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NRP col mars 2014 lire et écrire la poésie

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MARS 2014
lettres
collège
Nouvelle Revue Pédagogique
N° 637 / 8,20 € / ISSN 1636–3574
NRP
Des compétences
pour lire et écrire
la poésie
Séquences
X Fables à lire et à écrire
6e
X Paysages poétiques,
paysages intérieurs
5e
X La poésie engagée,
toujours actuelle
3e
…découvrir
…lire et analyser
Comprendre l’auteur
et le contexte d’une façon
claire et accessible
pour les élèves
S’approprier le texte
et en comprendre les enjeux
• Une biographie sous forme
d’interview fictive
• Le contexte et les repères
historiques illustrés par une frise
• Une présentation vivante
des personnages
• Des explications et encadrés
culturels directement accessibles
dans les marges
• Des ouvertures nombreuses vers
d’autres formes d’art grâce au
dossier central d’analyse d’images
• Des pauses lecture et des lectures
transversales (QCM, questionnaires de compréhension,
accompagnement vers l’expression)
…approfondir
et prolonger
• Des axes d’analyse pour approfondir le genre et le thème de l’œuvre
• Une lecture supplémentaire
pour le plaisir
nrP
Conformément aux dispositions sur le droit d'auteur
(Code de la Propriété Intellectuelle), la reproduction et
la représentation de tout ou partie de ce numéro de la NRP
notamment sur les sites web contributifs, les blogs, sont
strictement interdites et passibles de sanctions pénales et civiles
N°637
sommaire
Nouvelle Revue Pédagogique
Collège / MARS 2014
NOUVEAUTÉ 2013
16
Dossier
Le travail sur la poésie
et les compétences
Par Jean-Michel Zakhartchouk
Toutes les fiches
à télécharger au format word sur
le site pour les abonnés numériques.
Adaptables aux besoins des élèves.
Actualité
4
Livres
6
Pédagogie
8
spectacles
Par Carole Guidicelli
Séquences pédagogiques
9
collèges d’ici
20
10
Par Édith Wolf
Par Anne Remlinger
Par Alexandre Winkler
cinéma
Par Marie-Laure Guétin
11
Histoire
12
Lire au cDI
13
30
Par Alain Barbé
Par Christine Bruner
Le carnet d’écriture
Par Édith Wolf
d’écrivains
14 Maisons
Par Adeline Pringault-Leguy
Les
+ numériques
38
séquence 1 6e
Fables à lire et à écrire
Par Grégory Michel
séquence 2 4e
Paysages poétiques,
paysages intérieurs : comment
les lieux permettent d’exprimer
les émotions
Par Jérôme Dewasch
séquence 3 3e
Fiches pédagogiques
48
Étude de la langue
6e 5e 4e 3e
Construire La ponctuation
pour construire le sens
Par Pascale Elissondo
57
Analyse filmique 6e 5e
59
Entraînement
au brevet 3e
La Belle et la Bête
de Jean Cocteau (1946)
Par Marie Pierre Lafargue
« Ballade de celui qui chanta dans
les supplices » de Louis Aragon
Par Jean-Michel Zakhartchouk
La poésie engagée,
toujours actuelle
Par Jean-Michel Zakhartchouk
63
Latin 4e
Un vieux Romain chatouilleux
Par Anne Sinha
Au fil de la revue, vous pourrez exploiter les ressources multimédia suivantes*, disponibles sur
le site NRP dans l’espace « Ressources abonnés ». Rendez-vous sur http://www.nrp-college.com.
En partenariat avec l’INA
Corrigés, bibliographies,
documents complémentaires, etc.
Fichiers audio
Vidéo
Iconographie
* Certaines de ces ressources sont réservées aux abonnés numériques (abonnés papier + numérique ou 100 % numérique).
mars 2014
NRP COLLÈGE
1
NRP
Nouvelle Revue Pédagogique
RENCONTRE NRP
Ne pas donner
sa langue au chat
Jeux et stratégies pour l’étude
de la grammaire au collège
et au lycée
« Partager avec de jeunes esprits le bonheur de lire, écrire ensemble
des histoires, disséquer un petit texte sont autant de défis que le professeur
de français a l’habitude de relever, avec souvent un vrai plaisir pédagogique.
Il lui est plus difficile de transmettre son goût pour la langue, les finesses
de l’orthographe, les subtilités de la grammaire.
Comment aborder ces questions ? Pourquoi a-t-on si souvent le sentiment que
ça ne fonctionne pas, que les acquis sont à reprendre tous les ans ? Peut-on
trouver des stratégies, des détours, pour rendre les cours de langue plus
efficaces ? Plusieurs personnalités d’horizons différents répondront
à ces questions : des professeurs, un écrivain de l’Oulipo, ces gymnastes du
langage, une spécialiste des neurosciences qui fera un point sur les dernières
connaissances concernant l’apprentissage chez les ados et, enfin,
des professionnels de la Bibliothèque nationale de France.
Autant d’approches différentes et originales, hors des sentiers battus,
au secours de la grammaire.
»
Yun Sun Limet, directrice de la rédaction
Claire Beilin-Bourgeois, conseillère pédagogique
LE 5 MARS 2014
PROGRAMME
DE 14H À 17H
À LA BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE
QUAI FRANÇOIS MAURIAC
75013 PARIS
Chaque intervention sera suivie d’un échange avec le public.
Des bonbons aux épinards ?
Quelques considérations cognitives sur l’incorporation
du jeu dans l’enseignement
Par Alex Cristia
« Décoder » : pour une vision d’ensemble
du système grammatical au collège
Par Marianne Zingraff
Enseigner la langue au lycée :
des pistes pour un enseignement problématique
Par Edith Wolf
Des fonds oulipiens conservés
ou en dépôt à la Bibliothèque de l’Arsenal
Par Claire Lesage
L’ouvroir de littérature potentiel :
un gros potentiel pour l’étude de la langue
Par Hervé Le Tellier
Présentation du Candide enrichi :
le multimédia comme chemins de lecture
Par Françoise Juhel
Inscription recommandée
à l’adresse [email protected]
Nombre de personnes limité
NRP
www.nrp-mag.com
Copyright Eric Sempé/BnF
Architecte D. Perrault, Copyright ADAGP, Paris, 2014
Édito
Compétences et poésie, a priori
Yun Sun Limet
Directrice
de la rédaction
Éditeur : Nathan, 25 av. P. de Coubertin
75013 Paris
Directrice de la rédaction : Yun Sun Limet
Conseillère pédagogique :
Claire Beilin-Bourgeois
Directeur de la publication : Catherine Lucet
Directeur délégué : Françoise Fougeron
Responsable d’édition : Annie Chouard
Révision : Eva Baladier
Assistante d’édition Web : Alexandra Guidal
Fabrication : Lucile Davesnes-Germaine
Iconographie : Laure Penchenat
Marketing/Diffusion : Marielle Bignos,
Catherine Coat, Évelyne Delcroix.
Impression : NIL, Allée Louis Blériot,
58500 Clamecy
Création de la couverture : Christophe Billoret
Création des pages intérieures : Élise Launay
Réalisation maquette : Alinéa, route de
Gallardon 28130 Yermenonville
Publicité : Mistral Media, Directeur
commercial : Luc Lehéricy ; Directeur de la
publicité : David Bichot, 365 rue de Vaugirard
75015 Paris. Tél. : 01 40 02 99 00
Partenariats : Christophe Vital-Durand.
Tél. : 01 45 87 52 83
Code article : 111627
N° d’édition : 101 97 362
Dépôt légal : mars 2014
Commission paritaire : 0714T83332
Abonnement 1 an, France (5 numéros) :
39 € ; DOM/TOM : 51 € ; France (5 numéros et
5 suppléments) : 65,50 € ; DOM/TOM : 78,50 €
– Abonnement 1 an papier + numérique
(5 numéros et 5 suppléments) : 67,50 € ;
DOM/TOM : 80,50 € – Abonnement 100 %
numérique à partir de 19 € sur
www.nrp-college.com – Numéro vert :
0800 032 032 – Abonnement pour la Suisse,
EDIGROUP SA, [email protected] –
Abonnement pour la Belgique, Edigroup Sprl,
email : [email protected] – ISSN
1636-3574 – Prix au n° : 8,20 €
Certains exemplaires sont accompagnés
d’une offre d’abonnement.
ces deux mots semblent n’avoir pas grand-chose en commun.
L’un renvoie au savoir-faire, à l’efficacité, l’autre est de l’ordre
de la création, du geste libre. Sans doute le professeur de
français est l’enseignant qui fait face le plus souvent à ce
double registre. Et c’est aussi la singularité et le prix de ce
métier. Les séquences de ce numéro vous proposent d’aborder
fables, paysages intérieurs ou force de l’engagement pour dire,
lire, maîtriser les références culturelles, écrire.
« Vous demandez pourquoi ma poésie
Ne parle pas du songe, des feuilles
Des volcans de mon pays natal
Venez voir le sang dans les rues »,
écrivait le Chilien Pablo Neruda. Ces vers du triste temps
de la guerre d’Espagne résonnent encore, dans les rues
d’aujourd’hui, proches ou lointaines. Pour écrire ces mots,
il faut maîtriser la langue de manière intime, la compétence
a valeur de création, de poésie.
C’est aussi vers ces questions autour de l’étude de la langue
que nous vous invitons le 5 mars prochain à la Bibliothèque
nationale de France pour la rencontre NRP de l’année.
Des chercheurs, écrivains et enseignants nous proposeront
des retours d’expérience, des réflexions et propositions
sur ce sujet. Retrouvez ci-contre le programme de la
rencontre.
Et puisque le printemps est là, celui des poètes, qu’il soit aussi
celui de l’épanouissement des élèves… et de leurs professeurs !
Crédits photographiques
Couverture : FOTOLIA / Lynea ; 4 ht d : Éditions Nathan ; 4 ht g : Éditions PUF, 2013 ; 5 : Éditions
Cheyne ; 6 : DR ; 7 : BIS / Ph. Coll. Archives Larbor ; 8 : DR/ Compagnie Emilie Valantin ; 9 : FOTOLIA
/ Pavel Losevsky ; 11 : BIS / Ph. Coll. Archives Larbor ; 13 : DR/Maison J. Du Bellay ; 14 : DR / Maison
J. Du Bellay ; 16 : PLAINPICTURE / Frank Baquet; 17 : BIS / Ph. Coll. Archives Nathan ; 19 : ARTCOMART
/ Victor Tonelli, Conception electro acoustique et vidéo Wilfred Wendling, acteur Nicolas Senty ; 20 :
BIS/Ph. Jeanbor © Archives Bordas- Félix Lorioux-D.R. ; 22 : BIS / Ph. Coll. Archives Larbor ; 24 : BIS /
Ph. Coll. Archives Nathan ; 26 : Photo © Collection Musée Jean de La Fontaine, Château-Thierry / Coll.
Archives Sejer,Marc Chagall© Adagp, Paris 2014 ; 30 : FOTOLIA / Keller ; 33 : BIS / © Archives Larbor ;
34 : photo : AKG-images, Henri Rivière © Adagp, Paris 2014 ; 38 : CORBIS / Demotix-Fernando lavoz ;
40 : BIS / Ph. J. Bottet © Archives Larbor ; 41 : BIS / © Archives Larbor ; 44 : BIS / Ph. Oronoz © Archives
Larbor, Pablo Picasso © Succession Picasso 2014 ; 45 : DR / Photo : Annie Chouard ; 64 : BIS / Ph. Scala
© Archives Larbor.
mars 2014
NRP COLLÈGE
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Livres
Actu
Essai
Christian Chellebourg,
Les Fictions de jeunesse
PUF, 2013, 234 p., 25 €
Du bon usage des fictions
jeunesse
La lecture de l’ouvrage de Christian Chelebourg montre
qu’un livre agaçant, parfois naïf, peut se révéler aussi passionnant et utile.
Il est agaçant lorsqu’il évoque Bourdieu uniquement pour
condamner « l’aristocratisme austère des professeurs » ; il
est naïf lorsqu’il règle des comptes avec la culture légitime
en affirmant que la littérature jeunesse est une véritable
littérature alors même qu’il ne cesse de glorifier la capacité des fictions jeunesse à passer d’un « support » à l’autre,
fournissant ainsi la preuve que le texte est secondaire.
Mais l’ouvrage apporte des éléments précieux souvent
absents de la formation des professeurs.
L’introduction et le premier chapitre étudient la relation
du lecteur à l’œuvre ; de façon synchronique autour des
notions d’immersion fictionnelle, d’identification, de
répertoire de thèmes, puis diachronique par un parallèle
avec le roman populaire et en montrant la diversification
progressive des supports, du livre aux jeux sur écran.
Les chapitres suivants examinent le fonctionnement des
récits eux-mêmes, offrant une alternative à l’étude de
texte. Des analyses de structures et une réflexion sur le
fonctionnement de la fiction peuvent être menées avec
une véritable ambition intellectuelle. On fera ainsi étudier les dispositifs qui permettent l’entrée dans l’aventure
(rencontre d’un personnage, jeu, cataclysme), la notion
d’intertextualité, sous la forme de l’emprunt, de la parodie,
de l’adaptation, de la continuation ou de l’interpolation,
les représentations des enfants et des adultes (avec une
interrogation des valeurs), celles des garçons et des filles.
La réflexion sur fiction et vérité s’orientera autour de la
critique interne (par l’humour et l’autoparodie, pour le
« gore » par exemple), des moyens de faire croire à la
féerie par la précision de l’écriture (Tolkien), des motifs
(« l’aléthiomètre » d’une héroïne de Philip Pullman), d’une
réflexion directe sur le rôle du conteur d’histoire par rapport à la vérité.
Dernier et non moindre mérite de l’ouvrage : il constitue
une vaste et intelligente bibliographie commentée.
4
NRP COLLÈGE
mars 2014
Outil
pédagogique
6e/5e
Gilles Barraqué,
Une histoire à toutes
les sauces, Nathan,
2014, 120 p.
Le goût d’écrire
Concilier plaisir de lecture, jeux d’écriture, apprentissage
et réflexion, c’est le pari gagné par Gilles Barraqué avec
cet ouvrage qui donne en peu de pages un nombre quasi
infini de propositions et de pistes.
Le titre énonce le principe du livre : une « histoire » (une
anecdote simple), rapportée de façon neutre, est ensuite
mise à diverses « sauces » correspondant à des variations
de tonalité, de point de vue, de contexte, de forme, etc.,
chaque texte du livre correspondant à une recette réalisée. On reconnaît le principe des Exercices de style de
Raymond Queneau (à qui l’auteur rend hommage) mais
adapté de façon à être utilisable en classe.
C’est là le mérite particulier du livre. La notion de « sauce »
permet de faire comprendre à un élève jeune celle de
variation sans être obligé d’entrer dans des explications
parfois impossibles. Quant aux divers types de variations,
ils sont donnés par des titres parlants et un classement en
catégories. On trouve ainsi dans les Recettes selon l’humeur : à la sauce qui exagère (un peu), à la sauce bobard,
à la sauce au vinaigre, à la sauce à l’eau de rose ; dans
les Recettes du monde : à la sauce africaine, à la sauce
martienne, à la sauce sorcière ; dans les Recettes expérimentales : à la sauce à l’envers, à la sauce puzzle, crème
d’e (sur le modèle des Revenentes de Perec).
Les usages pédagogiques potentiels de ce petit livre sont
aussi nombreux que réjouissants : lecture préparée à voix
haute de certains textes ; initiation à des notions stylistiques comme le point de vue (Recettes personnelles) ou
le pastiche (à la sauce fantasy) ; travail sur le lexique (à
la sauce grecque, à la sauce aux gâteaux) ; et, bien sûr,
écriture de type atelier.
Pour faire écrire les élèves, il est possible de conserver
la même « histoire » de base et le nom d’une recette
proposée par l’auteur que l’on interprétera à sa façon.
Mais l’ouvrage permet aussi de stimuler l’inventivité :
en imaginant des catégories et des recettes, une autre
« histoire de base », en faisant retrouver une « histoire sans sauce » à partir d’une variation réalisée.
Un livre de recettes pour réussir à coup sûr vos préparations de cours d’expression écrite en 6e et 5e.
David Dumortier,
Des oranges pour ma
mère, 44 pages
Jean-Pascal Dubost
et Katy Couprie,
C’est corbeau, 61 pages
David Dumortier,
Cligne-Musette, 41 pages
Collection « Poèmes
pour grandir », éditions
Cheyne, 5 €
La poésie fait-elle
grandir ?
Éditer de la poésie contemporaine ; maintenir le savoirfaire de l’imprimeur ; concevoir le livre comme un objet
qui signifie par chacun de ses éléments : texte, maquette,
images ; être fidèle à un lieu symboliquement fort, c’est le
pari tenu par les éditions Cheyne, installées au Chambonsur-Lignon depuis 1979.
Si Matin brun de Frank Pavloff, apologue antitotalitaire,
a connu un succès mérité, on connaît moins les textes
poétiques que propose son éditeur : recueils contemporains écrits en français, traductions, revues annuelles. La
collection « Poèmes pour grandir » montre que la littérature jeunesse n’a pas forcément pour but de combler
des attentes stéréotypées mais peut initier au plaisir de la
surprise et de l’écart, donc à la littérature. Trois ouvrages
constituent un ensemble cohérent en permettant un passage du récit à la poésie.
Des oranges pour ma mère, de David Dumortier, raconte
le retour de prison d’une mère du point de vue d’un
enfant. Les sensations, les rêveries et les visions intérieures constituent la matière du texte que trament
images et métaphores et que donne à voir une illustration consubstantielle à l’écriture. Chercher les passages
et les images qui résistent à une première lecture et les
soumettre à des hypothèses peut constituer une initiation à l’interprétation littéraire.
Avec C’est corbeau, de Jean-Paul Dubost, qui présente
une suite de moments partagés par le poète avec un
corbeau qu’il a recueilli, on peut travailler sur le rapport
entre titres, textes et images, et réfléchir à la notion de
récit et de poème.
Cligne-Musette, de David Dumortier, recueil de courts
textes drôles, montre le travail poétique à l’œuvre dans
la surmotivation des mots (« Fée / On lui dit fais ! / Et elle
le fait / C’est aussi simple que cela. »). Belle initiation à
la dimension connotative de l’effet poétique, qui peut
donner lieu à des imitations. Les collages de Martine
Mellinette se prêtent à l’écriture de textes inspirés par
leur fantaisie désuète.
À lire
aussi
De façon intempestive, voici des livres à lire
aussi, encore en mars 2014, même s’ils ont
été primés en 2013…
Nouvelles
Livres
Poésie jeunesse
Actu
Alice Munro, Les Lunes de Jupiter,
« Points » Seuil, 358 p., 7,40 €.
Prix Nobel de Littérature
2013 pour cette auteure de
nouvelles. Le genre et l’écriture
de l’écrivain canadien le
méritent. Les Français sont peu friands
de textes courts, voici une belle manière
de se rattraper. Les Lunes de Jupiter sont
un ensemble de portraits familiaux et
familiers qui oscillent entre le souvenir et le
présent, gens simples de l’amérique rurale,
milieu que la narratrice a quitté mais qui la
constitue, et auquel elle rend ici un hommage
vrai, nostalgique et joyeux.
Roman
Richard Ford, Canada, éditions
de L’Olivier, 478 p., 22,50 €.
Prix Fémina étranger pour un
autre écrivain anglo-saxon,
américain cette fois mais signant
un magnifique Canada… Un souffle d’écriture
parcourt la plaine céréalière tout comme les
parkings de voitures d’occasion. Le narrateur,
sur la fin de sa vie, raconte les quelques
années particulières de son adolescence où il
s’est retrouvé, jeune américain gentil et bon
élève, déscolarisé, livré à lui-même dans un
milieu décalé du saskatchewan… Passage de
frontière. Passage de vie.
Roman
Pierre Lemaître, Au revoir là-haut,
Albin Michel, 568 p., 22,50 €.
Prix Goncourt. C’est un
livre « grand public », mais
qui respecte le lecteur. Et
ce n’est pas un livre sur 14-18, mais sur
les conséquences de ce séisme dans la
vie de quelques personnages. Et là, les
turpitudes humaines et leur mécanique sont
intemporelles. Un premier chapitre à intégrer
dans un corpus de textes sur la guerre, à
couper le souffle au sens propre…
mars 2014
NRP COLLÈGE
5
Pédagogie
Actu
À la rencontre d’un Prévert
méconnu
“
Paroles
trice
ra
d’administ
Par Anne Remlinger
Eugénie Bachelot Prévert, petite-fille du
poète Jacques Prévert, a créé la société
Fatras afin de gérer et diffuser son œuvre.
Rencontre avec Anne Remlinger qui l’assiste
dans cette mission, dans l’appartement du 18e
arrondissement où le poète a longtemps vécu.
Les meubles, les objets qui peuplent son univers
sont toujours là et, de la terrasse, on pourrait
presque toucher les ailes du Moulin rouge.
quelle est de votre point de vue
la principale mission de Fatras ?
Il y en a plusieurs. Mais on souhaite avant
tout réinscrire Jacques Prévert dans un
cadre plus large que celui auquel il est cantonné, et rendre compte de la complexité
et de la portée de son œuvre. Nous voulons
ouvrir des portes, donner des clés qui se
sont perdues petit à petit, car il est évident
qu’il pâtit d’un malentendu par rapport au
monde scolaire, On apprend surtout les
poèmes à l’école élémentaire, alors qu’il
aurait toute sa place dans le secondaire. Il y
aurait un intérêt à étudier l’œuvre complète
au lycée, en partant de ses recueils. C’est
d’ailleurs un professeur de philosophie
qui a suggéré à Prévert la possibilité d’un
recueil avec huit textes, qui circulaient de la
main à la main, qu’il a rassemblés en 1944.
comment expliquez-vous ce
malentendu dont vous parlez ?
Une des raisons est cette apparente simplicité de son œuvre. Nous voulons en
souligner la singularité, donner des angles
nouveaux d’approche en insistant sur le
fait qu’il vient du surréalisme et que ce qui
6
NRP COLLÈGE
mars 2014
apparaît naïf et vieillot s’inscrit avant tout
dans cette veine. Prévert n’est pas dans le
premier degré mais dans l’ellipse et l’allusion. Le malentendu est peut-être aussi dû
à la place centrale du thème de l’enfance
qu’on a associé au caractère enfantin des
textes. Alors que chez Prévert, c’était une
invitation à conserver une forme utile de
naïveté et d’émerveillement propres à
l’enfance. De son vivant, Il faisait certes
des interventions dans les lycées et les
écoles à la fin de sa vie, mais il n’a écrit que
sept ouvrages pour la jeunesse, comme
par exemple L’Opéra de la lune illustré par
Jacqueline Duhême, une jeune artiste
qu’il a soutenue, comme Elsa Henriquez
à laquelle il a offert le texte « Pour faire le
portrait d’un oiseau » pour sa première
exposition de peinture. De nombreuses
éditions anthologiques pour enfant sont
posthumes et présentent des textes initialement parus dans les recueils, que la jeune
génération méconnaît de plus en plus.
c’est paradoxal, car le recueil
a reçu un accueil incroyable…
À sa sortie, le livre s’est énormément vendu. Malgré les références très historiques
et le recours au langage parlé et populaire, très connoté, il a été rapidement traduit dans une vingtaine de langues. Il en
reste des chiffres et beaucoup de presse.
Une libraire, Adrienne Monnier, a tenu des
registres : il s’en est vendu 5 000 en une
journée. Et ce n’était pas qu’une ferveur
populaire : André Gide, Jean-Paul Sartre se
sont précipités sur le livre. Nous possédons
aussi des articles de Raymond Queneau
ou de Georges Bataille qui soulignent la
modernité de Paroles à sa sortie en 1946.
Il y avait un véritable phénomène Prévert,
une sorte d’engouement, car il cassait des
codes de l’expression poétique et était déjà
connu par un cercle d’initiés.
qu’est-ce qui chez Prévert
vous paraît le plus intéressant ?
On peut voir sans doute encore dans son
œuvre poétique une extrême modernité
parce que sa poésie contient en elle-même
sa « déconstruction », qu’il donne « à voir »,
et parce qu’elle est construite par rapport
au langage parlé. Cette démarche poétique
a fait sa popularité. Il ne faut pas oublier
pour autant que, dans les années 1920,
Jacques Prévert était une figure du Montparnasse qui fréquentait les bistrots et était
renommée pour ses facéties en compagnie
de son frère Pierre. Il habitait l’appartement
de Marcel Duhamel, qui dirigera plus tard
la Série noire, rue du Château, qui est
devenue un des repaires des surréalistes.
Son premier texte signé est collectif, une
pétition de soutien en faveur de Charlie
Chaplin en 1927, mais il gardera toujours
ses distances avec un certain dogmatisme.
Michel Leiris a dit que Prévert était un surréaliste « populaire ». Il se situe en marge
d’un courant, mais il en porte les traces.
L’homme aussi est très attachant. Jacques
Prévert était très pudique sur sa vie intime.
Grâce aux documents dont nous disposons, on découvre une personne paradoxale, aussi dans ses engagements : il
était pacifiste et on lui a reproché son
« quelle connerie la guerre » de la chanson
« Barbara ». En fait, il a continué à être engagé bien après le Groupe Octobre dont il
écrivait et jouait les textes pendant le Front
Pédagogie
Actu
populaire : il s’est positionné en mai 68, a
écrit en faveur d’Angela Davis, a porté les
valeurs de la défense de la nature contre le
modernisme. Enfin, il y a la question de son
travail de collaboration avec des artistes
qui mérite vraiment qu’on s’y intéresse. Il a
très peu travaillé seul et une de ses valeurs
cardinales, c’était l’amitié. On connaît sa
collaboration avec des peintres comme
Picasso, l’intérêt qu’il manifestait pour
la chanson, son travail de scénariste qui
intègre des indications pour les acteurs…
Justement, en quoi cette œuvre
pluridisciplinaire s’adaptet-elle bien aux programmes
du collège ?
L’enseignement en histoire des arts a ajouté aux contenus pédagogiques un nouvel
axe. Nous nous sommes dit que Prévert
se plierait bien à cette interdisciplinarité
puisqu’il a été scénariste, plasticien, chansonnier, poète… Son œuvre est très influencée par le cinéma. Il s’est nourri, avec
son frère Pierre, de films populaires comme
Fantomas ou les serials. Ce n’est pas un
poète venu au cinéma. Il se revendique
scénariste de métier avant tout. Beaucoup
de poèmes sont écrits d’un point de vue
très visuel et cinématographique avec
effet travelling, ralenti… Il a participé à
une trentaine de longs métrages et il reste
une cinquantaine de projets inédits. Cela
permettrait de montrer que ce type d’écrit
a une valeur en tant que tel. Les thèmes
surréalistes et l’influence du conte sont
d’ailleurs beaucoup plus présents et visibles dans ses films. Le titre Paroles peut
ouvrir aussi sur la chanson et la force de
l’oral par rapport à l’écrit, en nous référant
à ses saillies verbales qui l’ont fait connaître
avant qu’il ne soit publié. Puis sont venues
les collaborations avec des musiciens :
Henri Crolla, Joseph Kosma évidemment,
et le succès avec les interprètes comme les
frères Jacques, Juliette Gréco, Yves Montand. Certains textes pourraient être réinterprétés par des chanteurs plus contemporains, comme cela a récemment été le
cas avec un jeune slameur marseillais qui a
rencontré du succès.
ressources pour tous ceux qui veulent
approcher l’auteur. L’appartement est
conservé en l’état avec les meubles. C’est
un lieu musée, peu ouvert au public. Il
abrite des archives et est entièrement
financé par les droits d'auteur, ce qui est
atypique. Nos missions sont la conservation, l'inventaire et la numérisation des
archives, ce qui sous-tend nos actions plus
visibles visant à favoriser une meilleure
diffusion de l’œuvre. On accueille évidemment les chercheurs. Un chercheur ayant
connu Prévert écrit une somme incroyable
et nous l’accompagnons dans son projet.
Il y a aussi un éditeur qui établit actuellement une anthologie ; nous espérons que
les textes, sortis du rassemblement opéré
par Prévert dans ses recueils, retrouvent un
sens plus actuel et accessible. Enfin, des
élèves sortis des écoles d’animation ont
répondu nombreux à un appel à projet,
et les 13 sélectionnés se sont ainsi lancés
dans des courts métrages d’animation,
adaptés de 13 poèmes, avec une inventivité incroyable, nourrie de contraintes. Ce
projet est fidèle à l’esprit de Jacques Prévert qui a aidé de nombreux jeunes créateurs. Les films seront programmés sur une
chaîne de France télévision en mars 2014
sous le titre « En sortant de l’école ».
Fatras est un centre ressource
qui détient un grand nombre
de documents et d’archives :
quel usage peut-on envisager
d’un tel fonds ?
Pour les enseignants, nous projetons une
édition numérique multisupports avec
des poèmes moins connus, en donnant un
éclairage plus historique et biographique
sur certains textes. En sortant de l’école n’est
pas lié à un souvenir d’enfance. Comme
l’a signalé la femme d’Alexandre Trauner,
Prévert l’a écrit pour son ami décorateur
On veut rendre accessible ce qui ne l’est
plus et se positionner comme centre de
Envisagez-vous des éditions
nouvelles pour ces œuvres ?
de cinéma qui était alors caché pendant
l’Occupation et intervenait sur les films
de façon clandestine. Il sera occasionnellement professeur de dessin à Saint-Paulde-Vence et Jacques Prévert a écrit ce texte
pour ses élèves. Ces informations biographiques peuvent permettre à des élèves
de s’impliquer davantage dans la lecture.
Jacques Prévert n’aurait sans doute pas
apprécié d’être réduit à la récitation, lui qui
a quitté l’école à 14 ans, et qui a récusé le
terme de poète qu’il considérait comme
une étiquette. Enfin, de tels documents
doivent inclure des extraits de dialogues,
des œuvres plastiques comme des collages ou des dessins, les chansons. On
ne peut pas inciter les enseignants à étudier Jacques Prévert sans éditions abordables. Nous défendons par ailleurs un
projet d’exposition sur Paroles. On pourrait
rendre compte de la genèse singulière du
recueil, et du rôle déterminant joué par
Bertelé, son éditeur, et de la manière dont
Michaux, par exemple, est intervenu pour
convaincre de la nécessité de publier cette
œuvre. Dans une interview, Madeleine
Chapsal a déclaré en 1963 que Jacques
Prévert était devenu « un nom commun ».
Les gens entretiennent encore un lien très
affectif à cet homme et une telle exposition pourrait permettre de restituer cette
dimension en la rattachant à un contenu
et une histoire.
Informations pratiques
Fatras : www.jacquesprevert.fr
Contact archives, documentation, location
expositions : [email protected]
Contact autorisations, juridique :
[email protected]
mars 2014
NRP COLLÈGE
7
Spectacles
Actu
Quand les
marionnettes
d’Émilie Valantin
défient le diable…
Par Carole Guidicelli
La Compagnie Émilie Valantin reprend
Scapin et nous initie aux usages de Faust.
À suivre ce mois-ci au Mouffetard –
Théâtre des arts de la Marionnette à
Paris (inauguré en novembre dernier),
puis en province.
Pour un théâtre de grand art
Voilà trente-huit ans que la Compagnie Émilie Valantin (anciennement Théâtre du Fust)
nous prouve que le théâtre de marionnettes
est capable de relever les grands défis du
patrimoine littéraire, musical et théâtral,
voire des textes contemporains. Molière,
La Fontaine, Corneille, Haydn, Gounod sont
quelques-uns de ses artistes de prédilection, au même titre que Müller, Harms ou
Valle Inclán.
8
NRP COLLÈGE
mars 2014
Qui a pu oublier ces magnifiques figurines
de glace, si délicatement manipulées par
des tiges, qui déclamaient les vers du Cid et
s’affrontaient en duel dans la chaleur de ce
mois de juillet 1996, au Festival d’Avignon ?
Qui a pu oublier qu’Émilie Valantin a été la
première, en 2008, à faire entrer la marionnette sur le plateau de la salle Richelieu, à
la Comédie-Française ? C’était pour la Vie
du grand dom Quichotte et du gros Sancho
Pança : trente-cinq poupées, et dix comé-
Le spectacle
cité
Les Fourberies de Scapin,
du 18 au 23 mars, et Faust
et usages de Faust, du 25 au
30 mars, au mouffetard, Théâtre
des arts de la marionnette, Paris
5e ( www.lemouffetard.com).
Dates de tournée :
http://cie-emilievalantin.fr/
calendrier/
diens de la troupe pour les manipuler et leur
donner la réplique.
De scapin le manipulateur
au diabolique Faust
Les Fourberies de Scapin (Un Scapin manipulateur, 2006) reposent entièrement sur
la virtuosité de Jean Sclavis (Scapin) qui
installe, manipule et prête voix aux huit
marionnettes de 1,40 mètre qui figurent
les autres personnages. L’espace scénique
— un jeu de poulies, de contrepoids et de
sacs en toile pour ranger les pantins — est
simple et efficace. Le jeu de Sclavis/Scapin
en est d’autant plus dynamique, comme
la mécanique de la manipulation/mise en
scène du valet en est plus lumineuse pour
le spectateur.
Faust et usages de Faust, créé en décembre
au Théâtre des Célestins, reprend le même
principe. Cette fois, Sclavis est aux commandes d’une quinzaine de marionnettes,
variant les échelles et les techniques
de manipulation (fils, tringle, marottes,
peluches…). Délaissant la dimension
« faustienne » du personnage – une soif de
connaissance qui le pousse vers la magie –,
le parcours dans les œuvres de Marlowe,
Goethe, Balzac, et Gounod – et sur le net !
– met l’accent sur les questions contemporaines de désir et de liberté.
Faust (à l’effigie de Sclavis), pris entre Mauvais Ange (Jean Sclavis) et Bon Ange (Élie
Granger au piano) fait in fine l’expérience de
la vulgarité et d’un bonheur facile et factice.
« Personne n’est plus esclave que ceux qui
se croient faussement libres » (Goethe).
L’audiovisuel comme vecteur
de réussite au collège
Par A.W.
Se lancer dans l’aventure du cinéma-audiovisuel
signifie, pour un établissement, s’engager à faire
acquérir les compétences du socle par des moyens
détournés, souvent avec un succès remarquable.
Des expériences convaincantes
Le fait est notable auprès de publics sensibles, chez qui les approches les plus traditionnelles peuvent se révéler insuffisantes :
l’image se révèle alors être un support très
fructueux.
Dans une académie du Sud-Est, plusieurs
collèges ayant choisi cette voie offrent des
exemples intéressants. Dans un collège en
particulier, une progression sur les quatre
niveaux a été peu à peu mise en place ; elle
débute avec une 6e « audiovisuel » proposant, en plus des cours réguliers, trois heures
d’enseignement de cinéma-audiovisuel, se
partageant en une heure de théorie et deux
heures de travail en demi-groupe, le tout à
l’échelle d’une classe. On poursuit en 5e ce
dispositif, sous la forme d’une heure hebdomadaire de pratique audiovisuelle, adossée
au dispositif Collège au cinéma. En 4e et en
3e, forts de l’expérience acquise dans les
années précédentes, les élèves peuvent passer à la réalisation d’un court-métrage : à raison d’une heure hebdomadaire, la première
année est mise à profit pour l’élaboration du
scénario, la seconde pour le tournage proprement dit – cette expérience étant couplée avec une activité d’écriture de critique
cinéma, avec le concours de l’association
Cinéduc.
Dans la même académie, on observe des
formules légèrement différentes, auprès
d’autres établissements ; ainsi, après un
cycle de deux ans – en 6e et 5e – centré sur
la grammaire de l’image et la familiarisation
avec la cinématographie patrimoniale, la
pratique de l’image prend-elle pour cadre
les IDD – itinéraires de découverte – centrés
sur les métiers de l’image, au cours des deux
années suivantes.
Les conditions de la réussite
Des effectifs modestes restent les conditions
de succès d’une telle entreprise ; dans le
premier cas, l’expérience est menée tout au
long du cycle sur une seule classe ; dans le
second, si une classe seulement est concernée en 6e et 5e, l’IDD permet d’en impliquer
trois à partir de la 4e – seul un groupe réduit
d’élèves se retrouvant finalement concerné.
Il importe également de prendre en compte
la lourdeur des moyens engagés : le matériel de captation audio et vidéo, les supports
d’enregistrement et le matériel de montage
représentent un coût élevé que l’établissement doit majoritairement financer sur
ses moyens propres, à moins de bénéficier
d’une aide du conseil général, de la DRAC
ou de la DAAC locale. Enfin, dans les deux
cas, un partenariat apporte au projet une
Collèges d’ici
Actu
garantie de faisabilité ; dans le premier cas,
le CUCS – contrat urbain de cohésion sociale
– permet à l’établissement de bénéficier du
soutien artistique et technique de la cinémathèque.
En l’absence d’une véritable « option
cinéma-audiovisuel », ces expériences ne
doivent leur pérennité qu’à des équipes
unies et motivées : c’est à la fois leur force et
leur faiblesse. Aussi est-il souvent nécessaire
de les inscrire dans une logique de parcours
vertical, partant des écoles primaires de
secteur pour déboucher sur un lycée possédant ses propres options CAV – mais les
cas sont encore trop rares. En attendant, on
peut attendre de ces activités audiovisuelles
qu’elles constituent entre les cycles (école/
collège ; collège/lycée) ce vecteur de rapprochement et de liaison qui fait si souvent
défaut.
mars 2014
NRP COLLÈGE
9
Cinéma
Actu
Regards libres :
le réel à l’épreuve
des sens
Par Marie-Laure Guétin
Le CRDP de Lyon vient d’éditer un DVD
qui rassemble cinq courts métrages
questionnant la relation au réel, et
développant une commune expérience
anthropologique et esthétique. Celle-ci
prend la forme judicieuse et didactique
d’un étonnement devant le monde : la
perception que l’on en a, le sens qu’on lui
attribue, et les mystères qu’il embrasse.
Fiction et documentaire
Loin du cloisonnement habituel, la sélection
regroupe trois documentaires et deux films
de fiction, invitant d’emblée à réfléchir sur
l’établissement et la porosité des frontières
entre ces deux modalités cinématographiques. La prérogative du documentaire
ne saurait être simplement de trouver une
forme permettant de rendre compte du
réel, puisque les films fictionnels relèvent
de cette même intention. Ainsi, la séquence
caméra à l’épaule dans Le Chœur (1982),
réalisé au sein du Kanun par Abbas Kiarostami, pourrait s’inscrire dans un film documentaire sur la vie d’un marché en Iran. Un
même aspect informatif et une comparable
implication du cinéaste, en prise directe
dans les rues de Dakar, parcourent Petite
Lumière, film fictionnel d’Alain Gomis (2002).
L’un des parcours pédagogiques proposés
par le DVD ainsi que le film Regards libres
(Romain Delange, 2005), au dispositif formel
exacerbé, conduisent ainsi à différencier le
documentaire du reportage par la subjectivité assumée du point de vue, et à rappeler
que le documentaire, c’est aussi du cinéma.
La réflexion peut alors se poursuivre au
gré d’une autre parenté qui concerne la
dimension narrative incluse dans chacun
des films au programme. Des récits autobiographiques de L’Illusionniste (Alain Cavalier,
10
NRP COLLÈGE
mars 2014
1992), aux histoires qu’imaginent les enfants
devant le tableau abstrait de Jérémie Chabaud (Regards libres), en passant par les
récits que construit Fatima à partir de son
environnement quotidien (Petite Lumière),
la confrontation au monde se nourrit d’histoires afin de l’élargir, de l’expliquer, pour
finalement le réinventer.
Expériences sensibles
L’épreuve du réel, qui se constitue donc
à partir d’un étonnement heuristique,
recourt essentiellement à la perception :
ce qu’on voit, ce qu’on entend, ce qu’on sait
sont sujets à transformations, substitutions
et lacunes. Quelque chose du réel manque
ou s’abstrait, afin de donner une réalité
concrète, physique aux questions philosophiques qui sillonnent les films, allant de la
puissance de l’œuvre d’art à la cosmogonie,
des facultés de l’imagination aux limites de
la condition humaine. Tous les films développent en cela de véritables expériences
sensorielles pour les personnages et les
spectateurs.
Tour à tour se révèle le pouvoir d’évocation
de la parole (les commentaires des enfants
sur un tableau que l’on découvre à la toute
fin, dans Regards libres), et plus largement
du son, quand affleure, par le dépouillement d’un cadrage ou la portée du hors-
champ, le trouble de l’être humain, celui
du vieillard gardien de la loi du silence qu’il
impose, celui encore de l’illusionniste évoquant ses trois vies, filmée seule, frontalement. L’on comprend aisément dès lors que
ces films en appellent superlativement à des
dispositifs formels aussi simples qu’efficaces,
permettant de familiariser les élèves avec le
vocabulaire et les partis pris de l’écriture
filmique. Chaque mise en scène souligne
ici combien c’est par la force suggestive
du hors-champ, de ce qui se joue ailleurs,
alentour, ou encore à contretemps, que le
cinéma pense le rapport de l’homme au
monde.
Personnages-interprètes
L’expérimentation des sens que poursuivent
les films s’appuie amplement sur la présence de personnages-relais, intermédiaires
d’une certaine perception du monde ainsi
qu’objets en eux-mêmes du spectacle. Là
encore les films brouillent la distinction
entre régimes fictionnel et documentaire,
tant la limite entre la « vraie » vie et le rôle
est parfois ténue, ce qu’illustre parfaitement
Antoinette filmée par Alain Cavalier. Les
conditions de tournage, rapportées dans
les entretiens avec les cinéastes, expliquent
le sentiment de proximité qui se dégage
corrélativement à la très grande fragilité
et fugacité des êtres ainsi portraiturés. Le
plus extrême à cet égard reste GbangaTita (Thierry Kneuff, 1994) qui est constitué
d’un plan séquence de cinq minutes sur le
visage de Lengé, Pygmée baka, « dernier
conteur » parmi les siens, dans une forêt
du Sud-Cameroun. Présenté comme celui
qui connaît les récits du début du monde, il
transmet ici un conte entremêlé de chants
à des enfants dont on entend les voix. Fruit
d’un hasard de tournage, la caméra saisit
alors bien plus qu’un documentaire, un instant de grâce serti dans une pratique existentielle et ancestrale, vouée à disparaître
avec Lengé, quelque temps après la fin du
tournage.
Actu
Histoire
Cartographier l’imaginaire
Par Alain Barbé
Quand la géographie, science du réel, se confronte
aux représentations de l’imagination.
Fantasy
Le générique de Game of thrones survole
une carte animée où des villes mues par
des rouages complexes apparaissent,
croissent, périclitent au fil des épisodes.
Les sept royaumes de Westeros dessinent
vaguement le contour des Îles britanniques,
mais c’est bien d’un monde imaginaire qu’il
s’agit. Dès sa parution, le roman de George
R.R. Martin a sacrifié au rite de la carte de
fiction, qui caractérise la fantasy. L. Franck
Baum, le premier, y a recours pour son Magicien d’Oz. La carte du pays d’Oz, publiée en
1914, reste sommaire. Par sa forme elle
évoque le tracé de l’État du Kansas, où commence le récit. Le pays d’Oz apparaît donc
comme le double magique d’un territoire
bien réel. Tout autre est l’ambition de Tolkien. Les cartes publiées, avec l’aide de son
fils Christopher, pour illustrer Le Seigneur
des Anneaux sont devenues l’archétype de
la cartographie de fiction.
Un système cohérent
Les cartes de Tolkien se présentent comme
des cartes anciennes, médiévales, en accord
avec le temps de la fantasy. Cependant, Tolkien, agent de liaison pendant la Grande
Guerre, connaissait parfaitement les règles
de la cartographie moderne. Il intégra progressivement la notion d’échelle dans les
dernières cartes publiées. L’appréciation des
distances était pour lui essentielle car il avait
une vision topographique du cheminement
de ses héros, et dessinait au fil de l’écriture
de nombreux croquis géographiques. Certaines de ses descriptions sont dignes d’un
Vidal de La Blache : géologie, végétation,
topographie du terrain, rien n’est oublié. La
création de Tolkien frappe par sa cohérence
et sa complexité. Un cartographe américain,
K. W. Fonstad, a publié un Atlas of Middleearth (dernière édition révisée en 2001) qui
n’a rien à envier aux ouvrages équivalents
pour notre monde réel.
Un objet géographique
Les terres du Milieu sont devenues un
espace géographique à part entière. Le
Dictionnaire Tolkien comporte un article
très complet sur le sujet. Des chercheurs
de l’université de Bristol viennent de livrer
le résultat de leur étude sur le modèle climatique dans les terres du Milieu ! Deux
géographes du lycée Lakanal, Damien Blanchard et Stéphane Partiot, se sont attachés à
l’analyse des villes et des territoires urbains
dans Le Seigneur des anneaux, qu’ils appréhendent comme « géographiquement plausible ». Jean-Benoit Bouron, dans une étude
publiée par le Comité français de cartographie, affirme le droit à l’imagination géographique. Il démontre que l’imaginaire peut
nourrir la réflexion cartographique et qu’en
retour les cartes enrichissent l’imagination. Il
souligne aussi l’intérêt pédagogique d’utiliser la fiction pour mieux penser le réel.
Le pôle arctique vu par Mercator,
1595.
Des limites floues
Si les géographes redécouvrent les vertus
de l’imaginaire, les cartographes ont longtemps eu un rapport ambigu à la réalité.
Au xviie siècle, certains tentent encore de
situer le pays des Amazones. Le respect des
traditions s’allie ici à une manie du métier :
la carte a horreur du vide. La revue Carto
en donne des exemples dans sa rubrique
« Cartes imaginaires ». Une carte éditée vers
1590 dessine un lac au cœur de l’Amazonie.
Dans le souci de représenter l’ensemble des
terres, y compris celles restées inexplorées,
Mercator, père de la cartographie moderne,
n’hésite pas à figurer un pôle Nord composé
de quatre grandes îles. La rencontre entre
l’imaginaire et la cartographie est donc une
longue histoire. La carte reste une représentation où la limite entre fiction et réalité se
révèle souvent mouvante et floue.
À lire
• D. Blanchard, S. Partiot, Tolkien en
•
•
•
géographie, villes et territoires urbains
dans le Seigneur des Anneaux, www.
editions-polaire.com/revue-polaire.
J.L. Bouron, « Cartographier
l’imaginaire, un exercice
géographique », C.F.C., n° 205,
2010.
V. Ferré (dir.), Dictionnaire Tolkien,
CNRS éditions, 2012.
Magazine bimestriel Carto,
le monde en carte, site internet :
www.carto-presse.com/.
mars 2014
NRP COLLÈGE
11
Lire au CDI
Actu
Jetons l’ancre pour l’encre
des poètes
Par Christine Bruner, Fadben
Pour nombre d’élèves les écrivains
sont souvent éloignés de l’humanité
ordinaire, alors, quand il s’agit de poètes,
un quelconque degré de parenté semble
plus qu’improbable. En effet, la faculté à
écrire des poèmes revêt un caractère qui
tient au moins de la performance, sinon
d’un don à l’origine bien incertaine.
Quant à la lecture de poèmes, même si
les élèves perçoivent un intérêt sensible
lors d’une lecture obligée, la poésie reste
trop souvent, à leurs yeux et pour les plus
téméraires, un ensemble de jolies phrases
quelque peu hermétiques. Écrire un poème,
pour eux, c’est une opération quasi impossible : « Comment on fait pour trouver les
mots, et les rimes ? »
De l’exposition au poème
La projection aux élèves, d’une classe de
quatrième, d’une exposition virtuelle que
l’on trouve sur le site Internet de la Bibliothèque nationale de France (Homère ou
bien Victor Hugo) est une entrée en matière
originale pour introduire un travail sur la
poésie. Après la prise en compte des réactions des élèves, le travail demandé leur
sera exposé. Durant les différentes séances
pédagogiques, qui se dérouleront au CDI,
les élèves seront accompagnés par le professeur documentaliste et le professeur de
français avec la collaboration du professeur
d’arts plastiques.
Les consignes : les élèves en binômes,
nombre d’or du travail de groupe, feront
des recherches au CDI avec l’objectif d’une
production finale sous le format « Powerpoint » restitué oralement lors de la seizième
édition du Printemps des Poètes 2014, du 8
au 23 mars. Des efforts particuliers seront
demandés aux élèves afin que les informations projetées soient complémentaires
de l’exposé oral qui sera fait. Le produit fini
comprendra sept diapositives : un titre, un
sommaire, une introduction, quatre diapo12
NRP COLLÈGE
mars 2014
sitives sur le cœur du sujet, une conclusion,
une bibliographie, une illustration créée
avec l’aide du professeur d’arts plastiques, et
non une capture d’image trouvée au hasard
du web.
Trouver le poète
La question « Peut-on dire que le poète est
le reflet de son époque ? » sera le point de
départ de la recherche des élèves et le fil
rouge qui les guidera tout au long de leur
travail. Un choix de poètes français, ce sera
l’occasion de découvrir le poète Max Jacob,
mais aussi francophones leur sera proposé,
parmi lesquels Léopold Sédar Senghor,
Léon Gontran Damas, Aimé Césaire. Chaque
binôme travaillera sur deux poètes hommes
n’ayant pas vécu à la même époque, et
s’intéressera aux œuvres d’une poétesse
francophone. Une courte biographie sera
réalisée pour chacun des poètes. La guerre,
l’exil, la résistance, l’amour, la mort seront les
thématiques des poèmes.
Les élèves compareront les poèmes entre
eux, en utilisant les critères de genre poétique, de forme, de rime, de champ lexical
utilisés pour jouer avec le lexique et jongler
avec la sonorité des mots. Ils découvriront
à la fois le style propre à chaque poète, ce
qui fait qu’il est unique et ancré dans son
époque et l’intemporalité de son poème,
de son message qui s’adresse à la sensibilité du genre humain, au-delà du temps. En
effleurant l’universalité de la création poétique ils goûteront à la saveur de l’aventure
humaine. Ils côtoieront la musique du poète
sur le rythme des valeurs d’humanité.
Du poème à la chanson
Férus de chansons, les élèves poursuivront
leur travail en cherchant une chanson qui
se rapprochera le plus possible du thème
de départ choisi. Grand Corps Malade, Stromae, Indochine ou Bénabar entre autres
pourront aider les élèves à sentir la proximité entre la poésie et la chanson.
Pour créer il faut : choisir une citation sur la
poésie, qu’ils illustreront, en faisant appel à
leur imagination et à leur fantaisie, guidés
par leur professeur d’arts plastiques ; écrire à
leur tour un poème, en chahutant les mots,
en les mélangeant, en les apprivoisant, en
les écrivant autrement pour tenter peut-être
de dire l’indicible dans un refuge intime.
Grâce à ce travail d’écriture, ils auront créé
« un grain de poésie » et deviendront pour
d’autres peut-être « professeur d’espérance »
attendu.
Bibliographie
Pour écrire
L’Agenda du (presque) poète, par
Bernard Friot, De La Martinière
Jeunesse, 2011, pour se familiariser
en toute simplicité avec l’écriture
de la poésie.
Le Dictionnaire des rimes et assonances,
Le Robert.
•
•
Pour lire :
Les poètes ont toujours raison, éditions
L’Edune, Rascal, sélection de
poèmes sur des thèmes universels.
Travaux publics de Bénabar, éditions
Thierry Magnier, l’intégralité
des textes du chanteur français.
Naviguer dans les marges,
par Luce Guilbaud, Soc & Foc.
Amour toujours, par Armand Le Poète,
Gros texte.
Dans mon oreille, par
Philippe Annocque, Motus.
•
•
•
•
•
Pour voir :
Expositions sur la poésie sur le site
de la BNF : Victor Hugo, Homère.
La 16e édition du Printemps des
poètes.
•
•
d’écriture
« Les mots m’ont pris par la
main » (Aragon, Le Roman inachevé)
Par Édith Wolf
Le printemps des poètes fait depuis seize ans du mois de mars
celui de la poésie, donc le moment idéal pour aborder ce genre en
classe. Et l’atelier d’écriture est le meilleur moyen de commencer
une séquence en initiant les élèves de façon active au travail
poétique de la langue.
L’ensemble des exercices proposés a pour but une exploration de diverses manières de considérer les mots :
entrer dans la poésie, c’est découvrir un autre regard
sur les mots, les considérer en eux-mêmes, les faire
jouer entre eux, comprendre comment ils signifient et
déclenchent le travail de l’imaginaire.
Mots courts/ mots longs
• Voici des mots d’une syllabe : feu, là, voir, bleu, coq,
court, qui ?, où ?, loin, train, moi, nous, tout, clair, if,
vif, vie, mort, fort, court, seuil, jeu. Donnez leur nature
grammaticale. Cherchez-en d’autres de diverses
natures grammaticales et qui vous plaisent. Écrivez un
texte poétique constitué uniquement de mots d’une
syllabe. Son titre sera un des mots de la liste qui vous
a été donnée. Lisez votre texte à haute voix, lentement. Commentez l’effet produit par les mots courts.
Tous niveaux.
• Voici une liste de mots de trois syllabes ou plus :
dodeliner, perpétuel, métamorphose, virevolter,
silencieux(euse), photographie, horizon, escargot,
lumineux, chuchoter, transparent(e), amoureusement,
entremêlé(e), mélancolie. Choisissez quatre d’entre eux
et décomposez-les pour faire surgir les mots courts qu’ils
contiennent en observant l’exemple proposé. Puis écrivez un court texte dans lequel vous emploierez le mot
long et le plus possible des mots courts qu’il contient,
ainsi que des termes qui leur ressemblent par la sonorité.
Exemple : Silencieux : cil, lance, cieux ou s’il, anse, yeux,
ou silence, lieux, se, île, an, scie, eux. On pourra aussi
employer ciel, soucieux, asile, lenteur.
4e/3e.
À l’inverse, il fait l’éloge du mot couverture qu’il juge bien
adapté à ce qu’il désigne.
Voici une liste de mots : faim, eau, infini, ordinateur, chat,
chemin, ver, frire, chocolat, tristesse. Choisissez-en deux
pour lesquels vous émettrez une critique comme l’a fait
David Dumortier pour été, et deux qui vous paraissent
satisfaisants en expliquant pourquoi. Vous pouvez parler de la longueur du mot, le diviser en parties et commenter le résultat de cette division, dire qu’il fait penser
à d’autres mots, parler de ses sonorités et de son image
sur la page.
5e, 4e, 3e.
Atelier d’écriture
Actu
Le carnet
Au pays des mots
Voici des mots ou locutions qui ne désignent pas
d’élément concret : nulle part, jamais, solitude, bonté,
demain, oubli.
Choisissez un de ces mots et imaginez qu’il soit le nom
d’un pays : Le pays de Nulle part, le pays de Jamais, le
pays de la Solitude. Imaginez ensuite cet endroit dont
vous décrirez la géographie, le climat, les habitants
et leur mode de vie (travail, vie familiale, règles de la
société, langue, loisirs, habitudes alimentaires).
Tous niveaux.
Mots critiqués
Un poète contemporain, David Dumortier commente
ainsi le mot « Été » :
« En trois lettres, c’est bien court
pour des vacances1 ! »
1. In Cligne-musette, poèmes diminutifs et gymnastiques,
Cheyne éditeur.
mars 2014
NRP COLLÈGE
13
Maisons d’écrivains
Actu
Joachim du Bellay à Liré
Par Adeline Pringault
Pays de la Loire
Il n’est besoin ni d’objets ni de meubles
pour que les lieux soient chargés de
l’histoire, des mots et de l’esprit de
celui qui y vécut. C’est ce qu’ont voulu
nous rappeler les Liréens en créant le
musée de Joachim du Bellay et en nous
invitant au château de la Turmelière.
Joachim du Bellay y naquit en 1522, mais, du château
de ses ancêtres, il ne reste que des ruines qui offrent
une promenade agréable et romantique au visiteur
sans lui donner l’idée concrète de ce que pouvait être la
demeure du jeune poète. Comme le château, le bourg
entier de Liré fut détruit en 1794 lors des guerres de
Vendée, ne survécut que le « Grand Logis », demeure
Renaissance ayant appartenu à la famille du poète, mais
où il ne vécut jamais. Le musée s’y installa en 1957. Le
défi était beau : il fallait en cette absence de preuves matérielles offrir au visiteur inspiré un parcours qui lui fît rencontrer Joachim du Bellay. Les lieux devinrent donc des lieux
d’interprétation qui proposent au visiteur de lire de la poésie dans un cabinet de lecture tel que Joachim dut le faire,
d’écrire à la plume d’oie ou de réunir autour d’un mobilier
reconstitué des poètes apprentis ou chevronnés. L’esprit de
La Pléiade n’est pas loin et il suffit d’un brin d’imagination
pour entendre le poète dire en sa langue nouvelle ses vers
célèbres ou pour voir à travers le regard ménagé dans le
cabinet de lecture un ami, un poète, frapper à la porte.
Ces lieux sont vivants grâce surtout aux ateliers et aux
activités qui y sont proposés. Vous pouvez organiser pour
vos élèves une « Journée du Bellay ». Elle se déroule sur les
INFOS PRAtIQuES
• Pour y aller
Liré se situe au sud d’ancenis.
accès par angers et Nantes : a11 sortie « ancenis »
(ou D723).
• Le musée Joachim du Bellay
Pour tout renseignement et pour parcourir
quelques fiches pédagogiques (mais de nombreuses
informations supplémentaires vous seront données
au musée) : http://museedubellay.over-blog.com/
• Le château de la Turmelière
Pour organiser une « Journée du Bellay », contactez le
site : http://www.turmeliere.org/
• Les 7es Lyriades : 2 au 6 avril 2014
http://www.leslyriades.fr/
14
en région
NRP COLLÈGE
mars 2014
deux sites, distants de 2 kilomètres. La visite du musée que
les élèves parcourent livret en main, et en écoutant les lectures et anecdotes de l’animatrice, est enrichie d’un atelier
que le professeur aura préalablement choisi. Mon coup
de cœur va à l’atelier calligraphie, mais les élèves peuvent
aussi créer leur groupe de poésie ou s’affronter dans un quiz
Renaissance. La deuxième partie de la journée se déroule
au château : les ruines offrent une idée de la grandeur du
château primitif, puis les élèves ont la chance de découvrir
sur le même domaine les salles du château actuel, reconstruit à la fin du xixe siècle dans le style Louis XIII. Là s’organise
un bel atelier d’écriture ludique et poétique ou, au gré du
professeur, un atelier reliure ou une découverte du sonnet
Tant au musée qu’au château, les offres d’activités littéraires
sont variées et dynamiques. De plus, les responsables de
ces activités sont ouvertes à toute proposition autour des
mots, de l’écriture, de la lecture et de la Renaissance. Ainsi,
on pourra organiser cette visite avec le professeur d’histoire
et davantage axer les activités sur l’architecture et sur les
modes de vie. Il est possible aussi de prévoir des séjours
plus longs à la Turmelière qui propose des activités sportives et de découverte de la nature.
Chaque année, à l’occasion de la Semaine de la langue française (15 au 23 mars 2014), le musée organise un concours
de poésie, « Dix mots m’ont dit ». Et, tous les deux ans, se
déroulent à Liré les Lyriades de la langue française et les
Lyriades-jeunesse, dont la 7e édition, qui se tiendra du 2
au 6 avril 2014, aura pour thème « Langue française, chant,
chanson et musique », décliné pour les collégiens en « Le
français en chantant ». En parallèle aux rencontres jeunesse, des journées de formation continue sont ouvertes
aux enseignants.
Dossier
Le travail sur la poésie
et les compétences
Par Jean-Michel Zakhartchouk
A
priori, des différents domaines
de travail de la classe de Français,
la poésie paraît la plus éloignée
d’une approche par compétences.
On connaît bien les dangers
du technicisme, qui guettent
certaines propositions de manuels
scolaires trop préoccupés par un
apprentissage de techniques de
versification ou d’illustration de
figures de rhétorique, au risque
sommaire
Dépasser l’opposition
entre « technicisme »
et « spontanéisme » ––––––––––––––––––– 17
Les grands axes
de notre approche ––––––––––––––––––––––– 18
une démarche plus
que jamais actuelle–––––––––––––––––– 19
16
NRP COLLÈGE
mars 2014
d’en oublier le sens et de négliger
l’approche sensible. À l’inverse
d’ailleurs, l’appel à l’émotion, aux
sensations, dans une perspective
très spontanéiste, s’avère tout aussi
désastreux et contre-productif.
Danger de faire croire aux élèves
que la poésie peut naître sans
techniques, sans mobilisation de
ressources diverses, du plus profond
de l’être !
Fondées sur une approche par
compétences, les trois séquences
qui vous sont présentées dans ce
numéro attestent qu’il est pourtant
possible d’éviter ce double écueil, en
illustrant différentes facettes d’un
travail sur la poésie :
– en sixième, autour des fables ;
– en cinquième, autour de
l’expression d’émotions suscitées
par des paysages ;
– en troisième, autour de la poésie
engagée.
Le travail sur la poésie et les compétences
Dépasser
l’opposition entre
« technicisme »
et « spontanéisme »
Précisément, l’approche par compétences nous
paraît offrir un cadre tout à fait pertinent pour dépasser ces oppositions entre technique et sensibilité.
Puisqu’il s’agit pour les élèves d’une part de mobiliser de nombreuses ressources (savoirs, savoir-faire,
attitudes, références culturelles, lectures de textes et
d’images) pour réaliser une tâche, une production,
quelque chose qui ressemblerait à une « œuvre » faisant appel aussi à la sensibilité et à l’émotion. Cellesci doivent être nourries, mais en retour elles donnent
du sens à l’habileté ou à la connaissance de textes
pouvant servir de « modèles ». moins que jamais il
ne faut opposer la construction de connaissances
et l’acquisition d’une culture ou la manifestation
d’une sensibilité et d’une créativité pour une part
personnelles. Loin de micro-compétences (savoir
rimer, savoir écrire un quatrain…), il s’agit bien ici
d’exemples de mobilisation de ressources, guidée par
le professeur, afin d’aboutir à une production satisfaisante et évaluable selon des critères précis. rien
d’éthéré ou d’ineffable là-dedans mais plutôt l’occasion, sans aucun doute, d’éveiller ou réveiller des
compétences cachées ou trop en sommeil.
Et on est bien ici dans des situations complexes
lorsqu’il s’agit d’utiliser au mieux une image pour
produire un poème, que cette image soit choisie ou
proposée, lorsqu’il s’agit d’utiliser tout ce qu’on a
appris sur un genre de textes, qui va au-delà de la
poésie (littérature engagée) et qui peut s’incarner
«
Dossier
compétences inclut nécessairement la différenciation pédagogique. Guidage plus ou moins fort.
Contraintes plus ou moins exigeantes (celles de la
rime nous semblent bien moins importantes que le
respect du rythme ou la production d’images, même
maladroites ou stéréotypées). mais rappelons une
condition pour que tout cela fonctionne : la validation
d’un « item » ne nécessite pas un niveau d’excellence,
même si celle-ci peut et doit être recherchée pour
tous les élèves qui peuvent y parvenir.
Les grands axes
de notre approche
Comme dans le précédent dossier sur l’enseignement du français par compétences (novembre 2012),
on retrouve ici plusieurs aspects de nos propositions
de travail :
– l’importance de la réécriture, à partir d’un
premier jet (qui, contrairement à ce qu’on pourrait faire dans le travail sur le texte narratif, n’est
pas forcément placé au départ de la séquence), qui
sera souvent le point de départ de la mobilisation de
ressources pour l’améliorer, voire pour le remanier
complètement ;
– les liens étroits entre lecture et écriture,
même si ici l’écriture est plutôt l’objectif et la lecture
mise au service de l’objectif. Pas de production de
poésie engagée sans lire aragon, Eluard et quelques
autres, pas de production écrite de fable sans une
consultation suffisamment abondante de textes de
La Fontaine ;
Recherches
calligraphiques
de Robert
Delaunay pour
L’Alchimie du
Verbe d’Arthur
Rimbaud, 1914.
L’approche par
t
compétences inclu
nécessairement
la différenciation
pédagogique. »
aussi dans une culture familière aux élèves, de transposer une planche de bande dessinée en texte poétique (c’est une des compétences du socle que de
savoir passer d’un code à un autre) et de réutiliser un
savoir historique comme « sujet » d’une fable à la fois
contextualisée et universelle.
Notons au passage que nombre de nos propositions peuvent varier selon le type de classes ou
selon la composition de celles-ci. L’approche par
mars 2014
NRP COLLÈGE
17
– l’inscription du lexique et des notions
grammaticales comme ressources, ce qui leur
redonne du sens, loin des activités gratuites et formelles. Il s’agit bien de faire prendre conscience de
la richesse que constituent ces ressources au lieu de
les considérer comme d’épouvantables contraintes
qui mènent si on ne les respecte pas aux célèbres
« incorrect » et « mal dit » ;
– l’effort pour présenter tout ce qui relève
des références culturelles sous un jour plaisant,
« aimable », notamment par l’utilisation de l’image,
par les ponts avec des pratiques plus familières pour
un grand nombre d’élèves, par le recours au ludique.
À cet égard, la référence à l’auteur le plus célèbre de
la littérature française (La Fontaine), à des poèmes
très connus qui font partie du patrimoine et les effets
de contextualisation qui nous font lire certains textes
de Résistants différemment entre hier et aujourd’hui,
tout cela va dans le même sens : organiser le partage
d’un patrimoine, qui s’approprie tellement mieux
quand les élèves produisent des textes.
Les compétences,
une mode venue
d’ailleurs ?
On entend beaucoup dire que les compétences,
ce ne serait pas un produit made in France, ni
« Éducation nationale ». Une importation, voire une
intrusion dans notre tradition scolaire et culturelle
française. Qu’en est-il vraiment ?
Il est vrai que la notion de « compétence » a un
succès international et que beaucoup de systèmes
éducatifs s’en réclament. Mais est-on sûr de parler
toujours de la même chose ? Oui, il peut exister des
conceptions très réductrices d’une approche se résumant à une méthode standard, qu’on retrouve parfois dans des applications dogmatiques aux systèmes
scolaires, en Afrique par exemple. Oui, la tentation
existe, sous prétexte de rapprocher l’école et la vie,
qui est en soi un excellent principe, de trop axer
les pratiques en classes de langue maternelle vers
l’utilisation et l’analyse d’écrits du quotidien. Il y a
quelques années, le ministère québécois de l’Éducation a dû repréciser l’importance de la « dimension
culturelle » d’un enseignement qui semblait ne pas la
prendre suffisamment en compte1.
Cependant, si on lit bien ce texte très intéressant
qu’est « Huit recommandations du Parlement européen pour l’éducation et la formation tout au long
de la vie » paru en décembre 2006, l’approche culturelle y a toute sa place à travers la compétence 82 :
« développer la sensibilité et l’expression culturelles », qui implique la conscience de l’importance
de l’expression créatrice d’idées, d’expériences et
d’émotions sous diverses formes (musique, arts du
18
NRP COLLÈGE
mars 2014
spectacle, littérature et arts visuels). » Mais sans doute
faudrait-il mettre en évidence que cela implique la
fréquentation de nombreuses œuvres, la mobilisation
de savoirs culturels, l’appropriation d’un patrimoine,
tout ce que prône en fait l’école française depuis longtemps, sans forcément s’en donner les moyens justement, par une pratique plus active des élèves.
En fait, ce que nous présentons ici va bien dans le
sens du développement de la créativité des concepteurs comme des apprenants à qui elles vont être
proposées. Et nous sommes confortés en cela par
l’adjonction du terme « culture » au socle commun,
non pas comme la cerise sur le gâteau, mais comme
ce qui donne le sens du reste. Il s’agit bien de bâtir
une culture commune où il s’agit à la fois d’être
actif et acteur. Il semble que le Conseil supérieur des
programmes, dont le président est d’ailleurs un lettré
ancien enseignant de français soit sur cette position-là.
L’approche par compétences doit garder ce qu’il
peut y avoir de meilleur dans la tradition française :
un souci de qualité et d’exigence, l’attachement à un
patrimoine littéraire et artistique, une valorisation de
ce patrimoine qui fait réagir a contrario lorsqu’un
homme d’État semble se moquer de l’étude d’un
grand classique du xviie siècle et qui nous fait célébrer chaque année des centenaires d’artistes ou
d’écrivains.
Mais cela doit s’accorder avec une approche plus
active, plus tournée vers le faire. Et il est alors possible de tirer parti de manières de travailler répandues dans d’autres systèmes éducatifs tout en gardant
le meilleur de notre tradition. Il n’y a pas de contradiction au fait de travailler sur des textes littéraires et
par exemple se documenter, avec esprit critique, sur
les sujets les plus divers comme on le fait davantage
dans les pays scandinaves ou anglo-saxons.
Pour nous, quelques critères essentiels permettent en fait de cerner ce que doit être une
approche par compétences conforme aux objectifs
de formation d’un citoyen de demain :
– la confrontation des élèves à des tâches riches
et variées ;
– l’importance accordée aux œuvres patrimoniales comme supports de travail (mais pas seulement !), mais en les mettant en lien avec le présent et
les cultures plus familières aux élèves ;
– une diversification des modes d’évaluation, les
grilles étant plus des repères que des fins en soi ;
– le recul critique devant la notion même de compétence, tout ne se réduisant pas à elle.
Cette réflexion sur le bon usage des « compétences » semble partagée dans nombre de pays et
nous met en posture d’acteurs et non d’exécutants.
Dès lors, les exemples et références ne sont plus des
modèles à suivre, mais toujours à dépasser et à adapter à son propre contexte.
1. http://tinyurl.com/po5tb8e
2. http://tinyurl.com/p64crph
Le travail sur la poésie et les compétences
Dossier
« Ce que disent les voix » :
performance et installation
réalisée d’après les poèmes
de Luc Boltanski, 2007.
Une démarche plus
que jamais actuelle
Nous sommes aujourd’hui dans une phase d’interrogations sur le contenu du socle commun, qui
va déboucher sur une réécriture de celui-ci par le
Conseil supérieur des programmes avec pour cahier
des charges de mettre en conformité les programmes
avec le socle (et non l’inverse). Il envisagera aussi
d’autres modes d’évaluation et inscrira davantage
les démarches selon les niveaux et les cycles dans un
« parcours » pluriannuel.
Notre démarche d’enseignants de l’académie
d’amiens, tous ayant ou ayant eu la pratique de
classes ordinaires en collège, s’inscrit dans un travail
de longue durée autour des compétences, qui date
de plusieurs années, mais qui est particulièrement
d’actualité. Beaucoup d’enseignants, à juste titre,
reprochent à l’institution, surtout dans notre matière,
de ne pas avoir proposé davantage d’exemples de travail non pas idéal, mais tout à fait « normal » et dans
un cadre réaliste. Nous souhaitons avoir contribué ici
à cette demande, en présentant un ensemble cohérent, chacun de nous ayant relu les séquences des
autres, ces séquences étant aussi nourries de nos lectures et de nos échanges. En particulier, nous nous
référons à tout le travail mené sur le sujet par l’équipe
des Cahiers pédagogiques, associé ici à la NrP pour
vous inviter à une démarche novatrice… qui, nous
l’espérons, ne le sera plus demain ! À vous de jouer !
Et de nous apporter, sur le forum de la NrP, vos
remarques, vos suggestions, vos interrogations…
REPÈRES BIBLIOGRAPHIQuES
• Cahiers pédagogiques : Travailler par compétences n°475,
octobre 2009, coordonné par Vincent Guédé et anne
Hirribaren, du collège Clisthène de Bordeaux.
Un document essentiel, complété sur le site des
cahiers pédagogiques par d’autres contributions.
Disponible uniquement en numérique.
• Cahiers pédagogiques : Maîtrise de la langue. Compétence 1
du socle commun, n°495, février 2012, coordonné par
anne Hiribarren et Jean-michel Zakhartchouk.
maitrise de la langue et compétences : un couple que
l’on peut apprendre à faire danser souplement.
• Travail par compétences et socle commun, CrDP
d’amiens et CraP, Jean-michel Zakhartchouk (avec
la collaboration de rolande Hatem), préface d’alain
Bouvier (Haut conseil de l’éducation) et postface de
Philippe Perrenoud.
De nombreux exemples de pratiques d’un travail
par compétences, en France et à l’étranger. Et une
réflexion de fond, sans langue de bois…
Et SuR LA POÉSIE
• Cahiers pédagogiques : Poésie poésies, n°417, coordonné
par mireille Carton et Christophe roiné, octobre
2003.
La poésie à l’école nous confronte à des
« impossibles » : impossible de la soumettre à une
définition stable et définitive, de la réduire à une
forme canonique, impossible de l’enfermer dans
la seule discipline littéraire et linguistique et de
l’épuiser par une seule explication, une seule lecture…
Comment, à l’école, l’aborder sans la réduire à une
activité de « saisie de sens » ?
Ce dossier donne la parole aux enseignants, élèves,
didacticiens, poètes, éditeurs, en essayant de garder à
la poésie un peu de son mystère et de sa fantaisie. Il se
veut une source d’inspiration, d’envies, de « possibles » :
témoignages, nombreuses propositions concrètes pour
la classe : carnets d’écriture, répertoires, fabrication
d’anthologies, collages, mises en voix…
mars 2014
NRP COLLÈGE
19
6e Séquence
1
Fables à lire et à écrire
Par Grégory Michel
Présentation et problématique
• Parler de fables avec les élèves de sixième, c’est
toujours parler de textes qu’ils connaissent. Certains
citeront et même réciteront de mémoire les vers de
« La cigale et de la fourmi » ou ceux du « Corbeau et du
renard » qu’ils ont découverts les années antérieures.
D’autres associeront d’emblée le mot fable à l’auteur
Jean de La Fontaine. Il nous faudra donc partir des
connaissances des élèves pour amorcer la séquence et
pour souligner les limites de leurs connaissances.
• Les programmes de français préconisent une « initiation
à la poésie ». Cette découverte du texte versifié devrait
être faite avant l’étude de la fable. ainsi, on amènera les
élèves à analyser le genre de la fable comme un texte qui
marie les registres narratif et poétique.
• Lire ou écrire des fables, c’est aussi s’interroger sur les
enjeux de ces textes qui mettent en scène des animaux :
les fables ne sont-elles destinées qu’à endormir les
enfants, comme pourraient le penser les élèves ?
Le choix du corpus
Illustration de Félix Lorioux (1872-1964).
Les
+ numériques
Dans cette séquence, vous pourrez
exploiter les ressources multimédia
suivantes*, disponibles sur le site NRP
dans l’espace « Ressources abonnés ».
Rendez-vous sur
http://www.nrp-college.com.
Réviser la versification
Évaluation : les reprises et substituts du nom
Évaluation : Savez-vous reconnaître une fable ?
* Certaines de ces ressources sont
réservées aux abonnés numériques
(abonnés Papier + numérique
ou 100 % numérique).
20
2014
NRP
mars
2014
NRPCOLLÈGE
COLLÈGE MARS
• Il faudra donc bousculer certaines idées préconçues,
comme celle qui fait de La Fontaine le créateur du genre
de la fable ; pour ce faire, nous relirons Ésope.
• La séquence s’appuiera donc sur les fables suivantes :
« Le Lion et le renard », Ésope ; « Le Lion malade et le
renard », La Fontaine ; « Du rat et de la Grenouille »,
Ésope ; « Le Loup et les sept Chevreaux », Grimm ;
confronté à la fable « Le Loup, la Chèvre et le Chevreau »,
de La Fontaine (voir fiche élève 1) ; « Le Petit Poisson et
le Pêcheur », La Fontaine ; « D’un Chien et d’un Voleur »,
Ésope ; « Les Deux Coqs », La Fontaine.
La séquence proposée
• La lecture des fables convoquera des acquis en
versification et en narration. C’est pourquoi des
séquences telles que celles sur le conte et sur la poésie
doivent être conduites avant l’étude des fables.
• La séquence propose trois étapes pour amener les
élèves à produire une fable :
– l’étape 1 consiste à contextualiser le genre de la fable ;
– l’étape 2 apportera les ressources à mobiliser pour
réussir l’activité finale ;
– lors de l’étape 3, qui correspond à la situation
complexe, les élèves écriront une fable.
Fables à lire et à écrire
Support
6e Séquence 1
• Fables d’Ésope, de La Fontaine, et de Grimm.
• La Fontaine aux fables, volumes 1, 2 et 3 : 36 fables de La Fontaine interprétées en bande dessinée, éd. Delcourt.
Objectifs • Découvrir l’histoire du genre et ses caractéristiques à travers des auteurs d’époques différentes.
• Maîtriser les techniques nécessaires pour écrire une fable (construction narrative ; versification ; caractérisation
des personnages).
1
• 7 séances de 1 ou 2 heures pour un total de 8 h 30.
Contextualiser
le genre de la fable
SÉaNCE 1. Découvrir l’histoire d’un genre
➔ Lecture
Supports : documents sur l’époque et le contexte historique
Objectif : connaître l’histoire du genre
Durée : 1 heure 30
SÉaNCE 2. Observer l’évolution du genre
➔ Lecture
Supports : « Le Lion et le Renard », d’Ésope (Fables, viie-vie s. av. J.-C)
et « Le Lion malade et le Renard » de La Fontaine (Livre VI, XIV des
Fables)
Objectif : étudier l’inspiration antique et son dépassement
Durée : 1 heure
SÉaNCE 3. Étudier la versification d’un texte
➔ Écriture
ÉtaPE
Supports : « Du Rat et de la Grenouille », d’Ésope
Objectif : réviser les notions de versification et réécrire un texte en
vers
Durée : 1 heure
2
Travail sur
les ressources à mobiliser
SÉaNCE 4. Vers une définition de la fable
➔ Lecture
Supports : « Le Loup et les sept Chevreaux » des frères Grimm,
confronté à la fable « Le Loup, la Chèvre et le Chevreau », de La
Fontaine (voir fiche élève 1)
Objectif : analyser la construction narrative de la fable
Durée : 1 heure
SÉaNCE 5. Reprises et substituts du nom
➔ Étude de la langue, écriture
Support : « Le Petit Poisson et le Pêcheur », La Fontaine
Objectifs : éviter les répétitions et caractériser les personnages
Durée : 1 heure
SÉaNCE 6. La caractérisation des personnages
➔ Écriture
ÉtaPE
Support : « Du Corbeau et du Renard », Ésope
Objectifs : améliorer, enrichir un écrit
Durée : 1 heure
3
Retour à
la situation d’écriture
SÉaNCE 7. Écrire une fable à partir d’une bande
dessinée
➔ Écriture
Supports : « Les Deux Coqs », La Fontaine ; La Fontaine aux fables,
volumes 1, 2 et 3 : 36 fables de La Fontaine interprétées en bande
dessinée (Delcourt, 2010).
Objectif : réinvestir les ressources mobilisées en réécrivant une fable
Durée : 2 heures
Évaluation de compétences en lien avec le socle commun
Situer, et acquérir des références culturelles
• Connaître le nom, l’auteur, le contexte et l’intérêt des œuvres
étudiées.
• Situer des œuvres dans l’histoire littéraire et culturelle.
Mémoriser
• Savoir restituer des connaissances, maîtriser son cours.
• Réciter un texte.
Écrire
• Écrire un texte narratif en respectant les différentes étapes du récit.
• Caractériser les personnages.
• Rédiger en faisant preuve d’invention.
Maîtriser la langue
• Rédiger des phrases correctes, répondre par des phrases complètes.
• Mettre en forme et ponctuer un texte.
• Rédiger un texte cohérent et entier.
Lire – Comprendre
• Dégager les idées essentielles d’un texte ou d’une image.
• Relever des citations pertinentes pour justifier une réponse.
1
ÉtaPE
ÉtaPE
Durée
contextualiser
le genre de la fable
Séance 1
LEcTUrE
Découvrir l’histoire d’un genre
Cette première activité consiste à apporter des connaissances aux
élèves sur les origines de la fable, sur La Fontaine et le contexte
dans lequel il écrit. Grâce à des exercices proposés sous forme de
jeux, les élèves répartis par groupes de 3 ou 4 seront acteurs et
pourront ainsi mieux s’approprier les connaissances historiques
nécessaires.
Le professeur leur distribue des documents qui serviront de base
à l’activité. En voici quelques exemples :
Doc 1. origine du mot « fable »
Le mot fable nous vient du mot fabula qui vient du latin
classique et qui signifie « propos, parole ». On appelle
fabuliste une personne qui écrit des fables.
Doc 2. Le genre de la fable
• Le genre de la fable remonte à l’Antiquité avec le fabuliste grec Ésope (viie-vie siècle av. J.-C.). On écrit aussi
des fables au moyen Âge.
• Au xviie siècle, Jean de La Fontaine écrit des fables en
s’inspirant des auteurs de l’antiquité. Il en écrira 242 !
mars 2014
NRP COLLÈGE
21
Doc 3. Jean de La Fontaine
Jean de la Fontaine, né le 8 juillet 1621 à ChâteauThierry, est issu d’une famille bourgeoise. Après ses
études de droit, La Fontaine devient avocat. Il commence
ensuite à écrire, fait la connaissance à Paris de Nicolas
Fouquet, surintendant des Finances de Louis XIV (équivalent du ministre des Finances) qui vient de se faire
construire le somptueux château de Vaux-le-Vicomte.
Fouquet, amateur d’art, lui accorde pension et protection : c’était en effet un usage courant à cette époque,
pour des personnes riches ou haut placées, de recevoir
des écrivains et de leur donner une pension, c’est-à-dire
de l’argent, pour les aider à se consacrer à leur activité
littéraire. Mais en 1661, Fouquet est arrêté et emprisonné à vie, accusé d’avoir détourné l’argent de l’État.
5. La Fontaine est un auteur de l’Antiquité.
Après chaque affirmation, les élèves précisent si l’affirmation est
vraie ou fausse et citent un passage des textes pour justifier leur
réponse. (2 points par réponse)
Phase de mémorisation
Comme précédemment, le professeur écrira au tableau, une par
une, les questions suivantes :
1. De quel auteur La Fontaine s’inspire-t-il pour écrire ses fables ?
2. Par quel moyen La Fontaine peut-il subvenir à ses besoins en
tant qu’écrivain ?
3. Pourquoi Louis XIV n’aime-t-il pas La Fontaine ?
4. À qui le premier recueil des fables est-il dédié ?
5. À quoi sert une fable ?
Sur feuille, les élèves répondent de mémoire, sans consulter les
documents (2 points par réponse juste).
Phase de synthèse
Doc 4. Le succès
Le roi apprécie peu La Fontaine auquel il reproche ses
amitiés avec Nicolas Fouquet. La Fontaine continuera
donc à écrire avec le soutien de la duchesse d’Orléans
puis celui de Mme de La Sablière.
C’est seulement à 47 ans, en 1668, qu’il publie son premier recueil de fables. Il dédie son ouvrage au fils de
Louis XIV (le Dauphin) qui n’a alors que 6 ans. Le recueil est un succès. La Fontaine fréquente ainsi les écrivains célèbres de son temps comme Charles Perrault.
En 1678, il publie le deuxième recueil des Fables.
Puis en 1693, le troisième recueil.
Il meurt le 16 avril 1695.
L’activité se déroulera en 4 phases : une phase de repérage, une
phase d’analyse, une phase de mémorisation et une phase de
synthèse.
Phase de repérage
Vous laisserez les élèves découvrir les documents pendant 10 minutes. Ils devront être informés du temps limité.
Lors de cette première phase, le professeur écrira au tableau, une
par une, les questions suivantes :
1. Dans quel document parle-t-on des origines de la fable ?
(doc. 2)
2. Dans quel document donne-t-on l’origine du mot « fable » ?
(doc. 1)
3. Quel document évoque les rapports amicaux entre Fouquet et
La Fontaine ? (doc. 3)
4. Dans quel document apprend-on que La Fontaine devient
proche de la Cour ? (doc. 4)
Après chaque question, au signal du professeur, un élève du
groupe lève le document qui contient la bonne réponse.
Si vous décidez de donner à cette activité la forme d’un jeu, vous
pourrez attribuer 2 points par bonne réponse.
••Les élèves rédigent à plusieurs mains un paragraphe argumenté
avec toutes les informations glanées (2 points par information
juste).
Pour les élèves en difficulté, vous pouvez donner les mots clés des
textes, comme La Fontaine, fabula, Dauphin, fabuliste… Après la
mise en commun, avec les propositions des élèves, vous rédigez
un paragraphe de synthèse qui servira de trace écrite.
Le groupe qui aura remporté le plus de points a gagné.
Voici un exemple de paragraphe de synthèse. En supprimant les
mots en gras, on pourra en faire un texte à trous que les élèves
complèteront.
••
••
••
Le mot « fable » vient du latin fabula qui signifie
« propos, parole ». Au xviie siècle, La Fontaine
n’est pas l’inventeur des fables. Il s’inspire d’Ésope,
fabuliste de l’Antiquité.
À 47 ans, La Fontaine écrit les premières fables
pour le Dauphin, fils de Louis XIV. C’est un succès
pour ces textes qui mènent en scène des animaux au
comportement humain. Ces fables se terminent très
souvent par une morale qui nous apprend une vérité
sur le monde qui nous entoure.
Phase d’analyse
Le professeur écrira au tableau les affirmations suivantes :
1. Fouquet était le Dauphin.
2. La Fontaine est celui qui écrit les premières fables.
3. Le mot « fable » veut dire « pension versée par quelqu’un ».
4. Les fables de La Fontaine sont un succès qui lui permet de vivre
dans le luxe.
22
NRP COLLÈGE
mars 2014
Gravure de Charles-Nicolas Cochin (1715-1790).
Fables à lire et à écrire
Séance 2
6e Séquence 1
le c tu r e
Observer l’évolution du genre
••On fera lire les deux textes proposés dans la fiche élève 1 : « Le
Lion et le Renard » d’Ésope et « Le Lion malade et le Renard », de
La Fontaine (voir page 27).
••Par une étude comparative, il s’agira de mettre en avant l’inspiration antique : le thème, les personnages, la brièveté du récit mais
aussi l’appropriation de La Fontaine qui versifie les histoires.
••Cette analyse pourra aussi être présentée sous forme d’un tableau comme celui-ci :
Ressemblances
Différences
Le titre
1. Quelle est la classe
grammaticale du mot ajouté
dans le titre de La Fontaine ?
Les personnages
2. Qui sont les personnages ?
3. Comment sont-ils nommés ?
4. En quoi se comportent-ils
comme des animaux ?
L’écriture de l’histoire
5. Que raconte l’histoire ?
6. Comment est-elle racontée ?
Le dialogue
7. Pourquoi les personnages
ressemblent-ils à des humains ?
La morale
8. Où se trouve la morale ?
9. Que dit-elle ?
En conclusion, avec les élèves, vous reprendrez toutes les questions pour rédiger un paragraphe argumenté qui souligne les
ressemblances entre les deux fables (le titre, les personnages qui
sont des animaux et se comportent comme des humains) et les
différences (l’écriture versifiée chez La Fontaine et l’absence de
morale ; celle-ci est à déduire). Vous pouvez aussi demander de
compléter le corrigé ci-dessous :
I. La fable de La Fontaine ressemble à celle
d’Ésope car :
– on retrouve les mêmes personnages : un renard
et un lion ;
– les animaux ne portent pas de noms, mais
représentent l’espèce ;
– ils se comportent comme des animaux : ils
se mangent les uns les autres. Ils vivent dans des
tanières ou des cavernes ;
–ils se comportent aussi comme des humains : ils
parlent ; ils pensent.
II. La Fable de La Fontaine est différente de celle
d’Ésope car :
– La Fontaine ajoute l’adjectif « malade » au titre ;
– La Fontaine écrit en vers, Ésope en prose ;
– chez Ésope, la morale est clairement écrite.
Chez La Fontaine, il faut la déduire.
Séance 3
é c r itu r e
Étudier la versification d’un texte
••Vous ferez lire aux élèves une fable d’Ésope.
Un site utile : http://www.amiens.iufm.fr/amiens/cahier/biblio/
Fontaine/defesope.htm
Par exemple :
Du Rat et de la Grenouille
Dans le temps que la guerre était allumée entre les Grenouilles et les Rats, une Grenouille fit un Rat prisonnier,
et lui promit de le traiter favorablement. Elle le chargea
sur son dos pour faire le trajet d’une rivière qu’elle était
obligée de passer pour rejoindre sa troupe. Mais cette
perfide se voyant au milieu du trajet, fit tous ses efforts
pour secouer le Rat et pour le noyer. Il se tint toujours
si bien attaché à la Grenouille, qu’elle ne put jamais s’en
défaire. Un oiseau de proie les voyant se débattre de la
sorte, vint tout à coup fondre dessus, et les enleva pour
en faire sa proie.
••Vous pourrez faire repérer dans ce texte les différentes parties
narratives.
••Vous demanderez ensuite aux élèves de réécrire cette fable à
plusieurs ou seul, avec les critères de réussite explicités dans le
tableau de la page 24.
mars 2014
NRP COLLÈGE
23
Le sujet : « Je réécris une fable d’Ésope à la manière de La Fontaine. Mon texte, d’environ 10 lignes, sera écrit en vers et en rimes.
Il se terminera par une morale.
Critères d’évaluation
Mon texte racontera la même histoire que celle d’Ésope : j’utilise
le même lieu, les mêmes personnages. Je peux faire parler les
personnages. »
Validé
En cours de validation
Non validé
1. Mon texte respecte l’histoire d’Ésope.
2. Mon texte est écrit en vers et en rimes.
3. Mon texte contient une morale clairement rédigée.
Étape
2
Travail sur les ressources
à mobiliser
Séance 4
le c tu r e
Vers une définition de la fable
Il s’agira d’amener ici les élèves à formuler une définition construite
du mot fable. Pour cela, nous comparerons le conte bien connu des
élèves « Le Loup et les sept Chevreaux » des frères Grimm à la fable
de La Fontaine « Le Loup, la Chèvre et le Chevreau » (Fables, Livre IV,
XV), dont le texte est donné ci-dessous.
Le Loup, la Chèvre et le Chevreau
La Bique1, allant remplir sa traînante mamelle,
Et paître l’herbe nouvelle,
Ferma sa porte au loquet,
Non sans dire à son Biquet :
« Gardez-vous, sur votre vie,
D’ouvrir que l’on ne vous die2,
Pour enseigne3 et mot du guet4 :
Foin5 du loup et de sa race ! »
Comme elle disait ces mots,
Le loup de fortune6 passe ;
Il les recueille à propos,
Et les garde en sa mémoire.
La Bique, comme on peut croire,
N’avait pas vu le glouton.
Dès qu’il la voit partie, il contrefait son ton
Et d’une voix papelarde7
Il demande qu’on ouvre, en disant : « Foin du Loup ! »
Et croyant entrer tout d’un coup.
Le Biquet soupçonneux par la fente regarde :
« Montrez-moi patte blanche, ou je n’ouvrirai point »,
S’écria-t-il d’abord8. Patte blanche est un point
Chez les loups, comme on sait, rarement en usage.
Celui-ci, fort surpris d’entendre ce langage,
Comme il était venu s’en retourna chez soi.
Où serait le Biquet, s’il eût ajouté foi
Au mot du guet que de fortune
Notre Loup avait entendu ?
Deux sûretés9 valent mieux qu’une,
Et le trop en cela ne fut jamais perdu.
Jean de La Fontaine, Fables, Livre IV, XV.
1. La chèvre – 2. Dise – 3. Marque de reconnaissance – 4. Mot
de passe – 5. Attention – 6. – Par hasard – 7. D’une voix hypocrite – 8. Aussitôt – 9. Deux précautions.
24
NRP COLLÈGE
mars 2014
Cette étude comparative permettra de mettre en avant les ressemblances avec le récit : la fable raconte une histoire ; et avec le
poème : elle est écrite en vers.
Consignes
Sur les deux textes
1. En commençant par « C’est l’histoire de… », résume l’histoire en
une ou deux phrases.
2. Dans les deux textes, entoure en vert les noms de tous les personnages.
3. Dans les deux textes, entoure en bleu la situation initiale de
l’histoire et en noir l’élément perturbateur.
Sur le conte de Grimm
4. Dis si ces affirmations sont vraies ou fausses puis souligne pour
chaque réponse une phrase du texte qui justifie ta réponse.
a. La vieille chèvre a 7 enfants.
b. La vieille chèvre se rend chez sa sœur.
c. La première fois, les chevreaux reconnaissent le loup à sa voix.
d. La deuxième fois, les chevreaux reconnaissent le loup à sa
démarche.
e. La troisième fois, les chevreaux ouvrent.
f. Le plus grand chevreau se cache dans la pendule.
Sur la fable de La Fontaine
5. Dans la fable, combien de fois le loup frappe-t-il à la porte ?
6. a. Combien comptes-tu de vers ?
b. Combien comptes-tu de syllabes au vers 1 ? au vers 2 ?
7. a. À quoi correspondent les deux derniers vers ?
b. Les retrouve-t-on dans le conte des frères Grimm ?
c. À quoi ces vers servent-ils ?
Pour conclure
Je rédige une conclusion en commençant par « Une fable ressemble à un conte car… » puis je poursuis par « elle ressemble aussi
à un poème car…. ».
Gravure de Jean-Baptiste Oudry (1686-1755), (détail).
Fables à lire et à écrire
étude de la langue + écriture
Reprises et substituts du nom
••Très souvent, La Fontaine caractérise les personnages de ses
fables non pas à l’aide de longs discours, mais par la manière
dont il les nomme. Par exemple, le « renard » est appelé le « grand
croqueur de poulets » et le lion qualifié de « roi des animaux ».
Les élèves se rendront compte que varier les substituts évite les
répétitions dans un texte, mais permet aussi de caractériser les
personnages de la fable.
La fiche élève 2 propose tout d’abord d’identifier les substituts
du « petit poisson » dans la fable « Le Petit Poisson et le Pêcheur »,
puis des exercices d’application sur les reprises pronominales, les
substituts du nom ou les périphrases.
••
••
Séance 6
3
Étape
Séance 5
Retour à la situation
d’écriture
Séance 7
é c r itu r e
Écrire une fable à partir
d’une bande dessinée
••Présentées sous cette forme, les consignes données à l’élève per-
mettront de réinvestir le contexte culturel des premières activités
(l’époque à laquelle a vécu La Fontaine – la cour de Louis XIV – les
commandes littéraires…).
Paris, le 27 avril
Cher fabuliste,
é c r itu r e
Mon fils, le Dauphin, entre dans l’adolescence et je m’inquiète de le voir
faire les yeux doux aux demoiselles de la cour. Il est encore bien jeune et
ne connaît pas les dangers de l’amour. Il aime affronter ses rivaux. Il se
croit le plus fort, le plus beau, le plus intelligent, et cela m’effraie. Nous
savons bien tous les deux qu’en matière d’amour ce n’est pas toujours le
plus sûr de lui qui est récompensé ! Par conséquent, je vous saurais gré
de lui écrire une jolie fable comme vous en avez le secret pour le mettre
en garde. Peut-être qu’avec vous, il entendra raison.
La caractérisation
des personnages
••Il s’agira ici de réécrire une fable d’Ésope en ajoutant des périphrases à la manière de La Fontaine.
••Vous ferez lire la fable d’Ésope : « Du Corbeau et du Renard », puis
vous demanderez aux élèves de remplacer les mots en caractères
gras par un synonyme ou une périphrase qui donne une information sur l’animal. Exemple : pour amuser le Corbeau → pour
amuser le sombre oiseau.
Un Corbeau s’était perché sur un arbre, pour manger un fromage
qu’il tenait en son bec. Un Renard qui l’aperçut, fut tenté de lui
enlever cette proie. Pour y réussir et pour amuser le Corbeau, il
commença à le louer de la beauté de son plumage. Le Renard
voyant que le Corbeau prenait goût à ses louanges : « C’est grand
dommage, poursuivit-il, que votre chant ne réponde pas à tant de
rares qualités que vous avez. » Le Corbeau voulant persuader le
Renard que son chant n’était pas désagréable, se mit à chanter, et
laissa tomber le fromage qu’il avait au bec. C’est ce que le Renard
attendait. Il s’en saisit incontinent, et le mangea aux yeux du Corbeau, qui demeura tout honteux de sa sottise, et de s’être laissé
séduire par les fausses louanges du Renard.
Critères d’évaluation
6e Séquence 1
Votre roi,
Louis XIV
••Pour faciliter l’écriture, vous donnerez comme support une
planche de bande dessinée avec les phylactères vides (La Fontaine aux fables, volume 2). Il s’agit de la fable de La Fontaine « Les
deux coqs ».
À l’oral, vous demanderez aux élèves d’expliciter les liens avec le
billet envoyé par Louis XIV, puis de raconter l’histoire des deux
coqs illustrée par la bande dessinée.
Vous listerez avec eux les critères de réussite :
V : validé ;
ECV : en bonne voie, en cours de validation ;
NV : non validé.
••
••
Évaluation
personnelle
Évaluation du
professeur
Commentaires
1. Ma fable contient plusieurs étapes (un début
– un élément qui déclenche l’action –… )
2. Ma fable est cohérente avec la bande dessinée.
3. Mes expressions pour nommer les personnages
sont variées.
4. Mon texte contient des rimes, des vers…
5. Ma fable se termine par une morale.
Remarques :
– pour les élèves en difficulté, vous n’exigerez pas un texte rimé. La morale pourra être celle du billet envoyé par Louis XIV ;
– la production écrite pourra s’accompagner d’une réponse à envoyer au roi (p. 26).
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NRP COLLÈGE
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Histoire
arts
des
Les fables de La
Fontaine sont
sans doute un des
classiques de la
littérature française
qui a été le plus
souvent illustré.
si le lien entre les
mots et les images
varie beaucoup
d’un illustrateur
à l’autre, chagall
se distingue
particulièrement
entre tous.
avec cette œuvre
en effet, pas
d’anthropomorphisme
ni d’aide à ce
découpage
chronologique de
l’histoire auxquels les
élèves sont habitués,
y compris par les
travaux d’illustration
qu’ils ont eux-mêmes
réalisés en primaire.
On se proposera donc
de les sensibiliser à
cet univers plein de
naïveté, et de fantaisie
qui revisite la fable.
Retrouvez
le questionnaire
élève de cette analyse
et son corrigé en
ligne.
26
NRP COLLÈGE
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Fabuleuses fables
Marc Chagall,
Le loup et l’agneau,
gouache, 1923-1927.
Chagall, un illustrateur controversé…
En 1926, ambroise Vollard, éditeur et marchand de tableaux parisien très connu,
demande à Chagall d’illustrer cent fables de La Fontaine. Le professeur pourra se
reporter utilement au dossier réalisé dans l’académie de Grenoble par le groupe
départemental « Culture humaniste »1 pour connaître l’histoire de ce livre.
Le projet est controversé dès le début. Certains critiques se déchaînent, allant
jusqu’aux allusions antisémites : trop bariolé, pas assez classique, pas assez universel,
bref un peintre qui « sacrifie à la tâche – comme un vulgaire impressionniste ».
En outre, les cent gouaches que Chagall a peintes ne sont pas éditées, le rendu
des couleurs n’étant pas satisfaisant. Les toiles sont exposées, puis vendues. Chagall
change alors de technique : il grave des plaques en vue d’estampes. Entre les aléas
techniques et les vicissitudes historiques, le projet mettra du temps à voir le jour : ce
n’est qu’en 1952 que paraîtra le livre en deux volumes, avec un résultat différent du
projet initial.
… mais peut-on parler d’ « illustration » ?
Contrairement à la plupart des illustrations de La Fontaine, le tableau n’a pas
nécessairement besoin de l’éclairage du texte. Il peut être intéressant dans un premier
temps de ne pas donner son titre aux élèves afin de susciter les remarques sur les couleurs, les formes, la composition et apporter ainsi les précisions utiles sur la manière
de Chagall et son univers : ses origines russes bien sûr, sa fascination pour la nature
et le monde animal datant de son enfance, l’influence du fauvisme pour les couleurs
vives et du cubisme pour la déconstruction des formes (même si Chagall reproche
au cubisme son « réalisme » et son « rationalisme »), enfin cette simplicité naïve extrêmement touchante. L’artiste prône une conception « magique » de la peinture où se
mêlent différents niveaux de perception, dont le rêve ; cette dernière caractéristique a
suscité l’admiration des surréalistes et l’a souvent rapproché de ce mouvement, même
si son œuvre est bien trop unique pour qu’on puisse la rattacher à un courant précis.
Le professeur donnera ensuite le titre du tableau. Il racontera comment Chagall
a peint cette série, c’est-à-dire en écoutant sa femme lire le texte et en l’arrêtant
avant la morale : « ça, ce n’est pas pour moi ». Cela lui permettra de déclencher le
questionnement pédagogique sur les intentions du peintre, le ressenti du spectateur,
et opérer des comparaisons entre plusieurs illustrateurs de La Fontaine pour réfléchir
au statut de l’illustration.
1. http://tinyurl.com/pyedccn
1
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6e Séquence 1
D’Ésope à La Fontaine
Texte 1. Le Lion et le renard
Un lion devenu vieux, hors d’état désormais de
se procurer sa pâture par la force, estima qu’il fallait
jouer de finesse. Il s’installa donc dans une caverne
et s’y coucha, feignant d’être malade : ainsi, tous les
5 animaux qui venaient lui rendre visite étaient pris et
dévorés. Beaucoup avaient déjà péri quand se présenta le renard, qui l’avait percé à jour : s’arrêtant à
bonne distance de la caverne, il prit des nouvelles du
lion. « Ça va mal », répondit le lion, qui lui deman10 da pourquoi il n’entrait pas. « Je l’aurais fait, sans
doute », rétorqua le renard, « si je ne voyais beaucoup
de traces à l’entrée, mais aucune à la sortie. »
De même, à certains indices, les hommes sensés prévoient le danger et l’évitent.
Ésope, Fables, vii-vie s. av. J.-C.
5
10
15
20
Texte 2. Le Lion malade et le renard
De par le roi des animaux,
Qui dans son antre était malade,
Fut fait savoir à ses vassaux
Que chaque espèce en ambassade
Envoyât gens le visiter,
sous promesse de bien traiter
Les Députés, eux et leur suite,
Foi de Lion très bien écrite.
Bon passeport contre la dent ;
Contre la griffe tout autant.
L’Édit du Prince s’exécute.
De chaque espèce on lui députe.
Les renards gardant la maison,
Un d’eux en dit cette raison :
« Les pas empreints sur la poussière
Par ceux qui s’en vont faire au malade leur cour,
Tous, sans exception, regardent sa tanière ;
Pas un ne marque de retour.
Cela nous met en méfiance.
Que sa majesté nous dispense.
Grand merci de son passeport.
Je le crois bon ; mais dans cet antre
Je vois fort bien comme l’on entre,
Et ne vois pas comme on en sort. »
La Fontaine, Fables, Livre VI, XIV, 1668.
Étude comparative
1. Quelle remarque peux-tu faire après avoir lu ces deux
histoires ?
c. Le Renard comprend ce qu’il se passe en voyant du sang
près de la tanière. Vrai ou faux ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
Le mot-caméléon
...................................................................................................
3. Au lieu d’utiliser le nom commun « Lion », La Fontaine
utilise trois autres expressions, lesquelles ?
...................................................................................................
Vrai ou faux ?
...................................................................................................
2. Réécris correctement ces affirmations lorsqu’elles sont
fausses et lorsqu’elles sont vraies, entoure un passage du
texte qui le montre.
Qui est qui ?
a. Le Lion est tombé très malade. Vrai ou faux ?
4. Explique pourquoi ces deux auteurs ont été choisis.
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
b. Le Renard a compris ce que manigance le Lion.
Vrai ou faux ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
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NRP COLLÈGE
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E ÉL È V
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2
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Séquence 1 6e
reprises et substitutions
1. Étudier les reprises et substitutions dans une fable de La Fontaine
Voici le début de la fable « Le Petit Poisson et le Pêcheur »
(Fables, Livre V, III) quelque peu transformé :
Petit poisson deviendra grand,
Pourvu que dieu prête vie au petit poisson ;
mais lâcher le petit poisson en attendant,
Je tiens pour moi que c’est folie :
5 Car de rattraper le petit poisson il n’est pas trop certain.
Un Carpeau, qui n’était encore que fretin,
Fut pris par un pêcheur au bord d’une rivière.
«Tout fait nombre, dit l’homme en voyant son butin :
Voilà commencement de chère et de festin :
10 mettons le petit poisson en notre gibecière. »
Le pauvre Carpillon lui dit en sa manière : […]
1. Après avoir lu ces 11 premiers vers, quel problème
remarques-tu ?
Voici à présent la fin de l’histoire :
« […] Eh bien soit, repartit le Pêcheur ;
Poisson, mon bel ami, qui faites le Prêcheur,
Vous irez dans la poêle ; et vous avez beau dire,
Dès ce soir on vous fera frire. »
Un Tiens vaut, ce dit-on, mieux que deux Tu l’auras :
L’un est sûr, l’autre ne l’est pas.
7. Pour s’adresser au poisson, le pêcheur utilise deux
autres expressions : recopie-les.
...................................................................................................
8. Voici des expressions que tu pourras lire dans les fables
de La Fontaine : retrouve l’animal qu’elles désignent.
1. Dans « Le Corbeau et le Renard », qui est « le phénix des
hôtes de ces bois » ?
...................................................................................................
...................................................................................................
2. Remplace les 4 répétitions (vers 2-3-5 et 10) par un
pronom personnel. (Attention, l’ordre des mots pourra
changer.)
2. Dans « La Grenouille qui se veut faire aussi grosse
que le Bœuf », qui est « la chétive pécore » ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Dans « Le Lion et le Rat », qui est « le roi des animaux » ?
3. Vers 6 à 11 : recopie les deux autres expressions qui
désignent le petit poisson.
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
4. Sur quoi La Fontaine insiste-t-il lorsqu’il désigne le petit
poisson ? Entoure la réponse juste :
5. Dans « La Mouche et la Fourmi », qui est « la fille de l’air » ?
sa force – sa fragilité – sa grandeur – son courage.
5. Donne deux autres expressions que La Fontaine aurait
pu utiliser pour désigner le poisson.
...................................................................................................
6. Le poisson prend la parole pour convaincre le pêcheur
de le remettre à l’eau. Imagine deux arguments qu’il
pourrait formuler. Tu utiliseras les deux expressions
relevées à la question 5.
• Argument :
28
4. Dans « Le Chat, la Belette et le petit Lapin »,
qui est « la dame au nez pointu » ?
.............................................................................
...................................................................................................
6. Dans « Le Chat et un vieux Rat », qui est « la gent trottemenu » ?
...................................................................................................
7. Dans « Le Soleil et les Grenouilles », qui sont « les
citoyennes des étangs » ?
...................................................................................................
9. Invente des expressions avec les animaux « chien »,
« chat », « cheval », « souris » et 2 de ton choix.
...................................................................................................
...................................................................................................
• Argument :
.............................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
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6e Séquence 1
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2. Travailler les synonymes
10. Dans chaque groupe de mots, plusieurs termes
pourraient être employés pour éviter la répétition du mot
en gras. Barre celui qui ne convient pas.
11. Dans chaque groupe, choisis l’un de ces synonymes
et utilise-le dans une phrase qui mettra son sens en
évidence.
1. chien : toutou ; molosse ; Cerbère ; félin.
...................................................................................................
2. danger : péril ; menace ; écueil ; arrêt.
3. calme : tranquillité ; quiétude ; action ; paix.
...................................................................................................
4. bruit : boucan ; vacarme ; tapage ; féerie.
...................................................................................................
5. apprenti : débutant ; inexpérimenté ; professionnel ;
novice.
...................................................................................................
6. distraction : occupation ; amusement ; manifestation ;
passe-temps.
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Travailler les périphrases
12. Recopie les phrases suivantes en remplaçant les mots en gras par trois périphrases de ton invention.
1. À travers la paroi du bocal, Adrien contemplait la grenouille pour laquelle il éprouvait déjà de la tendresse.
...................................................................................................................................................................................................................
2. Le loup bondit sur la malheureuse bête.
...................................................................................................................................................................................................................
3. La mouche virevoltait entre les pattes du cheval.
...................................................................................................................................................................................................................
4. Éviter les répétitions
13. Quelle est la classe grammaticale des mots en gras ? De quels mots évitent-ils la répétition ?
Un Voleur entra furtivement de nuit dans une maison pour la
voler, et offrit un pain au Chien qui la gardait, voulant l’empêcher d’aboyer, en l’amusant à manger ce pain. mais ce fidèle gardien le refusa, et lui dit : « malheureux, je connais ton intention.
Tu veux m’empêcher d’aboyer, pour voler avec plus de liberté le
bien de mon maître ; mais je me garantirai de ta tromperie, et je
n’accepterai point tes présents. » alors le Chien se mit à aboyer
avec tant de violence, que tous les domestiques de la maison se
réveillèrent au bruit qu’il fit, et donnèrent la chasse au Voleur.
Ésope, « D’un Chien et d’un Voleur », Fables.
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NRP COLLÈGE
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5e Séquence
2
« Paysages poétiques, paysages
intérieurs : comment les lieux
permettent d’exprimer les émotions »
Par Jérôme Dewasch
Présentation et problématique
• Il s’agit ici d’amener les élèves à percevoir que
l’évocation d’un paysage ne se réduit pas à un tableau
descriptif mais fait naître et permet aussi au poète
d’exprimer des émotions. Cet approfondissement du
genre poétique s’inscrit dans les programmes de 5e
qui invitent à envisager davantage « les formes et leurs
significations ».
• Pourquoi favoriser ici une écriture poétique ? sans
doute parce qu’elle amène les élèves à mobiliser une
plus grande attention aux mots eux-mêmes, à leur
choix, à leur usage. Ce qui contribue à développer
une compétence qui va bien au-delà de la séquence.
Le choix du corpus
• Nous avons choisi des poèmes des xixe et xxe siècles
Les
+ numériques
Dans cette séquence, vous pourrez
exploiter les ressources multimédia
suivantes*, disponibles sur le site NRP
dans l’espace « Ressources abonnés ».
Rendez-vous sur
http://www.nrp-college.com.
Apprivoiser la poésie, atelier d’écriture
Travailler le vocabulaire des sentiments
Banque d’images : décrire un paysage
* Certaines de ces ressources sont
réservées aux abonnés numériques
(abonnés Papier + numérique
ou 100 % numérique).
30
NRP
2014
mars 2014
NRPCOLLÈGE
COLLÈGE JANVIER
qui offrent cet accès au sens, non pas forcément
facile, mais sensible. Ce choix de poèmes « célèbres »
s’inscrit aussi dans une volonté de transmission
d’une culture.
• De même, dans cette séquence, nous privilégions le
recours à l’image ou à l’œuvre picturale, capables de
stimuler impressions et imagination chez les élèves.
La séquence proposée
• réagir face à un document iconographique, face
à un poème, favorisera une approche sensible du
thème et engagera déjà une réflexion sur l’écriture
poétique.
• Il s’agira ensuite, selon une logique de construction
de compétences, de mobiliser un certain nombre
de ressources qui aident à la production finale en
enrichissant et affinant l’écriture : expression des
émotions, des sensations, travail sur la langue, sur les
mots, les images, les rythmes et les sons.
• L’écriture finale d’un poème à partir d’une image
permettra de mobiliser les ressources privilégiées
dans ce parcours, et d’évaluer l’acquisition de
compétences d’écriture.
Paysages poétiques, paysages intérieurs
Support
5e Séquence 2
• Victor Hugo, « Demain, dès l’aube… » (Les Contemplations, 1856) ;
• Paul Verlaine, « Chanson d’automne » (Poèmes saturniens, 1866), « Il pleure dans mon cœur… »
(Romances sans paroles, 1874) ;
• Guillaume Apollinaire, « Le Pont Mirabeau » (Alcools, 1913) ;
• Photographie représentant un paysage ;
• Henri Rivière, Coucher de soleil (1898), voir p. 35.
Objectifs • Approfondir sa culture patrimoniale au contact d’œuvres et d’écrivains majeurs des XIXe et XXe siècles.
Approfondir sa connaissance du genre poétique, en mettant notamment l’accent sur le rapport entre
la forme et le sens. Écrire un texte poétique, personnel, en mobilisant les ressources étudiées.
1
• Une douzaine d’heures.
Du paysage
à la poésie
Séance 1. Paysages et émotions
➔ Expression orale, lexique, étude de texte
Supports : • Une photographie représentant un paysage
• Apollinaire, « Le Pont Mirabeau ».
Objectifs : • Décrire une image, exprimer des impressions, des
sentiments • Comprendre les émotions liées au paysage poétique
évoqué.
Durée : 2 heures.
Séance 2. Décrire/ressentir
➔ Écriture, lexique
ÉtaPE
Objectifs : • Écrire à partir d’un paysage choisi • Réfléchir sur l’écriture
poétique.
Durée : 2 heures.
2
Poésie
du paysage
Séance 3. Émotions des poètes
➔ Étude de textes
Supports : • V. Hugo, « Demain, dès l’aube… » • P. Verlaine, « Chanson
d’automne », « Il pleure dans mon cœur… » • Fiche élève 1
Objectifs : • Identifier le rapport entre paysage et sentiment
• Comprendre de quelle manière le paysage est évoqué et non décrit
• Étudier la langue poétique.
Durée : 3 heures.
Séance 4. Dire l’émotion des poètes
➔ Expression orale
Supports : • V. Hugo, « Demain, dès l’aube… » • P. Verlaine « Il pleure
dans mon cœur… » • G. Apollinaire, « Le Pont Mirabeau ».
Objectifs : Mettre en voix les poèmes du corpus.
Durée : 1 heure
Séance 5. À nous la poésie !
➔ Étude de la langue
ÉtaPE
Objectifs : • Pratiquer des exercices d’écriture (exprimer une émotion,
une sensation, utiliser des images poétiques) • Fiche élève 2.
Durée : 2 heures.
3
Mon paysage,
mon poème
Séance 6. Écriture poétique
Support : Une image choisie ou Henri Rivière, Coucher de soleil
Objectifs : Produire un texte poétique en mobilisant les ressources
de la langue.
Durée : 2 heures.
Évaluation de compétences en lien avec le socle commun
Dire, lire, écrire
• Manifester, par des moyens divers, sa compréhension de textes
variés. (y compris par la lecture à haute voix)
• Utiliser ses connaissances sur la langue, savoir faire appel à des
outils variés pour améliorer son texte écrit
avoir des connaissances et des repères relevant de la
culture littéraire et approfondir sa connaissance des œuvres
patrimoniales
• Situer dans le temps et dans l’espace des événements, des œuvres
littéraires ou artistiques
• Établir des liens entre les œuvres (littéraires, artistiques) pour mieux
les comprendre
Lire et pratiquer différents langages
• Connaître et pratiquer diverses formes d’expression à visée littéraire.
• Écrire un texte poétique, en utilisant ses capacités de raisonnement,
ses connaissances sur la langue, en respectant des consignes
données (utilisation du lexique, des techniques poétiques…)
Faire preuve de sensibilité, d’esprit critique, de curiosité
• Être sensible aux enjeux esthétiques et humains d’un texte littéraire
et exprimer des émotions à l’écrit
1
ÉtaPE
ÉtaPE
Durée
Du paysage
à la poésie
Séance 1
EXPrEssIon orALE,
L E X I qU E , É T U D E D E T E X T E
Paysages et émotions
• La première séance permet d’entrer de manière sensible dans la
séquence. Prendre appui sur une image (ici une photographie)
pour que les langues se délient. Vous pouvez partir du scénario
pédagogique suivant :
1. Décrivez la photographie.
2. Que peut représenter cette photographie pour son auteur ?
3. Quels sentiments fait-elle naître en vous ?
Le paysage peut donc renvoyer à un souvenir, à un instant qui fait
naître des émotions. Laisser le champ ouvert à l’interprétation
personnelle conduit aussi à initier ce lien entre lieu et expression
des sentiments, et à redéfinir un lexique des émotions qu’il n’est
pas toujours évident de maîtriser : la nostalgie, la mélancolie, la
tristesse, la joie… Cette première « découverte » peut faire l’objet
d’une synthèse écrite afin de mettre dès à présent en jeu des
compétences écrites d’expression.
mars 2014
NRP COLLÈGE
31
••Le poème d’Apollinaire engage ensuite une réflexion sur l’écriture
poétique. Par un jeu de questions autour du texte, la lecture du
« Pont Mirabeau » doit mettre en évidence le lien entre le paysage
décrit (la Seine) et le ressenti du poète (amours passées, nostalgie,
conscience du temps qui passe à travers l’évocation de l’écoulement du fleuve).
Questionnaire de lecture
1. Quel paysage est décrit dans ce poème ?
2. Relevez les termes associés à ce paysage.
3. Quels sentiments le poète exprime-t-il ?
4. Relevez le champ lexical des émotions.
5. Que représente pour le poète l’eau qui s’écoule ?
6. Regardez le poème tel qu’il se présente : que vous évoque sa
forme ?
7. Question de synthèse (trace écrite personnelle) : quel lien y a-til entre le paysage que le poète décrit et ses sentiments ?
Séance 2
é c r itu r e , lexi q ue
Décrire/ressentir
••Vous aurez au préalable demandé aux élèves de venir en classe
avec une image (soigneusement choisie bien sûr) représentant
un paysage. Cela peut être une photo personnelle, ou extraite
d’un magazine, voire d’un manuel si on a du mal à trouver autre
chose. Un paysage qui suscite un ou des sentiments, qui peut
aussi être lié à un souvenir précis. Il s’agit du premier exercice
d’écriture qui conduira à la production finale. La consigne est la
suivante : « Décrivez l’image que vous avez choisie en expliquant
pourquoi vous avez fait ce choix et les sentiments que fait naître
chez vous cette image. » La lecture de quelques extraits permettra
à l’ensemble des élèves d’ouvrir encore le champ des émotions
liées au paysage. On mettra l’accent sur la diversité et la précision
lexicales amenant à affiner l’usage des mots (joie/euphorie, chagrin/tristesse…). Ces relevés permettront d’enrichir le vocabulaire
lorsqu’il s’agira pour les élèves d’écrire à leur tour (Fiche 2).
La séance s’achève sur une réflexion autour de l’écriture poétique :
« Si vous aviez à réécrire votre texte pour en faire un poème, que
changeriez-vous ? Qu’ajouteriez-vous ? Comment le présenteriezvous ? ». On attend évidemment des remarques sur la mise en
forme, sur la versification, sur les images, sur les mots… Phase
qui permet d’évaluer les connaissances des élèves sur le genre
poétique, et d’introduire la seconde étape de la séquence.
••
Questions
1. Quelle place est accordée au paysage dans chacun de ces
poèmes ?
2. Par quels moyens les poètes expriment-ils leurs émotions ?
Éléments de réponses
1. Par leur lexique et leur thématique, ces poèmes mettent en
évidence le lien entre paysage et émotion. Mais l’étude permet
de remarquer que le paysage, s’il est présent, est peu décrit ou
vaguement. Ce qui importe donc, notamment chez Verlaine, ce
n’est pas la description du lieu en tant que tel, mais les émotions
et les sensations qu’il fait naître, les associations qui se créent
entre le paysage extérieur et le paysage intérieur du poète. Une
manière impressionniste d’appréhender le lieu en fonction de son
état d’esprit. Chez Hugo, il est intéressant de noter que le paysage
est traversé, parcouru, à peine décrit, comme si les sentiments
prenaient le dessus et submergeaient le poète dans sa course.
Le contexte d’écriture du poème (la mort de sa fille Léopoldine)
permet d’éclairer l’écriture.
2. Il s’agit ensuite de mettre en évidence le travail que le poète
exerce sur la langue pour exprimer ses émotions. « Artisan du langage », comme on se plaît souvent à le dire aux élèves, le poète,
tel un orfèvre, choisit le mot, choisit les mots, en fonction de leur
sens, de leur force, de leurs sonorités, et, par le contact de ces
mots entre eux, crée un rythme particulier, une musique propre
à l’écriture poétique.
Séance 4
exp r e s s i o n o r ale
Dire l’émotion des poètes
••Cette séance s’inscrit dans la continuité de la précédente. Peut-on
faire l’impasse sur une lecture orale ? Peut-on occulter cette étape
d’appropriation du sens des textes, qui permet aussi d’évaluer
les acquis ? Utilisant les remarques qui ont été faites, notamment
sur les mots, le rythme et les sonorités, vous allez cette fois entreprendre une mise en voix des trois poèmes évoqués depuis le
début de la séquence. Une approche à nouveau sensible pour les
élèves qui, par leur voix, tentent d’exprimer et de faire partager
aux autres les émotions de chacun des trois poèmes. La lecture
orale est l’aboutissement d’une séance où les élèves, dans un premier temps, sont amenés collectivement à réfléchir et à débattre
sur la manière de lire les poèmes, puis, dans un second temps, par
groupes, à préparer la lecture orale d’un des poèmes du corpus.
Cette séance conduit naturellement à proposer par la suite un
apprentissage des poèmes par cœur qui permettra d’évaluer des
compétences du « dire », de s’inscrire dans la connaissance des
textes patrimoniaux, et simplement d’apprécier la manière dont
les élèves ont entendu et compris ces poèmes.
••
Étape
2
Poésie
du paysage
Séance 3
Séance 5
étude de texte s
Émotions des poètes
••La séance s’appuie sur la lecture de trois poèmes patrimoniaux et
sur la fiche 1 qui propose un cadre et un support d’activités aux
élèves. Le professeur adapte les consignes de manière personnalisée : le document permet à certains élèves une autonomie, là où
d’autres auront besoin d’être davantage guidés.
32
NRP COLLÈGE
mars 2014
étude de la la n gue
À nous la poésie !
••Cette séance propose des activités « décrochées » qui permettent
de s’intéresser davantage à des aspects d’écriture et de langue
(Fiche 2). Ces exercices ponctuels sont conçus comme des outils,
des ressources destinés à enrichir l’écrit final. On évite ici la multiplication et la variété pour se recentrer sur un aspect précis : le
choix des mots dans l’écriture. En lien direct avec les programmes,
Paysages poétiques, paysages intérieurs
un premier exercice propose de travailler sur les sensations : l’expression des sentiments passe souvent par la perception sensible
du paysage vu. Un deuxième exercice s’attache aux manières
d’exprimer un sentiment : quelles sont les manifestations physiques et intérieures d’une émotion ? Le troisième exercice poursuit ce travail sur le choix des mots : l’emploi des images (comparaison et métaphore). Il ne s’agit ici que d’une initiation, qui doit
ouvrir un champ de possibilités sans refréner l’enthousiasme des
élèves. Une dernière activité, plus ludique, permet de manipuler
la rime de manière ludique à partir d’un jeu de bouts rimés. Les
exercices proposés dans cette séance sont de difficulté progressive et méritent d’être adaptés selon les élèves.
Étape
3
Mon paysage,
mon poème
5e Séquence 2
••Voici quelques consignes pouvant aider les élèves les moins auto-
nomes :
1. Décrivez le paysage représenté par l’image : que voit-on sur
l’image ? Donnez tous les détails qui vous semblent importants
comme si vous deviez décrire cette image à quelqu’un qui ne la
voit pas.
2. Quel(s) sentiment(s) cette image exprime-t-elle pour vous ?
Expliquez pourquoi ce sont ces sentiments-là que l’image fait
naître chez vous.
3. Commencez à écrire un premier texte, un premier jet, dans
lequel vous associerez la description du paysage aux sentiments
qu’elle suscite ; mettez ceux-ci en évidence.
4. Utilisez la fiche 2 pour améliorer votre brouillon : exprimer une
sensation, un sentiment, utiliser des comparaisons et des métaphores pour dire autrement le sentiment, travailler le texte poétique (rimes, vers…).
5. Réécrivez votre texte en tenant compte de ces améliorations
et en regardant, en même temps, les critères d’évaluation pour
vérifier que vous répondez aux attentes de l’écrit.
Séance 6
Écriture poétique
••Les élèves sont amenés à réaliser la tâche finale de la séquence :
un écrit poétique. Vous leur proposerez deux supports possibles
pour cette production : soit un document iconographique de
leur choix, représentant un paysage, soit l’œuvre d’Henri Rivière,
Coucher de soleil (cette proposition pour éviter les difficultés liées
à la recherche personnelle d’une image). La consigne suivante
est donnée : « À partir de l’image, écrivez un poème dans lequel
s’exprimeront les émotions que provoque la vue de ce paysage. »
Il semble opportun, à partir de la grille d’évaluation proposée, de
personnaliser l’aide accordée aux élèves pour ce travail : certains
auront sans doute besoin d’être guidés pour parvenir au mieux à
mobiliser les ressources abordées en classe, d’autres a contrario
sauront accomplir cette tâche finale en autonomie, à partir de
la grille.
••
Félix Valloton (1865-1925), Nuage à Romanel (Lausanne,
Musée cantonal des Beaux-Arts).
Critères d’évaluation : V : validé, ECV : en bonne voie, en cours de validation ; NV : non validé
Évaluation
personnelle
Évaluation
du professeur
Commentaires
J’ai écrit un texte qui respecte le sujet : évocation
d’un paysage et des émotions qu’il provoque.
J’ai écrit un texte qui
utilise des éléments
poétiques :
rimes, vers (rythme,
sonorités) ;
j’ai employé des
images (comparaisons
ou métaphores).
J’ai exprimé les émotions à travers un vocabulaire
choisi, précis et adapté.
mars 2014
NRP COLLÈGE
33
Histoire
arts
des
Pour accompagner
cette séquence sur
les paysages en
poésie, les choix
d’œuvres d’art ne
manquent pas : celui
d’Henri rivière,
peintre à découvrir
ou à redécouvrir,
défendant un art
généreux et proche
du public, peut
s’avérer judicieux.
Entre japonisme et
impressionnisme,
sa manière est une
invitation au voyage
et à l’écoute de nos
sensations. D’une
grande modernité,
ses œuvres ne sont
pas sans annoncer
l’univers de certains
dessinateurs de B.D.
une invitation au voyage
Henri Rivière,
Le Coucher
du soleil,
lithographie
en couleurs,
54,5 x 83 cm,
n° 11 de la série
Les Aspects de
la nature, 1898.
Une nature démultipliée entre Japon
et Bretagne
Henri rivière (1864-1951) est une grande figure du cabaret montmartrois.
D’abord illustrateur de presse, il réalise les décors du Théâtre du chat noir ainsi que
des mises en scène de spectacles. Dès 1889, cherchant à transposer sur le papier les
effets de couleurs des décors de ses spectacles d’ombres, il se penche sur les techniques des graveurs japonais et produit quarante bois gravés en couleurs en deux
séries : la série de Paysages bretons (1890-1894) et la série La Mer, études de vagues
(1890-1892). admirateur d’Hokusai et d’Hiroshige, il s’attache à restituer les différents aspects de la nature, en particulier de la mer qui le fascine et où il passe ses étés.
Il se lance ensuite dans la lithographie, technique dans laquelle l’artiste trace son
dessin directement sur une pierre calcaire qu’il place sur une presse, chaque couleur
nécessitant une impression supplémentaire. Cette technique permet l’impression
de plusieurs tirages, dont chacun est numéroté, le prix de la lithographie dépendant
de sa rareté. ses lithographies des Aspects de la nature (1897-1899), suite de grands
formats, dont fait partie Le Coucher du soleil, sont tirées à mille exemplaires pour
décorer des intérieurs publics et privés sans réserver son art à une élite. si la plupart
des paysages de cette suite sont bretons, le titre et l’apparence globale du tableau
gomment volontairement une localisation trop précise.
Une simplicité apparente
Retrouvez l’intégralité
du questionnaire
élève de cette analyse
et son corrigé en
ligne.
34
NRP COLLÈGE
mars 2014
Tout dans ce tableau – couleurs, formes et composition – concourt à produire, a
priori de façon très simple, ces impressions de douceur évoquées dans L’Invitation
au voyage de Baudelaire.
Les couleurs employées sont des variations de jaune et de bleu, mais le travail
sur les nuances et leur emplacement est très élaboré : les dégradés d’orangé et d’ocre
du soleil couchant sont harmonieusement encadrés en haut et en bas par le bleu du
ciel et de la mer qui semblent se répondre. Les teintes des voiles se retrouvent plus
foncées dans les nuages du ciel.
Les formes sont très épurées et se simplifient encore à l’arrière-plan, laissant le
regard converger vers cet ailleurs. L’œil est guidé vers l’horizon : au premier plan à
droite un navire dresse ses mâts, le second, au centre, lève la voile, les trois derniers
ont déjà appareillé, tous forment une ligne oblique partant de la droite vers la gauche
mais dans le même temps ils tracent des lignes obliques et parallèles partant cette fois
de la gauche vers le centre, vers le soleil tout au fond, légèrement excentré.
E ÉL È V
cH
5e Séquence 2
E
arts
des
FI
Histoire
observation de l’œuvre :
lignes et formes
On distribuera aux élèves une photocopie en noir et blanc du tableau d’Henri Rivière, qu’on leur fera découvrir ensuite.
1. Que représente cette image ? Quel titre pourrait-on lui
donner ?
...................................................................................................
...................................................................................................
2. Examinez la composition de cette image : que voit-on
au premier plan ?
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Observez la taille des bateaux : que remarquez-vous ?
...................................................................................................
...................................................................................................
4. Où vont tous ces bateaux ? Examinez la direction qu’ils
prennent.
...................................................................................................
...................................................................................................
5. Tracez les points forts, les lignes de force et les masses
de cette image.
6. Que nous montrent les lignes de force de ce tableau ?
Vers quelle direction l’œil est-il attiré ? Pourquoi ?
...................................................................................................
...................................................................................................
7. Imaginez les couleurs de cette image (vous pouvez la
colorier si vous le souhaitez).
Quelques notions à connaître
• Les points forts sont les passages obligés pour l’œil
qui examine l’image.
• Les lignes de force correspondent à des lignes
simples (arête d’un mur, courbe d’un corps, lignes
d’horizon…) qui parcourent la photographie ou
le tableau. Elles permettent d’aider aussi bien à la
construction qu’à la lecture de l’image.
• Une masse est un ensemble de surface, de formes
de même nature. On pourra observer les pleins et les
vides, les masses de valeurs différentes (obtenues
par l’éclairage), ou de couleurs différentes. Dans une
publicité, on observera le rapport texte/image.
• Lorsqu’on regarde une image, l’œil est attiré par un
point fort, puis va parcourir l’image en suivant les
lignes de force.
mars 2014
NRP COLLÈGE
35
E ÉL È V
cH
1
E
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sur le site pour les abonnés numériques.
Adaptable aux besoins des élèves.
FI
Séquence 2 5e
Émotions des poètes
Texte 1. chanson d’automne
(Paul Verlaine)
Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
monotone.
Tout suffocant
Et blême, quand
sonne l’heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure
Et je m’en vais
au vent mauvais
Qui m’emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Texte 2 « Il pleure dans mon
cœur… » (Paul Verlaine)
Il pleure dans mon cœur
Comme il pleut sur la ville ;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon cœur ?
Ô bruit doux de la pluie
Par terre et sur les toits !
Pour un cœur qui s’ennuie,
Ô le chant de la pluie !
Il pleure sans raison
Dans ce cœur qui s’écœure.
Quoi ! nulle trahison ?….
Ce deuil est sans raison.
C’est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
sans amour et sans haine
mon cœur a tant de peine !
1. Découvrir les poèmes
6. Dans le poème de Victor Hugo, diriez-vous que le paysage est décrit précisément ou non ? Pourquoi, à votre avis ?
1. Après avoir lu les trois poèmes, donnez le sens
des mots suivants (cherchez si nécessaire dans un
dictionnaire) : langueur, suffocant, blême, deuil.
...................................................................................................
2. Pour chaque poème, relevez les éléments du paysage
décrit :
Poème 1
Poème 2
Poème 3
Éléments
du paysage
...................................................................................................
2. Paysage et sentiment
4. Dans les deux poèmes de Paul Verlaine, pourquoi le
paysage provoque-t-il de tels sentiments chez le poète ?
...................................................................................................
5. Dans ces mêmes poèmes, relevez des vers qui montrent
que paysage et sentiment sont tous deux liés (le paysage
permet d’exprimer ce que ressent le poète).
...................................................................................................
NRP COLLÈGE
...................................................................................................
3. Paysage, sentiment et poésie
7. Dans le poème 1, regardez les rimes : quels mots
importants permettent-elles de mettre en relief ?
...................................................................................................
8. Regardez la mise en forme du poème 1 : ne vous semblet-il pas que Verlaine a presque « dessiné » quelque chose ?
3. Pour chaque poème, dites quel sentiment, selon vous,
ressent le poète. Essayez de justifier votre réponse.
36
Texte 3. « Demain, dès l’aube… »
(Victor Hugo)
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l’or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
mars 2014
...................................................................................................
9. Dans les poèmes 1 et 2, relisez à voix haute les vers :
1. « Les sanglots longs
Des violons
De l’automne
Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone. »
2. « Dans ce cœur qui s’écœure »
Quelles remarques faites-vous sur le choix des mots et
leurs sonorités ?
...................................................................................................
...................................................................................................
2
5e Séquence 2
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E
FI
E ÉL È V
cH
À nous la poésie !
1. Exprimer des sensations
Face à un paysage on peut sentir diverses choses : il y a ce qu’on voit bien sûr, mais aussi des bruits, des odeurs, des parfums…
Nos sens réagissent à ce paysage.
1. Trouvez des mots pour compléter le tableau suivant :
Noms
adjectifs
Verbes
Sens de la vue
Sens du goût
2. À vous maintenant d’associer à un paysage
des sensations variées :
Un paysage de
montagne en
plein hiver
Sans de l’odorat
Une plage en
plein été
Sens de l’ouïe
La ville où j’habite
Sens du toucher
Chez moi
2. Exprimer des émotions
3. Quand nous ressentons une émotion, comment cela se
manifeste-t-il ?
a. Cherchez, si besoin à l’aide d’un dictionnaire, le sens
des mots suivants : l’euphorie, la détresse, l’angoisse, la
nostalgie.
b. Pour chacun de ces sentiments, cherchez maintenant
comment ils se manifestent : que ressentons-nous à
l’intérieur ? Quelle est notre attitude ? Comment voyonsnous physiquement ce que nous ressentons ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Employer des images
4. Les poètes que vous avez rencontrés dans cette séquence
utilisent des images qu’ils inventent pour communiquer
leurs émotions. La comparaison et la métaphore permettent
par exemple de nous faire comprendre ce qu’un lieu peut
représenter pour le poète.
S’il parle de ce lieu en écrivant « c’est mon nid », qu’est-ce
que cela signifie ? S’il écrit « c’est ma prison », qu’est-ce que
cela signifie ?
...................................................................................................
...................................................................................................
5. Complétez les phrases suivantes en utilisant une
comparaison avec un paysage :
Quand je suis triste, je suis comme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Quand je suis heureux, je suis comme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
4. Faire rimer son texte
6. a. Trouvez un mot qui rime avec « bonheur », puis un
mot qui rime avec « vent ». Vous avez maintenant quatre
rimes. Imaginez un poème de quatre vers dans lequel vous
utiliserez ces quatre rimes.
b. Trouvez un mot qui rime avec « chagrin », puis un mot qui
rime avec « feuille ». Même consigne.
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
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NRP COLLÈGE
37
3e Séquence
3
La poésie engagée,
toujours actuelle
Par Jean-Michel Zakhartchouk
Présentation et problématique
Manifestation dans les rues de Santiago du Chili
pour commémorer le 40e anniversaire du coup
d’État militaire et rendre hommage au chanteur
Victor Jara opposant à la dictature (voir p. 41).
Les
+ numériques
Dans cette séquence, vous pourrez
exploiter les ressources multimédia
suivantes*, disponibles sur le site NRP
dans l’espace « Ressources abonnés ».
Rendez-vous sur
http://www.nrp-college.com.
Reconnaître les traces d’un engagement
Écrire des vers à partir de contraintes
Reconnaître les procédés poétiques
* Certaines de ces ressources sont
réservées aux abonnés numériques
(abonnés Papier + numérique
ou 100 % numérique).
38
NRP COLLÈGE
mars 2014
• Dans cette séquence, il s’agit pour vous d’amener
l’élève à comprendre ce qu’est la poésie dite engagée, qui
au xxe siècle est peut-être devenue un « genre » spécifique,
tout en s’inscrivant dans le temps long d’une littérature
se voulant force d’action ou accompagnatrice de luttes
ou de révoltes. À cette occasion, vous présenterez aux
élèves des formes qui ont l’avantage d’être souvent
accessibles, et vous chercherez à bâtir des ponts entre
une poésie parfois très « classique » et des formes
familières à beaucoup d’entre eux (rap, slam). Ce sera
l’occasion, à partir de contraintes techniques fécondes,
de produire des textes engagés, nourris des textes travaillés
auparavant.
• On retrouve là des attitudes que le socle commun
engage à développer : savoir faire preuve de créativité
en intégrant des ressources de lecture, savoir relier des
œuvres patrimoniales à sa propre culture. ajoutons les
riches possibilités de conjugaison avec l’Histoire, qui
peut fournir des ressources à l’écriture du texte, de
même qu’en retour, ce travail qui souvent touche les
élèves permet un regard plus sensible sur des événements
historiques qu’ils peuvent alors davantage s’approprier.
L’étude de procédés rhétoriques est tout à fait pertinente
pour ce genre de poésie qui cherche à convaincre le
lecteur plus qu’à exprimer des états d’âme.
• Vous inscrirez la séquence dans une problématique plus
générale, qui recouvre bien des aspects du programme
de Troisième : les liens de la littérature avec « le bruit et la
fureur » du xxe siècle et du début du suivant.
Le choix du corpus
• Les manuels de Troisième contiennent de nombreux
fragments de poésie engagée du xxe siècle, et vous
pourrez aisément puiser dans ce corpus, en y intégrant
également la chanson d’hier et aujourd’hui, dont vous
trouverez facilement les paroles et éventuellement des
clips vidéo sur Internet.
La poésie engagée, toujours actuelle
3e Séquence 3
Supports • Louis Aragon, Ballade de celui qui chanta dans les supplices, publié en 1948 ;
Strophes pour se souvenir (devenu sous forme de chanson « l’Affiche rouge »), 1955, interprétation en clip vidéo de
Wire Jack ;
La Rose et le Réséda, 1943, chanté par La Tordue.
• Paul Eluard, La Victoire de Guernica, 1938 ; Liberté, 1942.
• Jacques Prévert, Barbara, 1946, interprétation en clip vidéo par Troïka.
• Nazim Hikhmet, Mes frères, dans le recueil paru en Poche Il neige dans la nuit et autres poèmes.
• David Diop, Liberté, dans le recueil Coups de pilon, 1956.
• Étienne Roda-Gil, Utile, 1992, interprétation et musique de Julien Clerc.
• Abd-al-Malik, Césaire (Brazzaville via Oujda), 2008.
Objectifs • Comprendre ce que signifie la « poésie engagée ». Savoir la situer dans l’Histoire (Résistance, refus du colonialisme, de la guerre, problèmes du monde d’aujourd’hui).
• Savoir repérer des procédés utilisés dans ce genre de poésie (anaphores, métaphores, interpellations) et des
tournures grammaticales (relatives, interrogatives, impératif, passif).
• Savoir utiliser quelques procédés caractéristiques (rythme, images…) pour écrire un texte engagé.
• Mettre en relation des textes et des œuvres picturales.
ÉtaPE
Durée
1
• Une douzaine d’heures.
SÉaNCE 5. Utiliser des extraits littéraires
pour améliorer sa production
Comprendre ce que signifie
« poésie engagée »
➔ Étude de textes
Durée : 2 heures
SÉaNCE 1. Définir la notion
➔ Repères
SÉaNCE 6. Retour réflexif
sur la notion de poésie engagée
Supports : Manuel de français, dictionnaires
Objectif : Aboutir à une première définition collective de la poésie
engagée
Durée : 1 heure 30
➔ Étude de textes et de documents
Objectif : Affiner la définition de la poésie engagée
Supports : • Textes étudiés dans la séquence • Citation de Benjamin
Péret • Fiche élève 3 (notices biographiques de poètes engagés)
Durée : 2 heures
SÉaNCE 2. Étude de textes engagés
et mise en évidence de procédés rhétoriques
Supports : Voir corpus de la séquence
Objectifs : • Saisir la spécificité de la poésie engagée • S’en approprier
le message et le sens profond
Durée : 1 heure 30
SÉaNCE 3. Première proposition d’écriture
autour de Guernica
➔ Étude de textes, expression écrite
ÉtaPE
Supports : • Picasso, Guernica • Eluard, La Victoire de Guernica • Alain
Resnais, court métrage sur Guernica (1950)
Objectif : Rédiger quelques strophes autour d’un événement
historique
Durée : 2 heures
2
ÉtaPE
➔ Étude de textes
3
Retour à
la situation d’écriture
SÉaNCE 7. Récapitulation et finalisation
du projet d’écriture
➔ Expression écrite
Objectifs : • Retravailler le premier jet des textes déjà écrits
(séance 3) • Produire de nouveaux textes
Support : Grille d’évaluation finale des compétences
Durée : 1 heure
Mobiliser les ressources
nécessaires pour améliorer
les textes
SÉaNCE 4. Utiliser les ressources de la langue
dans la perspective de l’écriture/réécriture
➔ Étude de la langue, expression écrite
Supports : • Modèles de métaphores • Phrases de tracts ou de lettres
• Photographie de Robert Capa « Mort d’un soldat républicain »
(1936), œuvres engagées de Picasso.
Objectifs : • Travailler sur des formes spécifiques (images, rythmes,
tournures syntaxiques) utilisables dans la production poétique.
• S’initier à la rhétorique de l’image.
Durée : 2 heures
Évaluation de compétences en lien avec le socle commun
Maîtrise de la langue / Lire
• Repérer les informations dans un texte à partir des éléments
explicites et des éléments implicites nécessaires (nécessité de
recherche documentaire et de référence au cours d’Histoire) C1, 2
• Manifester, par des moyens divers, sa compréhension de textes
variés (C1, 5)
• Lire le texte de manière expressive à haute voix (C1,1)
Maîtrise de la langue / Écrire
• Savoir écrire un texte en fonction d’intentions
• Utiliser ses capacités de raisonnement, ses connaissances sur la
langue, savoir faire appel à des outils variés pour améliorer son
texte (C1, 9)
mars 2014
NRP COLLÈGE
39
Étape
1
Comprendre ce que
signifie « poésie engagée »
Séance 1
r ep è r e s
Définir la notion
••L’objectif est de confronter des indications données par le ma-
nuel, par des dictionnaires, par une réflexion collective autour des
mots « poésie » et « engagement », pour aboutir à une définition
qui reste forcément imparfaite et non dogmatique.
Consigne : en groupes, à partir de documents divers, donnez
une définition simple de la « poésie engagée » qui permette de
dire que tel ou tel texte en fait partie. Puis indiquez pourquoi des
poètes se veulent « poètes engagés ».
Vous ferez ressortir l’idée que s’engager, ce n’est pas seulement
dénoncer, mais défendre une cause, des convictions. Il s’agit
donc d’une littérature de combat, d’appel à la révolte ou à la
résistance, ou au moins à la prise de conscience. La compassion
pour des victimes n’est pas suffisante pour qu’on parle d’engagement (par exemple, si l’on peut faire allusion au Dormeur du val,
il serait abusif de le considérer comme un poème pacifiste). La
seule description d’injustices ne l’est pas davantage (ainsi, « Les
Animaux malades de la peste », qui ne proposent rien pour éviter
les injustices).
La poésie engagée s’oppose aussi à la poésie lyrique, car il s’agit
plus d’une poésie d’idées que de sentiments, centrée sur le
« nous » plutôt que sur le « je ». Mais bien entendu, les sentiments
sont aussi présents dans la poésie engagée !
D’autre part, l’engagement l’est-il forcément pour une « bonne
cause » ? Là aussi, une réflexion collective s’impose. Vous pourrez par exemple projeter un extrait du poème d’Eluard à la gloire
de Staline (« Car la vie et les hommes ont élu Staline/Pour figurer
sur terre leur espoir sans bornes ») publié dans L’Humanité, le 8 décembre 1948 (pour l’anniversaire de Staline). Mais il est vrai qu’ici
l’engagement se confond avec l’hagiographie et n’est plus un
acte de résistance, mais de soumission. Est-on encore dans une
définition de l’engagement ? N’y a-t-il pas là une dérive toujours
possible quand l’art se met totalement au service d’une cause ?
Nous y reviendrons plus loin dans la séquence…
Des activités précises sont alors proposées, telles qu’un classement d’extraits : poésie engagée ou non… (voir fiche élève 1), ou
un vrai-faux avec justification, sur le modèle suivant.
••
••
8. La poésie engagée combat toujours ce qui opprime les
hommes.
9. La poésie engagée s’exprime en vers.
10. La chanson d’aujourd’hui peut être « engagée ».
Éléments de réponse
1. S’il est faux de dire qu’elle ne peut rien, on peut tout de même
discuter du pouvoir de la poésie, qu’on peut aussi considérer
comme dérisoire face au choc des armes.
2. On peut donner des exemples à l’appui de cette affirmation,
dont justement la poésie de la Résistance, surtout dans les moments où tout ce qui peut contribuer à « maintenir la flamme »
est nécessaire et utile.
3. et 4. Ici s’opposent deux conceptions de la poésie, opposition
qu’on peut cependant dépasser, puisque l’engagement n’est pas
contradictoire avec l’écriture lyrique, l’expression du Moi et des
sentiments personnels.
5. On pourra ici parler de la censure contre les poètes, notamment dans les pays totalitaires.
6. De nombreux poètes ont représenté ou représentent un combat populaire, et sont très écoutés : de Neruda à Darwich, comme
hier Victor Hugo…
7. On donnera en particulier l’exemple de poètes du « Tiers
Monde » devenus chefs d’État comme Leopold Sedar Senghor,
ou de personnalités importantes comme Aimé Césaire.
8. On n’oubliera pas de dire que la poésie, l’art en général peuvent
être au service de l’oppression (à l’instar de ce personnage de La
guerre de Troie n’aura pas lieu, qui préfigure tel poète nationaliste
serbe par exemple).
9. Cette affirmation donnera l’occasion de revenir sur ce qu’est la
poésie, qui ne se confond pas avec l’écriture en vers.
10. On sera ici amenés à évoquer la chanson engagée, à laquelle
les élèves ne pensent pas forcément au départ.
Il sera intéressant de reprendre ce questionnaire en fin de séquence. Mais pour structurer tout ce qui a été établi, vous pouvez
demander aux élèves de rédiger un paragraphe argumenté court,
mais précis sur ce qu’on appelle finalement « poésie engagée »
aux xxe et xxie siècles.
••
••
Consigne
••Voici des affirmations. Certaines sont vraies, d’autres fausses,
d’autres partiellement vraies ou fausses. Donnez votre avis en le
justifiant.
1. La poésie ne peut rien contre la guerre, le racisme, l’intolérance.
2. La poésie donne des forces pour lutter contre l’oppression et
la tyrannie.
3. Les poètes expriment surtout leurs sentiments personnels pour
ce qui les entoure.
4. Les poètes peuvent s’engager pour défendre une cause.
5. Des poèmes peuvent être interdits.
6. Certains poètes ont été très connus et populaires pour leurs
combats.
7. Des poètes se sont engagés dans la vie politique et sont même
devenus chefs d’État.
40
NRP COLLÈGE
mars 2014
« Frappe les blancs avec le coin rouge » : affiche de
propagande soviétique, 1919-1920.
La poésie engagée, toujours actuelle
Séance 2
3e Séquence 3
étude de texte s
Étude de textes « engagés »
et mise en évidence de procédés
rhétoriques
Dans une approche par compétences, des textes vont être étudiés et servir de ressources, de « modèles » pour un travail d’écriture, qui, une fois enclenché, permettra en retour de mieux saisir
la spécificité des poèmes engagés et de s’en approprier le message et le sens profond.
Vous allez donc étudier un corpus précis (voir ci-dessus) qui intègre des chansons pouvant être reproduites sous forme de clips
vidéos, très prisés des élèves. Notons, à propos des transpositions
de poèmes sous forme de chansons, qu’il importe de faire les bons
choix : on peut être personnellement toujours bouleversé à l’écoute
de Léo Ferré chantant l’hommage aux « vingt-trois étrangers/et nos
frères pourtant » ou apprécier le Barbara d’Yves Montand, mais il
est peut-être préférable de donner à entendre des interprétations
plus récentes, plus adaptées à un public d’élèves demandeurs de
« rythme ». Il s’agit bien d’être un « passeur culturel » et de donner
une image séduisante de cette poésie qui peut rencontrer des
préoccupations d’un certain nombre de jeunes, surtout dans une
« banlieue », là où a été expérimentée cette séquence.
Les compétences mises en œuvre
••Les compétences explicitement travaillées ici sont les suivantes :
1. Savoir relier un texte littéraire et des documents authentiques : en l’occurrence, par exemple, des lettres de fusillés, les
textes circulant clandestinement, utilisant la parodie, les détournements (chansons de Pierre Dac), les jeux de mots. Il est important
de ne pas en rester à la période de la Seconde Guerre mondiale et
d’aborder des textes plus contemporains et de divers continents.
Exemples :
• Confrontez la dernière lettre de Manouchian à sa femme Mélinée (que l’on trouve dans nombre de recueils comme Au nom de
la Liberté, « Étonnants classiques », 2000) et le poème d’Aragon.
Quels sont les passages presque textuellement repris et quels
sont les ajouts du poète dans la partie du texte qui évoque ce
dernier et poignant courrier ?
• Le recueil cité, Au nom de la Liberté, contient des textes qui sont
autant de messages codés (voir aussi : http://tinyurl.com/n5rwszv).
Ainsi le texte commençant par :
« Aimons et admirons/le chancelier Hitler
L’éternelle Angleterre/est indigne de vivre »
s’avère un message de Résistance quand il est lu de haut en bas
en coupant chaque vers en deux, à la manière du message de
Zadig chez Voltaire (qu’on peut rappeler au passage). Vous pouvez au départ indiquer aux élèves qu’il ne s’agit pas du tout d’un
texte collaborationniste et qu’il y a un procédé à découvrir.
• Des chansons de Pierre Dac (tel « Radio-Paris ment, Radio-Paris
est allemand ») peuvent aussi être étudiées rapidement. Et le message codé fait d’initiales (« la nation ABC, la gloire FAC… ») peut
même servir d’exercice orthographique manipulant les terminaisons en -é.
• Mais le travail doit aussi s’élargir à d’autres périodes. Ainsi le
texte de la chanson de Julien Clerc Utile peut-il être mis en relation avec des documents sur le Chili, la torture, l’évocation du
chanteur chilien Victor Jara dont les mains furent brisées par les
militaires, etc.
Affiche de propagande du 5 février 1944 dite « l’affiche rouge »,
présentant les résistants du groupe Manouchian comme des
criminels.
2. Savoir repérer en vue d’une utilisation proche, annoncée
dès le départ (production d’un poème), les procédés utilisés.
Ceux-ci peuvent obéir à une nécessité d’être compris d’un large
lectorat et donc reprendre des formes classiques, qui facilitent la
mémorisation.
Ces procédés sont de plusieurs ordres :
– rhétorique (utilisation de métaphores, mais cela n’est pas réservé à ce type de poésie ; place importante de l’anaphore, qui permet des effets d’insistance ; antithèse qui permet la confrontation
du Bien et du Mal ; oxymore qui transforme les vaincus provisoires
en vainqueurs moraux….) ;
– rythmique (présence de refrains, retour à l’alexandrin chez Aragon par exemple) ;
– syntaxique (utilisation de phrases interrogatives, du passif, mais
aussi de phrases nominales).
Exemple :
Retrouvez les procédés utilisés par Aragon dans les « Strophes
pour se souvenir ».
On dressera tout d’abord une liste récapitulative de ces procédés,
et on demande de les reconnaître en distinguant ce qui est de
l’ordre de la rhétorique, de la typographie, de la disposition des
mars 2014
NRP COLLÈGE
41
vers, du rythme, de la syntaxe. Ceci est une bonne manière de
s’approprier ces procédés et servira ensuite dans la phase d’écriture. On est là dans une phase de préparation à la mobilisation de
ressources. Ainsi, dans cet extrait de « L’Affiche rouge » :
« […] Un grand soleil d’hiver éclaire la colline
Que la nature est belle et que le cœur me fend
La justice viendra sur nos pas triomphants
Ma Mélinée ô mon amour mon orpheline
Et je te dis de vivre et d’avoir un enfant
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient le cœur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient la France en s’abattant »
Louis Aragon, Strophes pour se souvenir, 1955,
Le Roman inachevé © Gallimard.
On trouve :
– des personnifications : « la justice » en marche ;
– des métaphores : « les fusils fleurirent » (allusion à l’expression
« la fleur au fusil » mais il s’agit aussi d’un oxymore et d’une allitération qu’on peut considérer comme prolongée par « frères » et
« France ») ;
– la répétition de « vingt et trois », mais aussi celle du mot « cœur »
(qui se fend, qui est donné « avant le temps ») ;
– l’absence de ponctuation qui impose de bien repérer le texte
de la lettre du Résistant en le distinguant de la voix du narrateurcélébrateur, de réfléchir aux mots à mettre en valeur comme « la
France » ;
– les oppositions (« étrangers/frères » « de vivre/à en mourir », mais
aussi « étrangers »/« la France »).
Séance 3
étude de texte s
exp r e s s i o n é c r ite
Autour de Guernica,
première proposition d’écriture
••Vous consacrez le début de la séance à un travail autour de
cet événement-clé qu’a été le bombardement de la petite ville
basque de Guernica, premier vrai bombardement de civils qui
a donné lieu, on le sait, au célébrissime tableau de Picasso, mais
aussi au poème moins connu de Paul Eluard intitulé paradoxalement La Victoire de Guernica (publié dans le recueil Cours naturel
de 1938). Bien entendu, le lien avec l’Histoire des arts est évident
et l’éclairage du cours d’Histoire l’est également, d’autant que
vous pouvez faire consulter des documents sur ce qui s’est passé
(et qui a donné lieu à des polémiques sur l’établissement précis
des faits). Vous ne ferez étudier qu’un extrait du poème d’Eluard
(extrait qui sera ensuite mémorisé puis restitué en classe, avec le
tableau de Picasso projeté en toile de fond). Pour compléter, des
extraits vidéo peuvent être trouvés sur Internet (le film Guernica
d’Alain Resnais fait la jonction entre Picasso et Eluard).
Ce travail débouche sur une première proposition d’écriture :
rédiger des strophes en partant du tableau de Picasso et des éléments abordés en classe autour de cette tragédie. Au préalable,
on aura pu entraîner les élèves à écrire des strophes à partir de Liberté, ce qui est souvent « rassurant » car assez aisé (il est possible
de remplacer ou non « liberté » par une autre notion comme « justice », ou « amour » en s’éloignant alors de l’engagement civique).
••
42
NRP COLLÈGE
mars 2014
Évaluation du premier jet
Ce travail donne lieu à une évaluation provisoire, réalisée à partir
du tableau suivant :
(V : validé, ECV : en bonne voie, en cours de validation ; NV : non
validé)
Critères d’évaluation
V
ECV
NV
J’ai bien respecté les
contraintes de rythme (unité
des vers quant au nombre de
syllabes sauf effet particulier).
Mon texte est cohérent, en
rapport avec les événements
historiques évoqués.
Mon texte contient des
procédés poétiques bien
utilisés : jeux de sonorité.
Mon texte contient des
procédés poétiques bien
utilisés : images, figures de
style.
••On a réduit le nombre de compétences évaluées, mais on est allé
à l’essentiel en matière de poésie : la musicalité, les images, et le
souci du sens, qui doit être cohérent. Resterait à évaluer la « créativité », ce qui pose toujours problème et ne peut se faire que sous
forme de « bonus » : l’affichage d’extraits, la lecture à haute voix
de strophes réussies peuvent être d’autres manières d’évaluer les
productions les plus originales ou les plus riches.
Voici quelques exemples de strophes réalisées dans une classe
où la plupart des élèves ont de grosses difficultés à produire des
textes à la fois cohérents et créatifs.
••
Guernica, tu es en flammes
Faible protection de l’épée
Le cheval noir hurle de peur
Fleur lueur d’espoir
Stanley
Épée qui ne nous a pas protégés
Cheval douleur de mon cœur
Lumière de nos âmes abattues
Je m’adresse à l’espoir disparu
Sofiane
Épée impuissante
Monde interloqué
Visages déformés
Fleur sans espoir
Lampe sans larmes
Kahina
Guernica l’Enfer brûle
Ces démons ont frappé
Vos prières ne changeront rien
Regarde vers l’avenir
Vers le grand soleil
Vers les flammes de l’espoir
Théo
La poésie engagée, toujours actuelle
Étape
2
Mobiliser les ressources
nécessaires pour
améliorer les textes
Les élèves, à travers les activités proposées, sont amenés à s’approprier diverses ressources nécessaires pour enrichir leurs premiers récits, à s’entraîner avec les outils de la langue utiles pour
améliorer leurs textes.
Séance 4
étude de la la n gue
exp r e s s i o n é c r ite
Utiliser les ressources
de la langue dans la perspective
de l’écriture/réécriture
Ce travail prolonge tout ce qui a été fait les années précédentes
autour de la poésie (dont la poésie lyrique étudiée en quatrième).
Il s’agit notamment :
– d’étudier des modèles de métaphores pour en inventer d’autres
(sur les thèmes du combat, de la libération, de l’oppression…).
Exemples :
« fracas de la terre » (Eluard, Veilleur du Pont au change),
« C’est nous qui brisons les barreaux pour nos frères » (Maurice
Druon et Joseph Kessel, Le Chant des partisans),
« Couplés au bœuf décharné, nos poèmes/doivent pouvoir labourer
la terre » (Nazim Hikhmet, « Mes frères »),
« La poésie est une arme chargée de futur » (titre d’un poème de
Gabriel Celaya) ;
– de transformer des phrases de tracts ou de lettres en vers rythmés, voire rimés (on peut partir aussi de lettres de Résistants,
comme on l’a vu précédemment).
Exemples : « Ce sont les Français qui me livrent, mais je crie : “Vive
la France”, les Allemands qui m’exécutent, et je crie : “Vive le peuple
allemand et l’Allemagne” » (lettre de Guido Brancardo, fusillé), ou
le dernier discours de Salvador Allende, assiégé au palais de la
Moneda en 1973 : « Ils ont la force, ils pourront nous asservir mais
nul ne retient les avancées sociales avec le crime et la force. L’Histoire
est à nous, c’est le peuple qui la construit » ;
– d’utiliser des formes syntaxiques telles que les phrases interrogatives « rhétoriques » (indignation, interpellation), le passif (le
peuple martyrisé, le pays qui est blessé…) ou les phrases nominales (pour décrire un tableau ou une photographie) ;
– on peut travailler tout aussi bien sur une photo de Robert Capa
sur la guerre d’Espagne ou sur un autre Picasso, telle l’affiche
d’Amnesty international sur la paix, ou Massacre en Corée, 1951.
Exemple de travail sur l’image
••On pourra travailler sur la photo de Robert Capa Mort d’un soldat
républicain, prise en 1936 (l’authenticité de cette photo fait l’objet
d’un débat : prise sur le vif ou montage, comme on semble le
penser aujourd’hui ?).
On demande aux élèves, en indiquant seulement le titre de la
photo et la date :
1. Qu’est-ce qui nous touche dans cette photo ?
2. Pourquoi le photographe l’a-t-il prise ?
On peut ensuite débattre de son authenticité en donnant
quelques éléments factuels ou en faisant chercher des informations sur Internet, le but étant de montrer que, dans tous les cas,
••
••
3e Séquence 3
le photographe a une intention artistique et politique. Cette photo dont on sait qu’elle est l’une des plus célèbres du monde offre
un bon exemple de rhétorique qui transforme la victime en héros
de légende ; on pourra l’étudier en écho à des représentations du
héros en peinture ou en sculpture.
Séance 5
étude de texte s
Utiliser des extraits littéraires
pour améliorer sa production
En fait, il convient de répartir l’étude des textes évoqués plus haut
entre l’avant et l’après du premier travail d’écriture. Mais vous
pouvez aussi revenir sur un texte déjà abordé, en demandant en
quoi il peut servir de modèle, de matrice d’écriture.
Séance 6
étude de texte s
et de d o c ume n t s
Retour réflexif sur la notion
de poésie engagée
••Avant de lancer à nouveau les élèves dans la production écrite,
vous reviendrez sur la notion de poésie engagée afin de voir si les
représentations qu’ils s’en font ont évolué. Vous leur demanderez
de reprendre ce qu’il pouvait y avoir de commun entre les textes
étudiés, mais en insistant aussi sur les différences de forme, de
situation historique, de contexte.
Vous pouvez aussi, en contrepoint, les faire réfléchir sur cette
citation de Benjamin Péret qui écrit en 1945 : « L’expulsion de
l’oppresseur et la propagande en ce sens sont du ressort de l’action
politique, sociale ou militaire… En tout cas, la poésie n’a pas à intervenir dans le débat autrement que par son action propre… » en
expliquant que, pour lui, la poésie se trahit lorsqu’elle intervient
dans l’actualité politique. Cela permet ainsi d’introduire de la distance par rapport à cet engagement qui a été jusque-là valorisé,
en montrant que son association avec la littérature ne fait pas
l’unanimité. Vous pouvez là aussi proposer un paragraphe argumenté ou, pourquoi pas, un dialogue entre deux poètes, sur cet
engagement que l’un défend et l’autre pas.
Parallèlement, vous insisterez sur les destins divers de poètes
engagés en regardant des mini-notices biographiques permettant de distinguer ceux qui ont été surtout des témoins et ceux
qui ont pris des risques, physiques ou moraux (voir fiche élève 2).
Il s’agit ainsi de réfléchir encore aux motivations qui conduisent
des écrivains à s’engager, en insistant sur le fait que tout engagement n’est pas forcément louable…
Cette réflexion peut d’ailleurs se prolonger par un entraînement à
un sujet de type DNB portant plus globalement sur l’engagement
(au-delà de la poésie). Nous proposons dans ce numéro un travail
à partir de « La ballade de celui qui chanta dans les supplices » de
Louis Aragon (p. 60-62).
••
••
••
••
Prolongement interdisciplinaire
Et si on allait voir du côté de… l’Histoire
Lorsqu’un travail interdisciplinaire peut être mené avec le collègue d’Histoire, c’est bien évidemment mieux. Vous pouvez ainsi
valoriser les productions poétiques des élèves en proposant une
insertion de celles-ci dans le cahier d’Histoire ou leur affichage
dans les salles des deux matières.
mars 2014
NRP COLLÈGE
43
Étape
3
Retour à la situation
d’écriture
Séance 7
exp r e s s i o n é c r ite
Récapitulation et finalisation
du projet d’écriture
Évaluation finale
L’évaluation finale reprend à peu près les mêmes critères d’évaluation que celle du premier jet, mais vos exigences augmentent.
Cette évaluation, nous l’avons dit ci-dessus, participe à la validation du Livret personnel de compétences (ou ce qui en tiendra
lieu dans les années à venir).
(V : validé, ECV : en bonne voie, en cours de validation ; NV : non
validé)
Critères d’évaluation
Après cette situation de mobilisation des ressources, les élèves
sont invités à revenir à la production poétique.
Deux choix possibles : soit retravailler les poèmes déjà écrits à
partir du tableau Guernica, en intégrant par exemple l’obligation
de rimes, en mettant en place des contraintes encore plus serrées
(il faut « trois » métaphores, etc.), soit produire un nouveau texte,
en partant d’une situation historique ou d’actualité. On peut introduire ici une différenciation entre les élèves selon leurs facilités
d’écriture. La première solution est plus cadrée, mais peut-être
moins motivante.
Auparavant, vous vous lancerez dans une récapitulation des ressources possibles, des activités menées, des lectures qui peuvent
être utiles ; vous observerez avec les élèves la grille d’évaluation
conçue comme une aide à l’écriture. Vous pourrez même montrer un exemple d’amélioration possible, ou vous servir de textes
d’élèves déjà existants, examinés collectivement en vidéoprojection (voir les textes proposés en compléments numériques).
44
NRP COLLÈGE
mars 2014
NV
Mon texte est cohérent, en
rapport avec les événements
historiques évoqués.
Mon texte contient des
procédés poétiques bien
utilisés : jeux de sonorité.
Mon texte contient des
procédés poétiques bien
utilisés : images, figures de
style.
(bonus) Mon texte est inventif,
créatif.
••Valider la compétence, c’est bien juger que ce qu’a produit l’élève
est « suffisamment convenable ». Il y a bien un aspect subjectif à
un moment donné de la part de l’enseignant qui hésite entre « validation » et « en cours ». Il faut cependant bien préciser que l’on
ne valide pas seulement quand les critères ont été parfaitement
respectés. Pour le premier item, on peut admettre quelques erreurs dans le comptage des syllabes, l’important est qu’un rythme
soit trouvé de façon continue dans le poème. Pour le second, on
jugera le sens global, l’absence de grave incohérence par rapport
à ce qui a été dit en classe, en l’occurrence sur les circonstances
du bombardement nazi. Pour l’insertion de procédés poétiques,
l’intention, même exprimée maladroitement, est importante.
C’est ici la capacité à mobiliser, à réinvestir tout le travail préparatoire qui est estimée. Insistons là-dessus : on évalue une compétence en construction, pas une « performance ». Laissons au
bonus l’appréciation de la créativité, de l’inventivité, une entrée
plus affirmée dans un univers poétique, mais on ne demande pas
forcément cela dans le cadre de l’acquisition du socle commun
en fin de troisième.
Vous récapitulerez avec les élèves les phases par lesquelles on est
passé, vous reviendrez sur les définitions de départ de la poésie
engagée, en réutilisant par exemple le travail « vrai-faux » réalisé
dans la séance 1, et vous prendrez soin de resituer la séquence
dans le programme de français de troisième, qui intègre d’autres
aspects de la littérature engagée. Vous valoriserez le travail des
élèves par des lectures à haute voix, des affichages de textes,
éventuellement illustrés avec le concours du professeur d’Arts
plastiques. En lisant en classe ces textes, on pourra peut-être
entendre les mots d’une collégienne creilloise : « Vraiment je ne
savais pas qu’il y avait autant de poètes dans la classe. »
••
Picasso, Guernica, 1937 (Madrid, Museo nacionál Centro
de Arte Reina Sófia).
ECV
J’ai bien respecté les
contraintes de rythme (unité
des vers quant au nombre de
syllabes sauf effet particulier).
Inventaire des ressources qui ont servi à écrire/réécrire :
– des lectures de textes variés (poèmes pour l’essentiel, mais aussi
documents authentiques ou textes explicatifs) ;
– l’écoute de chansons ou d’adaptations de poèmes sous forme
chantée ;
– la projection d’images (tableaux, photos) ;
– le retour sur des procédés stylistiques déjà étudiés (figures de
rhétorique, jeux de sonorités, disposition typographique) ;
– la circulation éventuelle de textes entre les élèves, pour se
« donner des idées » ;
– la présentation de la grille d’évaluation, qui permet de comprendre où l’on doit arriver ;
– la référence au cours d’Histoire qui nous aide à resituer la poésie
engagée dans son contexte ;
– la connaissance personnelle de chansons d’aujourd’hui (rap ou
slam par exemple).
V
La poésie engagée, toujours actuelle
Histoire
arts
des
né au début du
XXe siècle sous
l’impulsion de
Murillo, artiste
mexicain qui
souhaitait en finir
avec la peinture
des salons, le
muralisme est une
nouvelle forme
d’expression
artistique qui,
comme son nom
l’indique, prend
les murs comme
support de
peintures destinées
à susciter des débats
idéologiques.
Il s’agit ainsi de sortir
des filières réservées à
une élite pour toucher
tout un chacun.
Dès ses origines,
ce mouvement
s’accompagne
donc de l’idée d’un
engagement social de
l’artiste – pour lequel
l’art a une fonction
publique – mais aussi
d’un engagement
politique.
Retrouvez
le questionnaire
élève de cette analyse
et son corrigé en
ligne.
3e Séquence 3
Muralisme et engagement
Sur les murs d’un
village, des fresques
collectives
En Italie, le muralisme se développe
dans les années 1970 et plus particulièrement à Orgosolo, petite ville sarde de
5 000 habitants.
Francesco Del Casino, un artiste
proche du Parti communiste et influencé par Léger et Picasso, s’y est
établi. En 1975, lors de la Festa della
Liberazione qui commémore la fin officielle de l’Occupation allemande et du
fascisme, des enseignants proposent
de créer des affiches dont les slogans
évoquant la lutte antifasciste seraient
imaginés par les écoliers. L’initiative
connaît un vif succès, mais les affiches
étant éphémères, l’expérience se poursuit avec des fresques réalisées par
Francesco Del Casino et ses élèves ;
elles se multiplient, se diversifient et
contribuent à la renommée de la cité.
Un radeau de la
Méduse revisité
Fresque du village d’Orgosolo, en Sardaigne
(détail).
L’œuvre présentée ici n’est pas affichée de manière classique : elle ne s’expose pas
dans un musée mais sur la façade d’un « bar café gelateria1 », elle n’est ni datée, ni
signée. C’est une œuvre anonyme parce que créée par plusieurs à destination de tous.
Elle évoque d’emblée le célèbre tableau de Géricault Le Radeau de la Méduse
(1819), qui avait immortalisé le naufrage d’un navire français au large de l’actuelle
mauritanie, et dont la composition est identique dans ses grandes lignes : homme
torse nu, redressé à la proue de l’épave, corps enchevêtrés derrière lui, et, au premier
plan, un autre semblant à l’agonie…
mais un texte2 s’inscrit au-dessus de la fresque, « siamo tutti clandestini » (nous
sommes tous des clandestins), la transformant ainsi en une dénonciation des frontières et des politiques d’immigration : à l’arrière-plan, un rempart ceint une ville qui
évoque New York par ses gratte-ciel.
En outre, les corps des « boat-people » rappellent la manière de Picasso : traits
déstructurés par les à-plats des yeux et des narines de l’homme en maillot blanc,
mains gigantesques, corps fondus dans les lignes brisées de la coque… Ces caractéristiques cubistes soulignent ici la maltraitance des corps et la détresse des esprits :
yeux exorbités, mains tendues dans un geste d’appel, bouches ouvertes en un cri
ou une lamentation… destinés à susciter l’empathie du spectateur, mais aussi son
indignation !
1. Certains éléments de la fresque ne sont pas visibles sur cette photo centrée sur le radeau ; on trouvera
sur Internet d’autres cadrages permettant de voir la fresque dans son contexte : http://tinyurl.com/noqq3uw
2. Hors du cadre de cette prise de vue, ainsi que la statue de la Liberté, plus à droite.
mars 2014
NRP COLLÈGE
45
Séquence 3 3e
FI
1
E
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Adaptable aux besoins des élèves.
E ÉL È V
CH
Pour une définition
de la poésie engagée
Voici un ensemble de citations de poètes. Pour chacun,
qu’est-ce qui peut bien rattacher ce passage à la
poésie « engagée » ? Quels indices vous permettent de
répondre ? Quel message chaque auteur veut-il faire
passer ?
Ce travail sera réalisé en groupes.
1. « Tout au contraire des vaisseaux les oiseaux ne volent
bien que contre le vent. Or la poésie tient de l’oiseau. »
Victor Hugo, préface des Feuilles d’automne, 1831.
5. « […] Si nous ne dormons pas c’est pour guetter l’aurore
Destinée arbitraire
© Gallimard.
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...................................................................................................
...................................................................................................
6.
...................................................................................................
...................................................................................................
Louis Aragon, Le Musée Grévin,
...................................................................................................
2. « Le poète n’est pas celui qui dit Je n’y suis pour personne
Le poète dit J’y suis pour tout le monde »
Claude Roy, « Jamais je ne pourrai » in Les Circonstances
recueilli dans Poésies, Gallimard.
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...................................................................................................
...................................................................................................
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7. « […] Il a les doigts épais et gras comme des vers
Et des mots d’un quintal précis comme des fers.
Quand sa moustache rit », […] on dirait des cafards
...................................................................................................
3. « Vous demandez pourquoi ma poésie
Ne parle pas du songe, des feuilles
Des volcans de mon pays natal
Venez voir le sang dans les rues. »
Pablo Neruda, L’Espagne au cœur
1938 pour la traduction française.
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...................................................................................................
...................................................................................................
4. « Considérez si c’est un homme
Que celui qui peine dans la boue
Qui ne connaît pas de repos,
Qui se bat pour un quignon de pain,
Qui meurt pour un oui pour un non »
Primo Lévi, Si c’est un homme,
...................................................................................................
46
recueilli dans Tristia et autres poèmes, Gallimard.
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8. « Depuis cent ans, les poètes sont descendus des
sommets sur lesquels ils se croyaient. […] Ils ont appris
les chants de révolte de la foule malheureuse et, sans se
rebuter, essaient de leur apprendre les leurs. »
Paul Eluard, L’Évidence poétique, in Œuvres complètes,
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
9. « Je sais la force des mots, des mots-tocsin »
Vladimir Maïakowski, 1930, trad. Elsa Triolet
Vers et proses.
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NRP COLLÈGE
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2
E
FI
E ÉL È V
cH
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3e Séquence 3
qui sont les poètes engagés ?
Voici des notices biographiques de poètes dits « engagés ».
Mahmoud Darwich (1941-2008)
Poète palestinien, il fut membre de la direction
de l’Organisation de Libération de la Palestine.
mondialement connu.
Aimé césaire (1913-2008)
Poète martiniquais, il combat le racisme et le
colonialisme. Il a été très longtemps maire de Fort-deFrance et député.
ossip Mandelstam (1891-1938)
Poète russe, antistalinien, il fut arrêté, déporté et
mourut durant sa déportation.
Bertold Brecht (1898-1956)
Dramaturge et poète allemand, il a combattu le
nazisme par ses écrits et s’est exilé pendant la période
nazie.
Pablo neruda (1904-1973)
Poète chilien, prix Nobel de littérature. mort (peutêtre assassiné) juste après le coup d’État militaire dans
son pays.
Paul Eluard (1895-1952)
Ce poète français qui combattit le fascisme est l’un
des grands écrivains de la résistance.
Kateb Yacine (1929-1989)
Cet écrivain algérien, auteur de poèmes sur son pays,
a dû s’expatrier pendant la guerre d’algérie.
Yannis ritsos (1909-1990)
Poète grec, souvent en exil ou déporté, il a combattu
la dictature dans son pays tout en soutenant le
communisme.
nazim Hikhmet (1902-1963)
Ce poète turc, successivement condamné pour
antimarxisme, activités antinazies et antifranquistes, a
fait 17 ans de prison et est mort en exil à moscou.
David Diop (1927-1960)
Poète sénégalais, il a combattu le colonialisme dans
son recueil de poèmes Coups de pilon.
questions
1. Quel(s) point(s) commun(s) ces poètes présentent-ils ?
...................................................................................................
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2. Que combattent/ou combattaient-ils ?
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...................................................................................................
...................................................................................................
3. Comment voit-on que l’engagement dans l’écriture est
aussi une forme d’action ?
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NRP COLLÈGE
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ÉtuDE DE LA LANGuE
La ponctuation
pour construire le sens
FIcHE
ENSEIGNANt
Par Pascale Elissondo
Présentation
Présentation
Contenu
Déroulement
Ces fiches s’adressent
s’adressent aux
aux classes
classes de
de6e
6e et éventuellement
éventuellement de
de 5e
5e
et peuvent être proposées en accompagnement d’un cours sur la
ponctuation ou dans le cadre d’une remédiation, en autonomie.
La classe de 6e
initie les
les élèves à un travail sur la construction du
6e initie
récit. Il est très fréquent, malgré le travail par étapes, que les copies
soient pauvres en ponctuation. Lancés dans le désir d’écrire long, de
raconter une histoire, les élèves oublient de ponctuer, convaincus,
pour certains, que cela n’est pas une priorité, pour d’autres qu’ils
le feront à la relecture. Dans leur élan, leur enthousiasme même à
inventer, ils n’ont pas toujours conscience que la ponctuation donne
du sens. Ces fiches proposent donc de mettre en évidence le lien
entre ponctuation et sens.
Nous aborderons la ponctuation selon les trois axes suivants :
– la ponctuation forte, essentielle à la construction de la phrase,
– la ponctuation à l’intérieur de la phrase, qui peut être un élément
stylistique ou porteur de sens,
– la ponctuation du dialogue,
– la dernière fiche clôturant l’ensemble en rappelant le rôle de la
ponctuation dans la construction du sens.
La première fiche aborde la ponctuation forte par un exercice
basé sur l’écoute : quelques phrases sont dictées et l’on demande
à l’élève d’utiliser des flèches pour caractériser l’intonation. Nous
verrons la phrase exclamative au service des sentiments, la phrase
interrogative et le cas particulier du rôle du point de suspension
dans le dialogue. Dans un second temps, toujours sous la dictée,
l’élève sera sollicité pour restituer une ponctuation forte dans un
texte court, en respectant l’intonation.
•
•
•
• Chaque fiche est organisée selon une progression : de l’observation à la construction, et contient un rappel du cours.
• Il m’a paru important de mettre en relation l’oral et l’écrit. L’écoute
me semble être un angle d’approche privilégié pour étudier la ponctuation. Aussi la lecture expressive d’un texte devrait-elle permettre
aux élèves de prendre conscience plus aisément de l’intérêt de la
ponctuation à l’écrit.
•
• Les fiches 2 et 3 traitent de la ponctuation à l’intérieur de la phrase :
dans un premier temps, l’élève observe afin de déterminer le rôle de
la virgule. À son tour, il construit avec la virgule en imitant la construction de la phrase. Il en
en sera
sera de
demême
mêmeavec
avecles
lesdeux-points
deux-pointset
etlelepointpoint
virgule.
• Dans la fiche 4, un exercice discriminatoire permettra de différen-
cier la ponctuation du dialogue dans le récit de celle du dialogue
théâtral.
Enfin, la dernière fiche vise à insister sur le lien entre ponctuation
et sens : l’élève remarque que changer la place d’une virgule, de
deux points, de guillemets modifie le sens d’une phrase. Un exercice
d’imitation lui permettra d’être acteur en manipulant. Dans le dernier exercice, il tentera de rétablir la ponctuation, tous les signes lui
étant donnés dans l’ordre : à lui de choisir avec pertinence la place
de chacun d’eux.
•
Éléments
réponse
fiches
d’entraînement
Éléments
dede
réponse
auxaux
fiches
d’entraînement
tESt D’ÉVALuAtION
Je teste mes connaissances sur la ponctuation
On attribue 0, 5 point par signe correct.
Elle criait :
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?
– Je vois, répondit-elle, deux cavaliers qui viennent de côté, mais ils
sont bien loin encore.
– Dieu soit loué ! s’écria-t-elle un moment après, ce sont mes frères. Je
leur fais signe tant que je puis de se hâter. »
ENtRAÎNEMENtS 2 Et 3
La ponctuation à l’intérieur de la phrase
Le rôle de la virgule est plus complexe : j’ai choisi de travailler sur les
cas les plus identifiables par les élèves : l’énumération, le détachement
du complément circonstanciel en début de phrase qui est, au fond,
un emploi stylistique mais facilement repérable. On peut également
mettre en valeur le rôle mélodique de la virgule qui suspend l’intonation, montrant ainsi que la phrase n’est pas terminée. L’exercice
48
NRP COLLÈGE
mars 2014
d’imitation m’a semblé plus accessible après la phase d’identification
du complément circonstanciel.
Le point-virgule est de loin le plus complexe pour les élèves puisqu’il
se situe
situe mélodiquement
mélodiquemententre
entrelalavirgule
virgule
etet
le le
point.
point.
Il sert
Il sert
à séparer
à séparer
les
grands
les
grands
éléments
éléments
d’une
d’une
phrase.
phrase.
J’ai J’ai
volontairement
volontairement
faitfait
apparaître
apparaître
les
virgules
les
virgules
dans
dans
la phrase
la phrase
pour
pour
faciliter
faciliter
l’exercice
l’exercice.
: « À cet instant précis,
sa tête heurta le fond de la salle en fait, elle mesurait à présent plus
ENtRAÎNEMENt 4 La ponctuation du dialogue
de
deux mètres soixante-quinze ; elle ramassa aussitôt la petite clef
d’or
se exercice,
précipita complexe
vers la porte
du jardin.
Pouretcet
parce
que la» ponctuation est variée, il
Le
cas particulier
des points
de suspension
a été choisi essentiellefaudra
inviter les élèves
à ne pas
oublier les majuscules.
ment
pouren
son
usage: «dans
le dialogue
marquant
l’hésitation
Elle reprit
disant
Où est
ma chatte
? » Ce quitantôt
était la
première
«phrase
Je viens…
jelivre
viens
paysLa
lointain…
voushors
demander
hade son
end’un
français.
Souris bondit
de l’eausietpar
se mit
sard…
vous d’épouvante.
pourriez m’accorder
», tantôts’empressa
la coupure
à frissonner
« Oh ! Jevotre
voushospitalité.
demande pardon,
de dire
la parole
Alice qui craignait d’avoir froissé le malheureux animal, j’avais
«oublié
Je viens…
que vous n’aimiez pas les chats. »
– Allez-vous en, vous n’êtes qu’un escroc. »
ENtRAÎNEMENt 4
La ponctuation du dialogue
Reconnaître
Analyser
Accorder
construire
ÉtuDE DE LA LANGuE
tESt
Enrichir
Je teste mes connaissances
sur la ponctuation
1. Identifier la ponctuation forte
1. Je recopie les phrases suivantes en choisissant les signes
de ponctuation qui conviennent à chaque emplacement
marqué — . Je mets les majuscules s’il y a lieu.
(barême… / 8 : 0,5 point par majuscule ; 0,5 point par signe de
ponctuation)
3. mon dieu — vous avez tout perdu au jeu — vous me
faites peur —
1. qui est là — répondez sur le champ —
4. il ne fut pas plus tôt arrivé sur les lieux du crime qu’il vit la
silhouette d’une femme disparaître dans les bois —
...................................................................................................
2. ne criez pas — on va s’occuper de vous —
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
2. choisir entre virgule et point-virgule
2. Je recopie ces phrases en les complétant par une
virgule ou un point-virgule.
3. Il refusait de faire les tâches les plus faciles il préférait
affronter la difficulté.
1. Parfois alors que le petit Léo s’était endormi l’adorable
créature venait se blottir contre lui.
...................................................................................................
...................................................................................................
4. Il lui demanda son adresse elle la lui donna.
...................................................................................................
2. Chaque muscle chaque fibre chaque cellule étaient
épuisés après la course.
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
5. Elle avait lu Harry Potter L’Ancre de la Miséricorde Le Tour du
Monde en quatre-vingts jours et L’Hivernage dans les glaces.
...................................................................................................
...................................................................................................
3. rétablir la ponctuation d’un dialogue
3. Écoute la lecture du texte et rétablis la ponctuation.
Elle criait
« anne ma sœur anne ne vois-tu rien donc venir
– Je vois répondit-elle deux cavaliers qui viennent de ce côté
mais ils sont bien loin encore
– Dieu soit loué s’écria-t-elle un moment après ce sont mes
frères Je leur fais signe tant que je puis de se hâter »
Charles Perrault, La Barbe bleue.
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EN
ÉtuDE DE LA LANGuE
1
Nt
AÎNEME
tR
Reconnaître
Analyser
Accorder
construire
Enrichir
La ponctuation forte
1. J’écoute
3. J’identifie un sentiment
gràce à la ponctuation
1. Écoute la lecture des phrases suivantes. Que
remarques-tu ? Montre que l’intonation baisse ou monte
en l’indiquant avec une flèche qui monte ou qui baisse.
1. Viendras-tu de si loin nous rendre visite ?
4. Indique pour chaque phrase le sentiment exprimé :
admiration, colère, étonnement, peur.
..........................
2. Le conteur s’interrompit : les enfants s’étaient endormis.
3. Que veux-tu dire ? A-t-il fait le nécessaire ?
.
........................
4. Elle aimait passionnément la musique depuis sa plus
tendre enfance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5. Arrête immédiatement ce cirque !
......................................
6. Quel panorama exceptionnel ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2. Dans le tableau, associe chaque type de phrase à
l’intonation qui correspond en plaçant les flèches.
Phrase
déclarative (.)
Phrase
interrogative (?)
Phrase
exclamative (!)
Je retiens
• La phrase donne une information : elle s’achève par
un point. L’intonation baisse.
• La phrase s’achève par un point d’exclamation ;
l’intonation baisse.
• La phrase pose une question ; elle s’achève par un
point d’interrogation ; l’intonation monte.
2. J’écoute et je ponctue
3. Sous la dictée de ton professeur, mets la ponctuation à
l’endroit indiqué dans le texte.
« Le lapin eut tôt fait de remarquer alice, qui furetait partout et il l’interpella d’une voix courroucée : “ mais que
fabriquez-vous donc ici, marie-anne — Filez à la maison
et rapportez-moi une paire de gants et un éventail — allez,
dépêchons — ” Et alice fut tellement effrayée qu’elle se
précipita dans la direction qu’il indiquait, sans tenter de lui
expliquer sa méprise— » […] « Comme cela semble bizarre
de faire des courses pour un lapin— » se dit alice—
1. Me trahir de cette manière !
................................................
2. Quel paysage magnifique !
.................................................
3. Quel curieux personnage !
..................................................
4. Elle avait le visage d’une sorcière ! . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Je retiens
Le point d’exclamation permet d’exprimer un sentiment
(colère, joie, étonnement, tristesse).
4. Je construis et ponctue mes phrases
5. Sur le modèle de l’exercice 4, rédige trois phrases
dans lesquelles tu exprimeras la colère, la joie, la peur.
Tu n’oublieras pas d’indiquer la ponctuation.
5. Le point de suspension
6. Parfois, nous rencontrons des points de suspension
dans le dialogue. Ils indiquent une interruption dans la
phrase. Selon vous, que marquent -ils dans les phrases
suivantes ?
1. « Je viens… je viens d’un pays lointain… vous
demander… si par hasard… vous pourriez m’accorder votre
hospitalité. »
2. « Je viens vous…
– Allez-vous en, vous n’êtes qu’un escroc »
Je retiens
Les points de suspension, toujours au nombre de trois,
marquent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . ou . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
dans le dialogue.
Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles,
trad. fr. Daniel Bismuth, © Bibliocollège.
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mars 2014
construire
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2
ÉtuDE DE LA LANGuE
Accorder
EN
Analyser
Nt
Reconnaître
AÎNEME
tR
La ponctuation à l’intérieur
de la phrase : la virgule
1. J’observe
1. Observe les phrases suivantes, puis recopie les
groupes qui précèdent la virgule et donne leur fonction
grammaticale.
2. Ce matin-là il découvrit une créature étrange sur la plage.
1. Au bout de quelques minutes, le petit garçon entendit au
loin un bruit de pas effrayant.
4. Au-dessus de son lit l’enfant croyait voir des étoiles.
...................................................................................................
2. À cet instant précis, elle se jeta sur la tarte au chocolat.
3. À chaque seconde il lui semblait entendre sa voix.
3. « J’ai lu les romans de Jules Verne, de Charles Dickens,
de Jack London, d’Alexandre Dumas : j’adore le roman
d’aventures. »
...................................................................................................
a. Quels sont les points communs entre les noms propres
cités dans cette phrase ?
3. Dès qu’elle fut blottie dans ses bras, elle oublia tous ses
soucis.
...................................................................................................
...................................................................................................
4. Dans cette pièce à peine éclairée, on pouvait apercevoir
un vieux canapé en cuir.
...................................................................................................
2. En te basant sur ton observation, place la virgule dans
les phrases suivantes.
1. Après avoir terminé son ouvrage la fille se mit à peindre.
b. Qu’en déduis-tu sur le rôle de la virgule dans la phrase ?
...................................................................................................
Je retiens
• La virgule marque une pause légère, une respiration
entre des mots ou groupes de mots.
• On peut l’employer pour indiquer par exemple une
énumération ou pour détacher des groupes de mots
indiquant le lieu ou le temps.
2. Je construis
4. Construis deux phrases sur le modèle des précédentes en prenant soin de ne pas oublier la virgule.
a. Complément circonstanciel de temps (Lorsque / Quand / Pendant que)
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b. Complément circonstanciel de lieu (Dans / À l’intérieur de / Au milieu de)
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51
EN
ÉtuDE DE LA LANGuE
3
Nt
AÎNEME
tR
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La ponctuation à l’intérieur
de la phrase : le point-virgule
et les deux-points
1. Le point-virgule
Je retiens
Le point-virgule s’emploie pour marquer une pause un
peu plus forte que la virgule mais les propositions qu’il
sépare ont un lien entre elles :
Le lapin arriva devant la porte et essaya de l’ouvrir ; mais
comme elle s’ouvrait vers l’intérieur et que le coude
d’alice était pressé, cette tentative se solda par un échec.
Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles, op.cit.
1. Place le point-virgule à l’endroit où tu le juges nécessaire :
« À cet instant précis, sa tête heurta le fond de la salle en fait,
elle mesurait à présent plus de deux mètres soixante-quinze
elle ramassa aussitôt la petite clef d’or et se précipita vers la
porte du jardin. »
2. Voici une phrase très longue ; les virgules ont été
conservées mais nous avons retiré les points-virgules.
a. Lis à haute voix et place les quatre points-virgules
en fonction de la respiration.
b. Quelle remarque peux-tu faire sur la construction
de la phrase ?
« au bout d’un mois, la Barbe Bleue dit à sa femme qu’il
était obligé de faire un voyage en province, de six semaines
au moins, pour une affaire de conséquence qu’il la priait
de se bien divertir pendant son absence qu’elle fît venir
ses bonnes amies qu’elle les menât à la campagne, si elle
voulait que partout elle fit bonne chère. »
Charles Perrault, La Barbe Bleue, 1697.
2. Les deux-points
Je retiens
Les deux-points annoncent :
une explication, une énumération ou des paroles.
3. Identifie le rôle des deux-points dans les phrases
suivantes.
1. Je sais pourquoi elle est partie en pleurant : ses camarades
se moquaient d’elle.
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52
NRP COLLÈGE
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2. Yoann aime les fruits : les mangues, les framboises,
les cerises, les kiwis et les fraises sont ceux qu’il préfère.
...................................................................................................
3. Léa range ses pinceaux : son cours de peinture est terminé.
...................................................................................................
4. La jeune fille s’exclama : « Quelle joie de danser ! »
...................................................................................................
4. a. Lis l’extrait suivant et rajoute les deux-points.
Étant arrivée à la porte du cabinet, elle s’y arrêta quelque
temps, songeant à la défense que son mari lui avait faite,
et considérant qu’il pourrait lui arriver malheur d’avoir
été désobéissante ; mais la tentation était si forte qu’elle ne
put la surmonter elle prit donc la petite clé, et ouvrit en
tremblant la porte du cabinet.
Charles Perrault, La Barbe Bleue, 1697.
b. Justifie ta réponse.
Les deux-points indiquent
......................................................
3. Je construis
5. À ton tour, réponds à la question suivante en terminant
la phrase et en faisant bon usage des deux-points et de la
virgule.
Si tu avais le pouvoir de changer les choses, lesquelles
changerais-tu ?
Si j’avais le pouvoir de changer les choses
.............................
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ÉtuDE DE LA LANGuE
Accorder
EN
Analyser
Nt
Reconnaître
AÎNEME
tR
La ponctuation du dialogue
1. Le dialogue dans le récit
Je retiens
Dans le récit, le dialogue est introduit selon des règles
précises :
– les deux-points annoncent les paroles ;
– les guillemets ouvrent et ferment le dialogue ;
– les tirets indiquent un changement d’interlocuteur.
Elle reprit donc en disant où est ma chatte ce qui était la
première phrase de son livre en français La souris bondit
hors de l’eau et se mit à frissonner d’épouvante oh je vous
demande pardon s’empressa de dire alice qui craignait
d’avoir froissé le malheureux animal j’avais oublié que
vous n’aimiez pas les chats
...................................................................................................
1. Je rétablis la ponctuation, les majuscules et soigne la
présentation
...................................................................................................
a. Dans un premier temps, écoute le texte lu par ton
professeur : tu mettras en couleur une barre qui marquera
les pauses que tu as repérées.
...................................................................................................
b. Ensuite, au cours d’une deuxième lecture, tu indiqueras
avec une flèche si l’intonation monte ou baisse.
...................................................................................................
c. Enfin, en t’appuyant sur tes observations, tu recopieras
le texte et rétabliras la ponctuation, en particulier les
guillemets, ainsi que les deux-points.
...................................................................................................
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...................................................................................................
...................................................................................................
2. Le dialogue de théâtre
2. Voici un extrait de théâtre :
SGANARELLE. – Hé bien ! mademoiselle, vous êtes malade ?
LUCiLE. – Oui, monsieur.
SGANARELLE. – Tant pis ! C’est une marque que vous ne portez pas
bien. sentez-vous de grandes douleurs de la tête aux reins ?
LUCiLE. – Oui, monsieur.
SGANARELLE. – C’est fort bien fait.
molière, Le Médecin volant, acte I, scène 5.
Remplis le tableau suivant pour montrer les différences entre la ponctuation du dialogue dans le récit et la ponctuation du
texte théâtral.
Guillemets
Tirets
Deux-points
Ponctuation forte
Ponctuation à
l’intérieur de la
phrase
Dialogue
dans un récit
..............................
..............................
..............................
..............................
..............................
Dialogue
théâtral
..............................
..............................
..............................
..............................
..............................
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mars 2014
NRP COLLÈGE
53
EN
5
Nt
ÉtuDE DE LA LANGuE
AÎNEME
tR
Reconnaître
Analyser
Accorder
construire
Enrichir
La ponctuation et le sens
1. J’observe
1. Phrase 1. Le Chaperon rouge dit : « Le loup est cruel. »
Phrase 2. « Le Chaperon rouge, dit le loup, est cruel. »
3. Phrase 1 : Les artistes qui ont reçu un prix sont heureux.
Phrase 2 : Les artistes, qui ont reçu un prix, sont heureux.
a. Qui parle dans la phrase 1 ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Explique la différence de sens entre les deux phrases.
b. Qui parle dans la phrase 2 ?
...................................................................................................
................................................
c. Qui est cruel d’après la phrase 2 ?
.......................................
2. Phrase 1 : Les employés qui s’étaient enfuis en emportant
la caisse ont été arrêtés.
Phrase 2 : Les employés, qui s’étaient enfuis en emportant la
caisse, ont été arrêtés.
Laquelle de ces deux phrases montre que tous les employés
du magasin sont malhonnêtes ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
4. À ton tour, déplace la ponctuation et donne un sens
différent à cette phrase.
« L’élève, dit le professeur, est un clown. »
...................................................................................................
2. Je rétablis le sens d’un texte court
5. Voici, à présent, un extrait d’Alice au pays des merveilles.
Replace la ponctuation suivante dans l’ordre indiqué. Tu
devras choisir de la mettre avant ou après les bons mots
pour qu’elle ait du sens.
Allez Dinah dis-moi la vérité as-tu jamais mangé une
chauve-souris
1. « , ! , . ? »
3. «, ! »
Ma chère Dinah comme je voudrais t’avoir ici avec moi il
n’y a pas de souris dans l’air je le crains fort mais tu pourrais
attraper une chauve-souris
Par mes oreilles et mes moustaches comme il se fait tard
2. « , , : ? »
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54
NRP COLLÈGE
mars 2014
construire
Enrichir
6
ÉtuDE DE LA LANGuE
Accorder
É
Analyser
N
Reconnaître
LuAtIO
VA
Je vérifie mes connaissances
sur la ponctuation
1. Je rédige en utilisant la ponctuation forte
1. Rédige trois phrases qui exprimeront les sentiments
indiqués entre parenthèses. (4 points)
a. (colère) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
qu’elles lui avaient fait souffrir Cendrillon les releva, et leur
dit en les embrassant, qu’elle leur pardonnait de bon cœur
et qu’elle les priait de l’aimer bien toujours on la mena chez
le jeune prince, parée comme elle était […]
b. (admiration) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Charles Perrault, Cendrillon ou La Petite Pantoufle de verre.
c. (étonnement) : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
...................................................................................................
d. (joie) :
...................................................................................................
...................................................................................
2. Recopie le texte en séparant les phrases par un signe de
ponctuation forte et rétablis les majuscules. (5 points)
« alors les deux sœurs la reconnurent pour la belle personne qu’elles avaient vue au bal elles se jetèrent à ses pieds
pour lui demander pardon de tous les mauvais traitements
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
2. Je ponctue le dialogue
3. Recopie le dialogue en remplaçant les — par un signe
de ponctuation. (8 points)
— Je voudrais bien — je voudrais bien… — Elle pleurait
si fort qu’elle ne put achever — sa marraine, qui était la
fée, lui dit —
— Tu voudrais bien aller au bal — n’est-ce pas —
— Hélas oui — dit Cendrillon en soupirant —
— Hé bien, seras-tu une bonne fille — dit sa marraine —
je t’y ferai aller — —
Charles Perrault, Cendrillon ou La Petite Pantoufle de verre.
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Je rétablis la virgule, le point virgule et les deux points à l’intérieur de la phrase
4. Place une virgule, un point-virgule et deux-points dans le passage suivant. (3 points)
Il se fit alors un grand silence on cessa de danser et les violons
ne jouèrent plus tant on était attentif à contempler les grandes
beautés de cette inconnue. On n’entendait qu’un bruit confus
« ah qu’elle est belle ! »
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NRP COLLÈGE
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L’histoire
Ulysse, de retour de la guerre
de Troie, survivra-t-il
aux embûches semées
par Poséidon, à la fureur
du Cyclope, aux charmes
Les enjeux pédagogiques
• Des extraits bien choisis pour saisir les différents aspects de l’œuvre
et des résumés clairs pour suivre la trame du récit.
• Une traduction inédite, accessible à des élèves de 6e.
• Une épopée qui permet d’analyser le récit, d’étudier les personnages
et l’Antiquité, en écho avec le programme d’histoire.
de Calypso et de Circé
ou au chant des sirènes ?
En complément : un extrait de l’Énéide de Virgile.
Retrouvez sur www.carresclassiques.com :
• des pistes d’exploitation pédagogique
• le livret de l’enseignant téléchargeable gratuitement.
FIcHE
ENSEIGNANt
Le rêve d’un poète
Poète, dramaturge, peintre, cinéaste, Jean Cocteau convoque
dans son adaptation du roman de Madame Leprince de Beaumont les muses, les mythes et les arts qui ont jalonné son
parcours de créateur. Concevant avant tout le cinéma comme
un art de l’illusion et son rôle de réalisateur comme celui d’un
prestidigitateur, Cocteau donne libre cours à son goût pour
les inventions techniques et pour les trucages aussi artisanaux qu’audacieux (projection inversée, ralenti, usage de fils
invisibles, surimpression, effets de montage). Par la puissance
onirique que lui confère l’écriture de ce cinéaste magicien, La
Belle et la Bête est une ode au cinéma et à sa capacité à transformer en son, lumière et mouvement les rêves d’un poète.
Un conte de fées d’après-guerre
Réalisé entre août 1945 et juin 1946 alors que la France est
exsangue, le tournage de La Belle et la Bête, qui nécessite
d’amples moyens économiques et techniques (costumes,
maquillages, effets spéciaux, décors), est une entreprise complexe. De plus, alors que le pays tente de se reconstruire dans
une certaine ferveur politique, l’adaptation d’un conte de fées
semble pour beaucoup un projet insensé et une fuite loin du
présent. Certes, La Belle et la Bête convoque tous les motifs du
conte (monstre, prince, belle endormie, la forêt comme lieu
mystérieux de transition et d’initiation, le château enchanté) mais, chez Cocteau, l’empire de l’imaginaire déplace les
limites du genre.
Dès le prologue écrit à la main1, Cocteau invite le spectateur
à pénétrer le monde du songe et à avoir foi en sa propre imagination. Puis le film se déploie comme un rêve éveillé où
l’on quitte le monde domestique pour prendre le chemin du
merveilleux. De la boue de la séquence d’ouverture (2) dans
laquelle pataugent les deux sœurs au septième ciel offert aux
amants dans le plan final (16), le film est ainsi guidé par une
force qui, comme ses personnages, nous invite à nous élever
du trivial à la beauté.
Un film écrit à l’encre de la lumière
Poétique et narrative, la lumière crée des images magiques
qui jouent sur le visible et le caché, le scintillement et l’obscur,
Par Marie Pierre Lafargue, intervenante cinéma en milieu scolaire.
tout ce qui attire le regard ou, au contraire, ce qui se refuse à
lui. Elle révèle le rayonnement intérieur de Belle et de la Bête
ou inversement, par son absence, dévoile la part d’ombre qui
habite les personnages.
Pendant le tournage, s’inspirant des peintres hollandais du
xviiie siècle et en particulier de Vermeer, le chef opérateur
Henri Alekan compose une symphonie visuelle de matières
et de contrastes. À la lumière domestiquée, diurne, « rationnelle » du monde des hommes, il oppose un monde nocturne
plongé dans des contrastes saisissants où les détails (rose,
gant, miroir, mains et yeux de la Bête) rayonnent dans leur
écrin d’obscurité. Au montage, Cocteau renforce ces choix en
faisant du fondu au noir l’instrument cinématographique privilégié du voyage et du passage entre les différents univers et
en le combinant aux effets de fumée et de drapés qui ouatent
le film : la brume de la forêt (3), les voiles lors de l’arrivée de
Belle au château (7), les draps séchant au soleil (12).
L’œil qui regarde
La Belle et la Bête regorge de miroirs et autres surfaces réfléchissantes tel le plancher lustré renvoyant l’image de Belle au
début du film. Les personnages s’y mirent sans cesse mais le
miroir n’y est pas tant le lieu de la contemplation que celui de
la révélation (reflets des sœurs en sorcière et guenon, apparitions des désirs enfouis de Belle). Le double sens du verbe
« réfléchir » – la réverbération et l’introspection – avec lequel
le film joue, renvoie au fait que le miroir de Belle « réfléchit »
rarement le reflet de son porteur mais « réfléchit » pour lui et
lui révèle ce que ses yeux ne peuvent voir. Le film invite à une
traversée des apparences vers la vérité des cœurs qui est une
définition du cinéma même : art usant des artifices de la mise
en scène pour s’approcher de la vérité.
La métamorphose du monstre obéit à la même injonction.
Pour incarner la Bête sans corps du conte original, Cocteau
imagine un être composite, doué d’une étrange séduction.
Bestiale avec sa gueule qui lape et sa mâchoire ornée de canines félines, mais aussi profondément humaine par son port
de tête altier, son costume perlé de pierres précieuses, ses
gestes raffinés et son langage soutenu, sa dualité traduit son
tiraillement et la douleur de cet homme aux instincts de bête
(10). À la question de la monstruosité constamment posée
par La Belle et la Bête, la mise en scène de Cocteau répond par
le regard d’amour de Belle qui met un terme à la malédiction
de la Bête (16).
1. La numérotation renvoie au chapitrage du film dans l’édition DVD Studio
Canal 2008.
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NRP COLLÈGE
57
ANALYSE FILMIQuE 6e-5e
La Belle et la Bête
de Jean cocteau (1946)
FI
E
ANALYSE FILMIQuE 6e-5e
E ÉL È V
cH
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Adaptable aux besoins des élèves.
La Belle et la Bête
de Jean cocteau (1946)
Après la projection du film, répondez aux questions et aux consignes.
1. Un film merveilleux
1. Où et quand le film se passe-t-il ?
5. Quels sont les trois lieux du récit ?
...................................................................................................
...................................................................................................
2. À quel genre appartient-il ?
6. Quels objets symbolisent le pouvoir de la Bête ?
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Quels sont les principaux personnages ?
...................................................................................................
...................................................................................................
7. De quels pouvoirs sont-il dotés ?
4. À quels autres contes font-ils penser ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
2. Belle lumière
8. Comment Belle apparaît-elle dans la première séquence ?
11. Citez d’autres objets brillants.
...................................................................................................
...................................................................................................
9. Comment est-elle mise en valeur dans le film ?
12. Où les trouve-t-on ?
...................................................................................................
...................................................................................................
10. En quoi Belle est-elle lumineuse ?
13. La Bête appartient-elle à l’ombre ou à la lumière ?
...................................................................................................
...................................................................................................
3. Hommes et bêtes
14. Qu’est-ce qui est « humain » sur le visage de la Bête ?
...................................................................................................
18. Quels autres personnages se comportent comme des
bêtes ?
...................................................................................................
15. Qu’est-ce qui est « animal » sur son visage ?
19. À quels animaux le réalisateur les compare-t-il ?
...................................................................................................
...................................................................................................
16. Quand se comporte-t-elle comme une bête ?
...................................................................................................
58
...................................................................................................
20. Qui libère la Bête de la malédiction ? Par quel pouvoir ?
17. Avec qui se comporte-t-elle avec humanité ?
...................................................................................................
...................................................................................................
...................................................................................................
NRP COLLÈGE
mars 2014
FIcHE
ENSEIGNANt
Le choix du texte
Ce poème d’Aragon, qui est une « ballade », illustre bien deux
caractéristiques d’une certaine poésie engagée :
– le choix de mots simples et le recours à des formes classiques, en l’occurrence la « ballade » qui renvoie à François
Villon et au Moyen Âge. Rappelons qu’il s’agit d’une forme
fixe contenant un refrain et un « envoi » ici absent ;
– la référence à un contexte précis : l’arrestation de Résistants
qui parviennent à garder le silence dans les tortures, et qui
confondent leur combat patriotique avec une lutte plus générale contre l’inhumanité.
Écrit dans la clandestinité sous un faux nom, il est bien représentatif de cette période où le poète demande qu’on ignore,
pendant « ces temps déraisonnables », les sources d’inspiration qui pouvaient sembler au cœur même de la poésie
(« Fuyez les bois et les fontaines/Taisez-vous oiseaux querelleurs/Vos chants sont mis en quarantaine/C’est le règne
de l’oiseleur » in Richard II Quarante). Il peut être mis en relation avec des lettres de fusillés. Aragon a d’ailleurs dédié ce
poème à Gabriel Péri (auquel Eluard a aussi rendu hommage),
député communiste, arrêté comme otage et qui fait allusion
dans sa lettre ultime aux « lendemains qui chantent », citation
auquel fait écho le vers « que chantent les lendemains ». Sans
doute Péri n’a-t-il pas subi de torture, mais il sert d’emblème
à une Résistance qui confond la Marseillaise et l’Internationale dans la mort héroïque. Allusion bien sûr trop subtile
pour des élèves de Troisième, mais nous espérons du moins
qu’ils repéreront les paroles de l’hymne national. On pourra
expliciter cela lors de la correction, ainsi que les références
subtiles au « Paris ne vaut pas une messe » pour laquelle il est
demandé de faire une hypothèse d’interprétation et plus difficile encore, celle au Richard III de Shakespeare, pas forcément
très pertinente d’ailleurs, si l’on peut se permettre…
Les compétences mises en œuvre
Les questions, dans l’esprit du DNB, s’attachent non à un
pointillisme étroit, mais sont au service du sens, incitant aux
hypothèses de lecture (et donc plus à un développement de
cette compétence essentielle de découvrir l’implicite qu’à
une « performance ponctuelle »), faisant appel à des connaissances normalement abordées en classe de Troisième, mettant le lexique et la grammaire (à travers notamment l’usage
des temps) ou la rhétorique au service d’un sens qui est ici
particulièrement transparent dès la lecture du titre.
par Jean-Michel Zakhartchouk
Les sujets de rédaction permettent d’exploiter le travail qui
a été fait autour de la littérature engagée, soit sous la forme
d’une production écrite adoptant le point de vue d’un personnage engagé, soit sous la forme d’une réflexion personnelle qui peut et doit s’appuyer aussi sur l’Histoire du
xxe siècle et sur la compétence qui consiste à savoir mettre
en relation des connaissances avec l’actualité.
Éléments de réponse aux questions
1. Les personnages en présence : le Résistant, qui refuse de
parler ; ceux qui l’interrogent, « deux hommes » (strophe 2) qui
« parlent en allemand » (strophe 12).
2. Ce texte a été écrit dans la clandestinité. Il vise à dénoncer
la violence de l’ennemi (« le bourreau », strophe 5 ; « sous vos
coups chargés de fers », strophe 13) et à glorifier la Résistance.
3. a. La ballade est un poème comportant des refrains,
comme une chanson. b. Ce texte est représentatif de la poésie
engagée, qui s’incarne dans un contexte, dénonce, et célèbre
des attitudes : ici l’héroïsme du Résistant torturé et qui se tait.
4. (12) Ils sont venus pour le prendre, / Ils parlent en allemand. / L’un traduit : – Veux-tu te rendre ? / Il répète calmement :
(13) – Et si c’était à refaire, / Je referais ce chemin.
Sous vos coups chargés de fers, / Que chantent les lendemains !
5. La répétition (strophe 3 : « tu peux vivre » ; strophe 6 :
« songe », 4 fois) évoque le caractère répétitif de l’interrogatoire, insinuant, martelé au Résistant pour le faire « craquer ».
6. Il pourrait dénoncer ses camarades, faire des aveux. Mais il
garde le silence, comme patriote et combattant.
7. Et si c’était à refaire / Referait-il ce chemin / La voix qui
monte des fers / Dit je le ferai demain
Les temps des verbes : imparfait, conditionnel présent, présent et futur. Le conditionnel « referait » indique la possibilité ;
le futur « ferai » : ce qui va se passer réellement.
8. Cette question est difficile, mais permet d’exercer la capacité à faire des hypothèses et à inférer : le Résistant est appelé
à se renier ; sa vie vaudrait alors plus que ce reniement.
9. On peut reconnaître dans la strophe 14, transposées dans
le contexte de la Résistance, les paroles de la Marseillaise
(« Des mots sanglant est levé »), le titre de l’hymne national
étant explicitement cité dans la dernière strophe. Cependant,
le poème se termine sur le mot « humanité », qui dépasse la
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NRP COLLÈGE
59
ENtRAÎNEMENt BREVEt
« Ballade de celui qui chanta
dans les supplices » de Louis Aragon
ENtRAÎNEMENt BREVEt
notion de patrie pour ouvrir beaucoup plus largement sur
l’universel (bien sûr, les élèves ne peuvent repérer la référence
à l’Internationale ; ils devront simplement repérer ici une référence qui dépasse la France).
réécriture
nous referions ; montera ; parlera ; cèdera ; s’ouvrira ; vous sortirez ; se dépossédera. (0,5 point par mot juste, plus 1,5 point s’ils
ont été bien recopiés, sans erreur. )
Dictée
Le boulanger n’avait pas encore dégrafé les rideaux de fer de
sa boutique que déjà le village était assiégé, bâillonné, hypnotisé, mis dans l’impossibilité de bouger. Deux compagnies
de S.S. et un détachement de miliciens le tenaient sous la
gueule de leurs mitrailleuses et de leurs mortiers. Alors commença l’épreuve.
Les habitants furent jetés hors des maisons et sommés de
se rassembler sur la place centrale. Les clés sur les portes.
Un vieux, dur d’oreille, qui ne tenait pas compte assez vite
de l’ordre, vit les quatre murs et le toit de sa grange voler en
morceaux sous l’effet d’une bombe. Depuis quatre heures
j’étais éveillé. Marcelle était venue à mon volet me chuchoter
l’alerte. J’avais reconnu immédiatement l’inutilité d’essayer de
franchir le cordon de surveillance et de gagner la campagne.
Je changeai rapidement de logis. La maison inhabitée où je
me réfugiai autorisait, à toute extrémité, une résistance armée
efficace. Je pouvais suivre de la fenêtre, derrière les rideaux
jaunis, les allées et venues nerveuses des occupants. Pas un
des miens n’était présent au village. Cette pensée me rassura.
À quelques kilomètres de là, ils suivraient mes consignes et
resteraient tapis.
René Char, « Feuillet 128 » in Feuillets d’Hypnos,
recueilli dans Fureur et mystère, Gallimard.
rédaction
Sujet d’imagination
Les élèves doivent à la fois réinvestir des compétences antérieures sur l’écriture épistolaire et utiliser ce qu’ils ont appris
sur la littérature engagée, en particulier la réflexion menée
en classe sur les raisons de l’engagement, même si elles vont
ici au-delà de celui de l’écrivain puisqu’il s’agit d’un engagement « physique ». Ce qui est intéressant aussi, c’est d’évaluer
si les élèves sont capables de prendre en compte toutes les
données de la consigne… afin d’y remédier si ce n’est pas
le cas, puisque c’est le rôle d’un examen blanc. La lettre est
forcément contextualisée, il s’agit bien de comprendre que
l’engagement n’a pas été public, d’où l’ignorance des parents.
Si des « lettres de fusillés » ont été étudiées (par exemple celle
de Manouchian), cette rédaction sera bien sûr facilitée. À noter que le Résistant ne peut pas forcément « tout dire » dans
60
NRP COLLÈGE
mars 2014
ce genre de lettre, laquelle n’attend pas de réponse, évidemment, hélas !
Outre les caractéristiques d’une lettre (présentation, etc.), les
élèves sont amenés à mobiliser des ressources de vocabulaire
pour exprimer les sentiments du héros, sentiments envers ses
proches comme envers le combat qui l’a mené à la mort.
La grandiloquence est ici possible, quand bien même elle
serait maladroite, car tout à fait dans le ton de la consigne
donnée et des circonstances. Et les élèves peuvent bien entendu s’appuyer sur le texte en reprenant par exemple les
mots d’Aragon : « et s’il était à refaire, je referai ce chemin »,
les allusions aux « lendemains », etc. La lettre est aussi à la
conjonction du passé (souvenirs d’enfance ?), du présent (tragique) et du futur (paradoxalement plein d’espoir).
Sujet de réflexion
Il s’agit d’évaluer là encore des compétences du socle commun, en écrivant un texte cohérent, organisé, utilisant des
ressources de la langue mises au service d’un développement
argumentatif. Rappelons que les élèves n’en sont qu’à une
initiation à des formes dissertatives et qu’il ne faut pas « en
demander trop ». Reste que les raisons de l’engagement ont
été analysées en classe, et ce travail préalable doit nourrir la
production écrite. De même le texte-source peut-il stimuler
le candidat : l’idée d’engagement comme « cheminement personnel », de volonté de servir les autres et de se tourner vers
un avenir qu’on espère meilleur, courage (« il chantait sous
les balles »), refus de « vivre à genoux », sens qu’on donne à sa
vie (« si je meurs/vous saurez pourquoi ce fut »), mais aussi les
objections à l’engagement : pourquoi sacrifier sa vie, pourquoi ne pas profiter des plaisirs de celle-ci (« la douceur des
matins ») ? On pourrait évoquer la vie de famille, la fragilité de
certaines causes qui sont défendues ou des résultats obtenus
(les sacrifices « vains »…).
D’ailleurs, un travail comme celui que nous proposons sur la
littérature engagée doit aussi introduire doute et esprit critique, même s’il ne faut en aucun cas minimiser la grandeur
de l’héroïsme des Résistants. Tous les combats n’ont pas la
clarté de celui qui fut livré contre le nazisme, et on aura aussi
analysé les perversions de l’engagement au service de causes
comme celle du stalinisme, étudié si possible conjointement
en cours d’Histoire (quel élève pensera à faire allusion à des
textes étudiés en classe, comme, peut-être, des extraits de La
Ferme des animaux ?).
On tiendra compte de la difficulté de ce genre de sujet en
privilégiant la maîtrise de l’organisation du texte, la présence
d’enchaînements logiques marqués par des connecteurs, l’effort même maladroit pour faire allusion à ce qui a été étudié
en classe, mais aussi la capacité à établir des liens avec l’actualité (les élèves citeront sans doute des « héros modernes » qui
leur sont parfois plus familiers que les combattants de la lutte
anti-nazie, tels Mandela ou Martin Luther King).
Les deux sujets sont en tout cas des occasions de faire
prendre conscience de la nécessité d’établir des ponts entre
ces sujets et le texte-source.
ENtRAÎNEMENt BREVEt
E
FI
E ÉL È V
cH
« Ballade de celui qui chanta dans
les supplices » de Louis Aragon
1 Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemains
2 On dit que dans sa cellule
Deux hommes cette nuit-là
Lui murmuraient « Capitule
De cette vie es-tu las
3 Tu peux vivre tu peux vivre
Tu peux vivre comme nous
Dis le mot qui te délivre
Et tu peux vivre à genoux »
4 Et s’il était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle pour les lendemains
5 rien qu’un mot la porte cède
s’ouvre et tu sors rien qu’un mot
Le bourreau se dépossède
sésame Finis tes maux
6 rien qu’un mot rien qu’un mensonge
Pour transformer ton destin
songe songe songe songe
À la douceur des matins
7 Et si c’était à refaire
Je referais ce chemin
La voix qui monte des fers
Parle aux hommes de demain
8 J’ai tout dit ce qu’on peut dire
L’exemple du roi Henri
Un cheval pour mon empire
Une messe pour Paris
9 rien à faire alors qu’ils partent
sur lui retombe son sang
C’était son unique carte
Périsse cet innocent
10 Et si c’était à refaire
referait-il ce chemin
La voix qui monte des fers
Dit je le ferai demain
11 Je meurs et France demeure
mon amour et mon refus
Ô mes amis si je meurs
Vous saurez pour quoi ce fut
12 Ils sont venus pour le prendre
Ils parlent en allemand
L’un traduit Veux-tu te rendre
Il répète calmement
13 Et si c’était à refaire
Je referais ce chemin
sous vos coups chargés de fers
Que chantent les lendemains
14 Il chantait lui sous les balles
Des mots sanglant est levé
D’une seconde rafale
Il a fallu l’achever
15 Une autre chanson française
À ses lèvres est montée
Finissant la marseillaise
Pour toute l’humanité
Louis aragon, « Ballade de celui qui chanta dans les supplices »
in La Diane française NE, Éditions seghers, 2012.
questions (15 points)
1. Qui sont les personnages en présence, que sait-on d’eux
et qu’arrive-t-il ? (1 point)
2. Pourquoi le texte est-il paru d’abord sous un pseudonyme ?
Pourquoi l’auteur l’a-t-il écrit ? (1 point)
3. a. Ce texte est une « ballade ». D’après la manière dont le
texte est écrit, qu’est-ce qu’une ballade ?
b. Quelles caractéristiques de la poésie engagée
reconnaissez-vous dans ce texte ?
c. Citez d’autres œuvres, littéraires et artistiques (tableaux ou
sculptures) où l’on retrouve ces caractéristiques. (3 points)
4. Le texte est sans ponctuation. Réécrivez les strophes 12
et 13 en rétablissant la ponctuation. (2 points : 1 pour les
points d’interrogation et exclamation et virgules, 1 pour la
ponctuation du dialogue)
5. a. Quelle est la figure de style qui revient souvent ? b. En
quoi est-elle bien accord avec le sens du texte ? (2 points)
6. Qu’est-ce qui pourrait « délivrer » (strophe 3) le
personnage principal de ce texte ? Et pourquoi refuse-t-il
cette délivrance ? (1 point)
7. Énumérez les temps des verbes de la strophe 10 et
indiquez pourquoi « referait » et « ferai » s’écrivent ainsi et
sont de temps différents ? (2 points)
8. La strophe 8 est difficilement compréhensible si on ne
voit pas à quoi fait allusion l’auteur. Sachant qu’Henri IV a
dit : « Paris vaut bien une messe » en acceptant de renier sa
foi protestante pour devenir roi, quel rapport cette formule
présente-t-elle avec la situation du poème ? (1 point)
9. Expliquez les deux dernières strophes. Que reconnaissezvous dans la strophe 14 ? Et pourquoi l’auteur a-t-il terminé
ainsi son poème (dernier vers) (2 points)
réécriture (5 points)
Réécrivez les strophes 4 et 5 en remplaçant « je » et « tu » par
« nous » et « vous » et le présent par le futur.
rédaction (15 points)
Sujet d’imagination
Le Résistant est mort. On lui a permis d’écrire à ses parents
avant de mourir. Imaginez cette lettre : il explique pourquoi
il a choisi ce « chemin » (ses parents ne le savaient pas, car
c’était clandestin), exprime ses sentiments et envoie un
dernier message à tous ses proches.
Sujet de réflexion
Des jeunes gens s’engagent dans des causes, risquant
parfois leur vie. Expliquez leurs raisons, en donnant des
exemples, en examinant aussi les objections qu’on peut
faire à leur engagement, puis donnez votre avis personnel.
mars 2014
NRP COLLÈGE
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LAtIN 4e
Un vieux romain chatouilleux
FIcHE
ENSEIGNANt
Ce passage, extrait des Faits et Dits mémorables de Valère
Maxime, comporte certaines complexités grammaticales,
dont deux occurrences de gérondif remplaçant un adjectif
verbal et l’emploi de verbes déponents. Il offre néanmoins un
exemple frappant de vertu romaine, dans une réalisation assez amusante de la métaphore « être chatouilleux ». La séance
est prévue pour une heure.
Présentation
Valère Maxime est un auteur du ier siècle après J.-C. Admis à
la cour de Tibère, il a compilé des séries d’anecdotes, prises
sans doute chez les historiens grecs et latins. Cette somme
comprend neuf livres, organisés en fonction de thématiques,
avec toujours des exemples romains et des exemples étrangers. Si on ne peut guère faire l’éloge de son originalité, cette
œuvre demeure une mine de récits instructifs et plaisants.
L’extrait choisi appartient au chapitre « De la bravoure » et
permet d’analyser un exemplum. Il raconte l’épisode de l’attaque des Gaulois contre Rome en 390 av. J.-C., qui se situe
donc avant l’épisode des oies du Capitole. On trouve la même
histoire chez Tite-Live (V, 41) avec un nom différent, Papirius
Mugillanus.
Traduction
Les portes de leurs maisons grandes ouvertes, ceux qui
avaient accompli la carrière des honneurs s’assirent ensemble sur leurs chaises curules avec les insignes des magistratures qu’ils avaient exercées et les sacerdoces qu’ils
avaient obtenus afin qu’eux-mêmes conservent dans leur
malheur leur splendeur et les ornements de leur vie passée et que la plèbe supporte avec plus de courage sa situation difficile. Leur apparence sembla d’emblée admirable
aux ennemis, qui étaient frappés par le caractère inédit de
la chose, la magnificence de leur parure et la singularité
même de leur audace. M. Atilius n’attendit pas que l’atteinte à ses droits soit complète : il infligea un violent coup
à la tête d’un Gaulois qui lui caressait la barbe et offrit avec
une grande détermination son corps à ce dernier, qui sous
le coup de la douleur se ruait sur lui pour le tuer.
Par Anne Sinha, professeure agrégée de lettres classiques
neutre. Fortius fait partie de la devise des Jeux Olympiques
(Citius, altius, fortius) même s’il est souvent traduit par « plus
fort ».
2. Defungor et adipiscor sont deux verbes déponents, qui se
caractérisent par une forme passive et un sens actif.
3. Les formes ad fortius sustinendos casus suos et ad se occidendum sont des adjectifs verbaux remplaçant des gérondifs.
La transformation est ici obligatoire du fait de la présence de
la préposition ad. L’adjectif verbal s’accorde alors avec ce qui
était le COD du gérondif, puisque la forme de départ était ad
sustinendum casus suos.
Analyse du passage
• Comme les autres magistrats, M. Atilius incarne le respect des institutions politiques et religieuses de Rome. Ces
hommes choisissent de s’asseoir sur leur chaise curule et
de porter sur eux toutes les insignes correspondant à ces
charges. Leur allure suffit à elle seule à désarçonner l’adversaire, avec cette idée antique qu’un individu existe avant tout
par le regard porté sur lui.
• M. Atilius se distingue des autres en choisissant de ne pas
supporter une marque d’irrespect, même au prix d’une mort
violente. Étant trop âgé pour combattre, ce que voulait pointer le Gaulois qui lui touchait la barbe, il se comporte néanmoins comme un soldat, en prenant l’initiative et en allant au
devant de la mort. Il incarne donc les valeurs de dignitas et de
virtus. L’exemplum se construit en isolant un individu singulier qui apparaît comme la quintessence du groupe mais fait
aussi le lien entre toutes les catégories qui composent la cité
attaquée : les personnes âgées, qui ne peuvent être sauvées
et sont laissées en première ligne, la population réfugiée dans
la citadelle et les soldats qui la défendent. Tite-Live donne
quant à lui un sens très différent à l’épisode, en insistant sur la
différence entre les plébéiens effrayés, qui se barricadent, et
les patriciens, qui ouvrent leurs portes avec aplomb.
Grammaire
1. Les formes fortius et cupidius sont des comparatifs de supériorité d’adverbes, qui prennent la forme d’un comparatif
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E
LAtIN 4e
E ÉL È V
cH
Un vieux romain chatouilleux
Dans cet extrait des Faits et Dits mémorables, Valère Maxime évoque le
courage de vieux Romains, qui attendent une invasion des Gaulois dans
la partie basse de Rome, faute d’avoir pu se réfugier dans la citadelle trop
exiguë.
Defuncti enim honoribus apertis januis in curulibus sellis cum insignibus magistratuum, quos gesserant, sacerdotiorumque, quae erant adepti, consederunt,
ut et ipsi in occasu suo splendorem et ornamenta praeteritae vitae retinerent et
plebi ad fortius sustinendos casus suos.Venerabilis eorum aspectus primo hostibus fuit et novitate rei et magnificentia cultus et ipso audaciae genere commotis. […] Non expectavit igitur hanc injuriae maturitatem M. Atilius, verum
barbam suam permulcenti Gallo Scipionem vehementi ictu capiti inflixit eique
propter dolorem ad se occidendum ruenti cupidius corpus obtulit.
Valère maxime, Faits et Dits mémorables, III, 2, 7.
Traduction
64
Grammaire
À l’aide du vocabulaire suivant, traduisez ce passage.
1. Analysez les formes fortius et cupidius.
Defungor, functus sum, fungi + abl : accomplir
Honor, oris, m : honneur
Apertus, a, um : ouvert
Janua, ae, f : porte
Curulis sella : chaise curule (symbole de pouvoir)
Insigne, is, n : insigne d’une fonction
Gero, is, ere, gessi, gestum : accomplir
Sacerdotium, ii, n : sacerdoce
Adipiscor, adeptus sum : obtenir
Consedeo, ere, sedi : être assis ensemble
Praetereo, ii, itum : passer
Retineo, tinui, tentum : conserver
Sustineo, tinui, tentum : supporter
Casus, us, m : accident, malheur
Cultus, us, m : culture mais aussi « parure »
Commotus, a, um : ému, ébranlé
Exspecto, are : attendre
Maturitas, atis, f : plein développement
Injuria, ae, f : atteinte à l’honneur
Permulceo, ere : caresser
Vehemens, tis : violent
Ictus, us, m : coup
Infligo, xi, ctum : frapper
Occido, ere, di, sum : tuer
Ruo, ere : se précipiter
Cupide : avec empressement
Offero, obtuli, oblatum : offrir
2. À quelle catégorie de verbes appartiennent defungor et
adipiscor ?
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3. Analysez les formes ad fortius sustinendos casus suos et
ad se occidendum.
Analyse du passage
Quelles sont les valeurs incarnées par M. Atilius ?
Patricien romain portant
les effigies de ses ancêtres
(Rome, Palais des conservateurs,
Bracio Nuovo).
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