(1) Activation macrophagique

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de
médecine
interne
34
(2013)
85–93
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Mise
au
point
Le
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
de
l’adulte
Hemophagocytic
lymphohistiocytosis
J.-M.
Michota,,b,
M.
Hiéc,
L.
Galicierd,
O.
Lambottea,b,
M.
Michele,
C.
Bloch-Queyratf,g,
O.
Herminef
aService
de
médecine
interne,
Assistance
publique–Hôpitaux
de
Paris,
hôpital
du
Kremlin-Bicêtre,
78,
rue
du
Général-Leclerc,
94270
Le
Kremlin-Bicêtre,
France
bUniversité
Paris-Sud
XI,
94276
Le
Kremlin-Bicêtre
cedex,
France
cService
de
médecine
interne
2,
CHU
Pitié-Salpêtrière,
Assistance
publique–Hôpitaux
de
Paris,
75651
Paris
cedex
13,
France
dDépartement
d’immunologie
clinique,
CHU
Saint-Louis,
Assistance
publique–Hôpitaux
de
Paris,
75475
Paris
cedex
10,
France
eService
de
médecine
interne,
CHU
Henri-Mondor,
Assistance
publique–Hôpitaux
de
Paris,
94000
Créteil,
France
fService
d’hématologie
adulte,
CHU
Necker-Enfant–Malade,
Assistance
publique–Hôpitaux
de
Paris,
75743
Paris
cedex
15,
France
gUnité
de
recherche
clinique
Cochin
Necker
Paris
Centre,
centre
d’investigation
clinique
Necker,
hôpital
Necker,
75015
Paris,
France
i
n
f
o
a
r
t
i
c
l
e
Historique
de
l’article
:
Disponible
sur
Internet
le
5
septembre
2012
Mots
clés
:
Hémophagocytose
lymphohistiocytaire
Syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
Syndrome
d’activation
macrophagique
r
é
s
u
m
é
Le
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
(SALH)
est
un
syndrome
potentiellement
mortel
par
défaillance
multiviscérale.
Le
SALH
est
la
conséquence
d’une
stimulation
inappropriée
de
lymphocytes
cytotoxiques
et
de
macrophages,
entraînant
une
phagocytose
anormale
des
éléments
figurés
du
sang.
Un
SALH
doit
être
évoqué
rapidement
devant
toute
cytopénie
fébrile
inexpliquée.
Les
marqueurs
bio-
logiques
sont
une
élévation
de
la
ferritine
et
des
triglycérides,
et
un
fibrinogène
diminué.
L’image
d’hémophagocytose
cytologique
(ou
histologique)
n’est
ni
nécessaire,
ni
suffisante
au
diagnostic.
Le
SALH
est
soit
«
primaire/génétique
»
(formes
familiales
ou
pédiatriques)
et
caractérisé
par
un
défaut
de
cyto-
toxicité
intrinsèque
des
lymphocytes
NK
ou
T
CD8,
soit
«
secondaire/réactionnel
»
(tous
âges
confondus)
à
une
cause
tumorale
maligne,
infectieuse
ou
auto-immune.
La
mortalité
étant
de
50
%
(toutes
causes
confondues),
elle
justifie
que
l’enquête
étiologique
soit
rapide,
«
agressive
»
et
multidisciplinaire
avec
l’implication
de
l’équipe
de
réanimation.
L’objectif
immédiat
du
traitement
est
la
suppression
de
l’état
d’hyper-inflammation
délétère
pouvant
conduire
à
la
défaillance
multiviscérale.
Ce
traitement
d’urgence
repose
actuellement
sur
l’étoposide
(VP16),
en
attendant
que
la
cause
sous-jacente
soit
identifiée
et
traitée.
©
2012
Société
nationale
française
de
médecine
interne
(SNFMI).
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droits
réservés.
Keywords:
Hemophagocytosis
lymphohistiocytosis
Reactive
hemophagocytic
syndrome
Macrophage
activation
syndrome
a
b
s
t
r
a
c
t
Hemophagocytic
lymphohistiocytosis
is
a
life-threatening
condition
associated
with
multiple
organ
dys-
functions.
This
entity
is
related
to
inappropriate
stimulation
and
proliferation
of
cytotoxic
lymphocytes
and
macrophages
inducing
phagocytosis
of
blood
cells.
Hemophagocytic
lymphohistiocytosis
should
be
considered
rapidly
in
any
unexplained
febrile
cytopenia.
Biological
markers
are
high
ferritin
and
triglyceride
levels,
and
low
fibrinogen.
Hemophagocytic
lymphohistiocytosis
diagnosis
should
not
be
ruled
on
or
out
solely
on
the
presence
or
absence
of
hemophagocytosis
features
on
smear
or
biopsy
sampling.
It
is
either
“primary/genetic”
(pediatric
or
familial
disorders)
and
characterized
by
a
lack
of
intrinsic
cytotoxicity
of
NK
cells
or
T
CD8
lymphocyte,
or
“secondary/reactive”
due
to
malignancy,
infec-
tious
or
autoimmune
origin.
Mortality
is
50%
(including
all
etiologies),
and
this
severity
requires
rapid
and
“aggressive”
investigations
with
multidisciplinary
approach
including
intensive
care
unit
team.
The
immediate
aim
of
therapy
is
suppression
of
the
severe
hyper-inflammation,
which
can
lead
to
multiple
organ
failure.
Emergency
treatment
is
currently
based
on
etoposide
(VP16),
pending
to
the
identification
and
treatment
of
underlying
cause.
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2012
Société
nationale
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médecine
interne
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Michot).
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et
al.
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(2013)
85–93
1.
Introduction
et
définitions
Les
termes
d’hemophagocytic
lymphohistiocytosis
ou
de
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
(SALH)
sont
généra-
lement
utilisés
respectivement
dans
la
littérature
anglophone
et
francophone
[1,2].
Le
terme
de
syndrome
d’activation
macrophagique
(SAM)
est
plutôt
utilisé
pour
les
formes
«
secondaires/réactionnelles
»
aux
maladies
auto-immunes
[2].
Pour
plus
de
clarté
dans
cette
revue,
nous
n’utiliserons
que
le
terme
SALH
pour
l’ensemble
des
formes
d’hémophagocytose.
On
consi-
dérera
de
manière
générale
que
les
formes
«
primaires/génétiques
»
sont
les
formes
pédiatriques
familiales
ou
de
l’adulte
jeune,
et
que
les
formes
«
secondaires/réactionnelles
»
sont
acquises
et
sporadiques
rencontrées
à
tous
les
âges
de
la
vie,
le
plus
souvent
chez
l’adulte.
Le
SALH
fait
partie
de
la
famille
des
histiocytoses
non
langhe-
ransiennes.
En
1939,
Scott
et
Robb-Smith
décrivent
les
premiers
«la
réticulose
médullaire
histiocytaire
avec
hémophagocytose
»[2],
maladie
sévère
évoluant
rapidement
vers
la
mort.
Depuis,
le
SALH
a
été
rapporté
dans
de
nombreuses
situations
cliniques
en
pédiatrie
comme
chez
l’adulte.
La
mortalité
du
SALH
secondaire
est
élevée,
proche
de
50
%
[3–5].
2.
Épidémiologie
En
pédiatrie,
le
SALH
primaire
est
une
pathologie
rare,
son
incidence
en
Suède
est
estimée
à
une
naissance
sur
50
000
[6].
L’incidence
du
SALH
chez
les
adultes
suivis
pour
une
hémopathie
maligne
dans
un
centre
d’hématologie
Suédois
(Karolinska
Insti-
tute)
est
estimée
à
1
%
[7].
L’incidence
du
SALH
reste
cependant
probablement
sous-estimée,
car
c’est
une
complication
rencon-
trée
dans
de
nombreuses
situations
cliniques.
En
réanimation
par
exemple,
le
SALH
serait
une
cause
fréquente
de
thrombopénie
chez
les
patients
en
sepsis
sévère
(60
%
des
cas)
[8].
3.
Physiopathologie
La
physiopathologie
a
été
principalement
décrite
à
partir
des
formes
de
SALH
«
primaires/génétiques
».
La
majorité
des
cytokines
mesurées
au
cours
du
SALH
sont
élevées
(IFN-,
récepteur
soluble
de
IL-2,
TNF-,
IL-1,
IL-6,
IL-10)
justifiant
les
termes
de
«
syndrome
hyper-inflammatoire
»
ou
«
d’orage
cytokinique
»
[2,9,10].
La
production
de
cytokines
inflammatoires
(IL-1,
IL-6,
TNF-)
par
les
macrophages
eux-mêmes
activés
exerce
en
retour
une
activation
des
lymphocytes
T
CD8,
entretenant
ainsi
une
boucle
d’amplification
conduisant
à
un
état
d’hyper-inflammation
[2].
Le
SALH
serait
la
conséquence
d’une
activation
anormale
des
lym-
phocytes
T
CD8,
déclenchée
par
exemple
par
une
infection
qui
survient
sur
un
terrain
de
déficit
inné
des
mécanismes
immuno-
modulateurs
[2,10,11].
Le
primum
movens
des
SALH
serait
un
défaut
fonctionnel
des
cel-
lules
NK
et
des
lymphocytes
T
CD8,
ce
qui
est
bien
caractérisé
dans
les
formes
«
primaires/génétiques
»
[2,11]
(cf.
infra)
mais
également
dans
certains
SALH
«
secondaires/réactionnels
»
[12].
La
molécule
Fas
qui,
en
synergie
avec
la
perforine,
joue
un
rôle
dans
le
maintien
de
l’homéostasie
des
cellules
dendritiques
et
dans
l’activation
des
lymphocytes
T,
pourrait
également
être
impliquée
dans
les
méca-
nismes
de
dérégulation
conduisant
à
la
cascade
inflammatoire
du
SALH
[13].
La
fièvre
est
secondaire
à
la
production
dérégulée
d’interféron-,
d’IL-1
ou
d’IL-6
[9].
La
pancytopénie
est
secondaire
à
:
la
phagocytose
des
éléments
figurés
du
sang
par
les
macrophages
activés
;
leur
apoptose
sous
l’effet
des
cytokines
[2]
;
Tableau
1
Critères
diagnostiques
de
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
utilisés
dans
les
séries
pédiatriques.
Critères
diagnostiques
(essai
HLH-2004)
[17]
:
5
critères
sur
les
8
sont
requis
1.
Fièvre
38,5 C
2.
Splénomégalie
3.
Bi-cytopénie
(hémoglobine
<
9
g/dL,
plaquettes
<
100
G/L,
neutrophiles
<
1000/mm3)
4.
Taux
élevé
de
triglycérides
(>
3,0
mmol/L)
ou
fibrinogène
bas
(<
1,5
g/dL)
5.
Ferritine
élevée
(>
500
ng/mL)
6.
Image
d’hémophagocytose
(moelle,
rate,
ganglion,
foie)
7.
Diminution
de
la
cytotoxicité
des
cellules
NK
8.
Taux
élevé
de
CD-25
soluble
(>
2400
UI/mL)
la
myélosuppression
induite
par
certaines
cytokines
comme
l’interféron-
[9].
L’organomégalie
reflète
l’infiltration
tissulaire
par
les
lympho-
cytes
et
les
macrophages
activés.
L’élévation
du
TNF-
se
manifeste
par
les
signes
généraux
et
la
perturbation
des
tests
sanguins
hépatiques,
conséquence
de
l’hyperplasie
des
macrophages
intra-
hépatiques
(cellules
de
Küpffer)
[10,14].
L’hypertriglycéridémie
serait
secondaire
à
l’inhibition
de
la
lipoprotéine
lipase
par
les
cyto-
kines
inflammatoires
(TNF-
et
IL-1)
[15].
L’hyperferritinémie
est
la
conséquence
de
l’érythrophagocytose,
de
l’atteinte
hépatique
et
de
l’inflammation
systémique
[16].
4.
Critères
diagnostiques
Le
diagnostic
de
SALH
repose
sur
la
présence
de
critères
cli-
niques
et
biologiques.
Les
critères
diagnostiques
validés
sont
les
critères
de
Janka
du
protocole
pédiatrique
HLH-2004
[17],
présentés
dans
le
Tableau
1.
Pour
le
diagnostic,
cinq
critères
sur
huit
sont
requis
parmi
:
fièvre
(
38,5 C),
splénomégalie,
bi-
cytopénie
(parmi
hémoglobine
<
9
g/dL,
plaquettes
<
100
G/L,
neu-
trophiles
<
1000/mm3),
taux
élevé
de
triglycérides
(>
3,0
mmol/L)
ou
fibrinogène
bas
(<
1,5
g/dL),
ferritine
élevée
(>
500
ng/mL),
image
d’hémophagocytose,
diminution
de
la
cytotoxicité
des
cellules
NK,
taux
élevé
de
CD-25
soluble
(>
2400
UI/mL).
Les
critères
diagnostiques
ne
sont
néanmoins
pas
validés
pour
les
SALH
de
l’adulte,
toutes
les
études
étant
rétrospectives,
et
les
cri-
tères
de
Janka
restent
utilisés
dans
les
grandes
séries
[3,18].
Deux
séries
asiatiques
de
SALH
réactionnels
de
l’adulte
utilisent
des
cri-
tères
diagnostiques
plus
simples
:
association
d’une
bi-cytopénie
et
d’une
image
d’hémophagocytose
(myélogramme,
ou
sur
une
histo-
logie
ganglionnaire,
hépatique
ou
splénique)
[19,20].
5.
Présentation
clinique
et
biologique
Le
diagnostic
de
SALH
doit
être
évoqué
devant
toute
cytopénie
fébrile.
5.1.
Présentation
clinique
Les
signes
généraux
sont
marqués
et
une
fièvre
est
presque
tou-
jours
présente
[1].
Un
syndrome
tumoral
est
trouvé
dans
plus
de
la
moitié
des
cas
(adénopathie,
hépatomégalie
ou
splénomégalie),
et
devra
souvent
faire
l’objet
d’un
examen
histologique
pour
identifier
la
cause
sous-jacente
[11].
Une
éruption
cutanée
généralisée
à
type
de
rash
non
prurigineux
transitoire
peut
être
observée
(26
%
des
cas)
[21].
L’atteinte
hépatique,
définie
par
la
perturbation
des
enzymes
hépatiques,
est
fréquente
(jusqu’à
60
%
des
patients)
[1,22].
Quand
elle
est
pratiquée,
la
biopsie
hépatique
met
en
évidence
une
dila-
tation
sinusoïdale,
une
péliose,
une
endothélite
portale
ou
un
aspect
de
ductopathie
[14].
L’atteinte
rénale
définie
par
une
insuf-
fisance
rénale
aiguë
concerne
jusqu’à
15
%
des
patients
[3].
Les
J.-M.
Michot
et
al.
/
La
Revue
de
médecine
interne
34
(2013)
85–93
87
histologies
rénales
rapportent
des
lésions
de
nécrose
tubulaire
aiguë,
des
lésions
glomérulaires
en
rapport
avec
une
collapsing
glomerulopathy
ou
une
hémophagocytose
intraparenchymateuse
glomérulaire,
ou
encore
des
lésions
de
microangiopathie
throm-
botique
[23].
Les
signes
neurologiques
à
type
de
syndrome
confusionnel
sont
présents
chez
20
%
des
patients
adultes
[3].
L’atteinte
neurologique
spécifique
par
des
cellules
lymphohistio-
cytaires
activées
avec
méningite,
névrite
optique
ou
atteinte
des
paires
crâniennes
est
rencontrée
dans
les
formes
pédiatriques,
et
témoigne
d’une
gravité
particulière
[24].
L’atteinte
pulmonaire
est
liée
le
plus
souvent
à
des
infiltrats
alvéolo-interstitiels
et
peut
évo-
luer
vers
un
syndrome
de
détresse
respiratoire
de
l’adulte
(SDRA)
[10].
Enfin,
la
défaillance
hémodynamique
puis
multiviscérale
est
le
reflet
de
l’état
d’hyper-inflammation
extrême
[10,11].
5.2.
Présentation
biologique
L’anémie
est
arégénérative,
des
stigmates
d’hémolyse
en
rapport
avec
un
avortement
intramédullaire
ou
une
hémolyse
auto-immune
peuvent
être
observés
[19].
Les
anomalies
de
l’hémostase
sont
fréquentes,
par
hypofibrinogénémie
ou
thrombo-
pénie,
l’évolution
vers
une
coagulation
intravasculaire
disséminée
est
de
mauvais
pronostic
[5,19].
Les
LDH
sont
élevées
dans
40
%
des
cas
[22].
En
pratique,
l’hyperferritinémie
et
l’hypertriglycéridémie
sont
deux
signes
fiables
qui
orientent
vers
le
diagnostic
de
SALH
[11].
Une
hyperferritinémie
supérieure
à
10
000
ng/mL
est
très
évo-
catrice
d’activation
macrophagique
[11].
La
fraction
glycosylée
de
la
ferritine
est
abaissée
quelle
que
soit
la
cause
de
SALH,
ce
qui
ne
permet
pas
de
différencier
une
poussée
de
maladie
de
Still
d’une
autre
cause
[16].
Il
peut
exister
une
hyponatrémie
par
sécrétion
inappropriée
d’hormone
antidiurétique
[25].
Des
stigmates
d’auto-
immunité
sont
possible
(anticorps
antinucléaires
ou
test
de
Coombs
positifs)
et
orientent
l’étiologie
soit
vers
une
connectivite
(lupus
systémique),
soit
vers
une
hémopathie
associée
à
des
stigmates
biologiques
d’auto-immunité
(lymphome
angio-immunoblastique,
maladie
de
Castleman,
lymphome
de
la
zone
marginale
transformé
etc.)
[11,22].
Il
n’y
a
pas
de
données
publiées
concernant
la
procal-
citonine
et
le
SALH.
À
noter
que
l’absence
d’élévation
franche
de
la
CRP
(CRP
<
30
mg/L)
au
cours
d’un
SALH
oriente
vers
le
diagnostic
de
lupus
[26].
6.
Cytologie
et
histologie
Le
diagnostic
de
SALH
repose
sur
un
faisceau
d’arguments
cli-
niques
et
biologiques.
En
pratique,
le
diagnostic
de
SALH
ne
devrait
jamais
être
retenu
ni
exclu
uniquement
sur
la
présence
ou
l’absence
de
l’image
d’hémophagocytose
[11].
L’image
cytologique
ou
histo-
logique
d’hémophagocytose
peut
ne
pas
être
observée
au
premier
examen
cyto-histologique,
et
l’urgence
thérapeutique
peut
exiger
de
traiter
le
patient
en
l’absence
de
cette
image
d’hémophagocytose
[11].
6.1.
Cytologie
Le
myélogramme
montre
une
moelle
riche
et
le
plus
sou-
vent
une
infiltration
médullaire
par
des
histiocytes-macrophages
matures
et
activés.
Une
érythroblastose
est
fréquente,
témoin
de
l’érythropoïèse
réactionnelle
à
l’hémolyse
intramédullaire
[19].
Le
myélogramme
est
l’examen
le
plus
sensible
pour
faire
le
diagnostic
d’hémophagocytose,
mais
d’autres
examens
cytolo-
giques
extramédullaires
(cytoponction
ganglionnaire,
cytologie
de
liquide
d’épanchement
ascitique
ou
pleural,
liquide
cépha-
lorachidien)
peuvent
également
mettre
en
évidence
des
images
d’hémophagocytose.
6.2.
Histologie
Les
examens
histologiques
peuvent
également
mettre
en
évidence
des
images
d’hémophagocytose.
Ces
examens
sont
indis-
pensables
pour
le
diagnostic
étiologique
(hémopathie
lymphoïde).
Les
organes
à
biopsier
seront
prioritairement
les
plus
patholo-
giques
(infiltration
tumorale)
et
les
plus
accessibles
(ganglions,
foie,
peau,
etc.).
La
biopsie
ostéomédullaire
(BOM)
est
un
exa-
men
rentable
en
termes
de
diagnostic
étiologique,
elle
permet
de
rechercher
principalement
une
infiltration
médullaire
d’un
lym-
phome
[27].
La
ponction-biopsie
hépatique
(PBH)
permet
d’obtenir
le
diagnostic
étiologique
dans
50
%
des
cas
quand
elle
est
réalisée
en
présence
d’anomalies
du
bilan
hépatique
ou
de
l’imagerie
du
foie
[14].
Lorsqu’aucun
diagnostic
n’a
pu
être
obtenu
malgré
des
prélèvements
histologiques
répétés
et
de
bonne
qualité,
d’autres
examens
histologiques
seront
à
envisager
en
fonction
de
la
présen-
tation
radioclinique
(biopsie
pulmonaire,
splénectomie,
etc.).
7.
Démarche
étiologique
La
démarche
étiologique
que
nous
proposons
est
résumée
sur
la
Fig.
1.
En
pratique,
le
diagnostic
de
SALH
est
évoqué
devant
une
fièvre
associée
à
une
bi-(ou
pan)-cytopénie,
une
hyperferritiné-
mie
et
hypertriglycéridémie,
avec
une
image
d’hémophagocytose
retrouvée
sur
le
myélogramme.
Chez
l’enfant,
un
SALH
primaire
doit
être
évoqué
et
une
prise
en
charge
spécialisée
en
immuno-hématologie
pédiatrique
est
requise.
Chez
l’adulte,
on
orientera
en
fonction
du
terrain
et
des
antécédents
les
recherches
vers
:
une
infection
:
hémocultures,
sérologies
et
PCR
des
herpès
virus
(CMV,
EBV,
HHV-8,
HSV),
recherche
de
mycobactéries
;
une
lymphoprolifération
:
tomodensitométrie,
biopsies
(gan-
glionnaire,
ostéomédullaire,
hépatique,
etc.)
;
une
maladie
auto-immune
(anticorps
antinuclaires
et
anti-
antigènes
solubles,
complément,
sédiment
urinaire).
Le
statut
VIH
doit
être
connu
car
il
oriente
l’étiologie
préférentiellement
vers
une
lymphoprolifération,
une
infection
opportuniste,
ou
une
maladie
de
Castleman
multicentrique
en
cas
de
co-infection
avec
HHV-8
[3,18].
8.
Étiologies
des
syndromes
d’activation
lymphohistiocytaire
«primaires/génétiques
»
(formes
pédiatriques
ou
de
l’adulte
jeune)
Les
SALH
«
primaires/génétiques
»
sont
décrits
chez
l’enfant
[2],
et
parfois
chez
l’adulte
jeune
[28].
Chez
l’enfant,
c’est
la
lym-
phohistiocytose
familiale
qui
est
la
maladie
la
plus
fréquemment
rencontrée.
Chez
l’adulte
jeune,
on
peut
être
confronté
au
syn-
drome
XLP
(syndrome
de
Purtilo).
Le
mode
de
transmission
des
SALH
primaires
est
autosomique
récessif,
sauf
pour
le
syndrome
XLP
qui
est
récessif
lié
à
au
chromosome
X.
Le
facteur
déclen-
chant
de
la
poussée
de
SALH
est
le
plus
souvent
une
infection
virale
[2].
Le
traitement
consiste
en
une
combinaison
de
chimio-
thérapie
et
d’immunosuppresseurs
(corticostéroïdes,
étoposide,
ciclosporine,
etc.).
En
cas
de
SALH
sévères
persistants
ou
récurrents,
une
allogreffe
de
cellules
souches
hématopoïétiques
est
propo-
sée
[11].
La
greffe
prévient
et
guérit
généralement
les
poussées
de
SALH,
cependant
des
complications
extra-hématologiques
notam-
ment
neurologiques
peuvent
persister
ou
évoluer
pour
leur
propre
compte
[29].
88
J.-M.
Michot
et
al.
/
La
Revue
de
médecine
interne
34
(2013)
85–93
Fig.
1.
Conduite
à
tenir
diagnostique
et
thérapeutique
devant
un
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
(SALH).
8.1.
Lymphohistiocytose
familiale
La
lymphohistiocytose
familiale
est
rencontrée
dans
la
petite
enfance
(âge
moyen
de
deux
mois)
[2].
Des
mutations
inactivatrices
du
gène
de
la
perforine
et
des
gènes
impliqués
dans
le
trafic
des
gra-
nules
de
cytotoxicité
ont
été
identifiées
(Tableau
2).
Les
symptômes
neurologiques
concernent
environ
50
%
des
enfants
et
peuvent
dominer
le
tableau
clinique,
voire
même
précéder
les
autres
symptômes
[6,24].
Le
pronostic
a
été
transformé
ces
dernières
années
grâce
aux
traitements
immuno-chimiothérapeutiques
et
à
l’allogreffe,
permettant
d’obtenir
une
survie
à
trois
ans
post-greffe
de
65
%
[11,17].
8.2.
Syndromes
de
Chediak-Higashi
et
de
Griscelli
Le
syndrome
de
Chediak-Higashi
est
caractérisé
par
un
albi-
nisme
partiel
(cutané
et
oculaire)
et
une
immunodépression
vis-à-vis
des
virus
et
des
bactéries.
Il
existe
des
anomalies
leucocy-
taires
caractéristiques
(myéloblastes
et
promyélocytes
contenant
de
grandes
granulations
intracytoplasmiques
peroxydase
posi-
tives),
une
éosinophilie
et
une
neutropénie.
Les
lymphocytes
NK
des
patients
présentent
un
déficit
de
leur
cytotoxicité.
Le
gène
muté
code
pour
la
protéine
LYSosomal
Trafficking
regulator
(Lyst),
impliquée
dans
l’adressage
des
protéines
intracellulaires
[30].
En
conséquence,
certaines
protéines
membranaires
lymphocytaires
Tableau
2
Gènes,
protéines
et
principaux
défauts
fonctionnels
impliqués
dans
les
différents
types
de
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
primaires/génétiques.
Type
de
pathologie
Gène
muté
Protéine
Principal
défaut
fonctionnel
LHF-1
Inconnu
Inconnue
Inconnue
LHF-2 PRF1
Perforine
Induction
de
l’apoptose
LHF-3
UNC13D
Munc13-4
Priming
vésiculaire
LHF-4
STX11
Syntaxin-11
Transport
vésiculaire
(lysosome)
LHF-5
STXBP2
Munc18-2
Transport
vésiculaire
(lysosome)
GS-1
MYO5A
Myosine
5a
Polarisation
cellulaire
GS-2
RAB27A
Rab27a
Transport
vésiculaire
(lysosome)
GS-3 MLPH Melanophyline
Transport
vésiculaire
(mélanosome)
CHS-1 LYST
Lyst
Transport
vésiculaire,
microtubules
XLP-1 SH2D1A
SAP
Transduction
du
signal
et
activation
lymphocytaire
XLP-2
XIAP
XIAP
protéine
Survie
et
différentiation
des
cellules
NK/T
J.-M.
Michot
et
al.
/
La
Revue
de
médecine
interne
34
(2013)
85–93
89
(la
perforine
ou
le
CTLA-4)
sont
déviées
de
leur
destination
pri-
mitive
et
adressées
par
erreur
vers
les
lysosomes
cellulaires,
expliquant
le
déficit
immunitaire
et
la
présence
des
grandes
vacuoles
cytoplasmiques
caractéristiques
de
cette
maladie.
Le
syndrome
de
Griscelli
est
une
pathologie
voisine
du
SCH,
à
la
différence
que
l’on
n’y
retrouve
pas
les
grandes
granula-
tions
intracytoplasmiques.
Les
mutations
décrites
concernent
deux
gènes
codant
pour
la
myosine
5A
et
pour
la
protéine
RAB27A
[31],
protéines
impliquées
également
dans
le
trafic
intracellulaire
lyso-
somal.
8.3.
Syndrome
X-linked
Lymphoproliferative
(XLP)
ou
syndrome
de
Purtilo
ou
maladie
de
Ducan
Cette
maladie
est
liée
à
l’X
et
touche
un
garc¸
on
sur
106naissances
[32].
Les
mutations
sur
le
chromosome
X
concernent
soit
le
gène
SH2D1A
codant
pour
SLAM–Associated
Protein
(SAP)
[33]
pour
le
XLP
de
type
1,
soit
le
gène
codant
XIAP
[34]
pour
le
XLP
de
type
2.
Le
XLP
est
caractérisé
par
une
primo-infection
EBV
gravissime,
s’exprimant
sous
la
forme
d’un
SALH
fatal
dans
deux
tiers
des
cas
[2,11,32].
Près
de
la
moitié
des
patients
présentent
des
manifestations
avant
toute
rencontre
avec
l’EBV
:
infections
(proba-
blement
favorisées
par
une
hypogammaglobulinémie),
lymphome
B
(souvent
de
localisation
intestinale
ou
iléocæcale),
vascularite
nécrosante
avec
granulomatose
lymphomatoïde,
aplasie
médul-
laire
[32].
Les
patients
ne
montrent
pas
de
réponse
efficace
anti-EBV
(faible
titre
d’anticorps
anti-EBNA
ou
anti-VCA)
[33].
La
mortalité
spontanée
de
cette
maladie,
fatale
dans
100
%
des
cas
avant
l’âge
de
40
ans,
rend
nécessaire
une
allogreffe
de
cellules
souches
hémato-
poïétiques
quand
elle
est
possible
[32].
9.
Étiologies
des
syndromes
d’activation
lymphohistiocytaire
«
secondaires/réactionnels
»
(tous
âges
confondus)
Rencontrés
à
tous
les
âges
mais
le
plus
souvent
chez
l’adulte,
l’activation
lymphohistiocytaire
y
est
ici
secondaire
à
des
patholo-
gies
infectieuses
(50
%
des
cas),
lymphoïdes
ou
tumorales
malignes
(30
%),
ou
auto-immunes
(5
à
10
%)
[1,22].
Il
n’est
pas
exclu
que
ces
formes
«
secondaires/réactionnelles
»
soient
favorisées
par
une
prédisposition
génétique
de
types
mutations
hypomorphes
[11,28].
9.1.
Hémopathies
et
néoplasies
Un
SALH
peut
compliquer
ou
révéler
une
hémopathie
ou
une
néoplasie.
Il
s’agit,
dans
les
séries
européennes
de
lymphomes
B
diffus
à
grandes
cellules
ou
de
maladies
de
Hodgkin
(en
par-
ticulier
associés
à
EBV
et
au
VIH)
[3,11,18],
et
dans
les
séries
asiatiques
de
lymphomes
non
hodgkinien
T
ou
NK
[19,35].
Le
retard
et
la
difficulté
diagnostique
de
certaines
présentations
d’hémopathies
(lymphomes
endovasculaires)
pourrait
expliquer
leur
association
fréquente
à
un
SALH
[36].
Les
autres
néoplasies
pourvoyeuses
de
SALH
sont
les
tumeurs
solides
(carcinome
gas-
trique
ou
ovarien,
thymome,
sarcome,
cancer
pulmonaire
à
petites
cellules,
tumeurs
germinales)
[1,22].
Les
leucémies
aiguës
ne
sont
qu’exceptionnellement
associées
à
un
SALH
[37].
Les
hémopathies
de
bas
grade
non
transformées
ne
s’accompagnent
habituellement
pas
de
SALH.
9.2.
Infections
Pratiquement
toutes
les
infections
bactériennes,
virales,
fun-
giques
ou
parasitaires
ont
été
décrites
comme
pouvant
évoluer
vers
un
SALH,
celui-ci
pouvant
ainsi
correspondre
à
la
forme
historique
dite
«maligne
»de
toute
infection
(Tableau
3).
Les
infections
virales
liées
virus
du
groupe
herpès
(CMV,
EBV,
VZV,
Tableau
3
Causes
infectieuses
de
syndrome
d’activation
lymphohistiocytaire
[22,38].
Infections
virales
Groupe
Herpès
CMV
+++
VZV
++
EBV
++
HSV
VIH
HHV-6
Autres
virus
Rougeole
+++
Rubéole
Adénovirus
Entérovirus
(echovirus,
coxsackies)
Virus
para-influenzae
Myxovirus
(infuenza
A
virus)
Virus
des
hépatites
(VHA/VHC)
Virus
Amaril
VRS
Parvovirus
B19
Dengue
Infections
bactériennes
Pyogènes
Bacilles
Gram
Négatif
(tous)
Haemophilus
influenzae
Streptococcus
pneumoniae
Staphylocoque
doré
Borrélia
burgdorferi
Salmonella
Tréponèmes
Germes
intracellulaires
Mycoplasme
pneumoniae
Ehrlichia
Babésiose
Coxiella
burnetti
Rickettsioses
Légionella
Chlamydia
psittaci
Brucella
Mycobactéries
Mycobacterium
tuberculosis
Mycobacterium
avium
Infections
parasitaires
Leishmania
donovani/Leishmaniose
viscérale
(Kala-azar)
Plasmodium
Toxoplasmose
Strongyloïdes/anguillulose
disséminée
Infections
fungiques
Candida
Aspergillus
Histoplasmose
Cryptocoque
Pneumocystis
jiroveci
HSV,
HHV-8,
HHV-6)
sont
responsables
de
près
de
la
moitié
des
cas
des
SALH
d’origine
infectieuse
[22,38],
notamment
chez
les
patients
immunodéprimés.
Viennent
ensuite
les
mycobactéries,
les
bactéries
pyogènes
(notamment
salmonelles)
ou
intracellu-
laires
(dont
les
mycoplasmes,
rickettsies,
erlichiae
ou
babesiae),
les
parasites
(notamment
leishmania,
plasmodium
falciparum,
pneu-
mocystis,
primo-infection
toxoplasmique,
etc.),
les
champignons
(notamment
histoplasmose,
cryptococcose)
et
les
autres
virus
(notamment
rougeole,
grippe,
VRS,
etc.)
[38].
9.3.
Maladies
auto-immunes
Deux
maladies
auto-immunes
dont
les
poussées
(ou
l’inauguration
de
la
maladie)
peuvent
se
compliquer
d’un
SALH
sont
le
lupus
et
la
maladie
de
Still
(forme
de
l’adulte
ou
arthrite
juvénile)
[4,20,26,39].
Chez
l’enfant,
la
maladie
de
Kawasaki
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