plus récemment, le 4-hydroxynonenal (4-HNE) et les F2-isopros-
tanes. Une autre approche a porté sur la mesure des lipopro-
téines de basse densité (LDL) oxydées dont la présence à des
concentrations importantes chez le patient hémodialysé va de
pair avec l’athérome accéléré et des anticorps anti-LDL oxydées
ont également été mis en évidence. Enfin des marqueurs de l’al-
tération de l’ADN (8-OH guanidine) des dérivés de l’oxydation du
NO et des signes indirects tels qu’une apoptose accrue ont été
également décrits chez ces patients.
En revanche, et bien que les protéines plasmatiques consti-
tuent des cibles électives des oxydants, les marqueurs sélectifs de
l’attaque oxydative des protéines ont été, à ce jour, peu utilisés à
des fins diagnostiques ou de recherche clinique. Nos travaux
visant à une meilleure caractérisation du stress oxydant chez les
patients dialysés ont permis d’individualiser la présence dans le
plasma de ces patients de dérivés de l’oxydation des protéines
que nous avons ainsi baptisés AOPP (Advanced Oxidation Protein
Products) en raison de leur relation étroite avec les AGE (Advan-
ced Glycation Endproducts).
■Les AOPP dans l’inflammation
de l’insuffisance rénale chronique
L’étude du rôle des AOPP dans la dysrégulation immunitaire
associée à l’insuffisance rénale a montré leur présence dès le
stade précoce de l’urémie, leur accumulation au cours de sa pro-
gression en relation étroite avec les marqueurs d’activation
monocytaire (néoptérine et cytokines pro-inflammatoires). Ces
résultats ont été corroborés par l’observation que des AOPP for-
més in vitro (par traitement de l’albumine avec des oxydants
chlorés) activent le métabolisme oxydatif et la production de TNF
par les monocytes et nous ont amenés à proposer que les AOPP
pourraient constituer une nouvelle famille de toxines urémiques
et/ou de médiateurs de l’inflammation. La mise en évidence
d’une relation entre les AOPP et l’activité oxydative des polynu-
cléaires neutrophiles dépendante de la myéloperoxydase sug-
gère que les AOPP pourraient, à l’instar des cytokines, être des
médiateurs de la communication entre polynucléaires et mono-
cytes. Dans cette hypothèse, les polynucléaires neutrophiles, qui
demeurent la source principale de myéloperoxydase, seraient la
source principale des oxydants chlorés responsables de la forma-
tion des AOPP et les monocytes constitueraient la cible privilé-
giée des AOPP via un récepteur qui reste à définir.
D’un point de vue plus fondamental, les oxydants chlorés,
jusque-là considérés comme des espèces microbicides dont la
production est restreinte aux cellules phagocytaires, se sont révé-
lés via leur action sur les protéines capables de moduler la réac-
tion inflammatoire. Ce nouveau concept, selon lequel la base
moléculaire de l’activité délétère des oxydants pourrait impliquer
les produits d’oxydation des protéines, est remarquablement
illustré dans l’inflammation associée à l’urémie.
■Implications du stress oxydant dans
les complications de l’hémodialyse
Comme le soulignent les revues générales données en réfé-
rence le stress oxydant joue un rôle non négligeable voire même
primordial dans les complications de l’hémodialyse. Ceci est parti-
culièrement net pour les complications ayant une dominante
inflammatoire telles que: 1) l’athérome accéléré via l’oxydation
des LDL – dont le rôle pathogène résulte en partie de leur capacité
d’induire l’activation des macrophages – et également via la myé-
loperoxydase dont la présence au sein des lésions athéroma-
teuses a été récemment décrite; 2) l’arthropathie à β2-microglo-
buline qui peut subir des modifications sous l’effet de l’oxydation
comme de la glycation; 3) l’anémie en raison de la très grande
susceptibilité des érythrocytes aux oxydants et de leur importance
dans la lutte anti-oxydante via leur contenu glutathion; 4) et enfin
la malnutrition qui accentue la perte en antioxydants et dont le
stress oxydant qui en résulte constitue une composante majeure.
■Prévention du stress oxydant
et stratégies anti-oxydantes
en hémodialyse
Le stress oxydant chez le patient dialysé met en jeu des com-
posantes liées à l’insuffisance rénale par le biais des toxines uré-
miques et des composantes liées aux circuits de dialyse et
notamment la biocompatibilité des membranes et la qualité du
bain de dialyse. En effet tant les toxines urémiques que le C5a et
le C3a générés par l’hémo-incompatibilité et les endotoxines
résultant de la contamination éventuelle du dialysat sont
capables d’activer la production d’oxydants par les neutrophiles
et les monocytes. La pratique de l’hémodialyse dans des condi-
tions optimales de biocompatibilité et avec un dialysat ultrapur
est une des bases de la prévention du stress oxydant.
Certains procédés de dialyse dite « anti-oxydante » incorpo-
rant de la vitamine E dans le circuit extracorporel (liposomes de
l’hémolipodialyse) ou surtout la membrane sont actuellement
développés. La membrane Excebrane a prouvé son efficacité à
diminuer certains marqueurs du stress oxydant et l’activation des
cellules phagocytaires mais uniquement par rapport aux mem-
branes cellulosiques bio-incompatibles. Les projets d’incorporer
la vitamine E dans des membranes hautement compatibles (au
lieu du cuprammonium) devaient permettre de mieux détermi-
ner l’efficacité de la vitamine E ainsi « greffée » dans la lutte
contre le stress oxydant chez le patient dialysé.
Concernant les thérapeutiques anti-oxydantes proprement
dites les faits suivants décrits dans les revues précitées ont été
observés: la vitamine E exerce un effet bénéfique sur l’anémie et
les accidents cardiovasculaires (SPACE study) ; la vitamine C dont
la perte perdialytique est importante est nécessaire mais com-
porte des risques d’effet pro-oxydant et d’apport d’oxalate; le
glutathion IV réduit le stress oxydant mais de façon modeste et
un essai thérapeutique multicentrique avec un inducteur de glu-
tathion, la N-acétylcystéine est en perspective.
■Conclusion
En conclusion le stress oxydant est une composante majeure
de l’inflammation associée à l’insuffisance rénale chronique et
majorée par l’hémodialyse. Les recherches menées chez les
patients urémiques pour mieux le dépister, en connaître les
session III
Néphrologie Vol. 24 n° 7 2003
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