La conscience des troubles (insight) dans la schizophrénie : une

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L’Encéphale (2008) 34, 597—605
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/encep
PSYCHOPATHOLOGIE
La conscience des troubles (insight) dans la
schizophrénie : une revue critique
Partie I : insight et schizophrénie, caractéristiques
cliniques de l’insight
Lack of insight in schizophrenia: A review
Part I: Theoretical concept, clinical aspects and
Amador’s model
S. Raffard a,∗, S. Bayard b, D. Capdevielle a, F. Garcia a,
J.-P. Boulenger a, M.-C. Gely-Nargeot b
a
Service universitaire de psychiatrie adulte, hôpital de la Colombière, centre hospitalier universitaire de Montpellier,
Montpellier-1, 191, avenue du Doyen Gaston-Giraud, 34295 Montpellier cedex 5, France
b
Département de psychologie, unité de psychopathologie et de neuropsychologie, EA3021, université Paul-Valéry,
Montpellier-3, 34195 Monpellier cedex 5, France
Reçu le 14 août 2006 ; accepté le 10 octobre 2007
Disponible sur Internet le 20 février 2008
MOTS CLÉS
Conscience des
troubles ;
Schizophrénie ;
Modèles descriptifs ;
Revue de la
literature ;
Prise en charge
psychologique
∗
Résumé La mesure et l’évaluation de la conscience des troubles dans la schizophrénie
connaissent un essor et un regain d’intérêt depuis une vingtaine d’années. La conscience d’avoir
un trouble mental, que les auteurs anglosaxons traduisent par insight, doit être explorée comme
un processus multidimensionnel et ne peut se limiter à une approche dichotomique en tout ou
rien qui a longtemps dominé dans la pratique clinique. Les liens entre déficits de l’insight et
mauvais pronostic dans le processus de soins sont l’explication première du nombre croissant de
recherches dans ce domaine et leurs études représentent un intérêt majeur pour l’amélioration
de la prise en charge des patients.
La schizophrénie est l’entité psychiatrique dans laquelle la conscience des troubles (ou
insight) est la plus fréquemment altérée. Entre 50 et 80 % de la population de sujets affectés de
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (S. Raffard).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2007.
doi:10.1016/j.encep.2007.10.008
598
S. Raffard et al.
schizophrénie présentent un déficit dans la conscience de leur maladie. Comparativement aux
autres troubles mentaux (psychotiques ou non), la littérature internationale souligne depuis
deux décennies l’importance et l’intensité des troubles de l’insight dans cette pathologie.
Définie pendant très longtemps comme un phénomène dichotomique, la récente modélisation clinique de la conscience des troubles dans la psychose et le développement d’outils
d’évaluation ont permis d’en souligner son aspect multifactoriel et dynamique. Dans cette revue
de la question sur l’insight dans la schizophrénie, nous reviendrons sur l’évolution du concept
d’insight en psychiatrie et sur sa définition. Les caractéristiques cliniques qui y sont spécifiquement associées seront abordées. L’ensemble des outils permettant d’évaluer l’insight dans la
schizophrénie seront présentés et un intérêt particulier sera porté au modèle clinique d’Amador
et à l’outil d’évaluation sur lequel il repose, la Scale to Assess Unawareness of Mental Disorder
(SUMD). En conclusion les prises en charge des troubles de l’insight dans la schizophrénie seront
évoquées.
© L’Encéphale, Paris, 2007.
KEYWORDS
Insight;
Schizophrenia;
Review;
Models;
Psychological
intervention
Summary
Introduction. — Schizophrenia is the psychiatric disorder in which the awareness of pathology
(or insight) is most frequently altered.
Literature findings. — A review of the literature shows that between 50 and 80% of patients with
schizophrenia do not believe they have a disorder. Studies published on this subject over the
two last decades stressed the specificity of this phenomenon in schizophrenic patients, taking
into account both its prevalence and its clinical consequences comparatively to other mental
disorders. If in bipolar disorders a lack of insight is linked with the intensity and acuteness of
symptomatology, there is only a limited relationship between these factors in schizophrenia,
thus making lack of insight a trait rather than a state-related symptom.
Discussion. — Though defined for a very long time as a dichotomic phenomenon, the recent
interest on insight in psychosis and the development of assessment tools for its evaluation have
made it possible to underline its multifactorial and dynamic characteristics. Although lack of
insight related to pathologies may vary across time in bipolar disorders, the results of clinical
studies suggest that this phenomenon remains stable in schizophrenia.
Conceptual proposals. — In this review, we will reconsider the evolution of this concept in psychiatry and its definition. The clinical characteristics, which are specifically associated with the
lack of insight in schizophrenia will be outlined. We will describe more specifically the model
of Amador and Strauss and their assessment tool: the Scale to Assess Unawareness of Mental
Disorder (SUMD). This model developed since the 1990s takes into account the time-related
evolution of insight, and can be applied both to bipolar and psychotic disorders.
Assessment tools. — The SUMD has six general items and four subscales. The general items estimate the three most widely used definitions of insight: awareness of having a mental disorder,
awareness of the achieved effects of medication and awareness of the social consequences of
having a mental disorder, and include assessment of both current and past-time periods. Four
other subscales, each composed of 17 items, assess awareness and attribution of specific current and retrospective symptoms as well as deficits associated with severe mental disorders.
Insight, thus, appears as a multidimensional and continuous phenomenon, since patients’ awareness may apply only to part of their symptoms and vary over time. In this article, we will
review existing scales assessing insight in schizophrenia. The deficiency of available scales validated in French limits the number of scientific publications concerning this important aspect
of the clinical evaluation of schizophrenic patients.
Therapeutical aspects. — Finally, interventions to improve insight in patients with schizophrenia
are presented. Recent studies have shown cognitive behavioural therapy (CBT) to be of benefit
in the treatment of poor insight in schizophrenia.
Conclusion. — Evidence suggests that early diagnosis and treatment of schizophrenia leads to
better prognosis. An important suggestion from theses studies may be that psychosocial therapy
needs to focus on explanations that are in tune with the culture, rather than focus on diagnostic
labels.
© L’Encéphale, Paris, 2007.
La conscience des troubles (insight) dans la schizophrénie : une revue critique
Introduction
Les cliniciens confrontés à la psychose ont toujours considéré comme partie intégrante de la maladie l’incapacité
de certains patients à pouvoir reconnaître leurs troubles.
Très tôt dans l’histoire de la psychiatrie, les aliénistes
s’interrogeaient déjà à propos de cette caractéristique
clinique et sur son particularisme [17]. Plus récemment,
Amador et Kronengold [7] précisent à ce propos : « Quand
on discute de leur maladie et de la nécessité d’un traitement avec des sujets souffrant de troubles psychotiques, les
cliniciens et leurs familles se sentent souvent frustrés face
à leur extrême manque de conscience de leurs troubles ».
Force est de constater que depuis une vingtaine d’année,
l’étude de la non conscience de la maladie chez les patients
schizophrènes suscite un regain d’intérêt. Les répercussions
cliniques sévères qui y sont très souvent associées en constituent certainement la raison première. En effet, l’absence
de conscience des troubles aurait un effet significatif sur
des facteurs comme la compliance au traitement ou les passages à l’acte agressifs. Différents travaux expérimentaux,
menés en recherche clinique, ont permis l’élaboration de
modèles multidimensionnels de la conscience de la maladie,
permettant de dépasser une simple vision dichotomique trop
réductrice. Ces études, presque toutes exclusivement issues
de la littérature anglosaxonnes, permettent également de
souligner la faiblesse de la recherche clinique française (en
psychiatrie et en psychologie), centrée sur cette problématique.
Pour définir la conscience des troubles dans les pathologies mentales, les auteurs anglosaxons utilisent le terme
insight ou awareness. La traduction adoptée de manière
consensuelle par les auteurs francophones est celle de
« conscience » [17,18]. Dans cet article, par souci de simplification, ces termes seront adoptés sans distinction bien que
cela mériterait un débat plus approfondi tant ils recouvrent
des réalités singulières qui s’ancrent dans des référentiels
variés [38].
Dans un tel contexte, cette revue de la question se
propose de dresser un état des lieux de ce concept
qu’est l’absence de conscience des troubles dans la schizophrénie. Après avoir abordé l’évolution historique du
concept d’insight dans la schizophrénie, nous en présenterons sa définition la plus récente, tel que le modèle
clinique d’Amador et al. [4—8] permet de la concevoir avec
ses prolongements méthodologiques (outils d’évaluation de
l’insight). Puis, nous en décrirons les répercussions cliniques
et les relations qu’entretient l’absence de conscience des
troubles avec l’ensemble de la symptomatologie schizophrénique ainsi que son évolution au décours de la maladie.
Insight et schizophrénie
Généralités
Une mauvaise conscience d’avoir un trouble mental n’est
pas spécifique à la pathologie schizophrénique. Le DSM IVTR [3] a pris la décision d’inclure cette dimension dans le
critère diagnostic du trouble obsessionnel-compulsif (TOC)
et la littérature récente sur l’insight a vu se développer des
recherches sur des patients atteints de troubles mentaux
599
aussi divers que la dysmorphophobie [36] ou les troubles
bipolaires [6,48,49]. Afin de comparer les diverses populations étudiées, une échelle la Brown Assessment of Beliefs
Scale [23] a été développée pour mesurer dans une grande
variété de troubles psychiatriques la capacité d’un patient
à reconnaître qu’il a un trouble mental et que ses croyances
sont altérées par le fait d’avoir un problème psychiatrique
ou psychologique. Néanmoins les troubles de l’insight ont
été beaucoup étudiés dans la schizophrénie, de part leur
stabilité et leur intensité. En effet, les déficits dans la
conscience des troubles apparaissent comme plus communs
et sévères chez les personnes affectées de schizophrénie
que dans les troubles schizoaffectifs ou les dépressions
majeures avec ou sans caractéristiques psychotiques, mais
pas significativement différents des patients bipolaires [49].
D’après différentes études, il a été estimé qu’entre 50 et
80 % des patients atteints de schizophrénie ne considèrent
pas avoir un trouble mental [6,11,22,49]. Par ailleurs, la
dernière version du manuel diagnostique américain DSM IVTR [3] considère désormais que le manque d’insight dans
cette pathologie est une manifestation de la maladie qui
doit être considérée comme un symptôme propre du spectre
schizophrénique. De manière assez consensuelle, différents
travaux ont démontré que, globalement, les patients schizophrènes présentaient une moindre conscience de leur
maladie comparativement à des patients atteints d’autres
troubles psychotiques [6,11,49] et ce, quelque que soit
l’instrument de mesure de l’insight utilisé. Ce fait a été systématiquement observé lors de la comparaison de patients
avec troubles bipolaires (avec ou sans sévérité psychotique) et de patients atteints de schizophrénie. De plus,
une récente méta-analyse [26] relative aux troubles bipolaires a permis de préciser que l’insight dans la manie,
bien que sévèrement altéré, ne pouvait être considéré
comme un trait mais plutôt comme un état qui ne dépendait pas du caractère psychotique de l’épisode. Des résultats
semblables ont été obtenus lors de la comparaison du
degré d’insight de patients souffrant de troubles dépressifs avec celui de patients schizophrènes [6,49]. Cependant,
contrairement aux sujets en état maniaque, le caractère
psychotique de l’épisode altérait le degré de conscience
des troubles. Il résulte de ces différentes études que les
déficits de l’insight seraient plus un trait des troubles schizophréniques tandis qu’ils seraient plus liés à l’intensité de
la symptomatologie dans les troubles bipolaires. Les troubles
de l’insight dans la schizophrénie auraient ainsi une valeur
nosologique et clinique fondamentale.
Évolution historique du concept d’insight dans la
schizophrénie
Le terme insight apparaît la première fois en 1934 dans
un article de Lewis [34] qui propose de définir ce concept
en se basant sur son utilisation en clinique courante.
Son premier constat est de mettre en avant l’absence de
définition stricte de ce terme malgré son usage fréquent
ainsi que la difficulté à le définir et à l’évaluer [13,38].
Lewis [34] définit l’insight comme une « attitude adaptée
face à un changement morbide en soi », une capacité à se
décentrer et à poser un jugement sur son état. Il s’agit donc
dans cette définition de l’insight de prendre en compte
600
la qualité de compréhension qu’un patient a envers sa
maladie et elle se rapproche du concept de conscience de
soi. D’autres auteurs souligneront [54] l’insuffisance d’une
telle définition, arguant que l’évaluation de l’insight doit
aussi prendre en compte et considérer les attitudes et
comportements en vie quotidienne d’un patient durant son
hospitalisation ou concernant sa compliance au traitement.
Cette distinction se justifie cliniquement par ces patients
qui ne se disent pas être malades, mais qui viennent
demander leur traitement et le prennent régulièrement ou
ne s’opposent pas à leur hospitalisation tout en niant avoir
un problème mental sévère. Autrement dit, ces auteurs
soulignaient l’importance de distinguer les connaissances
et la conscience qu’a un patient de son trouble mental
et ses attitudes face à la maladie qui peuvent être en
opposition. La psychopathologie phénoménologique a pu
mettre en exergue cette dissociation entre la souffrance
vécue par ces patients et le peu de conscience du caractère
pathologique de leurs pensées ou expériences vécues [15].
À la suite de ces travaux, avant tout, se référant à une
approche clinique, il est ici important de souligner que de
nombreuses définitions de l’insight ont été développées et
proposées et qu’il demeure un manque de clarté associé
à ce concept, certainement inhérent, d’une part, à la
difficulté de définir la conscience et, d’autre part, à la
conceptualiser dans les maladies mentales en référence à
une normalité qui nous échappe.
Historiquement en France, notamment après la thèse
portant sur la conscience morbide de Charles Blondel [16],
est apparue une rupture entre la conscience de soi normale et la conscience pathologique de soi qui accompagne
les troubles mentaux, notamment la schizophrénie [2,17].
Alors que la psychiatrie classique considérait jusque-là qu’il
y avait une continuité entre le normal et le pathologique [2],
la thèse de Blondel [16] va entraîner chez les psychiatres,
notamment français, l’idée que les patients souffrant de
psychoses ne peuvent pas avoir en partie conscience de leurs
troubles, délires et hallucinations. Cette idée va marquer la
pratique des soignants en santé mentale et leur faire considérer qu’en grande partie le patient souffrant de psychose
est « hors de compréhension ».
Il demeure un fait clinique que l’évaluation de la
conscience des troubles dans la schizophrénie se heurte à
ce que Jaspers appelle « conscience morbide » [29]. « Les
patients apprennent par cœur et répètent les mots des psychiatres et des autres personnes sans connaître exactement
leur signification ». Beck et al. [11], dans une conceptualisation plus récente de l’insight ne disent pas autre
chose quand ils différencient l’insight cognitif de l’insight
émotionnel. Le premier s’approcherait du rationalisme
morbide mais rendrait compte aussi de processus internes
qui agiraient afin de rendre cohérent des phénomènes
internes vécus comme externes par les patients comme les
hallucinations. Le second correspondrait à l’opinion subjective qu’ils portent sur leurs troubles. Mais contrairement à
des auteurs comme Jaspers [2,29], un ensemble de chercheurs vont différencier des niveaux d’insight [5,11,13,38]
et proposer que la conscience des troubles dans la schizophrénie soit considérée comme un phénomène continu et
multidimensionnel. Cette considération que l’insight peut
être à la portée des patients, du moins en partie, a laissé la
S. Raffard et al.
place à une volonté depuis une vingtaine d’année d’étudier
et formaliser l’insight à travers une conceptualisation
multiple plus adaptée à un phénomène complexe.
Historiquement, le terme insight provient à l’origine
de la clinique psychanalytique [58]. Il a désigné dans un
premier temps la prise de conscience des conflits et des
mécanismes de défense à l’œuvre dans la dynamique inconsciente de l’analysant, prise de conscience favorisée par
les interprétations de l’analyste. Puis, ce terme insight
a rendu compte plus généralement chez les patients de
l’ensemble des processus de prise de conscience de ses
propres états mentaux [59] permettant secondairement une
résolution du symptôme par associations libres. Il a été
définitivement associé à la conscience qu’un patient pouvait avoir de son état pathologique, le terme insight étant
réservé aux troubles mentaux et son quasi-synonyme, le
terme anosognosie proposé par Babinski [10] étant associé aux troubles neurologiques [5,42,56]. Le destin de ces
deux termes a d’ailleurs suivi un chemin fort différent.
Alors que l’anosognosie que l’on retrouve dans des maladies dégénératives comme la démence de type Alzheimer ou
frontotemporale [5,9,42] correspondait à une lésion ou une
anomalie cérébrale frontale ou pariétale [5,42], le défaut
d’insight dans la schizophrénie a été attribué dans un premier temps à un mécanisme de défense psychologique,
notamment le déni suite aux travaux de Freud [25]. Il est
important de souligner que le déni correspond à un refus
de prise en charge de certains éléments de la réalité alors
qu’ils ont été perçus. Dans le cadre de certaines anosognosies, notamment pariétales, il s’avère que l’information sur
l’anomalie touchant une partie du corps comme dans le syndrome de Babinski n’est pas perçue par le patient [55]. Dans
le déni il s’agit bien d’un mécanisme, certes inconscient
mais actif se déroulant dans l’après-coup du phénomène
perceptif [25] et non pas d’une anomalie perceptive. On
retrouve peu d’études psychanalytiques sur le thème de
l’insight et la plupart des travaux sont anglosaxons basés
sur l’analyse rétroactive de cas [38]. Il est important de
noter qu’un auteur comme Richflied [51], en avance sur son
temps, avait déjà proposé de dichotomiser l’insight entre un
insight intellectuel (intellectual insight) et un insight émotionnel (emotional insight) dans la prise en compte de la
compréhension que pouvait avoir un patient de son trouble
mental.
En ce qui concerne l’étiologie des déficits de la
conscience des troubles dans la schizophrénie, même si certaines études vont dans le sens d’une implication de certains
processus de défense psychologiques [20,35], ce qui est
retrouvé dans un ensemble de maladies d’origine somatique
[45], le lien robuste entre déficits cognitifs et déficits de
l’insight dans la schizophrénie privilégie [1] d’appréhender
ce phénomène à travers une approche étiologique multidéterminée [5,36].
En résumé, cet a priori de l’insight comme absolument
hors de portée des patients a certainement retardé l’intérêt
porté à la problématique de l’insight et son étude à travers
des paradigmes plus expérimentaux. Les modèles scientifiques actuels en psychopathologie cognitive qui plaident
pour un continuum entre le normal et le pathologique dans
les maladies mentales y sont certainement pour beaucoup
[12].
La conscience des troubles (insight) dans la schizophrénie : une revue critique
Figure 1
601
Modèle d’Amador et al., [6,8].
De plus, jusqu’à il y a peu, la plupart des praticiens se
cantonnaient à évaluer l’insight au travers de l’entretien clinique [5,7,8,17]. Aussi féconde qu’elle soit, cette approche
éminemment subjective ne pouvait autoriser le recueil
systématique de données objectives par le biais d’outils
standardisés aux qualités métrologiques connues. Si la
richesse des études de cas a permis de mettre en exergue
la complexité du phénomène, l’absence d’outils de mesure
rendait donc difficile l’exploration et la réplication expérimentale de l’hypothèse avancée par les cliniciens selon
laquelle les patients psychotiques auraient une conscience
partielle de leurs troubles. Il était de surcroît impossible
d’en cerner ses explications théoriques.
Il aura fallu attendre 1973 et l’étude multicentrique
de l’« International Pilot Study of Schizophrenia » menée
par l’Organisation mondiale de la santé pour que des
échantillons conséquents de patients fassent partie de protocoles opérationnalisant une définition de la conscience
des troubles [19]. Au travers de cette étude mondiale, les
différentes dimensions symptomatologiques de la schizophrénie furent analysées au travers de différentes cultures
ethniques dans l’optique de faire émerger un ensemble de
symptômes susceptibles de définir des sous-groupes homogènes et cliniquement valides de patients atteints de cette
maladie [19]. Les troubles de la conscience de la symptomatologie psychiatrique étaient alors reconnus comme
un phénomène transculturel. De plus, son intensité put
alors être envisagée comme un élément déterminant afin
d’établir différents sous-types diagnostiques. Dans cette
étude, l’absence d’insight était envisagée lorsqu’un patient
déniait vigoureusement le fait d’être malade. Bien que
cette approche de la conscience des troubles demeure
relativement dichotomique, l’originalité de cette importante étude aura été d’illustrer de manière rigoureuse
que l’insight constitue un élément essentiel de la symptomatologie schizophrénique. À la suite de cette étude,
différents auteurs ont essayé de conceptualiser l’insight
comme un phénomène non plus dichotomique, mais multidimensionnel et pouvant évoluer dans le temps. [8,22,37,41].
Dans cette revue de la question, nous nous proposons
d’expliciter le modèle proposé par Amador et al. [5—8]
qui apparaît comme étant le modèle descriptif le plus
complet, ayant de plus l’avantage de proposer une échelle
d’évaluation largement utilisée dans les recherches internationales.
Le modèle clinique d’Amador et al. [5—8] et son
prolongement méthodologique : la Scale to Assess
Unwareness of Illness in Mental Disorders (SUMD)
[4]
Le modèle d’Amador et al. [5—8] est actuellement considéré
comme le modèle de référence en clinique et en recherche
pour appréhender la notion de l’insight dans la schizophrénie et dans les troubles psychotiques en général. Ces auteurs
ont proposé une approche continue et multidimensionnelle
de l’insight où deux principales dimensions sont envisagées :
la prise de conscience de la symptomatologie de la maladie et le processus d’attribution des symptômes (Fig. 1).
Le trouble de prise de conscience est défini par ces auteurs
comme un défaut d’agrément entre le jugement que le sujet
porte sur sa condition et celui qui est émit par le praticien.
Cette prise de conscience concerne quatre dimensions qui
sont les suivants :
•
•
•
•
le trouble mental ;
les effets du traitement ;
les conséquences sociales de la maladie ;
les signes et symptômes spécifiques (par exemple, les hallucinations, l’émoussement affectif, etc.).
Le déficit d’attribution des symptômes renvoie quant à
lui au fait que le patient n’envisage pas un trouble mental
comme étant à l’origine de ceux-ci. Dans leur modèle, ces
auteurs ont également envisagé une dimension temporelle
en dichotomisant l’insight de la symptomatologie actuelle
de celui relatif à l’histoire passée de la maladie. L’insight
est donc défini dans ce cas, comme un phénomène pouvant
évoluer dans le temps.
À partir de ce modèle, ces auteurs ont proposé un instrument de mesure de l’insight [4] : la Scale to Assess
Unwareness of Illness in Mental Disorders. Largement normalisée dans sa version originale anglophone, cette échelle est
utilisée de manière privilégiée en clinique et en recherche.
Elle consiste en un entretien semi-structuré qui évalue
602
Tableau 1
S. Raffard et al.
Principales échelles d’évaluation de l’insight.
Échelles
Nombre
d’items
Validation
française
Administration
BCIS [11]
Insight Q8 [18]
IAS [14]
ITAQ [41]
PANSS, item
G12 [31]
SAI [22]
SAI-E [52]
SAIQ [40]
SRIS [37]
SRIS version 2
[39]
SUMD [4]
15
8
8
11
1
en préparation
oui
—
—
oui
auto
hétéro
auto
hétéro
hétéro
3
4
17
32
30
—
—
—
—
—
hétéro
hétéro
auto
auto
auto
74
en préparation
hétéro
BCIS : Beck Cognitive Insight Scale ; IAS : Insight Assessment
Schedule ; ITAQ : Insight and Treatment Attitudes Questionnaire ;
PANSS : Positive and Negative Syndrome Scale ; SAI : Schedule
for Assessing the Components of Insight ; SAI-E : Schedule for
Assessing the Components of Insight Expanded Version ; SAIQ :
Self Appraisal of Illness Questionnaire ; SRIS : Self-Report Insight
Scale for Psychosis ; SUMD : Scale to Assess Unawareness of
Mental Disorder.
le degré d’insight présent et passé. Comme l’illustre la
Fig. 1, la SUMD s’organise autour de quatre dimensions qui
renvoient chacun aux différents niveaux de conscience précédemment spécifiés et de la présence de 17 signes et
symptômes spécifiques de la schizophrénie. Pour chacun
de ces symptômes, le clinicien évalue la manière dont le
patient s’attribue ou non leur origine (par exemple, la maladie mentale ou la possession diabolique). La SUMD n’est pas
l’unique échelle d’appréciation du degré d’insight dans la
schizophrénie. Le Tableau 1 livre une synthèse de l’ensemble
des autres outils actuellement disponibles et validés. Ils
consistent soit en une auto- ou une hétéroévaluation. Le
nombre d’items qui les compose est extrêmement variable
et peu d’entre eux ont été validés en langue française. Toutefois, ces différents outils apparaissent relativement bien
intercorrélés [52].
Caractéristiques de l’insight : répercussions
cliniques, symptomatologie associée et
évolution au décours de la maladie
Les répercussions cliniques des troubles de l’insight dans
la schizophrénie sont importantes et nécessitent que cette
conscience des troubles soit évaluée dans la pratique clinique. En effet, un mauvais insight est associé à une faible
compliance au traitement [24,41,54], à un nombre plus
élevé de ré-hospitalisations [25,46,47], à un fonctionnement relationnel et social altéré [30,35], ainsi qu’à un
nombre de suicides et de comportements violents plus élevé
[32,53]. Plus généralement, la qualité de vie semblerait
plus altérée chez les patients présentant un défaut d’insight
que ceux avec une meilleure conscience de leurs déficits
[8,50].
De nombreux auteurs ont étudié le lien entre le degré
d’insight et les autres symptômes généralement retrouvés dans la schizophrénie. Les hypothèses de départ de
ces études consistaient à se demander dans quelle mesure
certains symptômes de la maladie où certaines variables
psychoaffectives pouvaient influencer la conscience des
troubles. Les données de la littérature ont à ce sujet mis
en avant des conclusions divergentes. Certaines études ont
effectivement montré que la symptomatologie négative et
la dépression pouvaient avoir une influence positive sur la
conscience des troubles [18,44,46]. D’autres travaux n’ont
pas retrouvé cette relation [7,41]. Notons que ces résultats
contradictoires peuvent en partie s’expliquer, d’une part,
par une absence de consistance dans le choix des outils utilisés pour apprécier le degré d’insight, et, d’autre part,
pour appréhender la symptomatologie schizophrénique et
les dimensions psychoaffectives telles que la dépression. La
méta-analyse de Mintz et al. [43], portant sur 40 études
publiées depuis 1974, s’est penchée sur les relations entre
les différentes dimensions de l’insight et la symptomatologie dans la schizophrénie. Dans le souci de rendre
comparable les différentes études de leur méta-analyse, ces
auteurs ont uniquement recensé celles qui avaient utilisé
des outils identiques pour mesurer l’insight et évaluer la
symptomatologie de la schizophrénie. Cette méta-analyse
porte sur un échantillon de 412 sujets. Les résultats de
ce travail illustrent que la symptomatologie schizophrénique n’expliquerait qu’une très faible proportion du degré
d’insight. Notons que dès 1994, Amador et al. dans l’une de
leurs études initiales, concluaient à des résultats à peu prés
équivalents [6].
Étant donné que l’absence d’insight semble être peu
influencée par la nature de la symptomatologie (positive, négative ou dépressive) et son intensité, certains
auteurs ont émis l’hypothèse selon laquelle l’insight devrait
lui-même demeurer relativement stable dans le temps.
Cependant, d’autres auteurs [44,54] ont infirmé cette
hypothèse en montrant que les patients schizophrènes
présentaient une amélioration de leur conscience des
troubles dans le temps entre l’hospitalisation et la sortie en suivi ambulatoire. Toutefois, plusieurs facteurs
limitent l’interprétation de ces résultats. Un de ces facteurs concerne l’intervalle de temps d’évaluation qui se
révèle parfois être très court, inférieur à un mois [54]. Le
second renvoie à l’hétérogénéité des patients qui constituaient les groupes, les auteurs y ayant inclus des patients
avec d’autres troubles psychotiques [54]. Quant à l’étude
de Mintz et al. [44], les patients ont suivi un programme
de prise en charge spécifique à un premier épisode psychotique qui pourrait expliquer l’amélioration de l’insight. Des
études prospectives à deux ans [21] ou presque cinq ans
[54] sur des patients suivis après hospitalisation n’ont montré pour leur part qu’une faible, voire une totale absence
d’amélioration de la conscience des troubles, en particulier
celle concernant la symptomatologie négative. Ces travaux
confirment globalement, d’une part, la relative stabilité des
déficits de la conscience des troubles dans la schizophrénie
et, d’autre part, le faible lien, bien que significatif, entre
l’intensité de la symptomatologie (en phase aiguë ou chronique) et le degré d’insight. Il convient dans la suite de ces
données de citer une étude récente [33] ayant utilisé l’IRM
fonctionnelle pour mesurer l’activité des zones cérébrales
La conscience des troubles (insight) dans la schizophrénie : une revue critique
impliquées dans la cognition sociale parmi une population
de sujets affectés de schizophrénie, notamment les zones
situées dans le lobe préfrontal médian gauche, entre un épisode aigu et la rémission des symptômes. Les auteurs ont
montré qu’une augmentation de l’activité dans cette zone
était corrélée avec une meilleure conscience des troubles et
du fonctionnement social. Si cette étude est limitée quant
à la généralisation de ces résultats du fait du faible nombre
de patients, elle est, cependant, la première à mettre en
évidence le fonctionnement d’une zone cérébrale précise
avec le niveau d’insight ainsi que le fait que chez un groupe
particulier de patients, la rémission symptomatologique est
associée à une amélioration de l’insight. À la suite de ces
études de groupes, une question demeure pour l’instant
sans réponse. Existe-t-il des sous-groupes de patients dont
l’insight évolue favorablement et si oui, quelles sont les
variables pouvant influencer l’insight des patients affectés
de schizophrénie ?
Conclusion
Les troubles de la conscience de la maladie sont présents
dans de nombreuses affections psychiatriques telles que
les troubles bipolaires ou le trouble obsessionnel-compulsif
pour lequel le DSM IV-TR reconnaît entre autres un soustype caractérisé par un pauvre insight. Il est maintenant
établi que les patients atteints de schizophrénie sont les
plus sévèrement touchés par cette dimension pathologique. Alors que l’absence d’insight dans la schizophrénie
ne semble être que peu en relation avec l’intensité de
la symptomatologie contrairement aux troubles bipolaires, ses répercussions cliniques apparaissent majeures
dans l’adaptation fonctionnelle, les soins et certains
comportements auto- et hétéroagressifs. Le modèle proposé par Amador et al. [5—8] constitue actuellement la
référence privilégiée dans l’approche phénoménologique et
multidimensionnelle de l’insight sur les plans de la clinique
et de la recherche utilisable en clinique quotidienne. En
ce sens, traduire et valider la SUMD parmi une population
francophone souffrant de schizophrénie permettrait de
développer les recherches françaises dans le domaine de
l’insight.
Alors qu’un certain consensus existe concernant la
mesure de l’insight, de nombreuses questions demeurent
sans réponse, notamment en ce qui concerne l’étiologie du
déficit de conscience des troubles dans la schizophrénie.
Les modèles étiologiques proposés privilégient souvent une
hypothèse étiologique unique au détriment d’une conceptualisation multidimensionnelle plus proche de la réalité
clinique. Que ce soit dans de futures recherches ou dans
la pratique clinique quotidienne, les différents facteurs
étiologiques de l’insight comme les mécanismes de coping
ou les déficits et biais cognitifs et neuropsychologiques
devront être envisagé pour une prise en charge et un accompagnement efficace des sujets affectés de schizophrénie
ou de troubles bipolaires. En effet, malgré les avancées
sur l’évaluation et l’étiologie de l’insight, un problème
demeure encore peu exploré : la conscience des troubles
peut-elle être améliorée dans la schizophrénie et si oui
nécessite-t-elle une prise en charge spécifique ? Si les causes
de l’insight apparaissent multidéterminées, il semble que
603
des prises en charges distinctes et complémentaires doivent
être proposées, comme cela a pu être proposé il y a déjà
de nombreuses années dans la prise en charge des patients
anosognosiques suite à des lésions cérébrales [42].
Néanmoins, avant toute prise en charge spécifique, il
apparaît qu’une prise en charge globale dès le premier épisode alliant psychoéducation individuelle et familiale ainsi
qu’un traitement pharmacologique permettrait une amélioration significative de l’insight [44]. En revanche, les
tentatives de prise en charge visant à améliorer l’insight
de patients chroniques et âgés semblent être peu efficaces
[27]. Cela pourrait être expliqué par un ensemble de facteurs impliqués dans l’étiologie et le maintien des déficits
de l’insight comme une baisse des ressources cognitives, la
résistance au changement ou la symptomatologie psychotique, notamment négative.
Cela laisse à penser qu’une prise en charge précoce dès
le premier épisode représente un enjeu majeur dans la prise
en charge des patients affectés de schizophrénie [44,57].
Il n’existe que peu d’études concernant la prise en charge
spécifique des troubles de l’insight. Les approches cognitivocomportementales visant spécifiquement une amélioration
de l’insight semblent être efficaces avec comme avantages
la prise en charge en groupes et de durée limitée dans le
temps [50] mais demandent, cependant, à être confirmées,
puis développées. Donnée clinique importante de l’étude de
Turkington et al. [57], une différence significative est apparue dans l’amélioration de l’insight après prise en charge,
entre groupes ethniques. Le groupe de sujets issus des minorités noires et afro-caribéens a présenté une amélioration
significativement inférieure aux populations blanches de
l’étude. Il nous semble que ces résultats mettent l’accent
sur la nécessité de prendre en compte le contexte socioculturel [30] et les croyances des patients lors de l’évaluation
de l’insight, mais aussi les croyances et attitudes du clinicien envers le patient. En effet, il apparaît important
de considérer qu’il existe plusieurs explications d’origines
culturelles différentes aux symptômes psychotiques, acceptées et répandues parmi des populations d’origines diverses
[30,57]. Les études sur les facteurs influençant la réussite
d’une psychothérapie ont pu mettre en évidence l’influence
positive d’une alliance thérapeutique entre le clinicien et
le patient [28]. Cela nécessite pour le clinicien confronté
à la psychose de prendre en compte la réalité propre du
patient tout en l’accompagnant dans le fait de pouvoir envisager d’autres possibilités sur ses expériences vécues. Des
études françaises sur ce sujet, notamment sur l’engagement
de patients d’origines culturelles différentes dans les programmes de soins, l’annonce de la maladie par le médecin
psychiatre ou la prise en charge et/ou l’engagement des
familles d’origines culturelles diverses demandent à être
entreprises. Comme le proposent certains auteurs [30,57],
les prises en charge doivent se focaliser sur des explications
en phase avec les origines ethniques, et donc en phase avec
les croyances propres des patients, plutôt que sur des étiquettes diagnostiques hors de portée de la compréhension
des malades.
En définitive, ces études nous rappellent qu’il ne faut pas
oublier que l’évaluation de l’insight rend compte d’une différence de point de vue entre un soignant et un patient qui
possèdent tous les deux leurs propres croyances et attitudes
face à la maladie mentale.
604
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