Chimiothérapie des cancers colo-rectaux métastatiques
98 Médecine Nucléaire - Imagerie fonctionnelle et métabolique - 2005 - vol.29 - n°2
L’étude américaine publiée en 2004
[11] comportait 3 bras de traitement
administrés à 795 patients : un bras
IFL [5], un bras FOLFOX 4 [8] et un
bras associant l’Oxaliplatine à 85 mg/
m² et l’Irinotecan à 200 mg/m² au J1
toutes les 3 semaines. Compte tenu
de la supériorité du FOLFOX 4 sur
l’IFL en terme de réponse objective,
de survie sans progression et de sur-
vie globale, l’étude a été interrompue.
L’augmentation de la survie globale
dans le bras FOLFOX 4 peut être ex-
pliqué par le fait que 60% des patients
de ce bras de traitement ont reçu une
deuxième ligne de chimiothérapie à
base d’irinotecan alors que 24% des
patients du bras IFL ont reçu une chi-
miothérapie à base d’oxaliplatine.
THÉRAPIES CIBLÉES
!Des études in vitro ont permis de
mettre en évidence au sein même du
tissu tumoral des sites moléculaires
susceptibles d’être des cibles spéci-
fiques de traitement des CCR métas-
tatiques. Le but de ce type de théra-
peutique est le blocage de la crois-
sance cellulaire tumorale. Deux clas-
ses de thérapies ciblées ont été in-
troduites dans le traitement des
CCR métastatiques : les anticorps anti-
EGF Récepteur et les inhibiteurs
angiogéniques (anticorps anti-VEGF).
Cetuximab
!Le cetuximab (Erbitux®) est un an-
ticorps monoclonal humanisé d’ad-
ministration intraveineuse qui inhibe
le récepteur de l’Epidermal growth
factor (EGF) de par sa forte affinité
avec le domaine extra-cellulaire du
récepteur. Le récepteur à l’EGF est un
récepteur transmembranaire de type
I doté d’une activité tyrosine kinase,
exprimé par les cancers colorectaux
dans 60 à 80% des cas. Une étude de
phase II a montré qu’une association
irinotecan-cetuximab chez 121 pa-
tients atteints d’un CCR métastatique
en progression avec un schéma de
5FU + irinotecan permettait d’obte-
nir 19% de taux de réponse objective
[12]. Afin de déterminer si l’efficacité
du cetuximab était due à son asso-
ciation avec l’irinotecan ou à son ac-
tivité intrinsèque, les mêmes auteurs
ont traité 60 patients par l’anticorps
seul et le taux de réponse objective
était de 10% [13]. Ces résultats ont
mené à la réalisation d’une étude ran-
domisée chez des patients lourde-
ment prétraités et dont la tumeur ex-
primait le récepteur de l’EGF [14]. La
randomisation était de 2/1 entre
cetuximab + irinotecan (218 patients)
et cetuximab seul (111 patients). Le
schéma d’irinotecan administré dé-
pendait de celui précédemment reçu
avant la progression de la maladie et
pouvait être de 180 mg/m² toutes les
2 semaines, de 350 mg/m² toutes les
trois semaines ou de 125 mg/m² tou-
tes les semaines. Le cetuximab était
administré à 400 mg/m² à la première
cure puis à 250 mg/m² aux cures sui-
vantes. Le traitement combiné indui-
sait un meilleur taux de réponse ob-
jective, 22,9 versus 10,8% (P=0,0074)
et de contrôle de la maladie (réponse
+ stabilité), 55,5 versus 32,4%
(P=0,0001). La survie sans progres-
sion était augmentée de façon signi-
ficative, 4,1 versus 1,5 mois (P<0,00
1). La survie globale n’était pas statis-
tiquement différente entre les deux
groupes : 8,6 versus 6,9 mois (P=0,48).
La toxicité la plus caractéristique du
cetuximab était une pseudo-acné
(80% dans chaque groupe). La toxi-
cité induite par le traitement combiné
n’était pas supérieure à celle induite
par un traitement d’irinotecan seul.
Le Bevacizumab (Avastin®)
!Le bevacizumab est un anticorps
anti VEGF qui bloque l’angiogenèse.
Son association avec le 5FU-AF ou le
5FU-AF + irinotecan a été évaluée dans
deux essais de phase III en 1ère ligne
métastatique. L’essai rapporté par
Hurwitz et al. a randomisé 813 pa-
tients entre un traitement par IFL +
bevacizumab et un traitement par IFL
+ placebo [15]. La dose de bevacizu-
mab était de 5 mg/kg tous les 15 jours.
A progression, les patients sous
bevacizumab pouvaient continuer à
recevoir cet anticorps en association
avec un traitement de deuxième li-
gne. Les patients randomisés dans le
bras IFL + bevacizumab avaient un
taux de réponse significativement
supérieur aux patients randomisés
dans le bras IFL + placebo : 44,8
versus 34,8% (P=0,004). La survie sans
progression et la survie globale
étaient significativement améliorées :
10,6 versus 6,2 mois (P<0,001) et 20,3
versus 15,6 mois (P<0,001), respecti-
vement. La principale toxicité du
bevacizumab était une hypertension
artérielle de grade 3 chez 11% des
patients versus 2,3% dans le groupe
placebo. Kabbinavar et al., ont com-
paré dans un essai de phase III un trai-
tement par 5FU-AF associé au
bevacizumab à un traitement par 5FU-
AF seul [16]. La survie sans progres-
sion était significativement meilleure
dans le bras bevacizumab + 5FU-AF
que dans le bras 5FU-AF seul : 9,2
versus 5,5 mois (P<0,001). En revan-
che, le taux de réponse objective et
la survie globale n’étaient pas
significativement différents entre les
2 bras de traitement.
Récemment, l’association du bevaci-
zumab au FOLFOX comparée au
FOLFOX seul a fait la preuve de son
efficacité en 2e ligne de chimiothéra-
pie après un traitement à base
d’irinotecan [17].
STRATÉGIES THÉRAPEUTIQUES
ACTUELLES ET PERSPECTIVES
Faut-il faire une bithérapie en
première ligne métastatique ?
!Les résultats des études précédem-
ment citées s’accordent en faveur des
bithérapies par Oxaliplatine ou CPT11
associés au 5FU-AF avec un gain de
20 à 30% en terme de taux de réponse
objective et une amélioration de 2 à
3 mois pour la survie sans progres-
sion (5,6). Il est cependant possible
qu’une chimiothérapie de 2e ou 3e li-
gne systématique après une mono-
thérapie par 5FU-AF soit aussi efficace
avec une toxicité plus faible, un coût
moins élevé et moins de contrainte
pour les patients. En effet, la méta-ana-