
■Diagnostic étiologique
Arguments du diagnostic
L’interrogatoire doit rechercher : la prise de médicaments, de
drogues, d’alcool, rechercher des facteurs de risque d’infections
par les virus hépatotropes, les antécédents chirurgicaux, en
particulier une cholécystectomie, des antécédents familiaux et
personnels de maladies du foie, le statut au virus de l’immuno-
déficience humaine (VIH), un séjour outre-mer.
Il est utile de rechercher ensuite les signes cliniques accom-
pagnant l’installation de la cholestase : douleur de type biliaire,
ou pancréatique, altération de l’état général, fièvre.
L’examen clinique peut révéler un signe de Courvoisier, des
signes d’insuffisance hépatocellulaire ou d’hypertension portale,
comme une ascite, une splénomégalie, des angiomes stellaires,
ou une gynécomastie. Certains éléments suggèrent l’étiologie
néoplasique comme un gros foie nodulaire et douloureux, une
vésicule palpable, des adénopathies sus-claviculaires.
Les examens biologiques simples permettent une orientation
étiologique. Une polynucléose oriente plutôt vers une angiocho-
lite, une hépatite alcoolique, une leucopénie vers une hépatite
virale, l’hyperéosinophilie vers une hépatite médicamenteuse. Une
anémie évoque un saignement ou un cancer, une polyglobulie un
syndrome paranéoplasique. Les aminotransférases (AT) très élevées
orientent vers une hépatite (virale, toxique, médicamenteuse). Les
AT élevées peuvent se rencontrer au cours des obstructions
biliaires aiguës. Les AT élevées de façon modérée se rencontrent
dans la cholestase pure et dans toutes les maladies aiguës ou
chroniques du foie. Une hypergammaglobulinémie oriente vers
une hépatopathie chronique, un bloc bc vers une cirrhose.
D’autres marqueurs peuvent être recherchés : tests sérologiques
pour les virus hépatotropes, surcharge ferrique (coefficient de
saturation de la sidérophiline, ferritine), recherche d’autoanticorps
(anticorps antimitochondries, antimuscles lisses, anti-liver/kidney
microsomes
[anti-LKM]), recherche d’un déficit de la céruléoplas-
mine, d’un déficit en $1-antitrypsine.
Explorations morphologiques
Échographie
L’échographie est l’examen morphologique de choix à réaliser
dans le diagnostic étiologique des cholestases. La facilité d’accès,
le caractère non invasif, peu onéreux, non ionisant, l’absence de
contre-indication sont autant de facteurs qui font que cet
examen est le prolongement naturel de l’examen clinique. Il
peut être réalisé au lit du malade. Il permet de savoir s’il s’agit
d’une cholestase extrahépatique par la mise en évidence d’une
dilatation des voies biliaires. La sensibilité de cet examen dans
la détection d’une dilatation des voies biliaires et d’une obstruc-
tion des voies biliaires varie entre 55 et 91 %.
[13, 14]
La
sensibilité augmente lorsque la concentration sérique en
bilirubine s’aggrave et avec la durée prolongée de l’ictère.
[6]
Le
canal hépatique commun, dont le diamètre transversal est
inférieur à 7 mm, doit être considéré comme normal. Un
obstacle est possible lorsqu’il est plus large.
Dans un petit nombre de cas, cet examen peut se solder par
un résultat faussement négatif, soit en raison d’une erreur de
l’échographiste, soit lorsqu’il n’existe pas de véritable dilatation
comme c’est parfois le cas au cours d’une lithiase de la voie
biliaire principale, ou bien en cas d’obstacle récent. D’autres
situations peuvent ne pas entraîner une dilatation des voies
biliaires : une infiltration pariétale diffuse, une cholangite
sclérosante.
Les voies biliaires intrahépatiques normales peuvent être
détectées. Lorsqu’elles sont dilatées, elles deviennent évidentes
et sont parfois plus larges que les branches portales adjacentes
(signes du canon de fusil). Le doppler est un moyen utile pour
différencier les vaisseaux des voies biliaires, car ces dernières ne
génèrent aucun signal enregistrable. Les dilatations intrahépati-
ques sont plus évidentes dans le lobe gauche, même en cas
d’obstruction symétrique car ce secteur est plus facilement
étudié. Quand les voies biliaires intrahépatiques sont dilatées,
l’obstruction biliaire est presque certaine.
Cholangiographie par résonance magnétique
ou bili-IRM
Comme pour toutes les techniques d’IRM, il y a plusieurs
stratégies pour effectuer une bili-IRM. Toutes utilisent, à la base,
une séquence fortement pondérée en T2 dans laquelle les
fluides stationnaires, tels que la bile et les sécrétions pancréati-
ques, ont un hypersignal intense par rapport aux tissus hépati-
que ou pancréatique environnants. Les voies biliaires intra- et
extrahépatiques normales sont visualisées dans plus de 90 % des
cas.
[15]
Les variantes anatomiques sont dépistées avec préci-
sion.
[19]
L’existence et le site d’un obstacle biliaire sont
respectivement déterminés dans 90 à 100 % et 85 à 100 % des
cas.
[20]
Les lésions bénignes ou malignes sont distinguées dans
au moins 80 % des cas.
[4]
Les calculs de la voie biliaire principale sont détectés à partir
de 4 mm de diamètre, mais ne peuvent être différenciés d’un
caillot sanguin, d’une tumeur, d’un sludge, ou de parasites.
[3]
En
cas de dilatation de la voie biliaire principale, la sensibilité pour
dépister une lithiase de la voie biliaire principale de plus de
4 mm est de 90 à 95 % par rapport à la cholangiographie
rétrograde perendoscopique.
[2]
Le rôle de la bili-IRM dans le
diagnostic des cancers des voies biliaires n’est pas encore bien
défini. La valeur prédictive positive de détection d’un cholan-
giocarcinome est de 86 %, la valeur prédictive négative de
98 %.
[7]
Ces résultats sont peut-être surestimés.
[16]
La bili-IRM
permet de détecter et d’évaluer l’extension des obstructions
hilaires et périhilaires.
[23]
En cas de pancréatite aiguë, la bili-
IRM est utile pour évaluer les voies biliaires, la présence d’une
lithiase, l’aspect des canaux pancréatiques, la présence de kystes
pancréatiques.
[18]
Elle permet aussi de distinguer un cancer du
pancréas d’une pancréatite chronique.
[1]
Actuellement, son
principal inconvénient est sa disponibilité réduite.
[21]
Échoendoscopie
Cet examen permet d’évaluer le canal hépatique commun en
positionnant l’extrémité de l’endoscope dans la portion verticale
du duodénum. La portion basse du canal hépatique et
l’ampoule sont alors bien dégagées. Cette méthode apparaît être
la seule capable de permettre une image de l’ampoule. Elle
semble avoir une très bonne sensibilité et spécificité pour le
diagnostic de carcinome de l’ampoule et pour celui de calcul
enclavé dans le canal cholédoque.
[10]
Tomodensitométrie (TDM)
Sa sensibilité et sa valeur prédictive sont comparables à celle
de l’échographie dans le diagnostic d’obstruction. Sa place est
limitée dans l’exploration de première intention des voies
biliaires. En revanche, son intérêt principal réside dans le bilan
d’extension à distance des tumeurs biliopancréatiques.
[8]
La
TDM est plus sensible que l’échographie pour identifier de petits
abcès, des collections extrahépatiques, de l’air et des
calcifications.
Cholangiographie rétrograde perendoscopique
(CPRE)
Une opacification rétrograde des voies biliaires peut être
effectuée lorsqu’un cathétérisme endoscopique de la papille est
possible. Le taux de succès est habituellement supérieur à 90 %.
Cette méthode montre le pôle inférieur de l’obstruction et
permet une sphinctérotomie lorsqu’elle est nécessaire, aussi bien
que la visualisation et des biopsies de l’ampoule de Vater. Si une
lésion obstructive peut être cathétérisée, une endoprothèse peut
être déployée à partir du bas.
Biopsie hépatique (PBH)
Cet examen a une place privilégiée dans l’approche diagnos-
tique et la recherche d’une cholestase chronique. Cet examen
s’attache à rechercher :
• des signes d’obstacle pour éliminer une pathologie sur l’arbre
biliaire extrahépatique ;
• une maladie de l’arbre biliaire intrahépatique en recherchant
des signes caractéristiques d’une cirrhose biliaire primitive à
un stade floride ou une cholangite sclérosante primitive ;
Conduite à tenir devant une cholestase
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3Hépatologie