Classe de 1eÌ re STMG 1

Telechargé par Louane Robin
Classe de 1ère STMG 1Lycée des Glières - Annemasse
Mme Parcollet
2023-2024
Élève : ……………………………………………………………………………………………
Le roman et le récit au Moyen-âge au XXIème siècle
Texte 1 : ABBE PREVOST, Manon
Lescaut « Les retrouvailles à Saint-
Sulpice »
Texte 2 : ABBE PREVOST, Manon
Lescaut « Le récit de la mort de Manon »
Texte 3 : EMILE ZOLA, La Bête
Humaine, « Le meurtre de Séverine »
Lecture cursive : La vie devant soi, Romain Gary ou Salina, Laurent
Gaudé
La littérature d’idée du XVIème au XVIIIème siècle
Texte 4 : FRANCOIS RABELAIS,
Gargantua, Chapitre XIV
Texte 5 : FRANCOIS RABELAIS,
Gargantua, Chapitre XXIII
Texte 6 : MICHEL DE MONTAIGNE,
Essais, « De l’éducation des enfants »
Lecture cursive : Micromégas, Voltaire ou Chagrin d’école, Daniel
Pennac
La Poésie du XIX au XXème siècle
Texte 7 : ARTHUR RIMBAUD, Les
Cahiers de Douai, « Vénus
Anadyomène »
Texte 8 : ARTHUR RIMBAUD, Les
Cahiers de Douai, « Le Dormeur du
Val »
Texte 9 : TRISTAN CORBIERE, Les
Amours Jaunes, « Le Crapaud »
Lecture cursive : Neige, Maxence Fermine ou Lait et Miel, Rupy Kaur
Le théâtre du XVIIème au XXIème siècle
Texte 10 : JEAN-LUC LAGARCE, Juste
la fin du monde, Prologue
Texte 11 : JEAN-LUC LAGARCE, Juste
la fin du monde, Tirade de Suzanne
Texte 12 : Bernard- Marie Koltès,
Roberto Zucco, « II. Le meurtre de la
mère »
Lecture cursive : Incendies, Wajdi Mouawad ou Cendrillon, Joël
Pommerat
Texte 1 :
ABBE PREVOST, Manon Lescaut « Les retrouvailles à Saint-
Sulpice »
Il était six heures du soir. On vint mavertir, un moment après mon retour, quune dame
demandait à me voir. Jallai au parloir sur-le-champ. Dieux ! quelle apparition surprenante !
j’y trouvai Manon. C’était elle, mais plus aimable et plus brillante que je ne lavais jamais vue.
Elle était dans sa dix-huitième ane. Ses charmes surpassaient tout ce quon peut décrire.
C’était un air si fin, si doux, si engageant, l’air de lAmour même. Toute sa figure me parut un
enchantement.
Je demeurai interdit à sa vue, et ne pouvant conjecturer quel était le dessein de cette
visite, jattendais, les yeux baissés et avec tremblement, quelle sexpliquât. Son embarras fut,
pendant quelque temps, égal au mien, mais, voyant que mon silence continuait, elle mit la
main devant ses yeux, pour cacher quelques larmes. Elle me dit, d’un ton timide, quelle
confessait que son infidélité méritait ma haine ; mais que, sil était vrai que jeusse jamais eu
quelque tendresse pour elle, il y avait eu, aussi, bien de la dureté à laisser passer deux ans sans
prendre soin de minformer de son sort, et quil y en avait beaucoup encore à la voir dans l’état
elle était en ma présence, sans lui dire une parole. Le désordre de mon âme, en l’écoutant,
ne saurait être exprimé.
Elle sassit. Je demeurai debout, le corps à demi tourné, nosant lenvisager directement.
Je commençai plusieurs fois une réponse, que je neus pas la force dachever. Enfin, je fis un
effort pour m’écrier douloureusement : Perfide Manon ! Ah ! perfide ! perfide ! Elle me répéta,
en pleurant à chaudes larmes, quelle ne prétendait point justifier sa perfidie. Que prétendez-
vous donc ? m’écriai-je encore. Je prétends mourir, répondit-elle, si vous ne me rendez votre
cœur, sans lequel il est impossible que je vive. Demande donc ma vie, infile ! repris-je en
versant moi- même des pleurs, que je m’efforçai en vain de retenir.
Texte 2 :
ABBE PREVOST, Manon Lescaut « Le récit de la mort de Manon»
Pardonnez si j’achève en peu de mots un récit qui me tue. Je vous raconte un malheur qui
n’eut jamais d’exemple ; toute ma vie est destinée à le pleurer. Mais, quoique je le porte sans
cesse dans ma mémoire, mon âme semble reculer d’horreur chaque fois que j’entreprends de
l’exprimer.
Nous avions passé tranquillement une partie de la nuit. Je croyais ma chère maîtresse
endormie, et je n’osais pousser le moindre souffle, dans la crainte de troubler son sommeil. Je
m’aperçus, dès le point du jour, en touchant ses mains, qu’elle les avait froides et tremblantes ;
je les approchai de mon sein pour les échauffer. Elle sentit ce mouvement, et, faisant un effort
pour saisir les miennes, elle me dit d’une voix faible qu’elle se croyait à sa dernière heure.
Je ne pris d’abord ce discours que pour un langage ordinaire dans l’infortune, et je n’y
répondis que par les tendres consolations de l’amour. Mais ses soupirs fréquents, son silence
à mes interrogations, le serrement de ses mains, dans lesquelles elle continuait de tenir les
miennes, me firent connaître que la fin de ses malheurs approchait.
N’exigez point de moi que je vous décrive mes sentiments, ni que je vous rapporte ses
dernières expressions. Je la perdis ; je reçus d’elle des marques d’amour au moment même
qu’elle expirait : c’est tout ce que j’ai la force de vous apprendre de ce fatal et déplorable
événement.
Mon âme ne suivit pas la sienne. Le ciel ne me trouva sans doute point assez
rigoureusement puni ; il a voulu que j’aie traîné depuis une vie languissante et misérable. Je
renonce volontairement à la mener jamais plus heureuse.
Je demeurai plus de vingt-quatre heures la bouche attachée sur le visage et sur les mains
de ma chère Manon. Mon dessein était d’y mourir ; mais je fis réflexion, au commencement
du second jour, que son corps serait exposé, après mon trépas, à devenir la pâture des bêtes
sauvages. Je formai la résolution de l’enterrer, et d’attendre la mort sur sa fosse. J’étais déjà si
proche de ma fin, par l’affaiblissement que le jeûne et la douleur m’avaient causé, que j’eus
besoin de quantité d’efforts pour me tenir debout. Je fus obligé de recourir aux liqueurs fortes
que j’avais apportées ; elles me rendirent autant de force qu’il en fallait pour le triste office
que j’allais exécuter. Il ne m’était pas difficile d’ouvrir la terre dans le lieu où je me trouvais ;
c’était une campagne couverte de sable. Je rompis mon épée pour m’en servir à creuser, mais
j’en tirai moins de secours que de mes mains. J’ouvris une large fosse ; j’y plaçai l’idole de
mon cœur, après avoir pris soin de l’envelopper de tous mes habits pour empêcher le sable de
la toucher. Je ne la mis dans cet état qu’après l’avoir embrassée mille fois avec toute l’ardeur
du plus parfait amour. Je m’assis encore près d’elle ; je la considérai longtemps ; je ne pouvais
me résoudre à fermer sa fosse. Enfin, mes forces recommençant à s’affaiblir, et craignant d’en
manquer tout à fait avant la fin de mon entreprise, j’ensevelis pour toujours dans le sein de la
terre ce qu’elle avait porté de plus parfait et de plus aimable. Je me couchai ensuite sur la fosse,
le visage tourné vers le sable ; et, fermant les yeux avec le dessein de ne les ouvrir jamais,
j’invoquai le secours du ciel, et j’attendis la mort avec impatience.
Texte 3 :
EMILE ZOLA, La Bête Humaine, « Le meurtre de Séverine »
Jacques, sans se retourner, de sa main droite, tâtonnante en arrière, avait pris le couteau. Et, un
instant, il resta ainsi, à le serrer dans son poing. Était-ce sa soif qui était revenue, de venger des
offenses très anciennes, dont il aurait perdu l’exacte mémoire, cette rancune amassée de mâle en
mâle, depuis la première tromperie au fond des cavernes ? Il fixait sur Séverine ses yeux fous, il
n’avait plus que le besoin de la jeter morte sur son dos, ainsi qu’une proie qu’on arrache aux autres
(…) .
Embrasse-moi, embrasse-moi…
Elle renversait son visage soumis, d’une tendresse suppliante, découvrait son cou nu, à
l’attache voluptueuse de la gorge. Et lui, voyant cette chair blanche, comme dans un éclat
d’incendie, leva le poing, armé du couteau. Mais elle avait aperçu l’éclair de la lame, elle se rejeta
en arrière, béante de surprise et de terreur.
Jacques, Jacques… Moi, mon Dieu ! Pourquoi ? pourquoi ?
Les dents serrées, il ne disait pas un mot, il la poursuivait. Une courte lutte la ramena près du
lit. Elle reculait, hagarde, sans défense, la chemise arrachée.
Pourquoi ? mon Dieu ! pourquoi ?
Et il abattit le poing, et le couteau lui cloua la question dans la gorge. En frappant, il avait
retourné l’arme, par un effroyable besoin de la main qui se contenait : le même coup que pour le
président Grandmorin, à la même place, avec la même rage. Avait-elle crié ? il ne le sut jamais.
À cette seconde, passait l’express de Paris, si violent, si rapide, que le plancher en trembla ; et elle
était morte, comme foudroyée dans cette tempête.
Immobile, Jacques maintenant la regardait, allongée à ses pieds, devant le lit. Le train se
perdait au loin, il la regardait dans le lourd silence de la chambre rouge. Au milieu de ces tentures
rouges, de ces rideaux rouges, par terre, elle saignait beaucoup, d’un flot rouge qui ruisselait entre
les seins, s’épandait sur le ventre, jusqu’à une cuisse, d’où il retombait en grosses gouttes sur le
parquet. La chemise, à moitié fendue, en était trempée. Jamais il n’aurait cru qu’elle avait tant de
sang. Et ce qui le retenait, hanté, c’était le masque d’abominable terreur que prenait, dans la mort,
cette face de femme jolie, douce, si docile. Les cheveux noirs s’étaient dressés, un casque
d’horreur, sombre comme la nuit. Les yeux de pervenche, élargis démesurément, questionnaient
encore, éperdus, terrifiés du mystère. Pourquoi, pourquoi l’avait-il assassinée ? Et elle venait
d’être broyée, emportée dans la fatalité du meurtre, en inconsciente que la vie avait roulée de la
boue dans le sang, tendre et innocente quand même, sans qu’elle eût jamais compris.
Mais Jacques s’étonna. Il entendait un reniflement de bête, grognement de sanglier,
rugissement de lion ; et il se tranquillisa, c’était lui qui soufflait. Enfin, enfin ! il s’était donc
contenté, il avait tué ! Oui, il avait fait ça. Une joie effrénée, une jouissance énorme le soulevait,
dans la pleine satisfaction de l’éternel désir. Il en éprouvait une surprise d’orgueil, un
grandissement de sa souveraineté de mâle. La femme, il l’avait tuée, il la possédait, comme il
désirait depuis si longtemps la posséder, tout entière, jusqu’à l’anéantir. Elle n’était plus, elle ne
serait jamais plus à personne.
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