
(1 + x)α= 1 +
n
X
k=1
α(α1) ···(αk+ 1)
k!xk+o(xn).
Recherche de limites ou d’équivalents
Exercice : Calculer la limite en 0de f(x), et donner un équivalent à l’infini de g(x)(on rappelle qu’une
fonction hest dite équivalente à gen l’infini si leur limite y tend vers 1), où
f(x) = 2 cos(x)2
x2et g(x) = x
x+ 1x2
.
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