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Bureau du directeur
POUR DIFFUSION IMMÉDIATE
CNW : code 01
Accès à certains documents d’enquête : le DPCP rappelle les
principes juridiques
Québec, le 21 avril 2016 À la suite des questions soulevées lors de son
passage à la Commission des institutions pour l’étude des crédits 2016-2017,
le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) souhaite informer les
citoyens sur les circonstances qui peuvent amener la diffusion publique
d’information touchant des dossiers d’enquêtes policières judiciarisés et sur les
mesures qui existent pour protéger la tenue des procès.
Les perquisitions
Lorsque les policiers présentent une demande pour obtenir un mandat de
perquisition, ils doivent soumettre au juge une déclaration écrite et
assermentée qui expose leurs motifs justifiant l’émission du mandat. Cet
exposé, qu’on appelle un affidavit, relate habituellement les éléments de
preuve déjà recueillis dans le cadre de l’enquête. Il peut notamment référer à
des déclarations obtenues de témoins, à des observations faites au cours
d’opérations de surveillance ou à des documents saisis à l’occasion de
perquisitions antérieures.
Une fois la perquisition exécutée, les policiers doivent produire au juge une
liste détaillant les éléments de preuve saisis. Le mandat de perquisition,
l’exposé écrit des motifs du policier et la liste des éléments de preuve saisis
font partie du dossier judiciaire. Le processus d’obtention d’un mandat de
perquisition est d’ailleurs considéré comme une procédure judiciaire. Or, la
Cour suprême du Canada a déjà décidé qu’une fois que la perquisition est
exécutée, les documents contenus au dossier judiciaire sont, en règle
générale, publics en raison du principe de la publicité des débats judiciaires.
Ainsi, quiconque se présente au greffe du tribunal peut en prendre
connaissance.
Exceptionnellement, lorsque les policiers obtiennent un mandat de perquisition,
le juge peut ordonner que l’exposé écrit des motifs du policier et la liste des
éléments saisis soient déposés dans une enveloppe scellée au greffe du
tribunal pour en assurer la confidentialité. Cette mesure peut se justifier sur
différents motifs, notamment pour protéger l’identité d’informateur ou pour ne
pas nuire à l’enquête en cours. Le cas échéant, une fois la perquisition
exécutée, quiconque peut s’adresser à un juge pour obtenir l’ouverture des
enveloppes scellées afin de prendre connaissance des motifs du policier et de
la liste des documents saisis. Hormis les personnes qui ont fait l’objet de la
perquisition, ce sont habituellement les médias qui s’adressent au juge pour
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avoir accès à ces documents. La poursuite peut s’opposer, mais elle devra
démontrer que la mise sous scellé des documents demeure absolument
nécessaire pour ne pas compromettre l’enquête en cours ou l’identité d’un
informateur. Le cas échéant, les documents seront « caviardés », c’est-à-dire
que seulement les passages qui doivent demeurer confidentiels seront noircis.
Les documents ainsi caviardés seront remis aux journalistes et à la personne
qui a fait l’objet de la perquisition si celle-ci en a fait la demande. Ils seront
aussi accessibles à quiconque se présente au greffe du tribunal pour en
prendre connaissance.
De plus, les individus ou les organismes qui font l’objet d’une perquisition ne
sont pas nécessairement privés du matériel saisi. Par exemple, une
perquisition peut viser des documents ou des échanges auxquels les
expéditeurs et les destinataires, voire même des tiers, conservent un accès par
voie informatique. Autrement dit, à l’ère de l’informatique, on ne peut penser
que les policiers et les procureurs seront nécessairement les seuls à avoir
accès aux éléments saisis à la suite d’une perquisition jusqu’à ce qu’ils soient
divulgués à l’ensemble des accusés, voire déposés en preuve au procès.
La preuve divulguée aux accusés
La divulgation de la preuve aux personnes accusées est généralement assortie
d’un engagement de confidentialité signé par leurs avocats, le cas échéant, ou
par eux-mêmes lorsqu’ils se représentent seuls. Les avocats qui
contreviendraient à semblables engagements pourraient engager leur
responsabilité déontologique devant le Barreau. L’accusé qui contrevient à cet
engagement ne pourra être poursuivi que si nous pouvons démontrer hors de
tout doute raisonnable qu’il a commis, ce faisant, une infraction criminelle (par
exemple, qu’il avait l’intention spécifique d’entraver le cours de la justice). Il est
arrivé que des personnes accusées remettent la preuve ainsi divulguée aux
médias et que le DPCP s’adresse aux tribunaux pour tenter d’en interdire la
publication. Compte tenu de l’équilibre qui doit être recherché entre la
protection du droit à un procès équitable, la liberté de presse et le droit du
public à l’information, seulement les éléments les plus préjudiciables comme
des aveux d’un accusé à la police ou les déclarations de témoins (qui auraient
permis aux témoins d’ajuster leurs versions avant leur témoignage) ont pu faire
l’objet d’une interdiction de publication.
Les témoins et les personnes accusées
Rien n’empêche un témoin de raconter publiquement son expérience et les
événements qu’il a constatés et rapportés aux policiers. De même, il est arrivé
que des personnes accusées choisissent de livrer leur expérience personnelle
aux médias, voire même admettent avoir adopté des comportements illégaux
impliquant des tiers. Dans ce cas, sauf en ce qui a trait aux éléments de preuve
incriminant ces tiers au point de causer un risque de préjudice réel et sérieux à
l’équité de leurs procès, il est difficile d’empêcher la publication de tels
éléments compte tenu du principe de la liberté de presse et de la liberté
d’expression.
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Les procédures parallèles antérieures au procès criminel
Les faits pertinents à une enquête peuvent aussi faire l’objet de procédures
parallèles qui peuvent précéder le début du procès criminel; par exemple,
lorsque la personne accusée fait aussi l’objet d’une poursuite civile fondée sur
les mêmes faits. Ce fut plus particulièrement le cas au cours des travaux de la
Commission Charbonneau. Le DPCP y est intervenu pour obtenir des
ordonnances de non-publication chaque fois qu’il estimait que la publication
des témoignages ou d’autres éléments de preuve risquaient de nuire au
déroulement des enquêtes en cours ou à l’équité d’éventuels procès. Encore
là, le principe de la publicité des procédures favorisait la publicité alors que la
confidentialité demeurait l’exception. Ce faisant, plusieurs faits qui seront mis
en preuve dans le cadre des procès pour les dossiers qui ont intéressé la
Commission Charbonneau ont déjà été rendus publics, la Commission ayant
refusé d’en interdire la publication estimant que le risque sérieux et réel de
compromettre l’équité des procès n’était pas démontré.
Par ailleurs, même lorsqu’un tribunal interdit la publication d’informations ou
d’éléments présentés en preuve, les journalistes, les personnes qui assistent
aux audiences judiciaires ou celles qui consultent les dossiers judiciaires
peuvent en prendre connaissance et en parler avec des tiers sans que cela ne
viole l’ordonnance. En effet, à moins que la preuve ait été présentée à huis clos
ou qu’elle ait été déposée sous scellé, mesures exceptionnelles compte tenu
du principe du caractère public des procédures judiciaires, l’ordonnance de
non-publication en interdit seulement la publication et la diffusion médiatique,
mais n’empêche pas les gens d’en parler entre eux.
La protection de l’équité des procès
Lorsque le DPCP évalue si une intervention est nécessaire pour préserver
l’équité du procès alors que des éléments d’information obtenus dans le cadre
d’une enquête sont rendus publics, il doit tenir compte de certains principes
développés par la jurisprudence en matière d’ordonnance de non-publication :
la publicité est la règle et la confidentialité l’exception;
la poursuite assume le fardeau de démontrer un risque de préjudice réel et
sérieux à l’équité du procès;
dans l’appréciation de ce risque, il faut notamment tenir compte de la
période de temps qui s’écoulera entre la publicité et la tenue du procès;
lorsque le procès doit se tenir devant un juge seul, il sera très difficile, voire
impossible, d’obtenir une ordonnance de non-publication;
même lorsque le procès doit se tenir devant jury, il faut tenir compte des
mesures que le tribunal pourra prendre pour s’assurer que l’équité du
procès ne sera pas compromise par la publication préalable d’éléments de
preuve qui pourraient être préjudiciables : les questions qui pourront être
posées aux candidats jurés dans le cadre du processus de sélection pour
s’assurer de leur impartialité, les ordonnances de non-publication que le
juge pourra rendre avant ou pendant le procès, les directives que le juge
adressera au jury, notamment de juger uniquement sur la preuve
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admissible qui leur sera présentée et de s’abstenir de rechercher des
informations concernant la cause sur l’Internet ou dans les médias
sociaux.
Par ailleurs, l’accusé qui souhaiterait obtenir un arrêt des procédures et éviter
la tenue de son procès devant jury, en raison de la publicité préalable de la
preuve ou des faits qui lui sont reprochés, assume aussi un très lourd fardeau.
Il devra démontrer que l’équité de son procès est irrémédiablement
compromise malgré les sauvegardes prévues dans le processus de sélection
du jury et les directives que pourra rendre le juge pour s’assurer que les jurés
ne se basent que sur la preuve qui leur sera présentée au cours du procès.
L’histoire judiciaire du Québec contient plusieurs exemples de procès très
médiatisés devant jury qui ont dû être recommencés suite à une ordonnance
de nouveau procès prononcée par la Cour d’appel en raison d’une erreur de
droit commise par le juge. Or, même si toute la preuve de la poursuite avait été
étalée publiquement au cours du premier procès, et dans certains cas même si
des éléments de preuve jugés inadmissibles avaient été légalement rendus
publics après la fin du premier procès, cela n’a pas empêché la tenue d’un
nouveau procès en tout respect du droit de l’accusé à un procès équitable.
Le Directeur des poursuites criminelles et pénales
Le DPCP fournit, au nom de l'État, un service de poursuites criminelles et
pénales indépendant, contribuant à assurer la protection de la société, dans le
respect de l'intérêt public et des intérêts légitimes des victimes. Pour en savoir
davantage : www.dpcp.gouv.qc.ca.
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Source :
Me Jean Pascal Boucher
Porte-parole
Directeur des poursuites criminelles et pénales
418 643-4085
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