
en France, par exemple, les dépenses de prestations sociales (hors santé) sont passées
d'environ 19,4 % du PIB en 1974 à 25,3 % en 1981 (INSEE)
Entrant dans les années 1980, l’Europe mais aussi d'autres régions occidentales connaissent une
crise idéologique : le tournant néolibéral s’impose progressivement. L’État-providence est
remis en question : les gouvernements, sous l’influence des idées libérales, prônent la réduction
de l’intervention étatique, l’allègement des dépenses publiques et le retour au marché comme
moteur central de l’organisation sociale. En conséquence, dans plusieurs pays, les priorités
changent : les politiques sociales sont revues à la baisse, les prestations sont conditionnées ou
restreintes, l’accent est mis sur incitation au travail (workfare) plutôt que sur l’assistance
universelle.
Aujourd’hui, l’État-providence semble traverser une crise plus profonde, philosophique et
structurelle. Ce ne sont plus seulement les contraintes budgétaires ou la conjoncture
économique qui sont en cause, mais l’ensemble des transformations sociales, démographiques
et économiques qui remettent en question sa pertinence. La mondialisation, le développement
rapide du numérique et les crises sanitaires, comme la pandémie de COVID-19, ont créé de
nouvelles formes de vulnérabilité, avec une précarisation de l’emploi, des inégalités croissantes,
une exclusion sociale renforcée et des mutations profondes du travail. Ces évolutions révèlent
les limites des mécanismes traditionnels de protection sociale. Ainsi, les crises de l’État-
providence ne sont pas seulement historiques : elles perdurent aujourd’hui, confrontées
aux mutations économiques, sociales et technologiques.
Le Maroc illustre, dans son modèle de développement, le rôle central de l’État social comme
pilier du progrès économique et de la justice sociale. Depuis les années 2000, le pays a intensifié
ses efforts pour renforcer la protection sociale, en adoptant une série de mesures structurantes.
Parmi elles, on peut citer la loi n°65-00 portant Code de la Couverture Médicale de Base (CMB)
en 2002, le lancement du Régime d’Assistance Médicale (RAMED) destiné à la population
défavorisée en 2008, ainsi que l’adoption de la loi relative à l’Assurance Maladie Obligatoire
(AMO) des travailleurs non-salariés en 2018. Ces initiatives montrent la volonté progressive de
l’État de couvrir l’ensemble de la population et de consolider le socle de protection sociale.
Après la pandémie de 2020 et sous l’impulsion des Directives Royales, le Maroc a amorcé une
nouvelle ère de protection sociale, marquée par l’adoption de la loi-cadre n°09.21 relative à la
protection sociale. Cette réforme poursuit quatre objectifs principaux : l’élargissement de la
couverture médicale obligatoire, la généralisation des allocations familiales, l’extension de