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ou au mode d’activité (sur une ou plusieurs salles), le manque d’implication du chirurgien est
apparu comme un facteur majeur dans la démobilisation des équipes (p< 1,1 10—5).
Discussion. — Bien que son utilité soit reconnue par les chirurgiens pour la sécurité des patients,
l’utilisation de la C/L reste encore limitée. Son contenu doit s’adapter aux conditions de tra-
vail et au type de chirurgie. Cette réflexion doit être orchestrée par la commission médicale
d’établissement à qui le législateur a donné un rôle majeur dans la conduite de la politique de
gestion des risques.
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Introduction
Le rapport de la Banque Mondiale de 2002 sur les activités
chirurgicales à travers le monde et plus particulièrement
sur les complications inhérentes à ce type d’activité, avait
montré que la moitié de celles-ci pourraient être évitées.
À partir de ces travaux, l’Organisation mondiale de la santé
(OMS) a publié, en 2008, des recommandations de pratiques
susceptibles d’améliorer la sécurité de la prise en charge
chirurgicale des patients. Ces recommandations ont abouti
à la rédaction d’une checklist (C/L) «sécurité au bloc
opératoire »qui a été testée dans huit hôpitaux à travers le
monde. Elle y a démontré son efficacité avec une réduction
significative de la morbimortalité, et ce, quel que soit le
niveau de développement des pays concernés. Dans l’étude
phare qui a lancé la mondialisation de la pratique de la C/L,
le taux de mortalité était passé de 1,5 à 0,8 % et le taux de
complication de 11 à 7 % [1]. Depuis d’autres études [2—6]
ont confirmé cette tendance, ce qui conduisit la Haute
Autorité de Santé (HAS) à imposer, dans le cadre de la certi-
fication des établissements, la mise en place dans les blocs
opératoires, d’une C/L «à la franc¸aise »qu’elle a élaborée
(Annexe A). Si le caractère obligatoire de la démarche a
assuré sa diffusion dans presque tous les blocs opératoires
franc¸ais, cette démarche garantit-elle pour autant une
utilisation optimale de l’outil se traduisant in fine par une
diminution significative de la morbimortalité postopéra-
toire. Nous nous proposons dans cet article de présenter les
résultats d’une enquête effectuée, en juillet 2010, auprès
de chirurgiens orthopédistes membres de l’organisme de
gestion des risques de la spécialité, Orthorisq. Elle concer-
nait le ressenti des professionnels face à ce nouvel outil et
visait en priorité à rechercher les difficultés auxquelles ils
pouvaient se trouver confrontés tant du point de vue de sa
compréhension que de son mode d’emploi.
Matériel et méthode
Un questionnaire (Annexe B) a été envoyé par mail aux
8771 médecins adhérents des organismes de gestion de
risques reconnus par la HAS et dont les missions sont définies
à l’article D. 4135-5 code de la Santé Publique. Ce question-
naire était composé exclusivement de questions fermées
avec, pour certaines, la possibilité de réponses multiples.
Un chapitre portait sur le mode et les conditions
d’exercice des chirurgiens ainsi que sur l’état de certifica-
tion des établissements. Un chapitre concernait la manière
dont était utilisée au quotidien la C/L ainsi que les limites de
la procédure telles qu’elles étaient ressenties par le chirur-
gien. En conclusion, les chirurgiens étaient appelés à donner
leur sentiment sur l’utilité générale de la procédure et sur
la nécessité ou non de la faire évoluer.
Les adhérents ont eu un mois pour retourner leur ques-
tionnaire avant d’être analysés. Les analyses statistiques ont
été effectuées à l’aide du logiciel Sigmastat. La comparaison
des moyennes s’est effectuée à l’aide d’un test de Student.
En cas de distribution non normale, les calculs statistiques
ont utilisé un test de Mann Whitney. La comparaison de deux
populations a été effectuée à l’aide d’un test de Chi2,en
appliquant les corrections de Yates pour les petits effectifs.
Une valeur de p< 0,05 a été considérée comme statistique-
ment significative.
Résultats
Parmi les 1900 réponses obtenues (Tableaux 1—7), 599
(31,5 %) provenaient de chirurgiens orthopédistes,
soit 40 % des praticiens membres d’Orthorisq (1495 au
1er juillet 2010). Soixante-dix-sept pour cent des répondants
exerc¸aient dans une structure libérale et 42,5 % travaillaient
régulièrement sur deux salles d’opération ou plus, facteur
considéré, a priori, comme limitant pour une bonne réali-
sation de la checklist. Tous les chirurgiens ayant répondu
avaient mis en place la C/L dans leur bloc opératoire. Cinq
cent trente-six chirurgiens (89,5 %) déclaraient déléguer
la réalisation de la C/L à l’infirmière de bloc opératoire
(IBODE), mais y participaient personnellement pour 416
(69,4 %). En revanche, 170 (28,4 %) n’y participaient jamais.
Enfin, un suivi régulier de la C/L n’avait été organisé que
dans 77 structures (12,8 %). Alors que sa réalisation est
obligatoire pour la certification des établissements depuis
le 1er janvier 2010, l’accompagnement nécessaire ne semble
toujours pas avoir été mis en place et 27,5 % des chirurgiens
répondants estimaient ne pas avoir rec¸u le soutien de
l’équipe médicochirurgicale pour implémenter la procé-
dure. De même, environ 40 % soulignaient les difficultés
qu’ils rencontraient habituellement pour réunir l’ensemble
des acteurs au moment du temps de partage, «time
out »des anglosaxons. Si aucune de ces difficultés n’était
Tableau 1 Lieu d’exercice et nombre de salles utilisées.
CH/CHU 122 1 salle 344
Cliniques privées 463 2 salles 224
PSPH 14 Plus de 2 salles 31