See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/48270989 Modélisation de trajectoires de véhicules de véhicules en virage par analyse de données expérimentales – application à la sécurité routière Article · January 2011 Source: OAI CITATIONS READS 2 1,273 2 authors: Daucher Dimitri Abdourahmane Koita Université Gustave Eiffel University of Paris-Est 1 PUBLICATION 2 CITATIONS 21 PUBLICATIONS 50 CITATIONS SEE PROFILE All content following this page was uploaded by Abdourahmane Koita on 16 October 2014. The user has requested enhancement of the downloaded file. SEE PROFILE 19ème Congrès Français de Mécanique Marseille – Août 2009 Modélisation de trajectoires de véhicules en virage par analyse de données expérimentales – Application à la sécurité routière Dimitri DAUCHER1, Abdourahmane KOITA2 Laboratoire Central des Ponts et Chaussées (LCPC) 58, boulevard Lefebvre – 75732 Paris Cedex 15 – France 1 [email protected] ; 2 [email protected] Résumé : Nous proposons une modélisation de trajectoires (loi horaire d’un vecteur position, vitesse, accélération) de véhicules en virage à partir de données expérimentales pertinentes. Basée sur la méthode des nuées dynamiques notre méthode discrimine d’abord plusieurs classes de trajectoires. Puis elle associe un modèle à chaque classe par une méthode d’approximation de loi. Ce travail sera complété par la mise en œuvre d’une méthode fiabiliste permettant d’associer un niveau de sécurité à chaque classe. Abstract : This paper presents a stochastic analysis of experimental trajectories in bend within a suitable mathematical framework. One will make a classification of the experimental trajectories in order to identify class. Then, we characterize a process governing each class. This work is a precondition to the construction of an indicator of risk. Mots-clés : Modélisation de trajectoires de véhicules en virage, analyse statistique, méthode des nuées dynamiques, densité spectrale de puissance, densité de probabilité, processus stochastique, développement de densités de probabilité sur des bases fonctionnelles 1.Introduction Malgré une amélioration significative de la sécurité routière ces dernières années, on a encore, en France en 2007, un bilan d’accidents de la route très insatisfaisant (4838 tués et plus de 100 000 blessés). Bien évidemment le bilan est encore plus lourd à l’échelle mondiale [1]. D’après une étude du LAB une meilleure gestion des difficultés en virage pourrait permettre d’éviter environ 15% des accidents de véhicules légers en France. Parvenir à appréhender la notion de risque routier en virage est une question ouverte très importante. Plus précisément, il s’agit de proposer un cadre scientifique adéquat permettant d’évaluer quantitativement des niveaux de risque pour un conducteur circulant à bord d’un véhicule léger sur une portion d’une route donnée comportant un virage. C’est à cette difficile question que ce papier va tenter d’apporter des premiers éléments de réponse. Pour cela nous nous intéressons d’abord à la notion de trajectoire de véhicule en virage. Elle sera présentée en détails au second paragraphe. Notons simplement pour le moment qu’il s’agit d’une fonction continue de IR+ dans IRn qui à chaque instant associe dans un plan les coordonnées du centre de gravité du véhicule, les 2 composantes de sa vitesse et les 2 composantes de son accélération. Ces grandeurs constituent un indicateur des comportements effectifs des véhicules et de leur conducteur dans leur contexte, donc de l’usage des infrastructures par les véhicules, permettant ensuite d’appréhender les risques routiers. Les trajectoires de véhicules ne peuvent pas être vues uniquement comme la résultante d’un modèle mécanique (de type dynamique du véhicule[10]). En effet, d’autres facteurs interviennent dans leur réalisation (comportement du conducteur, problème de visibilité, interactions avec la route, …). Ajoutons que pour être opérationnels ces modèles nécessitent de connaître précisément les paramètres qui les gouvernent (masse du véhicule, hauteur du centre de gravité, …). Ce nouveau point faible de ce type de modélisation peut s’avérer gênant (voir rédhibitoire) si l’on a en tête des applications avancées en sécurité routière qui nécessitent de connaître ces 1 19ème Congrès Français de Mécanique Marseille – Août 2009 données en temps réel. C’est pourquoi nous proposons de construire des modèles mathématiques pertinents et simples aptes à simuler correctement diverses catégories de trajectoires pratiquées par un panel représentatif d’usagers sur un virage donné. Là est le principal objectif du travail présenté ici. Pour le mener à bien nous sommes parti de la connaissance – sur un virage donné – d’une famille F de trajectoires représentatives en situation de conduite naturelle ([2],[3]). Nous nous sommes limité ici aux trajectoires réalisées par temps sec. Toutefois la démarche pourrait également s’appliquer à des trajectoires en conditions météorologiques plus critiques. Les données utilisées ont été recueillies à l’aide de dispositifs spécifiques (systèmes développés par le LCPC) d’une part et d’un protocole expérimental d’autre part. Le paragraphe suivant aborde notamment ce point. Le paragraphe 3 traite des questions de modélisation. Enfin, la dernière partie est consacrée aux perspectives en terme d’évaluation du risque routier. 2.Trajectoires, dispositif de mesure et recueil de données La trajectoire d’un véhicule durant un intervalle de temps T = [0, τ ] est la résultante de l’interaction entre ce véhicule, son conducteur et l’infrastructure routière. Elle peut être définie par la fonction continue déterministe suivante : Φ : T → IR 6 • • •• •• t Φ (t) = x(t), y(t), x(t), y(t), x(t), y(t) (1) Cette fonction associe à chaque instant t la position dans le plan du centre de gravité du véhicule ainsi que ses dérivées premières (vitesse latérale et vitesse longitudinale) et secondes (accélérations latérales et accélérations longitudinales).Il ne semble toutefois pas très judicieux de modéliser la notion de trajectoire par une fonction déterministe. Un même conducteur circulant à bord d’un même véhicule sur une même route dans les mêmes conditions (trafic, météo, état du conducteur, …) ne reproduira pas exactement deux fois la même trajectoire au sens de (1). C’est pourquoi nous préférons modéliser les trajectoires par un processus stochastique de la forme : U : IR x Ω → IR 6 • • •• •• (t, ω ) Ψ (t, ω ) = x , y, x , y, x , y (t, ω ) (2) Abordons maintenant le problème de la mesure des trajectoires de véhicule sous circulation, point de départ de notre étude. L’opération de recherche Métrologie du Trafic et des Trajectoires (MTT) [2] du LCPC a permis de développer et de mettre en œuvre différents outils de mesure de trajectoires locales sur des zones réputées dangereuses. Parmi ceux-ci les dispositifs embarqués à bord de véhicules instrumentés sont les plus performants tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif. Nous avons donc utilisé une Renault Clio (du LCPC) équipée d’un système informatique d’acquisition d’événements placé dans le coffre, couplé à des capteurs précis des paramètres cinématiques (GPS centimétrique et centrale inertielle) avec une fréquence d’acquisition de 100 Hz (figure 1). Pour des raisons de sécurité, mais aussi pour assurer une bonne répétabilité des mesures avec ce véhicule lourdement instrumenté, il a été décidé d’opérer sur un circuit fermé : une partie de la piste de glissance du centre de Nantes du LCPC, constituée d’un virage similaire à ceux que l’on peut rencontrer sur routes nationales (figure 1). L’objectif de l’expérimentation était d’observer sur ce virage et avec cette voiture, plusieurs centaines de trajectoires se rapprochant le plus possible de celles qui seraient pratiquées par des usagers si ce virage était situé sur une route ouverte. Pour cela nous avons fait appel à un panel de conducteurs auquel ont été données des consignes à respecter (conduite apaisée, conduite rapide, respect de règles de sécurité,...). Ce panel comprenait 23 personnes travaillant sur le site de Nantes du LCPC, 2 19ème Congrès Français de Mécanique Marseille – Août 2009 sélectionnées selon plusieurs critères :âge, sexe, nombre d’années écoulées depuis l’obtention du permis de conduire, et goût personnel pour la conduite. Figure 1 : système d’acquisition de trajectoires et vue aérienne du parcours choisi Pour davantage d’informations au sujet du protocole expérimental ayant permis de recueillir les données de notre étude, nous renvoyons le lecteur intéressé à [11]. Au final, sur le parcours choisi, nous avons obtenu 230 échantillons de trajectoires exploitables. Bien entendu, les mesures recueillies sont des observations discrètes de réalisations de différents processus stochastiques vectoriels de la forme de l’équation 2. 3.Analyse des observations et modélisation proposée Avant d’aborder le problème de la modélisation, il est nécessaire de classer les trajectoires recueillies en sous-ensembles homogènes. En effet, les trajectoires observées pour des conducteurs ou des consignes différents sont des réalisations de processus stochastiques différents. Il n’est même pas sûr a priori - que l’on puisse rattacher à un même processus les trajectoires associées à un même couple conducteur-consigne. Parmi les raisons à cela, on peut citer par exemple l’effet d’accoutumance. Nous avons donc à classer 230 échantillons de trajectoires de la forme : ε c, p = { c,p c, p k k x , y , x c, p k { où : I c,p = 1,2,..., N c, p y , c,p k , x c, p k , y c,p k }k∈ I c, p } , N c,p ∈ IN c est un entier naturel qui désigne un numéro de conducteur 1 ≤ c ≤ 23 p est un entier naturel qui désigne un numéro de trajectoire 1 ≤ p ≤ 10 (A chaque conducteur est associé 10 trajectoires) c, p c, p k x et y x et y c, p k c, p k k l’instant t c, p k sont les observations des coordonnées du centre de gravité du véhicule à l’instant t k+ 1 − c, p ; enfin t = 10 k c, p k ; désignent les observations de la vitesse latérale et de la vitesse longitudinale du véhicule à c, p c,p k+ 1 k x et y désignent les observations de l’accélération latérale et de l’accélération −2 ∀k ∀c ∀p c, p t et t = 0 ∀ c ∀ p longitudinale du véhicule à l’instant c, p t k c, p 0 3 19ème Congrès Français de Mécanique ε c, p Marseille – Août 2009 est donc l’ensemble des observations discrètes relatives à la pème trajectoire réalisée par le cème conducteur ayant participé à l’expérience. Le problème à résoudre est alors de trouver un entier naturel K tel que l’on puisse répartir la famille {ε } en K sous-famille statistiquement similaires et interpréter c, p c, p ces familles comme des réalisations discrètes de K processus stochastiques de lois différentes de la forme : U k : IR × Ω → IR 6 (t, ω ) U k (t, ω ) k = 1,..., K (3) Nous avons résolu ce problème en utilisant la méthode des nuées dynamiques, dont nous nous contentons de rappeler brièvement le principe général en 4 grandes étapes. Pour davantage d’informations sur cette méthode on peut se reporter à ([4],[6]). 1re étape : On répartit la population en K classes contenant n1, n2, n3,….nk éléments, selon des critères de tri fixés par l’utilisateur en fonction des propriétés de la population considérée. On considère le noyau Nj j = 1,…,k, de chaque classe, défini comme l’élément moyen de la classe (calcul d’une moyenne géométrique). 2ème étape : On calcule D( ε c, p , Nj) pour tout élément ε c, p et pour tout noyau Nj (où D désigne une distance ; on pourra par exemple choisir la distance euclidienne). 3ème étape : On alloue chaque élément ε c, p au noyau Nj le plus proche, tel que D( faible des distances à l’ensemble des noyaux. La classe Cj est donc définie par : ε c, p , Nj) est la plus C j = {ε c , p ; D(ε c , p , N j ) ≤ D(ε c , p , N r ) ∀ r ≠ j } 4ème étape : On cherche les nouveaux noyaux des classes Cj définies à l’étape 3, puis on répète les étapes 2,3 et 4 jusqu’à ce qu’un critère de convergence ([4], [5]) soit vérifié. La convergence ultime est bien sûr obtenue lorsque la composition du noyau est invariante d’une itération à la suivante. En pratique, après plusieurs essais de classification selon cette méthode, un choix de 4 classes s’est révélé optimal par rapport au critère de convergence. Concrètement, une classe correspond à un profil de vitesse moyen sur le parcours (parmi 4) et un profil de positionnement latéral sur la chaussée (parmi 2). Chaque classe identifiée est alors assimilable à un ensemble de réalisations discrètes d’un processus stochastique de la forme (3). Pour la clarté de ce qui va suivre, nous considérons une classe donnée et notons U le processus stochastique associé à cette classe, que nous cherchons à caractériser. Par construction ce processus n’est pas stationnaire. La non stationnarité de U provient à la fois de la non stationnarité de t m U (t) et de t L U (t) Nous effectuons une transformation de U pour se ramener au cas d’un processus stationnaire à l’ordre 2, ce qui est nécessaire car en dehors de ce cadre on est démuni d’outils mathématiques performants. Pour cela nous calculons, à partir des échantillons expérimentaux disponibles, une estimation de la variance matricielle du processus U : VU : IR → Mat IR (6,6) t VU (t) = IE[ (U(t) - m U (t)) (U(t) - m U (t)) T ] (4) où t m U (t) est la fonction qui à chaque instant t associe la moyenne temporelle m U (t) du processus U. Par construction VU (t) est une matrice symétrique et définie positive pour tout réel t. Elle admet donc, pour tout réel t une décomposition de Cholesky de la forme : VU (t) = L U (t) L U (t) T 4 19ème Congrès Français de Mécanique Marseille – Août 2009 LU est la racine carrée de Cholesky de VU. Notons que LU est inversible pour tout t car VU est définie 0 positive pour tout t. Considérons alors le processus U défini par : 0 U(t) = L-U1 (t) (U(t) - m U (t)) (5) 0 C’est un processus stationnaire à l’ordre 2 (par construction, on a déjà E[ U(t)] = 0 0 0 et V(U(t)) = I 6 ). 0 De plus nous avons montré numériquement que Cov( U(t ), ( U(t )) ne dépend que de l’écart t2-t1. 1 2 Dans la suite nous supposerons que ce processus est ergodique. En inversant (5) nous obtenons le modèle (6) qui permettra de simuler des réalisations de U. 0 U(t) = L U (t) U(t) + m U (t) (6) 0 Il reste maintenant à caractériser le processus U : nous devons à présent estimer et modéliser les densités de probabilité de chacune de ses composantes. De même il est nécessaire d’estimer sa DSP matricielle (densité spectrale de puissance). En ce qui concerne l’approximation des densités de probabilités pi i = 1,2,…,6 nous avons choisi d’effectuer un développement sur une base d’Hermite [9] : 2 p i (x) = où { h α } α ∈ IN désigne la base ( L 2 (IR), f(x)dx, ; ) avec f(x) = e 2 -x / 2 2π e -x / 2 + ∞ 2π ∑ q h (x) α =0 α α orthonormée (7) d’Hermite sur l’espace de Hilbert : et ϕ 1 , ϕ 2 = ∫ ϕ 1ϕ 2 f ; q α = ∫ p̂ i h α ; p̂ i est une estimée IR IR de pi La figure 2 montre une estimée de la densité spectrale de puissance (courbe de gauche) et une estimée de la densité de probabilité avec son approximation (courbes de droite). 2 0.5 1 0.45 --- cible ex ac te --- approximée théorique (Hermite) 0.4 0 0.35 -1 0.3 -2 0.25 -3 0.2 -4 0.15 -5 0.1 -6 -7 -2 0.05 -1 0 1 DS P ac c élération longitudinale 0 -6 -4 -2 0 2 4 6 Dens ité probabilité ac c élération longitudinale 2 Figure 2 : estimée de la DSP et la Densité de Probabilité pour le paramètre accélération longitudianle 5 19ème Congrès Français de Mécanique Marseille – Août 2009 Le processus U peut alors être simulé via (6). En effet, ( t m U (t) ; t L U (t) ) sont deux 0 fonctions déterministes connues propres à une classe de trajectoires. U peut être simulé à partir de sa DSP par une méthode classique. 4.Conclusion et perspectives A partir d’une analyse de familles représentatives de trajectoires de véhicule en virage, nous avons proposé des modèles de trajectoires. A chaque famille correspond un modèle mathématique (6) facilement implémentable et de bonne qualité. Ce travail sera prochainement complété par l’utilisation de la théorie de la fiabilité [7] afin d’associer à chacune des classes de trajectoires identifiées une probabilité de défaillance, qui constituera un premier indicateur de risque. Remerciements Les travaux présentés ici font partie du programme de recherche MTT (Métrologie du Trafic et des Trajectoires) du LCPC. Les auteurs tiennent à remercier tout particulièrement F. Peyret et M. Ortiz pour la mise à disposition du véhicule instrumenté et leur aide conséquente dans le recueil des données expérimentales à la base de cette étude. Références [1] World Mortality Database. WHO Mortality statistics. World Health Organization, 2004. [2] http://operationmtt.free.fr/ [3] P. OLIVERO, B. JACOB, D. DAUCHER, Glossaire de l’opération Métrologie du Trafic et des Trajectoires (MTT). [4] J.P. NAKACHE, J. CONFAIS, Approche pragmatique de la classification, Technip, 2005 [5] A. KOITA, D. DAUCHER, Stochastic Analysis of vehicle trajectories in bend : toward a risk indicator construction, 10th International Conference on Structure and Reliability ICOSSAR, Osaka, Japan, 2009 (accepté) [6] M. BARDOS, Analyse discriminante, Dunod 2001. [7] M. LEMARE, Fiabilité des structures couplage mécano-fiabiliste statique, Lavoisier 2005. [8] C. SOIZE, Méthodes mathématiques en analyse du signal, Masson, 1993. [9] Y. THOMAS, Signaux et systèmes linéaires, Masson, 1994. [10] J.P. BROSSARD, Dynamique du véhicule Modélisation des systèmes complexes, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 2006. [11] D. DAUCHER, B. JACOB, A. KOITA, Trajectoires de véhicules et construction d’indicateurs de rique routier, Congrès International ATEC-ITS France, Versailles, France, Février 2009. [12] V. PUGACHEV, Théorie des probabilités et statistique mathématique, MIR, 1982. 6 View publication stats