UNIVERSITE Nazi BONI CHIMIE MOLECULAIRE UEO CHM5013 Les oligo-éléments métalliques de la vie Deux crédits (16 heures) Pr Mabinty BAYO-BANGOURA 1 Chimie Moléculaire La chimie moléculaire est la science de l’étude des molécules élémentaires biologiques, organiques, ou inorganiques. Elle permet de comprendre et définir les méthodes de synthèse de ces composés essentiels aux développements d’applications à l’interface avec la médecine ou encore la physique mais également avec la chimie des matériaux, les nanotechnologies ou l’ingénierie chimique. La chimie moléculaire par sa finesse dans la manipulation des liaisons interatomiques contribue au bien être de notre civilisation à travers la préparation de produits utilisés dans la vie de tous les jours (médicaments, cosmétiques, agroalimentaires / phytosanitaires, monomères pour vêtements intelligents, cellules photovoltaïques organiques, ou écrans LED/OLED…). OBJECTIFS D’une manière générale, les objectifs de l’enseignement de la Chimie Moléculaire sont d’acquérir de solides bases théoriques pour maîtriser la préparation et la compréhension des propriétés de ces molécules, organiques, inorganiques ou biologiques. La force de la spécialité est cette intégration qui lui permet de couvrir toutes les facettes de ces disciplines, la synthèse, la réactivité, les propriétés et les applications des molécules. Une part importante présente sous différents aspects l’apport de la chimie moléculaire pour la chimie du développement durable (parfois appelée chimie verte). Chimie Inorganique Moléculaire La Chimie Inorganique Moléculaire illumine l'ion métallique dans tous ses états. Les propriétés chimiques sont explorées dans des assemblages polynucléaires et supramoléculaires. La réactivité est également exploitée pour la catalyse organométallique (processus catalytique). La catalyse, qui, par sa capacité, à accélérer, orienter et optimiser les réactions chimiques, peut les rendre plus propres et plus économes en matière, en énergie et en déchets. Les propriétés physiques sont à la base de l'élaboration de matériaux moléculaires polymétalliques. Le développement actuel des nanotechnologies se traduit par l’arrivée dans nos maisons, nos voitures et nos lieux de travail d’objets chimiques radicalement nouveaux, nanotubes de carbone ou nanoparticules métalliques. Ces objets peuvent apporter des solutions très intéressantes à des défis technologiques et environnementaux comme la conversion de l’énergie solaire, la médecine, la catalyse industrielle, la purification de l’eau, mais on ne sait encore rien de leur toxicité potentielle. 2 LA CHIMIE BIO-INORGANIQUE A l’interface de la chimie et de la biologie, la chimie bio-inorganique est aujourd’hui en pleine expansion. Elle est née du constat relativement récent que la vie n’est pas seulement organique mais aussi « minérale » : il n’y a pas de vie sans métaux. L’analyse du monde vivant est l’importance du rôle qu’y jouent les ions métalliques. Longtemps vue comme essentiellement « organique » et donc « bioorganique », la chimie du vivant révèle une face métallique aux reflets multiples et devient, par conséquent, « bio-inorganique » également. Il n’y a pas de vie sans métaux. Presque toutes les grandes fonctions du vivant sont assurées par des métalloprotéines et des métalloenzymes, nécessitant donc la présence d’un ou plusieurs atomes de sodium, de calcium ou encore de zinc, de fer ou de cuivre. Exemple: sans magnésium, calcium et manganèse, qui constituent des éléments essentiels de la photosynthèse des végétaux et des algues, il n’y a pas l’oxygène et la matière organique qui nous alimentent en énergie. C’est grâce au fer et au cuivre de nos oxydases que nous savons, par la respiration, utiliser cette ressource pour notre propre compte, tout en redonnant à la nature le dioxyde de carbone qui lui est nécessaire. Figure 1: Le photosystème des plantes contient du magnésium, du manganèse et du calcium, qui permettent l’oxydation de l’eau en oxygène et la récupération de ses électrons pour la réduction du dioxyde de carbone en molécules carbonées (sucres, …). 3 La vie dépend de la capacité des organismes vivants à utiliser efficacement le potentiel chimique de leur environnement. Ce potentiel, c’est le soleil, pour l’énergie, ainsi qu’un nombre relativement limité de molécules, généralement petites, d’une très grande inertie chimique – des sortes de puits de potentiel chimique – qui se sont accumulées à la surface de la terre : eau, oxygène, dioxyde de carbone, azote, etc. Pour les utiliser, il faut les activer, et cela nécessite des modifications électroniques profondes que seuls les ions métalliques permettent. Les métalloenzymes qui réalisent ces activations – protéases, monooxygénases, hydrogénases, oxydases, photosystème – sont véritablement extraordinaires, et leurs mécanismes d’action d’une très grande subtilité. . Figure 2 : Structures chimiques de certaines molécules naturelles. Le milieu vivant L’unité moléculaire du vivant : la cellule Qu’est-ce qu’une cellule vivante ? La cellule est une goutte minuscule, constituée et remplie de milliers de molécules, de tailles et de formes variées, échangeant énergie et matière avec l’extérieur ? Goutte minuscule, certes, mais devenue visible, observable et concrète, comme le devient aussi son contenu moléculaire, grâce aux techniques les plus modernes de la microscopie par exemple. La vie Qu’est-ce que la vie ? La vie est la matière « informée » que produit la communication entre ces molécules, à travers des interactions subtiles au sein de réseaux certes complexes, mais néanmoins aisément décrits par les lois de la physique et de la chimie ? Elle est aussi cette matière « transformée » par une 4 dynamique fortement interconnectée de milliers de réactions chimiques, certes d’une efficacité cinétique et avec des rendements encore inaccessibles au laboratoire. C’est bien parce que la chimie est à la fois une science de la matière « informée » et une science de la matière « transformée » que les chimistes ont toute légitimité pour participer à ce grand projet de l’homme : comprendre le monde vivant. Les molécules du vivant Les molécules du vivant sont des macromolécules essentielles bien qu’en nombre relativement limité, elles sont les mêmes molécules qui se retrouvent chez tous les êtres (bactérie, mammifère ou plante). La diversité du vivant résulte d’une diversité chimique et d’une combinatoire complexe dans l’utilisation de cette collection finie de molécules. Les êtres vivants possèdent des molécules très particulières, appelées « enzymes », qui leur confèrent une formidable puissance de transformation chimique de la matière vivante. Ces enzymes ou protéines, ont la faculté unique d’accélérer (par des facteurs qui peuvent atteindre parfois la valeur de 1019) toutes les réactions chimiques de la cellule et de les orienter avec une extrême précision et une étonnante sélectivité. Cette propriété ou catalyse enzymatique, constitue bien l’un des grands secrets chimiques de la vie. Avec le dogme « une réaction, une enzyme », un champ fantastique de recherche s’ouvre pour le chimiste, qui devient biochimiste et qui ne s’intéresse plus seulement à l’identification des molécules du vivant mais aussi à la façon dont elles sont transformées par des réactions catalytiques fascinantes au sein de la cellule. Exemples de catalyse enzymatique : - la présence du fer dans l’hémoglobine et son rôle dans le transport de l’oxygène de l’air. - Le métal joue un rôle catalytique lors des réactions d’oxydation catalysées par une enzyme à cuivre, la laccase. - La chimie complexe de la respiration dépend de systèmes métalloenzymatiques, comme le cytochrome oxydase, contenant du fer et du cuivre. - Les « clusters fer-soufre », constitués uniquement d’atomes de fer et de soufre sont une classe de centres métalliques accrochés aux protéines qui jouent des rôles majeurs en biologie. - Le cytochrome oxydase, qui participe à la respiration, contient le fer et le cuivre qui permettent de catalyser la réduction à 4 électrons de l’oxygène en eau nécessaire à la « combustion » des aliments. Celle-ci produit l’énergie que nous consommons pour vivre et redonne à la nature l’eau et le dioxyde de carbone dont elle dépend. 5 Figure 3 : La métalloprotéine RimO catalyse la thiométhylation sélective d’un acide aspartique au sein de la protéine S12, un des composants du ribosome. pour montrer l’extrême sélectivité des enzymes, Figure 4: Un exemple de site chimie « bio-inspirée » ou «biomimétique». La préparation de complexes métalliques mimant le site actif, à base de nickel et de fer, des hydrogénases et leur couplage à des matériaux nano structurés conduit à des catalyseurs originaux et peu coûteux pour la production d’hydrogène. La problématique de l’énergie est la grande question de l’humanité du XXIe siècle, parce que l’ère du carbone s’achève lentement et sûrement. La transformation de l’eau et du soleil, sources inépuisables d’énergie, en carburants, est aujourd’hui à la portée des chercheurs. Des travaux visent alors à trouver de nouveaux catalyseurs pour la production et l’utilisation de l’hydrogène, l’un des vecteurs énergétiques de demain. L’hydrogène est un combustible 6 particulièrement intéressant en raison de la grande quantité d’énergie que sa combustion dégage (presque trois fois plus que le pétrole par unité de masse) et parce que cette combustion ne produit pas de CO2, comme le fait celle du pétrole, mais exclusivement de l’eau (figure 4). Figure 5 : La combustion de l’hydrogène produit de l’énergie et de l’eau. Évidemment, ce combustible présente un certain nombre d’inconvénients majeurs, sinon il y a bien longtemps que nos voitures fonctionneraient à l’hydrogène. Le premier est que sa combustion, dans ce qu’on appelle les piles à combustible ou piles à hydrogène, nécessite des catalyseurs à base de platine, métal trop cher et en quantités infimes à la surface de la terre. Un autre problème est que l’hydrogène n’existe pas sous la forme utile H2 et doit être produit, par exemple, à partir d’hydrocarbures ou mieux encore à partir de l’eau, par des processus qui coûtent cher en énergie ou qui nécessitent également des catalyseurs à base de métaux précieux. Le vivant peut nous fournir la solution. Solution chimique particulièrement séduisante et fascinante, puisque des organismes comme des cyanobactéries ou des microalgues ont trouvé comment utiliser du manganèse, du nickel et du fer, au sein d’enzymes extraordinaires, pour produire de l’hydrogène uniquement à partir de l’eau et du soleil – ce soleil qui fournit à la Terre, en une seule journée, l’énergie consommée annuellement par la population mondiale et qui continuera à le faire pendant quelques milliards d’années. Comprendre les aspects de cette chimie d’une extrême complexité et s’en inspirer pour inventer les catalyseurs originaux et peu coûteux de demain qui remplaceront le platine constituent déjà, un peu partout dans le monde, des axes majeurs de recherche. qu’il était possible de mimer, à l’échelle atomique, le site actif des hydrogénases, ces métalloenzymes qui catalysent la transformation de l’eau en hydrogène (figure 5). Leur site actif contient non pas du platine mais des atomes de nickel et de fer. Les modèles chimiques à base de ces métaux non précieux qui peuvent être inventées, par une approche bio-inspirée, constituent des catalyseurs efficaces pour la production d’hydrogène. L’apport des nanotechnologies peut s’avérer précieux, des complexes de nickel greffés sur des nanotubes de carbone fournissent des matériaux d’électrodes peu coûteux et présentant des propriétés catalytiques remarquables qui se rapprochent de celles du platine. Un médicament, c’est le plus souvent une petite molécule, naturelle ou synthétique, capable de se fixer de façon sélective sur une macromolécule biologique (protéine, acide nucléique) et de moduler son activité. La fixation d’une petite molécule à une protéine, grâce à des interactions subtiles – comme on peut le voir dans le cas des rares structures cristallographiques de 7 complexes structuralement caractérisés entre un récepteur membranaire et un ligand, ou dans le cas plus fréquent d’une enzyme en complexe avec un inhibiteur spécifique –, est l’un des processus moléculaires les plus fondamentaux de la biologie. La découverte rationnelle de tels ligands de protéines par le chimiste continue à être un problème fascinant mais néanmoins extrêmement difficile, car il n’y a toujours pas de « recette » infaillible pour trouver la molécule qui se fixe spécifiquement sur une protéine dont la séquence et la structure sont connues. 8 LES OLIGO-ELEMENTS DANS LE MILIEU VIVANT Lorsqu’on examine la chimie des processus biologiques, la frontière entre la chimie inorganique et la chimie organique est indistincte. Les éléments biologiques principaux essentiels pour toute vie comprennent C, H, N, O (les quatre éléments les plus abondants dans les systèmes biologiques) ainsi que Na, K, Ca, P, S et Cl. Les éléments fondamentaux qui constituent les éléments (composés) de construction des biomolécules (les aminoacides, les peptides, les glucides, les protéines, les lipides et les acides nucléiques) sont C, H, N, O, avec P qui joue un rôle dans, par exemple, l’ATP et l’ADN et avec S, qui est la clé des aptitudes coordinatrices des résidus cystéine des protéines. Le rôle des composés moins abondants, mais pourtant essentiels, comprend le contrôle osmotique et le potentiel d’action des nerfs (Na, K, et Cl), Mg2+ dans la chlorophylle, les enzymes à Mg2+ impliquées dans l’hydrolyse des phosphates, les fonctions structurales de Ca2+ (par ex : les os, les dents et les coquilles) et les actions déclenchantes de Ca2+ (dans les muscles). Les oligo-éléments métalliques sont V, Cr, Mn, Fe, Co, Ni, Cu, Zn, et Mo, alors que les oligo-éléments non-métalliques comprennent B, Si, Se, F, et I. On peut résumer ainsi le caractère essentiel des oligo-éléments: - V accumulée par quelques organismes, son rôle essentiel a été montré pour la croissance des rats et des poussins ; - Cr est essentiel pour le métabolisme du glucose chez les mammifères supérieurs ; - Mn, Fe, Cu, Ni, Zn sont essentiels pour tous les organismes ; - Co est essentiel pour les mammifères et pour de nombreux organismes ; - Mo est essentiel pour tous les organismes, même si les algues vertes sont peut-être une exception; - B est essentiel pour les algues vertes et pour les plantes évoluées même si son rôle est inconnu ; - Si est essentiel pour les squelettes externes ou exosquelettes (carapaces des invertébrés, comme les insectes, les crustacés et les mollusques, des diatomées marines (microalgues unicellulaires (de 2 μm à 1 mm) enveloppées par un squelette externe nommé frustule) sont constitués de silice hydratée, mais le rôle du Si dans d’autres systèmes biologiques est moins bien défini ; - Se est essentiel pour les mammifères et pour certaines plantes évoluées ; - le rôle du F n’est pas complètement établi, mais sa carence provoque des caries dentaires ; 9 - I est essentiel pour de nombreux organismes. Malgré leur rôle essentiel pour la vie, les oligo-éléments métalliques ne constituent qu’une minuscule fraction du poids du corps humain. Nous allons examiner la façon dont les systèmes vivants stockent les métaux et dont les ions des oligo-éléments métalliques prennent part au transport des molécules, aux processus de transfert électroniques et à la catalyse. Une étude des oligo-éléments métalliques dans les systèmes biologiques est de la chimie de coordination appliquée. I- Quelques définitions 1) Polypeptides Un polypeptide est une chaîne d'acides aminés reliés par des liaisons peptidiques. On parle de polypeptide lorsque la chaîne contient entre 10 et 100 acides aminés. Au-dessus de 100 acides aminés on parle généralement de protéine. Un polypeptide naturel se forme par condensation selon diverses séquences des 20 aminoacides naturels. La liaison peptidique La structure (figure 1 page 963) donne la formule générale d’un aminoacide et montre une liaison peptidique formée par la condensation de 2 résidus d’aminoacides. Il y a 21 acides aminés, mais un seul type de liaison utilisé pour les relier entre eux: c'est la liaison peptidique. La liaison peptidique est formée durant l'étape de traduction par une liaison covalente entre un groupement α-aminé d'un acide aminé et le groupement carboxylique d'un autre acide aminé. Une chaine peptidique a une extrémité N (correspondant à un groupement NH2) et une extrémité C (correspondant à un groupement CO2H). Tous les aminoacides sont chiraux, sauf la glycine, mais la nature est spécifique pour les énantiomères qu’elle utilise. Liaison peptidique 2) Les protéines Les protéines sont des polypeptides de grande masse moléculaire avec des structures complexes ; ce sont des chaînes de plus de 100 acides aminés reliés par des liaisons 10 peptidiques. La séquence des aminoacides donne la structure primaire de la protéine, alors que les structures secondaires et tertiaires révèlent les propriétés spatiales de la chaine peptidique. L’hémoglobine, la myoglobine et la plupart des métalloenzymes sont des protéines globulaires. Le groupement prosthétique Le groupement prosthétique d’une protéine est un composant supplémentaire non protéique qui est essentiel pour l’activité biologique de la protéine. Il s'agit d'une molécule organique non protéique maintenue dans une structure protéique (nommée alors apoprotéine) au moyen de liaisons covalentes permanentes, mais aussi éventuellement des liaisons faibles (ex: liaisons ioniques, liaisons hydrogène). Les groupements prosthétiques appartiennent à plusieurs catégories moléculaires. L' hème est la plus connue, elle intervient dans la plupart des réactions de transport de l'oxygène (ex: hémoglobine, hémocyanine) et d'oxydoréductions biologiques (ex: cytochrome, chlorophylle, bactériochlorine). Elle est le groupement prosthétique de l’hémoglobine et de la myoglobine. Les protéines qui contiennent des métaux sont des métalloprotéines et la protéine sans le métal est appelée apoprotéine. La différence entre une protéine et l’apoprotéine correspondante est analogue à la différence entre un complexe et le ligand libre correspondant. Nous allons nous intéresser aux groupements prosthétiques qui contiennent des centres métalliques. L'hème (et autres porphyrines) contient un atome métallique (fer, magnésium,...) - ou plusieurs métaux- situé en général au centre, qui entre en jeu pour l'action biologique de l'apoprotéine. Figure 2 : structure de l’hème b L’hème est un cofacteur contenant un atome de métal, souvent du fer, servant à accueillir un gaz diatomique (par exemple du dioxygène O2) au centre d’un large anneau organique appelé porphyrine. Un cycle porphyrine contenant un centre Fe est appelé groupement hème. Toutes les porphyrines ne contiennent pas nécessairement un atome de fer mais la majorité des 11 métalloprotéines qui contiennent des porphyrines ont en fait l’hème comme sous-unité prosthétique. II- Stockage et transport des métaux : Fe, Cu, Zn, et V Les organismes vivants ont besoin d’avoir des moyens de stockage et de transport des oligoéléments métalliques, et le stockage du métal sous forme non toxique est évidemment essentiel. 1) Stockage et transport du Fe Considérons le Fe, l’oligo-élément métallique le plus important chez les humains. La masse moyenne de Fe dans un humain de 70 kg est de 4200 mg et ce niveau doit être maintenu par l’absorption de la nourriture pour compenser les pertes. Chez les mammifères le travail de transfert du fer des sources alimentaires vers l’hémoglobine implique au départ l’absorption du Fe(II) après le passage de l’estomac, suivie de l’assimilation dans le sang sous la forme de transferrines ( protéine sérique) qui sont des glycoprotéines c’est à dire des composés de protéines et de glucides dont le cœur est un ion [Fe6O14(OMe)4(4-O)2L2]2+ avec L= N(CH2CH2NH2)3), ce sont des métalloprotéines contenant du Fe(III) (molécules qui transportent le fer). Exemples : la transferrine du sérum, la lactoferrine (présente dans le lait) et l’ovotransferrine (présente dans le blanc d’œuf). Le fer est transporté sous forme de transferrine dans les « récipients de stockage » des protéines jusqu'à ce qu’il soit nécessaire de l’incorporer dans l’hémoglobine. Chez les mammifères le fer est stocké principalement dans le foie, la moelle des os et la rate sous forme de ferritine, une métalloprotéine soluble dans l’eau. Les études par diffractions aux rayons X ont montré que la ferritine est constituée par 24 unités équivalentes disposées en forme de coque creuse dont la cavité contient 4500 centres de Fe3+ à haut spin sous la forme d’un oxyhydroxophosphate microcristallin de composition (FeO.OH)8(FeO.H2PO4). Alors que la structure de l’apoferritine et de la ferritine sont assez bien établies, la façon dont le fer est transporté dans et hors de la cavité est toujours un sujet de recherche. On a suggéré que le fer entre sous forme de Fe2+ et qu’il est oxydé à l’intérieur de la protéine. Chez les humains la transferrine du sérum transporte 40 mg de fer vers la moelle des os. Elle contient une seule chaine polypeptidique enroulée de façon à présenter deux poches permettant de fixer Fe3+. Chaque poche présente au centre métallique des atomes N-donneurs et O-donneurs durs, mais également la présence d’un ligand [CO3]2- ou [HCO3]- est essentielle. 12 La constante de stabilité du complexe de Fe3+ est très élevée (log = 28 à pH 7,4), ce qui fait de la transferrine un agent extrêmement efficace de transport et de récupération du fer dans l’organisme. (Figure 29.3) : Représentation schématique d’un site de liaison Fe3+ dans la transferrine). Le mécanisme exact de l’entrée et de la sortie de Fe3+ dans la cavité n’a pas été élucidé, mais il semble raisonnable que le processus soit facilité par un changement de conformation de la chaine polypeptidique. Les microorganismes aérobies ont aussi besoin de fer, mais ils ne peuvent pas l’absorber simplement à partir de leurs environnements aqueux, puisque Fe3+ précipite sous forme de Fe(OH)3 (Ks= 2,64.10-39). L’évolution a donné à ces organismes des ligands polydentate Odonneurs appelés sidérophores qui récupère le fer. L’enterobactine de Fe(III), H6L, dérive de trois résidus de L-serine qui portent tous un groupement 2,3-dihydroxybenzoyle. La forme déprotonée, L6-, se lie à Fe3+ pour donner le complexe [FeL]3- dans lequel Fe3+ est dans un environnement octaédrique (ou presque octaédrique). Les sidérophores sont des chélateurs de fer synthétisés et sécrétés notamment par les micro-organismes pour leur permettre de puiser le fer essentiel à leur développement. Ce sont des molécules de faibles poids moléculaires ayant une très forte affinité pour l'ion Fe³⁺. Les complexes qui transportent le fer chez les mammifères et les microorganismes ont des constantes globales de stabilité très élevées. Bien que les mécanismes exacts n’aient pas été bien élucidés, il est raisonnable de suggérer que la réduction en Fe2+ est nécessaire, puisque la constante de stabilité du complexe de Fe2+ est de plusieurs ordres de grandeur inferieure a celle du complexe de Fe3+. 2) Métallothionéines : transport de certains métaux toxiques Les métallothionéines (MTs) sont des protéines de faibles poids moléculaire (6-10 kDa) 13 (kDa= kilodalton, unité de mesure de masse moléculaire, valant 1000 daltons (103 daltons). Une protéine de 75 kDa pèse 75 kg/mol). Dalton= Unité de masse atomique unifiée. Le symbole est Da. Un dalton est avec une assez bonne précision la masse d’un atome d’hydrogène, la valeur exacte étant 1,00794 dalton.) caractérisées par leurs structures et une haute affinité pour les ions métalliques. Le transport de centres métalliques mous est important pour la protection contre les métaux toxiques comme le Cd2+ et Hg2+. La complexation nécessite des ligands mous, qui sont fournis par la nature sous forme des résidus cystéine, des thionéines, dont les complexes métalliques sont les métallothionéines. Les thionéines sont de petites protéines contentant des aminoacides dont environ un tiers sont des cystéines, fixent Cu+ et Zn2+, mais leur rôle actif dans le transport et le stockage de ces métaux chez les mammifères n’a pas été confirmé. Les résidus Cys sont voisins les uns des autres ou séparés par un résidu d’un autre aminoacide, réalisant ainsi des poches de sites Sdonneurs adaptés à la récupération des ions métalliques mous. La présence de Cd2+, Hg2+, Cu+ et Zn2+ provoque la production de thionéines dans le foie et les reins des mammifères. Une thionéine peut fixer entre quatre et douze centre métalliques ; les centres Cd2+, Hg2+ et Zn2+ sont vraisemblablement dans des environnements tétraédriques alors que Cu+ peut être tricoordiné. Elles sont présentes chez de nombreux animaux et chez tous les mammifères, elles contribuent à la détoxication des organes et cellules. Ces protéines jouent un rôle majeur en contrôlant la biodisponibilité ( La biodisponibilité est la proportion d’une substance qui va effectivement agir dans l’organisme par rapport à la quantité absorbée) de métaux essentiels tels que le cuivre, le zinc et d'autres métaux. a) Classification des métallothionéines Elles se distinguent par la répétition de Cys-X-Cys ou Cys-Cys ainsi que par l'absence d'acide aminé aromatique ou hydrophobique. Les métallothionéines sont classées selon l’alignement des séquences Cys-Cys, Cys-X-Cys et Cys-X-Y-Cys où X, Y représentent des acides aminés autres que la cystéine. On distingue trois classes différentes : Classe I : Le positionnement des cystéines et très proche de celui chez les MTs du cortex rénal du cheval (homme) Classe II : le positionnement est différent (levure) Classe III : organisation en motifs répétés ayant pour structure (Glu-Cys)n – Gly où n varie de 2-10. Malgré la présence de nombreux résidus cystéines (Cys), on dénote une absence de pont 14 disulfure. En effet, tous les groupes sulfhydryles (le groupement sulfhydryle est composé d'un atome de soufre et d'un atome d'hydrogène reliés au moyen d'une liaison simple : -S-H) permettent aux métallothionéines d’établir des liaisons ou de fixer 7 ions métalliques divalents. b) Fonctions de régulation et de détoxication des métallothionéines - Régulation de la concertation intracellulaire de certains métaux essentiels (Cu, Zn) par : Séquestration : afin d’éviter leur circulation à l’état libre dans les tissus ou bien leur fixation sur d’autres protéines vitales. Libération : pour l’approvisionnement des processus métaboliques (activation) - Les métallothionéines sont considérées comme des antioxydants grâce à leur richesse en fonctions sulfhydriles. - Les métallothionéines protègent les cellules contre les agressions des ions métalliques (rôle de détoxication par captage des métaux en excès d’origine exogène.) Elles jouent également un rôle très important en contrôlant (dans une certaine mesure) certains effets toxiques de métaux lourds et métalloïdes hautement toxiques et/ou non-essentiels (plomb, mercure, cadmium,...) et en favorisant leur rétention et/ou excrétion. Les complexes thiolates et les complexes apparentés sont étudiés comme modèles des métallothionéines. 3) Le glutathion Le glutathion est un pseudo-tripeptide formé par la condensation d'acide glutamique, de cystéine et de glycine : γ-L-Glutamyl-L-cystéinylglycine. Le glutathion, qui existe sous forme oxydée et réduite, intervient dans le maintien du potentiel redox du cytoplasme de la cellule. Il intervient aussi dans un certain nombre de réactions de détoxication et d'élimination d'espèces réactives de l'oxygène. À noter que le groupement amine de la cystéine se condense avec la fonction acide carboxylique en γ de l'acide glutamique. Pratiquement, toutes les 15 cellules en contiennent une concentration élevée. On le représente de manière simplifiée par GSH (forme réduite) ou GSSG (forme oxydée), la fonction thiol lui conférant ses principales propriétés biochimiques. a) Propriétés oxydoréductrices et réactivité GSH (forme réduite) et GSSG (forme oxydée) forme un couple oxydoréduction très important car il permet les échanges d'électrons (donc d'énergie) à l'intérieur de la cellule. Le glutathion est vital pour détoxifier les métaux lourds tels que le mercure, le plomb et le cadmium, et plusieurs autres polluants. Le groupement thiol réagit avec les sels de ces métaux lourds en créant avec eux une liaison soufre-métal très forte pour qu'ils soient ensuite excrétés sans causer de dommages à l'organisme, hormis la perte de glutathion et une légère acidification. Le produit de solubilité du sulfure de mercure HgS est par exemple le plus faible connu (4.10−53). L'enzyme séléniée glutathion peroxydase est essentielle à la détoxication des oxydants de type peroxydes (eau oxygénée, peroxynitrite), qu'ils soient d'origine exogène ou endogène (respiration cellulaire, peroxyde d'hydrogène formé par d'autres processus antioxydants complémentaires, peroxynitrite impliqué dans l'apoptose cellulaire ou le système immunitaire). Dans ce processus, l'enzyme catalyse la réaction d'oxydoréduction suivante : 2 GSH + peroxyde → GSSG + peroxyde réduit. L'eau oxygénée est par exemple réduite en eau. b) Usage thérapeutique Le glutathion sous forme réduite est l’antioxydant majeur des cellules, les protégeant notamment des radicaux libres (dérivés actifs de l'oxygène). Sa réduction est rendue possible par la glucose-6-phosphate déshydrogénase, une enzyme. De fait, une carence en cette enzyme peut avoir des effets similaires à une carence en glutathion au point de vue de la lutte contre les radicaux libres. Le glutathion protège les cellules de plusieurs polluants et poisons, incluant certains issus de la combustion des carburants et de la fumée de cigarette. Il retarde également les dommages dus aux radiations comme ceux rencontrés à la suite de la diminution de la couche d’ozone. Vieillissement: Il est connu que le vieillissement est accompagné d’une chute précipitée dans nos niveaux de glutathion. De bas niveaux de glutathion sont souvent rencontrés dans plusieurs maladies associées au vieillissement telles les cataractes, la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, l’artérosclérose et d’autres. 16 4) Le traitement de O2 : hémoglobine et myoglobine Chez les mammifères, O2 (absorbé par la respiration) est transportée dans le courant sanguin par l’hémoglobine, et il est stocké dans les tissus par la myoglobine. L’hémoglobine et la myoglobine sont toutes deux des protéines à hème-fer. Les chaines protéiques de la myoglobine et de l’hémoglobine contient un groupement protoprophyrine IX (figure 12.9a) qui avec un résidu histidine relié au squelette de la protéine, contient un centre Fe. Figure : Protoporphyrine IX Figure 29.7b : structure de l’hémoglobine selon une représentation en ruban. 17 L’environnement du centre Fe est une pyramide à base carrée lorsqu’il est « au repos », ce qu’on appelle aussi sa forme desoxy. Lorsque O2 se lie au groupement hème, il entre en trans du résidu His pour donner une espèce octaédrique (figure 29.8 page 971). Bien que chacune des quatre unités de l’hémoglobine contienne un groupement hème, les quatre groupements ne fonctionnent pas indépendamment les uns des autres ; la fixation et la libération de O2 est un processus coopératif. Le groupement hème au repos contient Fe(II) haut spin qui se trouve hors du plan des quatre N-donneur du groupement porphyrine et il est attiré vers le résidu His. Le centre Fe(II) à haut spin est apparemment trop grand pour trouver place dans le plan des quatre N-donneurs. Lorsque l’O2 pénètre dans le sixième site de coordination, le centre fer maintenant Fe3+ entre dans le plan de la porphyrine et entraîne avec lui le résidu His. Cela perturbe alors non seulement la chaine protéique à laquelle le groupement His est fixé, mais aussi les 3 autres sous unités protéiques, et un processus coopératif déclenche la fixation de plus en plus rapide des molécules successives de O2. Lorsque O2 est libéré de l’hémoglobine vers la myoglobine, la perte de la première molécule déclenche la libération des trois autres. La myoglobine ne présente pas cet effet coopératif puisqu’elle ne comporte qu’une seule chaine protéique. De nombreuses années d’activité de recherche ont contribué à atteindre le niveau actuel de compréhension de la fixation de O2 sur l’hémoglobine et sur la myoglobine. Certaines études modèles ont mis en évidence les réactions de O2 avec certains complexes bases de Schiff de cobalt (II). Une base de Schiff est une imine formée par condensation d’une amine avec un composé carbonylé. (Figure 29.4 page 972) Un ligand logique pour modéliser les sites actifs de la myoglobine et de l’hémoglobine dérive de la porphyrine, le tétraphényleporphyrine est facile à obtenir, mais la réaction du complexe de Fe (II) (Fe(tpp)2) avec O2 conduit à un complexe de Fe(III) avec un pont peroxo. (Figure 29.5 page 972) L’interaction avec le deuxième centre de fer peut être évitée en utilisant un ligand porphyrine avec des substituants volumineux. (Figure 29.6 page 973) D’après le modèle de fixation de O2 au centre Fe(II) à bas spin de l’hémoglobine et de la myoglobine, la coordination s’accompagne d’un transfert d’électron, qui oxyde Fe(II) à haut spin en Fe(III) à bas spin qui réduit O2 en [O2]-. Fe(III) (d5) à bas spin et [O2]- contiennent tous deux un électron célibataire, et on peut comprendre le fait que les formes oxy des protéines sont diamagnétiques par un couplage antiferromagnétique entre le centre Fe(III) et le ligand [O2]-. En se liant à un groupement hème O2 se comporte en ligand accepteur . Il 18 n’est pas étonnant que d’autres ligands accepteur puissent prendre la place de O2 dans l’hémoglobine ou la myoglobine, et c’est la base de la toxicité de CO. Toutefois, le cyanure, bien qu’il soit un ligand accepteur , favorise les centres métalliques dans un état d’oxydation élevé et il se lie à Fe(III) dans les cytochromes; l’empoisonnement par [CN]- n’est pas provoqué par le blocage des sites de liaison de O2 de l’hémoglobine par [CN]-. 5) Hémocyanine Les hémocyanines sont des protéines contenant du cuivre qui transportent O2 chez les mollusques (escargots, calmars...) et les arthropodes (homards, crabes, scorpions) et même si leur nom suggère la présence d’un groupement hème, les hémocyanines ne sont pas des protéines à hème. Deux centres Cu (I) (Cu….Cu = 354 pm, c’est à dire non liés) sont enfouis dans la métalloprotéine, chacun étant lié à trois résidus histidine. La forme désoxy d’une hémocyanine est incolore et contient Cu(I), alors que la fixation de O2 donne la forme bleue de Cu(II). Figure (29.11 page 973) 6) Hémérythrine Chez les invertébrés marins comme les annélides (vers de terre à segments), les mollusques et les arthropodes, O2 est transporté par l’hémérythrine, une protéine sans hème contenant du fer. Contrairement à l’hémoglobine, l’hémérythrine ne présente pas de coopération entre les sous-unités de la fixation de O2. Figure (29.14 page 976) Pl de 19 détails Représentation de la liaison de l'oxygène O2 au site actif de l'hémérythrine. Les structures des formes desoxy et oxy de l’hémérythrine ont été déterminées par cristallographie. Dans la forme desoxy on a une unité [Fe(II)]2 pontée par un hydroxyle, un des Fe(II) est pentacoordiné et l’autre est hexacoordiné). Les deux centres Fe(II) de la désoxyhémérythrine ont un couplage ferromagnétique à travers le pont Fe-O-Fe. Le centre Fe(II) pentacordiné est coordinativement insaturé et additionne O2 pour donner l’oxyhémérythrine. L’atome de l’hydroxyle participe à la fixation de O2 en devenant une partie d’un ligand [HO2]-, mais en restant associé au groupement µ-oxo par formation d’une liaison hydrogène. 7) Cytochromes P-450 Les cytochromes P450 (CYP450) sont des hémoprotéines — protéines ayant de l'hème comme cofacteur — qui interviennent dans des réactions d'oxydoréduction d'un grand nombre de grandes ou de petites molécules, qu'il s'agisse de métabolites ou de xénobiotiques — polluants, toxines, drogues, médicaments, etc. Ce sont généralement les oxydases finales d'une chaîne de transport d'électrons. Le terme P450 provient de la spectrophotométrie et du pic d'absorbance à une longueur d'onde de 450 nm lorsque ces enzymes sont à l'état réduit et complexées avec le monoxyde de carbone. Les cytochromes P-450 sont de métalloenzymes qui fonctionnent comme des monooxygénases en catalysant l’insertion de l’oxygène dans une liaison C-H d’un hydrocarbure aromatique ou aliphatique, c’est à dire la conversion de R-H en ROH. Donc la réaction la plus courante catalysée par les cytochromes P450 correspond à leur activité de monooxygénase, c'est-à-dire à l'insertion d'un atome d'oxygène qui provient de O2 sur une position aliphatique d'un substrat organique tandis que l'autre atome d'oxygène du dioxygène O2 est réduit en eau H2O. a) Site actif d’un cytochrome P-450 Le site actif d’un cytochrome P-450 est une unité hème qui contient un centre Fe(III) pentacoordiné. (Figure 29.16 page 977). Un complexe protoporphyrine (IX) est lié de façon covalente à la protéine par une liaison Fe-Cystéine. Au repos le cytochrome P-450 contient un centre Fe(III) à bas spin. Le cycle catalytique de la transformation de RH en ROH suit les étapes suivantes : - fixation du substrat organique RH sur le site actif de la métalloenzyme et perte d’un ligand H2O ; 20 - réduction monoélectronique de Fe (III) à bas spin en Fe (II) à bas spin ; - fixation de O2 pour donner un adduit, suivie d’un transfert monoélectronique du fer pour obtenir un complexe peroxo de Fe (III) ; - capture d’un électron pour obtenir une espèce {Fe(III)-O-O-} qui se protone pour donner {Fe-O-OH} ; - protonation supplémentaire et perte de H2O, ce qui donne une espèce {Fe(IV)=O} avec le cycle porphyrine formellement sous forme de radical-cation ; - transfert de l’atome O oxo au substrat RH lié et libération de ROH avec fixation concomitante d’un ligand H2O sur le site actif de la métalloenzyme qui contient à nouveau Fe(III) à bas spin. On pense que l’insertion de O dans la liaison C-H de RH met en jeu un mécanisme radicalaire. 8) Les oxygénases Les oxygénases sont des enzymes qui insèrent l’oxygène à l’intérieur d’autres molécules ; une monooxygénase insère un seul atome d’oxygène, et une dioxygénase en insère deux. Le métabolisme des médicaments et la synthèse des stéroïdes sont deux exemples de l’utilisation biologique de cette réaction. III) Processus rédox biologiques La nature réalise une chimie rédox à travers les protéines bleues à cuivre, les protéines fersoufre et les cytochromes. Le transfert électronique dans la nature implique ajustement du potentiel redox d’un couple redox comme Fe3+/Fe2+ par la modification des ligands coordinés au centre métallique. La théorie de Marcus-Hush (page 899) s’applique aux transferts électroniques dans les systèmes bioinorganiques où il existe une communication sur des distances relativement longues entre des centres métalliques actifs en rédox. La théorie de Marcus relie les données cinétique et les données thermodynamique de deux réactions d’auto-échange avec des données sur la réaction croisée entre les partenaires de l’ d’auto-échange. Par exemples: [ML6]2+ + [ML6]3+ → [ML6]3+ + [ML6]2+ [M’L6]2+ + [M’L6]3+ → [M’L6]3+ + [M’L6]2+ [ML6]2+ + [M’L6]3+ → [ML6]3+ + [M’L6]2+ auto-échange 1 auto-échange 2 réaction croisée 1) Les protéines bleues à Cu 21 Les protéines bleues à cuivre contiennent au moins un centre Cu de type 1, et on trouve dans cette catégorie les plastocyanines et les azurines. Les plastocyanines sont présentes dans les plantes supérieures et les algues bleues, ou elles transportent les électrons entre les photosystèmes I et II. On trouve les azurines dans certaines bactéries et elles sont impliquées dans le transport des électrons pour la transformation de [NO3]- en N2. Il existe trois catégories de centres cuivre dans les protéines bleues à cuivre : -Un centre de type 1 caractérisé par une absorption intense dans le spectre électronique avec max 600 nm, et max 100 fois supérieur à celui de Cu2+. L’absorption est attribuée à un transfert de charge du ligand cystéine à Cu2+. - Un centre de type 2 présente les caractéristiques du spectre électronique typique de Cu2+. - Un centre de type 3 présente une absorption à max 330 nm ; c’est un couple de centres Cu(II) couplés de façon antiferromagnétique, ce qui donne un système diamagnétique. L’unité Cu2 peut fonctionner comme un centre de transfert de deux électrons et est impliqué dans la réduction de O2. Des études structurales réalisées sur les formes réduites de la plastocyanine et de l’azurine montre dans chaque cas que la sphère de coordination reste la même sauf pour les longueurs des liaisons Cu-L. Typiquement les liaisons s’allongent de 5 à 10 pm en passant de Cu (II) à Cu(I). On peut considérer que les sphères de coordination observées conviennent aussi bien à Cu(I) qu’à Cu(II) et cela facilite un transfert d’électrons rapide. La fixation sur Cu (I) est plus favorisée que la fixation sur Cu(II) ; cela est confirmé par les potentiels de réduction élevés (mesurés à pH=7) de la plastocyanine (+370 mV) et de l’azurine (+308mV). Les protéines bleues à cuivre multicuivre comprennent l’ascorbate oxydase et la laccase. Ce sont des métalloenzymes qui catalysent la réduction de O2 en H2O et en même temps, un substrat organique (par ex. un phénol) subit une oxydation monoélectronique. Le schéma global peut s’écrire sous la forme : O2 + 4H+ + 4e- ⇄ 2H2O 4RH + O2 4R. + 2H2 Les oxydases sont des enzymes qui utilisent O2 comme accepteur d’électrons. 2) L’enzyme Photosystème II L’enzyme Photosystème II transforme H2O en O2 : 2H2OO2 + 4H+ + 4e- . Le site à l’intérieur de l’enzyme Photosystème II est un cluster Mn4 avec une unité [Mn(O)2Mn(-O)2Mn] en combinaison avec un 4ème Mn. Le transfert d’électrons met en jeu les 4 22 centres Mn qui subissent une série d’étapes redox, l’état entièrement oxydé et l’état entièrement réduit étant respectivement (MnIV3MnIII) et (MnIII3MnII). Le cycle catalytique proposé (appelé cycle de Kok) par lequel la réaction : H2OO2 + 4H+ + 4e- se réalise (représentée ci-dessous), les intermédiaires S0 à S4 représentant les unités Mn4 dans les différents états d’oxydation : page 711 3) La chaine mitochondriale de transfert électronique Les mitochondries sont les structures cellulaires ou les carburants biologiques bruts sont transformés en énergie. La chaine mitochondriale de transfert électronique est la chaine des réactions redox qui se produisent dans les cellules vivantes. Chaque système transfère un ou plusieurs électrons et fonctionne dans une gamme étroite de potentiel de réduction. (Figure 29.13 page 980 et Structure respectives des coenzymes [NAD]+ et FAD). Le cytochrome c oxydase catalyse la réduction de O2 en H2O : O2 + 4H+ + 4e- ⇄ 2H2O E’ = +815 V. L’échelle E’ qui s’applique aux mesures à pH=7 s’étend jusqu'à -414 mV, et cette gamme de potentiel correspond à ceux qui sont accessibles dans les conditions physiologiques. La plupart des réactions redox qui mettent en jeu des molécules organiques se produisent dans la gamme 0 mV > E’> - 400 mV. L’oxydation d’un carburant biologique implique des réactions dans lesquelles les électrons traversent les éléments de la chaine de transport électronique jusqu'à ce que finalement H2 et des électrons pénètrent dans le couple [NAD]+/NADH. Structure du NAD+ (à gauche) et du NADH (à droite) 23 Le nicotinamide adénine dinucléotide (NAD) est une coenzyme présente dans toutes les cellules vivantes. Il s'agit d'un dinucléotide, dans la mesure où la molécule est constituée d'un premier nucléotide, dont la base nucléique est l'adénine, uni à un second nucléotide, dont la base est le nicotinamide. Le NAD existe sous une forme oxydée, notée NAD+, et une forme réduite, notée NADH. Le NAD intervient dans le métabolisme comme transporteur d'électrons dans les réactions d'oxydoréduction, le NAD+ comme oxydant et le NADH comme réducteur. Les oxydations et les réductions des molécules organiques mettent en jeu habituellement des processus à deux électrons, alors que les changements redox sur les centres métalliques impliquent des étapes monoélectroniques. 2) Les protéines fer-soufre Les protéines fer-soufre contiennent Fe (II) ou Fe(III) à haut spin coordiné tétraédriquement à quatre S-donneurs. Ces derniers sont des S2- (c.-à-d. des ions sulfure discrets) ou des résidus Cys de la chaine protéique. Les fonctions biologiques des protéines fer-soufre comprennent des processus de transfert d’électrons, la fixation de l’azote, les sites catalytiques des hydrogénases et l’oxydation de NADH en [NAD] + dans les mitochondries. Les hydrogénases sont des enzymes qui catalysent la réaction : 2H+ + 2e- H2 a) Les rubrédoxines Les protéines fer-soufre les plus simples sont les rubrédoxines qui sont présentent dans les bactéries. Les rubrédoxines fonctionnent comme des sites de transfert monoélectronique, avec le centre fer faisant la navette entre Fe(II) et Fe(III). Lors de l’oxydation, les longueurs des liaisons Fe-S raccourcissent de 5 pm. Les rubrédoxines ont une structure secondaire comprenant deux hélices α et deux ou trois feuillets β, le site actif contenant un cation de fer coordonné à quatre atomes de soufre appartenant aux groupes thiol de quatre résidus cystéine, selon une géométrie assez proche d'un tétraèdre régulier. Lors du transfert de l'électron, le cation de fer oscille entre les états d'oxydation +2 (ferreux) et +3 (ferrique). Le potentiel d'oxydo-réduction de ce couple redox est compris typiquement 24 entre −50 et 50 mV. Son état d'oxydation peut être déterminé à l'œil nu dans la mesure où une rubrédoxine oxydée (avec un cation Fe3+) est rouge tandis qu'elle est incolore à l'état réduit (avec un cation Fe2+, car les transferts de charge entre le cation et les ligands donnent lieu à une émission dans l'infrarouge, invisible à l'œil nu). b) Les ferrédoxines Une ferrédoxine est une protéine fer-soufre réalisant des transferts d'électrons dans un grand nombre de réactions d'oxydoréduction du métabolisme cellulaire grâce à leurs clusters Fe-S dont les cations de fer oscillent entre les états d'oxydation +2 (ferreux) et +3 (ferrique). La première protéine de ce type a été isolée en 1962 à partir de la bactérie anaérobie Clostridium pasteurianum1,2. Une ferrédoxine particulière aux chloroplastes3 intervient dans les réactions de photophosphorylation cyclique et non cyclique de la photosynthèse. Dans la photophosphorylation non cyclique, la ferrédoxine est l'ultime accepteur d'électrons et réduit le NADP+ sous l'action de la ferrédoxine-NADP+ réductase (EC 1.18.1.2) avec la FAD et un groupe flavine comme cofacteurs : 2 ferrédoxine-[ Fe2+ Fe3+ S2-2] + NADP+ + H+ → 2 ferrédoxine-[ Fe3+2 S2-2 ] + NADPH. La ferrédoxine des chloroplastes contient des clusters Fe2S2, composés de deux cations de fer et deux anions sulfure. Il existe d'autres types de clusters Fe-S, dont les plus courants sont ceux de type Fe3S4 et Fe4S4. Les ferrédoxines se trouvent dans les bactéries, les plantes et les animaux et sont de divers types : - les ferrédoxines [2Fe-2S] contiennent deux centres Fe, pontes par deux ligands S2-, la sphère de coordination de chaque métal étant complétée par deux résidus de Cys. (figure 29.15 a) - les ferrédoxines [3Fe-4S] contiennent trois centres Fe et quatre centres S2- dans une disposition approximativement cubique avec un sommet vide ; cette unité est connectée à la chaine protéique par des résidus Cys. (figure 29.15 b) - les ferrédoxines [4Fe-4S] ressemblent aux ferrédoxines [3Fe-4S], mais elles contiennent des groupements FeS (Cys)supplémentaire qui complète le cœur approximativement cubique du cluster. (figure 29.15 c) L’avantage des ferrédoxines sur les rubrédoxines pour la chimie redox, c’est qu’en combinant plusieurs centres Fe très proches, on peut accéder à une plus vaste gamme de potentiels de 25 réduction. Une ferrédoxine [2Fe-2S] fonctionne comme un centre de transfert monoélectronique, passant d’un état Fe(II)/Fe(II) dans sa forme réduite à un état Fe(II)/Fe(III) lorsqu’elle est oxydée, et vice-versa. Une ferrédoxine [4Fe-4S] transfère également un seul électron. Les potentiels de réduction typique sont autour de -300 à -450 mV pour la demi-réaction. c) Les hydrogénases Dans les bactéries qui réduisent les sulfates on a identifié trois types d’hydrogénases contenant du Fe. Le centre fer est dans un site approximativement octaédrique et les trois ligands terminaux sont probablement un groupement SO et deux groupements CO (ou peutêtre [CN]-). Même à l’état oxydé on a suggéré que l’environnement des ligands autour du centre fer le conduit à être Fe(II) à bas spin. La présence d’un groupement amine dans le site actif de certains hydrogénases fournirait un site susceptible de jouer un rôle catalytique pour la libération des protons et le dégagement de H2. d) Les nitrogénases La fixation de l’azote par les bactéries met en jeu la réduction de N2 en NH3 catalysée par des nitrogénases selon la réaction: N2 +8H+ + 8e- NH3 +H2 L’hydrolyse de l’ATP, qui est un processus libérant de l’énergie, est concomitante à ce processus. Deux métalloprotéines constituent le système nitrogénase : une protéine à fer qui couple l’hydrolyse de l’ATP au transfert électronique, et une protéine FeMo qui lie N2. On peut résumer en trois étapes le rôle double de ces protéines : - réduction de la protéine à Fe ; - transfert monoélectronique de la protéine à Fe à la protéine FeMo selon le processus qui met en jeu l’hydrolyse de l’ATP ; - transfert d’électrons et de H+ à N2. 26 3) Les cytochromes Les cytochromes sont des éléments essentiels de la chaine de transfert électronique des mitochondries. Ce sont également les composants essentiels des chloroplastes des plantes pour la photosynthèse. Les cytochromes sont des protéines à hème, et l’aptitude du centre fer à subir des changements réversibles Fe(III) Fe(II) leur permet d’agir comme des centres de transfert monoélectronique. On connaît de nombreux cytochrome différents, le potentiel de réduction du couple Fe3+/Fe2+ étant ajusté par l’environnement protéique. Les cytochromes appartiennent à diverses familles, par ex : les cytochromes a, les cytochromes b, les cytochromes c, qui sont qualifiés ainsi selon les substituants du groupement hème. Nous avons vu que pour les protéines à hème transporteuses d’O2, « l’état de repos» contient un centre Fe(II) pentacoordiné qui devient hexacoordiné après la fixation de O2. En revanche, les cytochromes b et c de transfert électronique contiennent Fe hexacoordiné qui est présent sous forme de Fe(II) ou Fe(III). La conformation des ligands change peu lorsque la réaction redox se produit. a) Le cytochrome c554 Le cytochrome c554 est essentiel pour le chemin réactionnel de la nitrification : NH3 est transformé en NH2OH (catalysé par l’ammonia monooxgénase) qui est ensuite oxydé en [NO3]- (catalysé par l’hydroxylamine oxydoréductase). Le rôle du cytochrome c554 est d’accepter des doublets électroniques de l’hydroxylamine oxydoréductase et de les transférer via le cytochrome c552 aux oxydases terminales. La structure cristalline du cytochrome c554 montre que les quatre unités hème sont disposés en couples de façon à ce que les cycles porphyrine soient approximativement parallèles, et que leurs bords se recouvrent. b) Le cytochrome c oxydase Le cytochrome c oxydase est le chainon terminal de la chaine de transfert électronique mitochondriale qui catalyse la réduction de O2 en H2O et contient quatre centres métalliques actifs (CuA, CuB, hème a et hème a3) qui couplent le transfert d’électrons et le pompage de protons. Le transfert d’électrons met en jeu les sites CuA et hème a, les électrons étant transférés du cytochrome c (équation 29.16) à CuA, puis à l’hème a. L’hème a3 et le CuB fournissent le site de fixation de O2 et de conversion de O2 en H2O, et sont impliqués dans le pompage de H+ (quatre par molécule O2) à travers la membrane intérieure de la mitochondrie. Les données cristallographiques ont révélé les caractéristiques structurales ci-dessous : - le Fe (hème a) est hexacoordiné avec des résidus His dans les sites axiaux ; - CuA est un site dicuivre ponté par des résidus Cys, avec un cœur Cu2S2 qui n’est pas different de celui de la ferrédoxine [2Fe-2S] ; 27 - Le CuB tricoordiné et le Fe (hème a3) pentacoordiné sont distants de ≈ 450 pm et ne sont pas unis par un ligand pontant. (La figure 29.23) montre les sites métalliques actifs de la forme oxydée du cytochrome c oxydase et la relation spatiale entre eux. Ils se trouvent à l’intérieur d’une protéine et ils sont constitués de 13 unités polypeptide différentes. Des études structurales détaillées des chaines protéiques ont montré qu’un système de liaisons hydrogène qui incorpore des résidus du squelette de la protéine, des chaines latérales propanoate de l’hème et de résidus His lié à CuA peut constituer « une autoroute » pour le transfert électronique en CuA et l’hème a. L’étape initiale du cycle catalytique qui met en jeu le cytochrome c oxydase est la fixation de O2 sur l’état réduit du site actif Fe (hème a3) CuB, celui-ci contient Cu(I) et Fe(II) à haut spin. Les études spectroscopiques et mécanistiques suggèrent, que au début, la molécule de O2 entre en interaction avec CuB, ce qui donne naissance à un complexe hème-superoxyde du type Fe-O2 du type Fe(hème a3) O2 /CuB contenant Fe(III) et Cu(I). Le complexe FeIII-O2evolue ensuite vers une espèce (oxo) FeIV=O. (structure 29.22) Nous devons noter qu’il existe dans les cytochromes une liaison forte de [CN]- à Fe (III) qui rend le cyanure toxique. 4) L’ion Zn2+ : l’acide de Lewis de la nature L’anhydrase carbonique II et les carbopeptidases A et G2 sont des enzymes contenant Zn(II). Comme le zinc(II) n’est pas un centre redox actif, il ne peut pas participer aux processus de transfert d’électrons. C’est cependant un centre métallique dur et il est idéalement adapté à la coordination des N-donneurs et des O-donneurs. Il est aussi extrêmement polarisant, et l’activité des métallocènes contenant Zn(II) dépend de l’acidité de Lewis du centre métallique. a) Anhydrase carbonique II L’anhydrase carbonique II humaine (AC) est présente dans les globules rouges et catalyse l’hydratation réversible de CO2. H2O + CO2 → [HCO3]- +H+ La métalloprotéine contient un ion Zn2+, la sphère de coordination tétraédrique est complété par un ion hydroxyde ou une molécule d’eau (figure 29.25). L’environnement de la chaine peptidique autour du site actif est essentiel pour l’activité catalytique du site : le ligand [OH] lié à Zn2+ est lié par liaison hydrogène à un résidu acide glutamique voisin, et au groupement OH d’un résidu thréonine voisin. A coté du centre Zn2+, il y a une poche hydrophobe qui 28 « capture » CO2. Le cycle catalytique de l’hydrolyse de CO2 est présenté dans (figure 29.25b). Apres la libération de [HCO3]-, le ligand H2O coordiné doit être déprotoné pour régénérer le site actif, et le proton est transféré par un réseau de liaison hydrogène à un résidu His (qui n’est pas coordiné à Zn2+) à l’intérieur de la poche catalytique. Le site actif de CA II a été modélisé par un ligand hydrurotris(pyrazol)borato (29.25) pour stimuler les trois résidus His qui fixent Zn2+ dans la métalloenzyme. Comme Zn2+ est un ion métallique d10, il tolère une série de géométries de coordination. La protonation réversible du ligand [OH]- de CAII (figure 29.25a) est modélisée par la réaction du complexe (29.26) avec (C6F5)3B(OH2) et la déprotonation ultérieure par Et3N (équation 29.18). Le choix de l’acide est important parce que la base conjuguée déplace en général le ligand [OH]- comme dans la réaction 29.19. Le complexe (29.26) réagit avec CO2 (équation 29.20) et catalyse l’échange d’oxygène entre CO2 et H2O (équation 29.21). Cette dernière réaction est également catalysée par l’anhydrase carbonique. b) Carboxypeptidase A Le carboxypeptidase A (CPA) est une métalloenzyme pancréatique qui catalyse la coupure d’une liaison peptidique d’une chaine polypeptidique. (équation 29.22). Près de la surface de la protéine, il y a une poche dans laquelle un ion Zn2+ est lié à la chaine protéinique par un résidu Glu bidentate et par deux résidus His. La sphère de coordination pentacoordinée est complétée par une molécule d’eau. (Figure 29.27a) La (Figure 29.26c) montre que Glu 72 lié de façon monodentate au centre Zn2+, alors qu’au repos, un mode bidentate a été confirmé. Il semble que le passage d’une coordination bidentate à une coordination monodentate soit associée à la formation d’une interaction Zn2+…O…H2O (Arg-127) illustrée par la (Figure 29.26c), l’ion Zn2+ étant capable de se deplacer vers Arg-127 à mesure que l’interaction se développe. Pour compléter le cycle catalytique, un ligand H2O occupe à nouveau le site vacant du centre Zn2+. c) Carboxypeptidase G2 Le carboxypeptidase G2 (CPG2) catalyse la coupure de glutamate C-terminal du folate et des composés voisins. L’acide folique est nécessaire à la croissance, et on peut empêcher la croissance des tumeurs en utilisant des médicaments du cancer qui diminuent le niveau des folates. Contrairement au CPA, le site actif du CPG2 contient deux centres Zn distant de 330 pm et pontés par un résidu Asp et une molécule d’eau (Figure 29.27b). Chaque ion Zn2+ est en 29 plus coordiné à des résidus His et Glu de la chaine protéique pour obtenir un environnement tétraédrique. d) Remplacement de l’ion zinc par l’ion cobalt Un inconvénient pratique du travail avec les métalloprotéines contenant le zinc est la configuration d10 de cet ion. On ne peut pas sonder le site métallique avec les spectroscopies UV-vis ou de RPE, ni par des mesures magnétiques. Des études mettant en jeu le remplacement de Zn2+ par Co2+ fournissent un centre métallique susceptible d’être étudié par les techniques spectroscopiques et magnétiques. (Co2+ est un ion d7), le choix de Co2+ étant dû au fait que : - les rayons ioniques de Co2+ et de Zn2+ sont à peu près identiques ; - Co2+ peut accepter les mêmes environnements de coordination que Zn2+ ; - Il est souvent possible de remplacer Zn2+ d’une protéine par Co2+ sans trop perturber la conformation de la protéine. Le schéma suivant présente une méthode typique de remplacement d’un ion métallique dans laquelle le ligand L enlève Zn2+ par complexation. [P Zn2+] L [AP] Co2+ [PCo2+] P= protéine et AP= apoprotéine inactive Par exemple le traitement de l’anhydrase carbonique par 29.28 ou par sa base conjuguée provoque l’élimination de Zn2+ et la formation de l’apoprotéine catalytiquement inactive. La réaction de l’apoprotéine avec Co2+ donne une enzyme substituée par le cobalt, [PCo2+] qui catalyse l’hydratation de CO2. On peut de même enlever l’ion Zn2+ de la CPA par traitement avec bpy (29.29) et après l’insertion de Co2+, on constate que la metalloenzyme modèle [PCo2+] est active (en fait plus active que la CPA d’origine) pour la coupure du peptide. On peut réaliser avec [PCo2+] des recherches qui sont impossibles avec les enzymes au zinc d’origine, p. ex. les données de spectroscopie électronique en fonction du pH indique si les ligands comme H2O sont déprotonés ou non. 30 En biochimie, un cofacteur est un composé chimique non protéique mais qui est nécessaire à l'activité biologique d'une protéine, le plus souvent une enzyme. Les cofacteurs interviennent fréquemment dans la réaction catalytique et peuvent être considérés comme des « molécules d'assistance » aidant aux transformations biochimiques. Les cofacteurs peuvent être classés en deux catégories : Les ions métalliques et les clusters métalliques1. Ces derniers peuvent participer à des réactions d'oxydoréduction et de transfert d'électron contribuer à la stabilité de la protéine et/ou intervenir dans l'activation de molécules d'eau2 ; les coenzymes qui sont des molécules organiques. Elles favorisent l'activité enzymatique et peuvent être classées selon leur mode de liaison à l'enzyme : les coenzymes faiblement liés à l'enzyme (liaison hydrogène ou ionique) seront appelés cosubstrats et les coenzymes fortement liés à l'enzyme (liaison covalente) seront appelés groupements prosthétiques. Certaines sources limitent l'usage du terme « cofacteur » aux substances inorganiques3,4. Une enzyme inactive, sans cofacteur, est appelée apoenzyme ; alors que l'enzyme « complète », avec cofacteur, est l'holoenzyme. la flavine adénine dinucléotide (FAD) liées par liaison covalente, les cosubstrats nicotinamide adénine dinucléotide (NAD+) et coenzyme A (CoA), et un cofacteur métal-ion (Mg2+). Les cofacteurs organiques sont souvent des vitamines ou des dérivés de vitamines. Beaucoup contiennent le nucléotide adénosine monophosphate (AMP) dans leur structure, comme l'ATP, le coenzyme A, la FAD et NAD+. 31