GÉOMÉTRIE ALGÉBRIQUE ET ESPACES DE MODULES

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GÉOMÉTRIE ALGÉBRIQUE ET ESPACES DE MODULES FEUILLE D’EXERCICES 1
ANDREAS HÖRING
Les questions sur les déformations des faisceaux cohérents seront le centre d’intérêt du premier TD et je conseille vivement de les préparer. Les rappels d’algèbre
commutative sont plus techniques, mais utiles pour suivre le cours et résoudre les
questions sur les déformations1.
Déformations des faisceaux cohérents
1.) Soit X une variété algébrique définie sur un corps algébriquement clos k et
soit F un faisceau cohérent sur X. Pour n ≥ 1, notons ∆n pour Spec k[t]/(tn+1 ).
Une déformation de premier ordre de F est un couple (F1 , φ1 ) où
• F1 est un faisceau cohérent sur X × ∆1 plat sur ∆1
et
• φ1 un isomorphisme de F1 ⊗ OX×0 vers F.
De même, une déformation d’ordre n de F est un couple (Fn , φn ) où
• Fn est un faisceau cohérent sur X × ∆n plat sur ∆n
et
• φn un isomorphisme de Fn ⊗ OX×0 vers F.
Deux déformations (Fn , φn ) et (Fn0 , φ0n ) sont isomorphes si on a un isomorphisme
de faisceaux β : Fn ' Fn0 et le morphisme induit φ0n ◦ β ◦ φ−1
n : F → F est l’identité.
(a) Soit (Fn , φn ) une déformation d’ordre n de F. Montrer que le groupe
Aut(Fn , Fn−1 ) des automorphismes de Fn qui induisent l’identité sur Fn−1 =
Fn ⊗ OX×∆n−1 est isomorphe à H 0 (X, EndF).
Soit (F1 , φ1 ) une déformation de premier ordre, alors la suite exacte
t
0 → k → O∆1 → k → 0
induit par platitude une suite exacte
(∗)
t
0 → F → F1 → F → 0.
Cette suite exacte de OX×∆1 -modules peut être vue comme suite exacte de OX modules (pourquoi ?), elle donne donc une classe d’extension
e ∈ Ext1 (F, F).
(b) Montrer que cette construction donne une bijection entre les déformations
de premier ordre de F et Ext1 (F, F).
Date: 12 janvier 2008.
1
Si vous avez des questions, contactez [email protected].
1
(c) Dans la situation de la question précédente, supposons en plus que F est
localement libre. Dans ce cas on vient de montrer que les déformations de premier
ordre sont paramétrées par
H 1 (X, End(F)).
Nous allons voir maintenant comment on peut obtenir une description plus explicite
de la classe d’extension en utilisant la cohomologie de Čech (cf. [Har77, III, 4] pour
un rappel de la définition).
Supposons donc que F est localement libre et soit (F1 , φ1 ) une déformation de
premier ordre. Soit (F0 := p∗X F, IdF ) la déformation triviale de F et choisissons
un recouvrement par des ouverts affines Ui de X tel qu’on ait des isomorphismes
γi : F0 |Ui → F1 |Ui .
γj−1 γi
Montrer que δij :=
cohomologie de Čech
0
∈ H (Uij , EndF0 ) définit un élément δ dans le groupe de
H 1 (X, EndF)
qui est nul si et seulement si les isomorphismes γi se recollent en un isomorphisme
global F0 ' F1 2.
(d) (Principe de relèvement T 1 ) Soit (Fn , φn ) une déformation d’ordre n de F.
Supposons que F et donc Fn est localement libre et notons
en ∈ H 1 (X, Hom(F, Fn−1 ))
la classe de cohomologie associée à Fn . Montrer qu’il existe une obstruction o ∈
H 2 (X, EndF) qui s’annule si et seulement si la classe en se relève en une classe
en+1 ∈ H 1 (X, Hom(F, Fn )).
Montrer également que l’obstruction o s’annule si et seulement si Fn admet une
extension en un faisceau Fn+1 sur X × ∆n+1 plat sur ∆n+1 .
Remarque. Ce théorème reste vrai pour un faisceau cohérent F arbitraire si on
remplace H 2 (X, EndF) par Ext2 (F, F) (cf. [HL97, App. to Ch. 2]).
Rappels d’algèbre commutative
2.) Soit A un anneau commutatif noethérien. Soit M un A-module. On dit que
M est plat si le foncteur N 7→ M ⊗A N est exact, c’est-à-dire toute suite exacte de
A-modules
0 → N 0 → N → N 00 → 0
donne une suite exacte
0 → M ⊗A N 0 → M ⊗A N → M ⊗A N 00 → 0.
Une A-algèbre M est plate si elle est plate comme A-module. Montrer les énoncés
suivants :
(a) M est plat si et seulement si pour tout idéal a ⊂ A, le morphisme a⊗M → M
est injectif.
(b) Soit k un corps et soit A := k[t]/(t2 ). Un A-module M est plat si et seulement
si la multiplication par t de M vers tM induit un isomorphisme M/tM → tM .
2Plus précisement, on montre que si la classe de cohomologie est zéro, on peut modifier les γ
i
tels qu’ils se recollent en un isomorphisme global.
2
(c) Si M est un A-module plat et A → B un morphisme d’anneaux, alors M ⊗A B
est un B-module plat.
(d) Soit B une A-algèbre plate et N un B-module plat. Alors N est un A-module
plat.
(e) Soit
0 → M 0 → M → M 00 → 0
une suite exacte de A-modules. Si M 0 et M 00 sont plats, alors M est plat. Si M et
M 00 sont plats, alors M 0 est plat.
(f) Supposons que M est un A-module de type fini sur A un anneau commutatif
noethérien local. Alors M est plat si et seulement si M est un A-module libre.
3.) Soit f : X → Y un morphisme entre schémas noethériens et soit F un faisceau
de OX -modules. On dit que F est plat sur Y au point x ∈ X si le germe Fx est
un OY,y -module plat où y = f (x) et la structure de OY,y -module est donné par le
morphisme de structure f # : OY,y → OX,x . On dit F est plat sur Y , si F est plat
en tout point de X. On dit que f est un morphisme plat si OX est plat sur Y .
Montrer les propriétés suivantes :
(a) Soit A → B un morphisme entre anneaux commutatifs noethériens et soit
f : X := Spec B → Y := Spec A le morphisme correspondant. Soit M un B-module
et soit F le OX -module associé à M . Alors F est plat sur Y si et seulement si M
est plat sur A.
(b) (Changement de base) Soit f : X → Y un morphisme entre schémas noethériens et soit F un OX -module plat sur Y . Soit g : Y 0 → Y un morphisme entre
schémas noethériens. Soit X 0 := X ×Y Y 0 le produit fibré et soient f 0 : X 0 → Y 0 et
g 0 : X 0 → X les morphismes naturels (cf. [Har77, p.87]). Alors (g 0 )∗ F est plat sur
Y 0.
(c) (Transitivité) Soient f : X → Y et g : Y → Z des morphismes entre schémas
noethériens et soit F un OX -module plat sur Y . Si g est un morphisme plat, alors
F est plat sur Z.
(d) Soit F un OX -module cohérent. Alors F est plat sur X si et seulement si F
est localement libre.
4.) Soit X un schéma noethérien. Nous admettons que la catégorie M des OX modules a suffisamment d’injectifs [Har77, III, Prop.2.2]. En particulier si F : M →
B est un foncteur de M vers une autre catégorie abélienne B qui est exact à gauche,
alors les foncteurs dérivés existent. Soit F un OX -module, alors le foncteur
Hom(F, .) := HomOX (F, .)
est exact à gauche et nous définissons pour i ≥ 0
Exti (F, .)
comme le i-ème foncteur dérivé de Hom(F, .).
Soit G un faisceau, on définit le faisceau Hom(F, G) par
U 7→ HomOX |U (F|U , G|U )
où U est un ouvert dans X (a priori c’est seulement un préfaisceau, mais on montre
sans problème que c’est un faisceau [Har77, II, Ex.1.15]). On définit
Exti (F, .)
3
comme le i-ème foncteur dérivé de Hom(F, .).
Une extension d’un OX -module F par un OX -module G est une suite exacte de
OX -modules
0 → G → M → F → 0.
Deux extensions sont isomorphes si on a un isomorphisme de suites exactes qui
induit l’identité sur F et G. Montrer les énoncés suivants :
(a) On a une bijection entre les classes d’isomorphisme d’extensions de F par G
et les éléments de Ext1 (F, G).
(b) Soit L un faisceau cohérent localement libre, alors
Exti (L, G) ' H i (X, L∗ ⊗ G).
ou L∗ désigne le faisceau dual Hom(L, OX ).
(c) Si F et G sont des faisceaux cohérents, alors
Exti (F, G)
est un faisceau cohérent pour i ≥ 0.
(d) Pour tout G ∈ M on a
Ext0 (OX , G) ' G
et
Exti (OX , G) = 0
pour i > 0.
(e) Donner un exemple d’un faisceau cohérent localement libre L sur X = P1 tel
que
Ext1 (OX , L) 6' Γ(X, Ext1 (OX , L)).
(Ceci montre que les foncteurs «sections globales» et «Ext» ne commutent pas.
Notons néanmoins que les «Ext» et les «Ext» sont reliés par une suite spectrale.
[God58, II,7.3.3])
(f) Supposons que tout faisceau cohérent sur X est le quotient d’un faisceau
localement libre (cette condition est satisfaite si X est projective par le théorème
de Serre). Alors un faisceau cohérent F est localement libre si et seulement si
Ext1 (F, G) = 0
pour tout faisceau d’OX -modules G .
Références
[God58] Roger Godement. Topologie algébrique et théorie des faisceaux. Actualités Sci. Ind. No.
1252. Publ. Math. Univ. Strasbourg. No. 13. Hermann, Paris, 1958.
[Har77] Robin Hartshorne. Algebraic geometry. Springer-Verlag, New York, 1977. Graduate Texts
in Mathematics, No. 52.
[HL97]
Daniel Huybrechts and Manfred Lehn. The geometry of moduli spaces of sheaves. Aspects
of Mathematics, E31. Friedr. Vieweg & Sohn, Braunschweig, 1997.
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