Sur la théorie géométrique des G-fonctions - IMJ-PRG

Sur la th´eorie g´eom´etrique des G-fonctions
(Le th´eor`eme de Chudnovsky `a plusieurs variables)
par
Lucia Di Vizio
Institut de Math´ematiques, Universit´e Pierre et Marie Curie, case 247, Tour 46, 5`eme ´etage
4 place Jussieu, F-75252 PARIS CEDEX 05 - FRANCE
§0. Introduction.
La notion de G-fonction a ´et´e introduite par C.L. Siegel en 1929. Dans les ann´ees quatre-
vingts la th´eorie des G-fonctions (`a une variable) a repris une nouvelle force, grˆace aux travaux
de E. Bombieri, D.V. et G.V. Chudnovsky, Y. Andr´e et B. Dwork, qui ont, entre autre, mis
en ´evidence ses liens avec la g´eom´etrie arithm´etique. Un des piliers de cette th´eorie est le
th´eor`eme de Chudnovsky [1, VI] rappel´e ci-dessous. Il joue aussi un rˆole fondamental dans la
th´eorie des s´eries Gevrey de type arithm´etique d´evelopp´ee par Y. Andr´e(1).
Donnons bri`evement quelques d´efinitions. Soient Kun corps de nombres et VKson anneau
des entiers. On appelle G-fonction une s´erie formelle y=PnNanxn`a coefficients dans K,
telle que :
1) il existe L ∈ Kx, d
dx qui annule y:Ly= 0;
2) pour toute immersion K C, la s´erie enti`ere ya rayon de convergence non nul, en tant
que s´erie `a coefficients complexes;
3) il existe une suite de nombres entiers positifs (Nn)nNet une constante Cr´eelle positive
telles que Nnas∈ VKpour tout snet telles que NnCnpour tout nN.
On consid`ere maintenant un op´erateur diff´erentiel
L=
µ
X
i=0
Ai(x)d
dxi
Kx, d
dx.
Pour tout nN, on peut construire une suite d’op´erateurs (Ln)n1telle que Lnest l’unique
op´erateur divisible `a droite par Let de la forme :
Ln=Aµ(x)n
n!d
dxµ+n1
+
µ1
X
i=0
Ai,n(x)d
dxi
,avec Ai,n(x)K[x].
On dit que Lest un G-op´erateur ou un op´erateur de type Gs’il existe une suite de nombres
entiers positifs (Nn)n1et une constante Ceelle positive telles que NnAi,s ∈ VK[x] pour tout
snet i= 0, . . . , µ 1 et telles que NnCnpour tout nN. Le th´eor`eme de Chudnovsky
dit que l’op´erateur minimal qui annule une G-fonction donn´ee est de type G; cela, grˆace `a [8,
13.0] et `a [6], implique le th´eor`eme suivant :
(1) eries Gevrey de type arithm´etique I et II, Pr´epublications de l’Institut de Math´ematiques de Jussieu, Mai et
Octobre 1997, respectivement.
1
2Sur la th´eorie g´eom´etrique des G-fonctions
Th´eor`eme 0.1. L’op´erateur diif´erentiel minimal qui annule une G-fonction donn´ee est `a
singularit´es r´eguli`eres et les exposants en chaque singularit´e sont rationnels.
Dans ce papier nous g´en´eralisons `a plusieurs variables le th´eor`eme de Chudnovsky que
nous venons d’´enoncer (cf. Th. 4.1), dans un contexte plus g´eom´etrique, qui a ´et´e introduit
par Y. Andr´e et F. Baldassarri dans [2]. Nous d´eduisons des r´esultats de [3] une g´en´eralisation
de [8, 13.0] (cf. App. A), qui, avec [5], nous permettra d’obtenir l’analogue `a plusieurs variable
de (0.1).
Nous envisageons cet article comme une contribution `a la construction d’une th´eorie
des E-op´erateurs `a plusieurs variables, obtenus `a partir des G-op´erateurs par transforma-
tion de Fourier partielle, et pour laquelle notre r´esultat devrait ˆetre un outil essentiel. Le
but de cette th´eorie est le d´eveloppement de techniques qui permettent d’obtenir des r´esultats
d’ind´ependance alg´ebrique des valeurs d’une vaste famille de fonctions. On pense, par exemple,
`a la fonction :
f(x, y) = ex+2F1(a, b, c;y),avec a, b, c Q,
qui est somme d’une E-fonction et d’une G-fonction.
Remerciements. L’auteur tient sp´ecialement `a remercier Y. Andr´e pour lui avoir sugger´e de
travailler sur ce sujet et pour son assistance tout le long de la pr´eparation du pr´esent papier.
Elle remercie aussi D. Bertrand pour ses remarques sur le texte et Z. Djadli pour son cyclop´een
travail de correction des fautes de fran¸cais.
Cet article est organis´e comme suit :
§1. Notations
§2. Modules diff´erentiels de type G
§3. G-fonctions
§4. Enonc´e du th´eor`eme principal
§5. emonstration du th´eor`eme (4.1)
Appendice A. R´egularit´e des modules diff´erentiels de type G
Appendice B. Lemme du Wronskien `a plusieurs variables
§1. Notations.
1.1. Soient Kun corps de nombres et VKl’anneau des entiers de K. On utilise la notation
| |vpour une valeur absolue v-adique de Ktelle que v|p, o`u pest un premier de Z, ou pour
une norme qui ´etend la norme archim´edienne de Q. Dans le cas non-archim´edien on normalise
| |vde la fa¸con suivante :
|p|v=p[Kv:Qp]/[K:Q],
o`u Kvest le compl´et´e de Kpar rapport `a | |vet v|p. De fa¸con similaire, dans le cas archim´edien,
on normalise | |ven posant :
|x|v=
|x|1/[K:Q]
Rsi Kv=R
|x|2/[K:Q]
Csi Kv=C.
On remarque que pour ce choix de normalisation la Formule du Produit est valable :
Y
v
|x|v= 1 ,xK.
§2. Modules diff´erentiels de type G3
On note Σfl’ensemble des vtels que v|ppour un certain pZet Σl’ensemble des vtels
que | |v´etend la norme archim´edienne de Q.
1.2. Dans la suite on utilisera les notations suivantes :
X=K-sch´ema lisse de dimension relative d, de type fini et g´eom´etriquement connexe.
F=κ(X)= corps des fonctions rationnelles sur X.
Soient x= (x1, . . . , xd) des coordonn´ees ´etales locales sur Xet Di=
xi, pour i= 1, . . . , d.
On note α= (α1, . . . , αd) les ´el´ements de Ndet pour tout α, β Ndon pose :
|α|=
d
X
i=1
αi, α! =
d
Y
i=1
αi!,
αβαiβipour tout i= 1, . . . , d
α
β=
d
Y
i=1 αi
βi,si αβ
xα=xα1
1· · · xαd
d, Dα=Dα1
1· · · Dαd
d.
On note, enfin, 1iNdle multi-indice ayant toutes les entr´ees nulles sauf la i-`eme ´egale `a 1.
§2. Modules diff´erentiels de type G.
2.1. Soit (M,) un X/K-module diff´erentiel localement libre de rang µ, muni de la connexion
int´egrable . On appelle (M, ) sa fibre au point g´en´erique de X. On observe que, ´etant donn´e
un F/K-module diff´erentiel (M, ), on peut toujours trouver un sch´ema X/K convenable, tels
qu’il existe un X/K-module diff´erentiel (M,) libre muni d’une connexion int´egrable , dont
(M, ) est la fibre au point g´en´erique, et tels que Xadmet des coordonn´ees ´etales globales x:
donc dans la suite on supposera que (M,) est libre sur Xet que Xadmet des coordonn´ees
´etales globales.
Soit eune base de M, telle que :
1
α!(D)αe=eGα,avec GαMµ×µ(O(X)).
Les matrices Gαsont li´ees entre elles par la relation de r´ecurrence :
(2.1.1) Gα+1i=1
αi+ 1 DiGα+G1iGα,pour tout αNdet poue tout i= 1, . . . , d.
D´efinition 2.2. On choisit un sous-scema ouvert Sde Spec(VK)et un S-sch´ema lisse XS,
de type fini, `a fibres connexes et tel que XS×SSpec(K) = X. On note ΣSl’ensemble des
points ferm´es de S. Pour tout vΣS, on consid`ere la norme | |X,v associ´e `a l’anneau local de
XSdans le point g´en´erique de la fibre sp´eciale de XSsur v(2). On pose :
h(M, n, v) = sup
|α|≤n
log+|Gα|X,v ,pour tout vΣS,
(2) Si Xest un sous-sch´ema ouvert de l’espace affine de dimension dsur K, la norme | |X,v est la norme de Gauss
usuelle sur K(x)=κ(X), d´efinie par : Pαaαxα
Pβbβxβv,Gauss
=supα|aα|v
supβ|bβ|v.
4Sur la th´eorie g´eom´etrique des G-fonctions
o`u log+x= log sup(1, x)pour tout xR. On appelle taille de (M,)le nombre suivant :
σS(M) = lim sup
n→∞
1
nX
vΣS
h(M, n, v).
On dit que (M,)est un module diff´erentiel de type Gs’il satisfait la condition de Galoˇckin :
σS(M)<.
On dit qu’un F/K-module diff´erentiel (M, )est de type Gs’il existe un module diff´erentiel
libre (M,)sur un sch´ema X/K convenable tel que (M,)est un module diff´erentiel de type
G.
On appelle rayon de convergence g´en´erique v-adique de (M,)(ou de (M, ))le nombre :
Rv(M) = inf 1,lim inf
|α|→∞ |Gα|1/|α|
X,v ,pour tout vΣS,
et rayon inverse global le nombre :
S(M) = X
vΣS
log+1
Rv(M).
On dit que (M,)v´erifie la condition de Bombieri si S(M)est fini.
Remarque 2.3. On sait (cf. [5]) que h(M, n, v) et Rv(M) sont ind´ependants du choix des
coordonn´ees ´etales xsur Xet ne d´ependent que de la fibre g´en´erique (M, ) de (M,). De
plus Rv(M) est ind´ependant du choix de la base ede M.
De mˆeme, σS(M) et S(M) ne d´ependent que de XSet de (M, ) et ils sont ind´ependants
du choix de xet e. Enfin, les conditions de Galoˇckin et de Bombieri sont ´equivalentes et ne
d´ependent que de la fibre g´eom´etrique de M, donc ne dependent pas du choix de S(cf. [5]).
Par souci de simplicit´e nous donnons ici une d´efinition alg´ebrique de la notion de r´egularit´e
et de la notion d’exposants dans les cas de plusieurs variables. C’est une des d´efinitions donn´ees
dans [3].
Soit Zun diviseur irr´eductible et lisse de X,iZ:Z Xl’immersion ferm´e de Zdans
X,ηZle point g´en´erique de Zet x= (x1, . . . , xd) des coordonn´ees ´etales sur X, telles que
Zest le sous-sch´ema ferm´e d’´equation x1= 0. Puisque l’anneau local OX,ηZde Xen ηZest
un anneau de valuation discr`ete de Favec uniformisant x1, on peut lui associer une valeur
absolue | |X,Z , telle que |x1|X,Z (0,1) et :
OX,ηZ={x∈ F :|x|X,Z 1}.
On pose :
D1=x1
x1
, D2=
x2
,· · · , Dd=
xd
.
Soit C=FD1⊂ F le corps des constantes de D1;Ca degr´e de trascendance d1 sur K, il
est alg´ebriquement clos dans Fet C×⊂ O×
X,ηZ. Soit ˆ
Fle complet´e x1-adique de Fet soit C0
la clˆoture alg´ebrique de Cdans ˆ
F. Alors C0est isomorphe au corps r´esiduel de | |X,Z , il est
une extension alg´ebrique de Cet ˆ
F
=C0((x1)). On note ( ˆ
M, ˆ
) le ˆ
F/K-module diff´erentiel
obtenu de (M, ) par passage au complet´e.
§3. G-fonctions 5
D´efinition 2.4. On dit que (M,)est singulier r´egulier en Zsi le ˆ
F/C0-module diff´erentiel,
obtenu de (ˆ
M, ˆ
)par restriction de aux d´erivations de ˆ
F/C0, est singulier r´egulier dans le
sens de [8, §11], i.e. s’il existe une base ede ˆ
Msur ˆ
Ftelle que :
(D1)e=eH1,avec H1Mµ×µ(C0).
On appelle exposants de (M,)en Zl’image des valeurs propres de H1dans la clˆoture
alg´ebrique de C0modulo Z. On sait (cf. [AB2, App. A et 6.1.3]) qu’ils ne d´ependent pas du
choix de eet sont en fait dans la clˆoture alg´ebrique de Kmodulo Z.
Dans l’Appendice A nous allons donner une d´emonstration du r´esultat suivant :
Corollaire 2.5. Un module diff´erentiel de type Gest `a singularit´es r´eguli`eres et les exposants
en chaque singularit´e sont dans Q/Z.
§3. G-fonctions.
D´efinition 3.1. Soit aααNdune famille de nombres alg´ebriques. On consid`ere les conditions
suivantes :
(G1) pour tout α= (α1, . . . , αd)Nd, il existe une constante r´eelle positive C1telle que les
conjugu´es des aαsont de module inf´erieur `a C|α|
1;
(G2) il existe une constante r´eelle positive C2telle que le d´enominateur commun dans Nde
aα:|α| ≤ nest inf´erieur `a Cn
2.
Soient PXun point ferm´e de Xet ˆ
OX,P le compl´et´e de l’anneau local OX,P de X
en P. Le choix des coordonn´ees ´etales x= (x1, . . . , xd)sur X d´etermine une immersion de
K-alg`ebres diff´erentielles
(3.1.1)
τ:ˆ
OX,P L[[xx(P)]]
f7−PαNd
αf
xα(P) (xx(P))α,
o`u Lest une extension finie de K. On appelle G-fonction en Pun ´el´ement fde ˆ
OX,P , qui
satisfait les conditions suivantes :
(G) les coefficients des τ(f) = PαNdaα(xx(P))αv´erifient les conditions G1) et G2),
(H)fest rationnellement holonome,i.e. le F-espace vectoriel engendr´e par (Dαf)αNdest un
F/K-module diff´erentiel de dimension finie.
Remarque 3.2.
1) La notion de G-fonction est ind´ependante du choix des coordonn´ees ´etales et du corps K,
d’ailleurs, quitte `a ´etendre le corps K, on va supposer que Pest un point K-rationnel et que
x(P) = 0.
2) Un ´el´ement fde ˆ
OX,P est rationnellement holonome si et seulement si la s´erie τ(f) =
PαNdaαxαest rationnellement holonome sur K(x), i.e. le K(x)/K-module diff´erentiel en-
gendr´e par (Dατ(f))αNdest un K(x)-espace vectoriel de dimension finie.
On veut maintenant caract´eriser la propri´et´e (G) de fa¸con plus quantitative; pour cela on
va introduire la notion de taille d’une s´erie formelle :
D´efinition 3.3. Pour une s´erie formelle y=PαNdaαxαK[[x]], on d´efinit la taille de y
de la fa¸con suivante :
σ(y) = lim sup
n→∞
1
nX
vΣfΣ
h(y, n, v)
1 / 27 100%

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