Les dioxines - Cancer et environnement

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Les dioxines
Messages clés
Les dioxines sont des polluants organiques persistants. Elles sont produites lors de processus de
combustion et s’accumulent dans la chaîne alimentaire. Les aliments les plus contaminés sont les
viandes, les poissons, les œufs, certaines matières grasses (huiles), les produits laitiers. Les incinérateurs d’ordures ménagères d’ancienne génération ont été pendant longtemps les
sources principales d’exposition aux dioxines. Depuis la loi de décembre 2002, les émissions de
dioxines par les incinérateurs sont très réglementées et ont par conséquent nettement diminué
(divisées par 100 entre 1995 et 2006). Aujourd’hui les sources principales d’exposition aux
dioxines sont l’industrie manufacturière et le chauffage résidentiel. L’exposition aux dioxines peut être d’origine professionnelle, environnementale (riverains vivant
autour d’incinérateurs), alimentaire, ou accidentelle (incendies, éruptions volcaniques). Le CIRC a classé le 2, 3, 7, 8 TCDD dit « dioxine de Seveso » dans le groupe 1 des cancérogènes
certains pour l’homme. Les autres congénères de dioxines sont encore « inclassables quant à leur
cancérogénicité » en raison de preuves insuffisantes. Des augmentations de risque de pathologies cancéreuses (cancer du poumon, lymphome non
Hodgkinien, et sarcome des tissus mou) seraient retrouvés chez les riveraines d’incinérateurs
d’ancienne génération. D'autres effets sur la santé ont été associés avec une exposition aux dioxines : malformations
congénitales, toxicité fœtale, altérations du développement de l'enfant, troubles endocriniens….
Présentation générale
Origine des dioxines
Procédés industriels à hautes températures
Incinération des déchets
Sidérurgies, production de pâte à papier
Chauffage au bois et brûlages des déchets verts
Emissions accidentelles
Trafic routier
Accumulation dans la chaîne alimentaire
Dioxines et cancers
Autres effets sur la santé
Evolutions récentes Présentation générale
Les dioxines constituent une famille de polluants organiques persistants dans l’environnement. Elles sont
produites involontairement lors des processus de combustion et s’accumulent dans la chaine alimentaire. Les
principales sources d’exposition sont les incinérateurs d’ordures ménagères d’ancienne génération. On les
retrouve aussi dans un grand nombre de procédés de fabrication : la métallurgie du cuivre et de l’acier, le
blanchiment au chlore des pâtes à papier, la production de certains herbicides et pesticides. Les dioxines sont
également émises par les voitures ainsi que lors de la combustion du charbon et du bois. Elles peuvent aussi
apparaître au cours de phénomènes naturels, comme les éruptions volcaniques ou les feux de forêts.
Le mot « dioxine » est un terme générique regroupant deux hydrocarbures aromatiques polycycliques
chlorés (HAPC) : les dioxines (polychlorodibenzodioxines ou PCDD) et furanes (polychlorodibenzofuranes ou
PCDF).
Elles font partie de la famille des organochlorés ou des POP (Polluants Organiques Persistants) au même titre
que les pesticides ou encore les PolychloroBiphényles (PCB). Leurs propriétés toxiques dépendent de leur
structure chimique et de leur nombre d’atomes de chlore. Parmi les 210 composés (ou congénères) identifiés
et présents dans l’environnement, la toxicité de 17 congénères (7 PCDD et 10 PCDF) a été avérée avec des
niveaux variables de toxicité. La plus nocive est la 2, 3, 7, 8 tétrachlorodibenzo­p­dioxine­TCDD, dioxine la
plus connue suite à l’accident survenu à Seveso en 1976 (Italie). Le Centre International de Recherche sur le
Cancer (CIRC) a classé la 2, 3, 7, 8 TCDD dite « dioxine de Seveso », dans le groupe 1 des cancérogènes
certains pour l’homme. Les autres congénères de dioxines sont encore « inclassables quant à leur
cancérogénicité pour l'homme » en raison de preuves insuffisantes et font donc partie du groupe 3 (PNUE,
1999 ; CITEPA, 2012).
Les dioxines sont des composés chimiques peu volatils, peu solubles dans l’eau mais avec une stabilité
chimique et métabolique importante, ce qui explique leur forte persistance dans l’environnement. Les dioxines
présentent également une affinité pour les graisses (ou lipophilie) qui leur permet de s’accumuler dans les
tissus gras de l’organisme pendant une période d’environ sept ans. Chez l’homme, l’exposition moyenne des
populations se fait majoritairement par voie alimentaire, en particulier par l’ingestion des graisses animales
contenues dans les produits laitiers, viandes, poissons.
Les niveaux de dioxines se mesurent en Indicateur Equivalent Toxique ou I­TEQ, unité de mesure établie par
l’OMS en 1999. A chacun des congénères de dioxines est attribué un coefficient de toxicité, qui a été estimé
en comparant l’activité du composé à celle du congénère le plus toxique la 2, 3, 7, 8 TCDD (INERIS, circulaire
du 30/05/1997 relative aux dioxines et furanes).
Origine des dioxines
Les dioxines sont produites lors de procédés de combustion dans lesquels le carbone, l’oxygène et le chlore
sont présents simultanément à une température inférieure à 850°C. Les sources émettrices de dioxines sont
multiples d’origine humaine (industrie, chauffage…) ou d’origine naturelle (éruptions volcaniques ou incendies
de forêt). Elles ont été recensées et quantifiées par le Programme des Nations Unies pour l’Environnement
(PNUE) (PNUE, 2005).
Procédés industriels à hautes températures
Les fours de cimenteries et équivalents (brique, tuile, chaux, poterie, céramique, verre) produisent des
poussières récupérées par des filtres similaires aux incinérateurs et sur lesquelles de fortes quantités de PCDD
et de PCDF sont retrouvées. La reconnaissance de la responsabilité de ces activités dans la production de
dioxines est assez récente.
Incinération de déchets
Les incinérateurs de déchets ménagers ou industriels ont été pendant une vingtaine d’années les principaux
émetteurs de PCDD et de PCDF. Dans l’ensemble des rejets de ces incinérateurs ancienne génération – c'est­
à­dire toute installation qui fonctionnait avant la mise aux normes suite à l’Arrêté Incinération du 20
septembre 2002 – les PCDD et les PCDF se retrouvaient dans les mâchefers (5%), les fumées (10%) et les
cendres volantes (85%) (ADEME, 1996).
Grâce au renforcement des réglementations (loi de décembre 2002) en matière d’émission, les quantités de
polluants émises par les incinérateurs d’ordures ménagères ont considérablement diminué ces dernières
années. De 1995 à 2006, ces émissions de dioxines ont été divisées par un facteur supérieur à 100, passant
de 1090 grammes par an en 1995 à 8,5 grammes par an en 2006, alors que la quantité de déchets incinérés
a augmenté au cours de la même période (ADEME, 2010). La diminution du nombre d’incinérateurs explique
également la baisse des concentrations environnementales de dioxines.
Sidérurgies, production de pâte à papier
Les dioxines peuvent aussi provenir de l’industrie chimique utilisant du chlore (pesticides, PCB….), de la
synthèse chimique de dérivés aromatiques chlorés et de chlorures de polyvinyle (PVC).
Les fabrications de pâte à papier, le recyclage de certains métaux non ferreux, des feux d’origine
domestiques sont aussi des sources considérées comme importantes.
Chauffage au bois et brûlage des déchets verts
La combustion non­contrôlée du bois provoque la formation de dioxines se fixant sur des particules de très
petite taille. Cette exposition est d’autant plus importante qu’elle se concentre à l’intérieur des habitations,
espaces confinés et peu aérés.
Le brûlage des déchets verts est une combustion peu performante, il émet des imbrûlés en particulier si les
végétaux sont humides. Les particules formées dans ce contexte sont porteuses de composés cancérigènes,
comme les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP), dioxines et furanes.
Une étude réalisée dans les Alpes­Maritimes, en 2008­2009, pour caractériser les particules, montre que le
brûlage des déchets verts constitue une source épisodique aggravante. Les brûlages de déchets verts
peuvent représenter jusqu’à 45 % des particules dans l’air. (AirPACA www.airpaca.org)
Emissions accidentelles
Les sources accidentelles sont pour la plupart des incendies. Les conditions de combustion y sont médiocres
et les produits brûlés contiennent des composés précurseurs de PCDD et de PCDF.
Mais c’est surtout l’accident chimique de Seveso le 10 juillet 1976 qui restera l’accident le plus connu et le plus
grave. Dans cette usine de production de trichlorophénol, l’explosion d’un réacteur a entraîné l’émission de 1
à 5 kg de TCDD dans l’atmosphère (Bertazzi, 1998).
Trafic routier
Le transport routier associé aux émissions des gaz d’échappement des moteurs diesel et essence est
également une source de dioxines, sachant que l'essence plombée produisait 20 fois plus de dioxines que
l'essence sans plomb.
Accumulation dans la chaine alimentaire
Les dioxines s’accumulent tout au long de la chaîne alimentaire jusqu’à l’ingestion par l’Homme de produits
contaminés. Les principaux aliments contaminés par les dioxines sont les viandes, les poissons, les œufs,
certaines matières grasses (huiles), le lait et les produits laitiers. La contamination des fruits et légumes est
relativement négligeable par rapport aux matières grasses et produits laitiers.
Une fois dans l’organisme humain, elles sont transportées par les lipides du sang pour ensuite s’accumuler
dans les tissus adipeux.
Source des données: CITEPA/avril 2012
Du fait de l’application des normes européennes pour l’incinération des déchets, les émissions de dioxines ont
fortement diminué depuis les années 1990 (­94% de g I­TEQ émis entre 1990 (1885 g ITEQ) et 2010 (98g I­
TEQ)). L’industrie manufacturière et le chauffage résidentiel restent encore deux principales sources
d’exposition aux dioxines.
Malgré cette diminution des émissions de dioxines depuis les années 90, les craintes relatives à leurs effets sur
la santé demeurent.
Dioxines et cancers
De nombreuses études épidémiologiques ont été réalisées sur les effets sanitaires liés aux émissions
d’incinérateurs d’ordures ménagères d’ancienne génération. Les effets d’expositions chroniques observés
chez des ouvriers exposés professionnellement ou les effets d’intoxications accidentelles permettraient
d’affirmer que l’exposition à la TCDD serait associée à une augmentation du risque de cancer tous types
confondus chez l’homme. Les trois localisations de cancers chez l’homme pour lesquels une association serait
le plus souvent retrouvée dans les études sont : le cancer du poumon, le lymphome non hodgkinien (LNH) et
le sarcome des tissus mous (STM) (Baan, 2009).
Quelques données scientifiques concernant les riverains vivant autour d’incinérateurs de déchets ménagers,
avant leur mise en conformité, ont suggéré un lien significatif entre exposition et excès de risque d’apparition
de cancers. Un excès de lymphomes malins non hodgkiniens (LNH) et de sarcomes des tissus mous a été mis
en évidence chez des riverains de site d’incinérateurs (Fabre 2008, Viel 2008, Viel 2011). Une étude réalisée
en France par l’InVS suggère une augmentation du risque de cancers chez la femme (tous types de cancers
confondus), du cancer du sein chez la femme, et du cancer du poumon tous sexes confondus, (Fabre
2008). Par ailleurs une augmentation du risque de cancer gastro­intestinal (Zambon 2007, Fabre 2008) et du
cancer du foie (Fabre 2008, Elliot 1996, 2000) a été décrite.
Ces études présentent toutefois des méthodologies imparfaites (absence de prise en compte des facteurs de
risque de cancer connus et de l’histoire résidentielle des participants) et demandent à être confirmées. Ces
augmentations de risque de pathologies cancéreuses chez les riveraines d’incinérateurs ne peuvent donc pas
être attribuées, de façon certaine, aux seules émissions de dioxines et aux incinérateurs de déchets
ménagers.
Autres effets sur la santé
D'autres effets sur la santé ont été associés avec une exposition aux dioxines : malformations congénitales,
toxicité fœtale, altérations du développement de l'enfant, troubles endocriniens, perturbation de certaines
enzymes hépatiques, effets sur le système immunitaire et cardiovasculaire.
Un risque d’anomalies rénales chez des nourrissons a été mis en évidence et associé à l’exposition des mères
pendant leur premiers mois de grossesse aux fumées d’incinérateurs de déchets ménagers (ancienne
génération) (Vinceti, 2009 ; Cordier, 2010).
Lors d’une exposition forte ou très forte, en milieu professionnel ou accidentellement comme à Seveso, les
premiers effets sanitaires observés ont été des atteintes dermatologiques aigues (chloracné ou acné
chlorique) (Baccarelli A, 2005). Puis après un certain nombre d’années sont apparus des modifications de la
fonction thyroïdienne (Baccarelli, 2008) et des perturbations du système endocrinien chez des hommes
exposés pendant leur enfance (Mocarelli, 2008).
Evolutions récentes
L'Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a actualisé la connaissance sur les taux de dioxines
présents dans les denrées alimentaires et les aliments pour animaux. Les résultats de ce dernier rapport publié
en juillet 2012 sont encourageants et révèlent une baisse de l'exposition alimentaire aux dioxines et aux
polychlorobiphényles (PCB) de type dioxine pour la période 2008­2010 par rapport à 2002­2004, "d'au
moins 16% et allant jusqu'à 79 % pour la population générale". Une diminution similaire est constatée chez
les enfants. Le rapport de l’Efsa recommande néanmoins une surveillance ciblée des denrées alimentaires les
plus consommées c’est à dire le poisson, la viande et les produits laitiers.
Auteur : Unité Cancer et Environnement
R e l e c t u r e : Laure Dossus (Unité Inserm, Institut Gustave Roussy) ; Lucie Anzivino­Viricel
(Observatoire Régional de Santé Rhône­Alpes
Nos fiches sur ce thème
Cancer du poumon
Cancer du sein
Hémopathies malignes de l'enfant
Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques
Lymphomes non Hogkinien
Etudes et publications scientifiques
Baan, 2009 : A review of human carcinogens­­Part F: chemical agents and related occupations.
Baccarelli, 2008 : Neonatal thyroid function in Seveso 25 years after maternal exposure to dioxin.
Bertazzi, 1998 : The Seveso studies on early and long­term effects of dioxin exposure
Cordier S, 2010 : Maternal residence near municipal waste incinerators and the risk of urinary tract
Elliott P, 1996 : Cancer incidence near municipal solid waste incinerators in Great Britain.
Elliott P, 2000 : Cancer incidence near municipal solid waste incinerators in Great Britain. Part 2:
Fierens, 2003 : Dioxin accumulation in residents around incinerators.
IARC, 1997 : Polychlorinated dibenzo­para­dioxins and polychlorinated dibenzofurans. IARC monographs
InVS, 2006 : Étude d’imprégnation par les dioxines des populations vivant à proximité d’usines d’inc
InVS, 2008 : Etude d'incidence des cancers à proximité des usines d’incinération d’ordures ménagères
Mocarelli, 2008 : Dioxin exposure, from infancy through puberty, produces endocrine disruption and a
OMS, 2014 : Les dioxines et leurs effets sur la santé
Tard, 2000: Exposition de la population française aux dioxines, furanes et PCB de type dioxines.
Viel JF, 2011 : Increased risk of non­Hodgkin lymphoma and serum organochlorine concentrations among
Viel, 2008 : Risk for non Hodgkin's lymphoma in the vicinity of French municipal solid waste inciner
Vinceti M, 2009 : Risk of congenital anomalies around a municipal solid waste incinerator: a GISbase
Zambon, 2007 : Sarcoma risk and dioxin emissions from incinerators and industrial plants: a populati
Informations des publics
AirPACA Qualité de l’air : Brûlage déchets verts et qualité de l’air.
CITEPA: Centre Interprofessionnel Technique d’études de la pollution atmosphérique
Info Santé Déchets N° 62, avril 2009 : Spécial DIOXINES et PCB
InVS­AFSSA : 65 questions réponses sur les incinérateurs et les dioxines
MCE : Santé­Environnement des liens de chaque instant
Rapports et textes officiels
AFSSA, 2006 : Avis aliments relatif à l'imprégnation corporelle en dioxines des forts consommateurs de
produits animaux d'origine locale dans le cadre
AFSSET, INSERM, 2008 : Expertise collective, Cancer et environnement
EFSA, 2012 : Update of the monitoring of levels of dioxins and PCBs in food and feed
Ineris, 2006 : Rapport HAP, Données technico­économiques sur les substances chimiques en France
PNUE, 1999 : Substances Chimiques
PNUE, 2005 : Substances Chimiques (2ème édition)
Mise à jour le 21 avr. 2016
Copyright 2016 ­ Centre Léon­Bérard
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