Journal d'agriculture tropicale et de botanique appliquée Connaissance de la Vanille Th. E. Hibon Citer ce document / Cite this document : Hibon Th. E. Connaissance de la Vanille. In: Journal d'agriculture tropicale et de botanique appliquée, vol. 13, n°8-9, Aoûtseptembre 1966. pp. 353-384; doi : https://doi.org/10.3406/jatba.1966.2892 https://www.persee.fr/doc/jatba_0021-7662_1966_num_13_8_2892 Ressources associées : Vanille Fichier pdf généré le 02/05/2018 ETUDES ex CONNAISSANCE DE DOSSIERS LA VANILLE chargé Anciendechef mission du Service aux FarEtablissements Th. de l'Agriculture E. HIBON français de la de Réunion l'Océanie. et Les Orchidacées, famille à laquelle appartient la vanille (1), sont, sans discussion possible, les moins banales de toutes les plantes cultivées; leurs organes végétatifs et leur mode de vie sont curieux; leurs fleurs remarquables, et leurs graines si petites, sans albumen, et à embryon non différencié, vraiment extraordinaires. Leur nombre est considérable : 20 000 espèces environ, ce qui les place, à cet égard, tout de suite après les Composées. La zone tempérée en compte un certain nombre, mais leur climat d'élection est Sud-tropical. On les rencontre surtout : — dans la région florale indo-africaine : Madagascar, Mascareignes, Ceylan, — dans la région florale de l'Insulinde et du Pacifique : Java, Sumatra, Bornéo et Océanie. 170 espèces ont été relevées à la Réunion et 35, dans les îles de la Société. Le genre Vanilla compte environ 110 espèces. Certaines d'entre elles atteignent sans doute les plus grandes dimensions parmi les Orchidacées. Les trois espèces cultivées : Vanilla fragrans (Salisb.) Ames, du Mexique et par extension de l'Océan Indien; Vanilla tahitensis J. W. Moore, du Pacifique et Vanilla Pompona Schiede, de la Guadeloupe, ont des feuilles qui peuvent atteindre 25 cm de longueur et des mérithalles de parfois 15 cm. Ces lianes à sarments herbacés articulés, montent parfois grâce à leur tuteur, jusqu'à la hauteur de quatre étages. Mais ce n'est (1) Ce mot désignera aussi bien le vanillier cultivé que son fruit, naturel ou préparé. JOURN. d'AGRIC. TROPICALE ET DE BOTANIQUE APPLIQUÉE, T. XIII, N° 8-9, AOUT-SEPTEMBRE 1966 Journal d'Agriculture tropicale 17 — 354 — pas le caractère ornemental des tiges charnues, des feuilles sessiles charnues et des fleurs blanc-verdâtres en épis (fausses grappes) axillaires, qui peuvent rendre compte de l'attachement qu'ont tant d'hommes pour la vanille. Ce sont ses fruits qu'on appelle gousses, alors qu'il s'agit de .capsules; ce sont ses gousses préparées, c'està-dire, la vanille parfumée, brillante et douce à la main qu'il est impossible d'oublier, une fois qu'on l'a connue. Les feuilles, les fleurs, les fruits et certaines manières d'être de la vanille diffèrent de même que l'arôme, selon l'espèce cultivée. Le seul examen des feuilles permet de différencier les espèces. Celles de V. fragrans (1) sont planes ellipsoïdales avec l'extrémité libre, courtement acuminée; celles de V. tahitensis sont moins épaisses, plus étroites, donc plus allongées, à bords presque parallèles, et présentent un gouttière nette; celles de V. Pompona sont très épaisses, brusquement contractées et arrondies à la base, à forme courtement ovale, subcirculaire. Pour une meilleure connaissance de la vanille, il faut évoquer sa biologie, son environnement, sa culture et sa préparation, jusqu'au moment où, couchée en bottes onctueuses et parfumées dans son lit de papier paraffiné, au fond des boîtes en fer blanc neuf et brillant, protégée par des emballages maritimes en bois dur, elle voguera vers les pays d'Europe, d'Amérique du Nord et l'Australie. C'est en traitant ces diverses questions que nous parlerons de ses principaux organes. Quelques mots sont cependant à consacrer tout d'abord à ses racines. La vanille est une plante de culture jardinée. Elle se multiplie depuis toujours par boutures, sauf en laboratoire et cela depuis quelques années seulement. Ses racines ne se développent pas simplement dans le sol au niveau des nœuds enterrés. Toute la liane, à quelque niveau que ce soit, émet à l'opposé de la feuille une, deux ou trois « vrilles » blanc-verdâtres, qui se collent au tuteur, s'aplatissent un peu à son contact et progressent ainsi vers le sol, dans lequel elles pénètrent superficiellement, à 10 cm au plus. Elles se ramifient alors, se dirigeant cette fois, non plus suivant le tropisme normal ni même obliquement, mais presque horizontalement, comme pour prendre possession de tout le sol. En coupe, les « vrilles » présentent les faisceaux du liber alternant avec les faisceaux du bois et la pointe des faisceaux ligneux est dirigée vers l'extérieur. Il s'agit donc bien de racines. Outre (1) Ce sont là des caractéristiques moyennes. Des variations (que reflètent les feuilles), existent, correspondant sans doute à des clones, ceux-ci étant mieux connus au Pacifique qu'ailleurs. La vanille du Pacifique est, à cet égard, beaucoup plus vicariante que V. fragrans. qu'elles fixent la liane au tuteur comme de véritables vrilles, elles sont capables, grâce à la présence d'une assise périphérique de cellules spongieuses extérieurement, de retenir la vapeur d'eau utile. Cette assise s'appelle le voile. Les racines de la vanille prennent possession de la matière organique où qu'elle se trouve : trous et fissures des arbres, fourche des branches, sol. Il est très important de noter qu'outre ce mode de vie, la vanille, comme du reste nombre d'autres orchidées, dispose d'un mode de nutrition spécial grâce à la présence d'un champignon symbiote. Si le support vivant de la liane, c'est-à-dire le tuteur, lui offre des ressources suffisantes, elle peut vivre en epiphyte. De toute manière, le sol en tant que source d'éléments minéraux n'est pas indispensable à la vanille. Au contraire, l'humus du sol lui est tellement nécessaire qu'on peut se demander s'il ne sert pas à suppléer une photo-synthèse très pauvre. Ce serait donc une plante un peu saprophyte Comme le sont d'ailleurs d'autres espèces de genres voisins des Vanilla, de la même tribu des Néottiées. Il existe même une espèce aphylle dans le genre Vanilla. Cette façon d'être des racines de la vanille nous conduit à définir ses exigences, quant au climat, au sol, à l'arbre d'abri (1) et au tuteur et à expliquer à cette occasion certaines pratiques rendues nécessaires du fait des maladies. Les climats. La vanille (V. fragrans) nous vient du Mexique, où elle pousse au bord des ruisseaux et rivières atlantiques, la sécheresse étant là sa plus grande ennemie. C'est donc, suivant l'expression des botanistes, une plante rivulaire. Elle est cultivée dans ce pays à une altitude inférieure ou égale à 150 m, dans les régions ouest et sud du golfe de Campêche sur des collines, que sept « rios » chargent d'une atmosphère humide. C'est à l'Ile Bourbon, aujourd'hui la Réunion, que la vanille a été mis pour la première fois en culture hors de son berceau. C'était vers 1822, trois ans après qu'on y eut introduit V. pompona qui venait de Cayenne. En raison de ce que l'on savait alors en fait de météorologie terrestre (2), les premières plantations eurent lieu dans les vallées (1) Dans sa fonction d'ombrage, l'arbre d'abri intéresse toutes les parties vertes, donc principalement la feuille; mais si l'on considère le vent et la pluie, il concerne les racines. (2) II faut souligner ici qu'à cette époque, malgré la présence fréquente à bord des navires d'un jardinier botaniste chargé de recueillir des plantes utiles en vue de leur naturalisation, la météorologie intéressait la navigation et fort peu l'agriculture. — 356 — fraîches des lieux habités. Dix ans plus tard, alors que l'on ne savait pas encore pratiquer la fécondation, chacun possédait quelques dizaines de lianes, voire même quelques pieds, à l'ombre tranquille de la collection d'arbres rares du verger. Après la mise en pratique de la fécondation (1841), les inconvénients du morcellement des cultures, soit dans les parcs ou jardins des « habitations », soit sur les pentes déclives des galeries forestières ne tardèrent pas à se manifester. On regroupa donc les vanilles : a) dans la zone où les pluies atteignent environ 3 000 mm sur au moins 175 jours, répartis sur les douze mois de l'année; b) à des altitudes où la température reste favorable (de 14° à 28° C. environ) soit à moins de 200 m. Les pays, où se cultive la vanille, présentent à peu près tous des caractéristiques de pluviosité et de température semblables, avec cependant quelques nuances. Ces pays sont : 1° dans l'hémisphère nord, au Sud du tropique du Cancer sur le versant atlantique : le Mexique (frange littorale occidentale et méridionale du golfe de Campêche), Porto-Rico et la Guadeloupe, c'est-à-dire les abords du 20e parallèle Nord; 2° dans l'hémisphère sud, au Nord du tropique du Capricorne : a) dans l'Océan Indien, la Réunion, Madagascar et les Comores, c'est-à-dire, aux environs du 20e parallèle, une zone d'îles plus ou moins grandes, qui, vers le Nord, atteint par exception le 11° sud à la Grande Comore. b) dans l'Océan Pacifique, les îles de la Société depuis Bora-Bora au Nord-Ouest (16° 30' sud environ) jusqu'à Tahiti et enfin plus au Sud (22° 50' environ), l'île Rurutu du groupe des Australes, c'est-à-dire encore les parages du 21e parallèle Sud. On peut donc admettre que la vanille se plaît particulièrement aux approches du 20e parallèle (Nord ou Sud) au pied de montagnes élevées émergeant du sein des océans. Mais il faut, tout de suite et en même temps, écrire le maître mot, le mot clef de la vocation vanillière des lieux et de leur visage, à savoir Valizé. C'est l'alizé qui exprime le mieux, parce qu'il les crée, les traits véritables et communs du visage de ces isthmes, îles et archipels à vanille, dont on dit qu'ils sont « du vent » ou « sous le vent ». Courant aérien humide de surface, l'alizé souffle de l'Est. Du Nord-Est vers le Sud-Ouest dans l'hémisphère Nord et du SudEst vers le Nord-Ouest dans l'autre. Ainsi suggère-t-il déjà la position orientale d'élection des vanillières dans ces pays. — 357 — L'ampleur, la durée et la constance de la direction de l'alizé justifient la vocation vanillière plus ou moins affirmée des pays qu'il visite, avec d'ailleurs les nuances qu'introduisent leur position géographique et leur relief. En effet, il tempère, abrège, et même annule, suivant le cas, la saison sèche, malgré son humidité. Il souffle le jour, faiblit parfois la nuit et détermine sur le relief ce qu'on appelle des pluies orographiques. Essayons d'examiner d'un peu plus près l'influence de l'alizé en prenant comme exemples la Réunion et la Polynésie française. LA RÉUNION A la Réunion, l'alizé souffle pendant plus de 200 jours par an, il domine la climatologie, créant deux régions : — la partie du Vent, pluvieuse, — la partie sous-le-Vent, située à l'Ouest et au Nord, plus sèche. Frappant de toute son épaisseur (environ 3 000 m), de juin à novembre et par le Sud-Est, l'énorme masse montagneuse compacte du centre de l'île (point culminant : 3 069 m), l'alizé procure à la partie située à l'Est du méridien 55° 40' Est, soit en gros, l'Est de la ligne Saint-André-Vincendo, dans la zone côtière cultivable une pluviosité supérieure à 3 000 mm pendant une moyenne de 175/220 jours par an. Cependant qu'à l'abri, l'autre région connaît une période sèche de 6 à 8 mois. Lorsqu'on considère la distribution moyenne des pluies, mensuelle ou annuelle à la Réunion, on est frappé, surtout pour les isohyètes de la période dite sèche, de la permanence de cette force dispensatrice d'humidité. Celle-ci frappe l'île au Sud-Est, au niveau du volcan actif de la Fournaise, en direction du Nord-Ouest, le relief la rejette un peu vers le Nord/Nord-Est, comme pour mieux féconder précisément la terre des vanilles. En réalité, les courants alizés voient parfois leur direction aller de l'Est à l'Ouest au cours de la période qui va de décembre/ janvier à avril/mai. Ces changements de direction sont plus ou moins instables, plus ou moins accusés, et surtout plus ou moins humides, donc plus ou moins actifs. Ils dépendent à la fois et dans le même temps : a) de l'existence de hautes pressions dans les parages des îles Saint-Paul et Amsterdam; b) de la non-formation de situations dépressives au Sud de Madagascar. — 358 — Ces alizés entraînent certaines instabilités climatiques en liaison avec les reliefs et, sur la partie du Vent, des averses parfois accompagnées de rafales. Pour donner une idée plus précise des différences entre « le Vent » et « sous le Vent », voici la moyenne des pluies et du nombre de jours de pluie pour deux stations diamétralement opposées de la Réunion (1) et à seulement 60 km l'une de l'autre à vol d'oiseau : — au S.-E., Le Tremblet (région du vent), altitude : 120 m, latitude : 21° 17' S. Longitude : 55° 48' E. — Au N.-O., La Possession (région sous le vent), altitude : 10 m. Latitude : 20° 55' S. Longitude : 55° 20' E. Précipitations en mm. Le Tremblet jours Mois mm J F M A M J J A S O N D 541,0 456,8 808,6 406,6 482,2 284,3 280,2 235,1 271,2 131,8 246,2 321,1 15 14 18 14 16 15 14 14 12 10 10 10 La Possession mm jours 193,3 112,3 205 68,3 22 32,2 11,9 8,3 11,8 17,1 64 60,2 7 8 8 3 2 3 2 3 3 2 3 5 soit au total : 4 465 mm en 162 jours au Vent 806 mm en 48 jours sous le Vent. On comprend les très grandes différences qualitatives et quantitatives entre les végétations des deux régions. LES ILES DU PACIFIQUE Les îles de la Société, noyau de la Polynésie française, forment deux groupes, si l'on omet cinq plus petits « motus » (îles) bas sur l'eau et sans intérêt pour la vanille : — les îles du Vent : Tahiti et Moorea; les îles sous le Vent : Hùabine, Raiatea, Tahaa et Bora-Bora. (1) Service Météorologique de la Réunion — Résumé du temps en 1961 à la Réunion. — 359 — Ces îles sont disposées suivant une ligne à direction générale SE-NW, donc dans le sens général de l'alizé. En partant du SE, nous avons des massifs montagneux qui culminent : à Tahiti, à 1 323 et à 2 237 m; à Moorea, à 1 212 m; à Hùahine, à 680 m; à Raiatea et Tahaa (enfermées dans le même lagon), à 1 033 m et à Bora-Bora seulement à 725 m. Les masses montagneuses sont surtout étendues dans les îles du Vent au Sud-Est et leur altitude comme leur importance diminue d'une façon notable à partir de Tahiti. Comme l'alizé ne souffle guère dans le Pacifique Sud que quatre mois (mai/juin à août/septembre), en raison peut-être de l'écran plus ou moins important que les montagnes lui opposent, il y a, lorsqu'on s'éloigne vers le Nord-Ouest, comme un assèchement partiel des versants exposés au vent. Ainsi, et à cause aussi des quelques 150/175 milles qui séparent les îles du groupe du Vent de la dernière des îles sousle-Vent, Bora-Bora, on a des différences très sensibles de climat. Là 2 à 5 m de pluies suivant les lieux, ici, ciel très souvent clair. On comprend alors que la vanille réussisse moins bien dans l'île au lagon merveilleux, au bord duquel a voulu reposer Alain Gerbault (1). On voit donc que les lieux où la culture de la vanille est possible doivent réaliser des conditions climatiques bien précises; mais partout le jardinage demeure obligatoire, surtout lorsque les pluies du mois le plus sec de l'année ne franchissent pas le seuil utile des 100 mm en 10 jours. Dans la zone Est et Sud-Est de la Réunion qui lui convient, voici, en degrés centigrades, l'ébauche du tableau thermique : Moyennes des Minima : Maxima : Janvier 22° 28-30° Juillet 14-15° 24° Les quatre types de culture de la vanille à La Réunion. La vanille connaît quatre types de culture : 1) en bordure immédiate de l'Océan Indien, la culture sous couvert naturel dans la forêt sombre et moite qui va de Sainte-Rose à Saint-Philippe par l'extrême Sud-Est, avec 4 000 mm de pluie pendant plus de 200 jours par an; (1) A Vaitape, île Bora-Bora. — 360 — 2) la culture sur les bords et dans quelques encaissements de certaines grandes vallées où le manteau forestier primitif est entamé et dans lesquelles le soleil brille à peine quelques heures par jour (ce tye est peu représenté) ; 3) la culture sur les pentes extérieures exposées au soleil levant et au vent du large toujours humide, sous couvert de Casuarina equisetifolia auquel certaines essences récemment multipliées {Gliricidia) commencent à se substituer; 4) enfin, une culture spéciale en plaine argilo-siliceuse dans des champs de canne à sucre où l'on a donné une place à la vanille en arrachant un ou deux rangs de canne sur trois. C'est donc une culture intercalaire permanente, dans un lieu où la hauteur des pluies atteint 3 m en 175 jours par an. Premier type de culture. A très faible distance du rivage, derrière les rochers noirs, couverts d'écume, le premier type de culture n'utilise que des données naturelles, savoir : — sol de lave basaltique, parfois encore squelettique, que des cassures profondes et nombreuses assainissent parfaitement; — végétation de lichens, mousses et fougères, à la fois au niveau du sol et sur les arbres, lesquels, Filaos (Casuarina) et Vacoas (Pandanus utilis), colonisent les crevasses des laves et végètent normalement (1). L'humidité générale entretient ici une végétation qu'il est parfois difficile de discipliner. Mais la matière végétale y est abondante et les racines de la vanille trouvent une bonne nourriture humide dans les creux établis au sein de la masse de lave, au contact des tuteurs naturels, Pandanus notamment. C'est du reste l'un des paysages les plus attachants du monde. La brise de mer chante mélancoliquement dans les filaos qui, les jours clairs, bercent un peu de ciel entre leurs rameaux grêles. Mais le relief est âpre et la pluie, incessante, tombe en fines farines, en poignées de grains ou en nappes. Dans ces conditions le mildiou n'est pas exceptionnel et la cueillette des fruits, (un, deux ou trois au maximum par épi et par cueillette) exige un courage et des qualités visuelles peu communs. On y récolte une vanille longue, fine, qui « se fait » assez rapidement (on dit qu'une vanille « se fait », lorsque, cueillie en état (1) D'autres essences forestières sont relevées qui intéressent parfois la vanille, comme le Mapou (Agauria salicifolia) de la famille des Ericacées. — 361 — d'être préparée, c'est-à-dire technologiquement mûre, elle passe par tous les stades de la préparation pour devenir la vanille du commerce). Second type de culture. Le second type de culture est pratiqué dans des vallées encaissées, pourvues de sols très bons. Les champs sont très morcelés et peuvent durer longtemps. On y récolte des gousses bien nourries, sans défaut d'ordre cicatriciel et d'un format supérieur. Troisième type de culture. Le troisième type est pratiqué sur les pentes exposées aux brises marines en quelques lieux où une rare végétation naturelle subsistait ainsi que sur d'anciens champs de canne ou de cultures vivrieres depuis quelque temps abandonnées faute de routes praticables. La récolte de cannes est en effet pondéreuse ; celle des vanilles légère. Ici on plante arbres d'abri et tuteurs. De chaque côté de ceux-ci, on a dressé des alignements de pierres. Dans les plates-bandes ainsi constituées, les éléments propres à faire de la matière humique sont apportés, il s'agit d'herbe arrachée à la main. Toutes les herbes demeurant vivantes près des pieds de vanille, ne sont d'ailleurs pas à détruire, celles en particulier qui peuvent maintenir une atmosphère fraîche sont conservées, surtout lorsque le terrain présente des paliers relativement plats où le sol nu a tendance à s'échauffer. Le sol demeure frais sans excès, à preuve les fougères qu'on y rencontre. Les arbres tamisent la lumière comme les vieilles voiles, le vent. On taille les tuteurs à 2 m environ. La vanille qu'on récolte en ces lieux, a du corps et du parfum mais l'épicarpe est parfois endommagé par les nombreux escargots et par les bords coupants des feuilles. Dans ces cas, on dit que la vanille est « escargotée » ou « raguée » (1). Dans les cultures de ce type, en raison même des alignements et des soins, les fusarioses et le vent déciment parfois les lianes. Quatrième type de culture. Le quatrième et dernier type a lieu en plaine, il est spécial à la commune de Saint-André. Ici l'arc-en-ciel n'est plus le prélude (1) La faune malacologique des Iles de la Société est pauvre. Les quelques Partula de Tahiti et de Moorea ne touchent pas aux vanilles. Dans l'Océan Indien, au contraire, les Achatina causent de notables dégâts aux gousses. — 362 — à la symphonie des pluies. Cette région se place au point de vue des précipitations atmosphériques au niveau le plus bas, elle ne jouit guère de précipitations occultes, le pays ayant peu de galeries forestières. En compensation, grâce aux cannes à sucre, la vanille intercalaire reçoit un mulch abondant et riche au moment de leur épaillage. Aux époques de la cueillette, un soleil généreux peut causer des brûlures aux fruits, surtout lorsqu'on utilise comme tuteur le pignon d'Inde (Jatropha Curcas) qui se dépouille complètement. L'épicarpe des gousses est alors plus épais, il oblige d'user d'eau plus chaude pour la première opération de la préparation qui est l'échaudage, mais ces fruits sont plus gros et riches en vanilline et en « huile » . Dans le cas de ces vanilles de plaine, le travail est assez simple et réduit au minimum. Types de culture en d'autres pays. On retrouve deux de ces quatre types de culture à Madagascar, aux Comores, ainsi qu'à Rurutu (île d'Océanie) où la vanille cultivée est par exception la même qu'à Bourbon, c'est-à-dire Vanilla fragrans. Aux îles de la Société : Tahiti, Moorea, Raiatea et Tahaa, un peu Huahine et Bora-Bora, la vanillle est différente : V. tahitensis. Les types communs de culture sont au nombre de deux : celui des vallées plus ou moins encaissées et celui des pentes extérieures exposées à l'océan. Cependant à Madagascar, dans l'Ankaïbé, et aux Comores, on a commencé à cultiver la vanille à 400 et à 500 m d'altitude sans abri, cette fois (1). Dans les îles du Pacifique, comme à la Réunion, c'est la vanille des pentes extérieures qui partout fournit la production principale. En Polynésie française, la vanille se cultive au-dessus de 80 m car tout l'anneau littoral jusqu'à cette altitude, est réservé au cocotier. La profondeur des vanillières est faible parce que la route longe la côte et que les esprits (les tùpa-paù) et les pentes très raides interdisent la culture vers l'intérieur. En outre, la côte est rarement accore aux îles de la Société, elle est dans la plupart des cas, protégée par le récif de corail qui crée le tranquille lagon aux « verts » éblouissants, mais qui ne laisse guère passer le grand souffle aérateur du large. D'où des conditions moins favorables aux vanilles. (1) En général, l'ombrage doit être d'autant plus dense que l'altitude est basse. L'ombrage ne doit pas « faire ombrage », comme on le verra plus loin. — 363 — On retrouve dans le Pacifique, outre les arbres abri-tuteur Casuarina et Pandanus très ubiquistes, de nombreux tuteurs n'ayant que cette fonction, dont un petit Tecoma, un Bauhinia et trop souvent encore l'épais, le compact Hibiscus tiliaceus. Nossi-Bé n'appartient pas aux Comores, on y cultive encore un peu la vanille. Cette île mérite une mention spéciale. Nossi-Bé qui est la plus « polynésienne » des îles de l'Océan Indien, a été le berceau d'une excellente vanille. Des ouvriers de la première heure {1870) y ont longtemps préparé un produit hors de pair. Il faudrait parler plus longtemps de toutes ces îles auxquelles il faudrait ajouter Porto-Rico, Java, et la mouilleuse Guadeloupe qui produit Vanilla Pompona, dire la beauté de leurs montagnes, la splendeur des couchers de soleil, les étonnants jardins toute l'année en fleurs, les jeux de la lumière dans les lagons aux eaux limpides, l'accueillante gentillesse des habitants, ces gens qui vont pieds nus par des « chemins couleur de chair de mangue », soufflant dans l'antsiva ou le pu... Mais il reste à parler du plus terrible des éléments du climat, heureusement exceptionnel, le cyclone. Les Cyclones. Les cyclones n'évitent que la Polynésie (1). L'Océan Indien et la mer des Caraïbes les subissent au rythme d'un tous les 7 à 10 ans (2). Ils passent au cours de la végétation, de la floraison, et de la fructification des vanilles. On imagine, devant la fragilité des lianes, les dégâts que peuvent causer des vents dont les pointes de vitesse débordent parfois 200 km à l'heure. On imagine les dévastations que cause, après un chute de pluie de 400 à 800 mm en 24 heures, un ouragan ordinaire où le vent souffle à 100 km à l'heure. « Personne n'est maître du vent, pour le retenir », dit l'Ecclésiaste. Au lendemain de ces cataclysmes, il faut reprendre le chemin de la vanillière. Il faut de son mieux, recoller la vaisselle et parfois emprunter. Les cyclones ont pour conséquence sensible, la contraction des récoltes pendant quelques années. Le cours des vanilles connaît donc des mouvements périodiques de hausse qui s'atténuent par la suite. Ce qui a donné le sentiment d'une spéculation sur les vanilles. En réalité, pour une plante de culture jardinée, dont (1) Le vent y a atteint une seule fois, en 1941, 95 km par heure. C'est tout à fait exceptionnel. (2) En moyenne il y a six cyclones par an sur l'Océan Indien du Sud-Ouest. Grâce aux données accumulées depuis 1848 sur les cyclones de cette zone, le calcul des probabilités de risques paraît aujourd'hui possible. — 364 — l'aire culturale, chose rare, ne déborde pas l'aire de distribution géographique des espèces du même genre, et qui par ailleurs utilise et utilisera toujours une main-d'œuvre nombreuse, les hausses de prix sont inéluctables. Considérations complémentaires sur les sols. Après ce qu'on en a dit incidemment, il sera à peine utile de rappeler les qualités d'un sol à vanille : — humus plutôt que terre vraie et humus jeune et aéré. Humus qui pourrait être dit « à l'état naissant » et que les racines mêmes de la vanille contribuent à créer, l'humidité aidant, à partir de matières diverses. Humus très légèrement acide et peut-être un peu fertilisé par les fins débris des laves basaltiques désagrégées par les pluies, humus qui sans doute s'imprègne aussi parfois d'un peu du sel des embruns, notamment lors des grands vents cycloniques; — très grande perméabilité aux racines et fraîcheur plutôt qu'humidité (c'est la raison du choix des pentes douces pour créer les vanillières) ; — sol très sain, non tassé et propre, le drainage et la propreté étant maintenus corrects par le travail à la main à cause des racines superficielles; Ce sol, c'est essentiellement de la matière organique. C'est pourquoi l'on a estimé, non sans raison, que les facultés de photosynthèse de la vanille, pourtant verte des pieds à la tête (partie aérienne des racines, tiges et feuilles), étaient faibles et que son pigment vert pouvait ne pas tellement différer de celui du gui parasite. Ce sol qu'il faut donc créer à l'image du terreau qu'on rencontre à la fourche des rameaux, il faut l'entretenir et reconstituer par du much, notamment après les tornades. Comme cocotier et vanillier sont, ou peuvent être, presque partout commensaux, c'est naturellement au cocotier qu'on demandera le mulch. La bourre de coco séparée de la coque est en effet excellent pour cela. Il en est de même de toutes les pailles : feuilles sèches de cannes à sucre, feuilles et tiges des graminées fauchées. Dans ce sol, les fusarioses sont à l'affût (1). D'où l'intérêt de solutions de continuité, autrement dit des surfaces morcelées. Les fusarioses sont très graves mais il existe parfois dans les vanillières infectées, des emplacements privilégiés où les lianes restent saines. Toutes les fois donc que la maladie sévit sérieusement, la longévité des plantations est réduite et la qualité des fruits s'atté(1) Déterminant une pourriture molle des racines souterraines et une nécrose sèche des parties aériennes. — 365 — nue. Et c'est là encore une raison de la non possibilité de démocratiser la vanille. Il faut rappeler ici que le cacao au miel parfumé à la vanille était du temps des Aztèques, un produit de luxe que seuls les dignitaires pouvaient consommer. Rien n'a donc changé. Lorsqu'on réfléchit aux besoins en matière humique des vanilles et à l'essartage minutieux réalisé pour la création d'une vanillière en plantation régulière, on est amené à se demander si, tant que les fusarioses n'auront pas été vaincues, il ne serait pas préférable d'utiliser après aménagement les bois et forêts naturels sans trop abattre ni dessoucher. Et cela d'autant plus que l'on aura affaire à de fortes pentes, sur lesquelles on devra planter plus tard des lignes antiérosives de citronnelle. Arbres d'abri et tuteurs. Et maintenant l'arbre d'abri et le tuteur qu'il faut traiter ensemble, car la même plante remplit quelquefois les deux rôles à la fois, tels Casuarina et Gliricidia maculata. L'arbre d'abri (ou d'ombrage, mais le mot abri est préférable) doit essentiellement atténuer le soleil. Ceci peut être obtenu par la création de taches d'ombre relative et de plages de lumière juxtaposées que le cours de la journée déplace. Mais on préfère, avec raison, essayer d'obtenir, par quelques couches de feuillages peu épaisses, placées à différents niveaux, un écran léger et sans fissures laissant aux vanilles une lumière adoucie. Les frondaisons fines et élégantes du filao et de Gliricidia sont très propres à créer cette luminosité douce et égale sur toute la vanillière. Dans tous les cas, l'écran doit se situer assez haut au-dessus des vanilles pour permettre à l'air de circuler le plus librement possible et il doit être léger pour que l'herbe puisse pousser. La plante de couverture est en général une graminée dont les fines racines sont anti-érosives. Tel est le cas en Polynésie française où l'on apprécie un Oplismenus. En même temps qu'ils filtrent la lumière et qu'ils adoucissent l'action du vent (notamment sur les pentes), les feuillages des arbres d'abri tempèrent le choc de l'eau des pluies et facilitent son évacuation par les branches et le tronc, ce qui allège ainsi la tâche des tuteurs et, partant, profite à la vanille. La formation et surtout la taille des arbres d'abri sont difficiles, elles exigent un sens averti de la végétation et des saisons tropicales, une connaissance profonde de la biologie de la vanille, une grande agilité et une scrupuleuse conscience professionnelle. Le tuteur, lui, doit d'abord s'accorder à la liane. Il y a, entre certains tuteurs (une Lau racée : Litsea et une Capparidacée : — 366 — Moringa), et la vanille de secrètes correspondances difficiles à expliquer. L'écorce du tuteur doit ensuite se laisser pénétrer par les racines-suçoirs qui s'appliquent contre son tronc pour gagner le sol. Il est donc meilleur que le tuteur ne perde pas son écorce et que celle-ci soit relativement tendre. C'est le cas des Pandanus et du pignon d'Inde (Jatropha Curcas). Il faut aussi que son enracinement ne concurrence pas trop celui de la vanille, dont les racines sont forcément très voisines. C'est le cas de Pandanus utilis dont les grosses racines adventives, malgré les apparences, ne concurrencent guère celles très superficielles de la liane. Il faut encore que le tuteur soit sain et capable de supporter la taille, celle-ci étant favorable à la floraison et à la maturation des fruits de la vanille. On étête toujours trop court. Bien entendu Casuarina, arbre d'abri et Pandanus, ne s'étêtent pas. Le tuteur doit supporter une masse assez lourde de lianes, il faut donc qu'il soit robuste. Mais à étêter trop court, c'est-à-dire, trop bas, on risque à chaque descente des lianes, d'avoir à laisser celles-ci pendant longtemps au contact du sol, source même des fusarioses (1). Faute donc de mesurer 1,80 m, au moins, le « vanillard » devrait toujours travailler au nettoyage et à la descente des lianes en utilisant un escabeau, toutes les fois au moins que le permettent les pentes. Ce nettoyage comprend l'incinération par beau temps des parties âgées de la liane. Le tuteur doit lui même pouvoir profiter au maximum des pluies d'été pour fournir lors de sa taille une matière humique suffisamment abondante. Cette taille doit ainsi être progressive; on doit revenir 3 ou 4 fois sur un tuteur. C'est le cas d'une légumineuse aux belles grappes de fleurs roses, la Madré del Cacao (Gliricidia) . En début de plantation, lorsque les boutures des jeunes Gliricidia sont suffisamment reprises, on les rabat à 2 m. Sur huit individus, sept demeureront ainsi, jouant le seul rôle de tuteur, le huitième au contraire devra jouer en outre le rôle d'abri. Pour cela, on lui conservera deux ou trois branches destinées à fournir le parasol désiré. Aujourd'hui la fortune de cette Madré del Cacao s'affirme peu à peu par la mise en place directe des boutures ou par la création de parcs à bois à la Réunion, à Madagascar, aux Comores et en Polynésie française. Grâce à quoi on pourra remplacer certains tuteurs traditionnels présentant des défauts, ou hôtes de parasites graves {Hibiscus tiliaceus et Jatropha Curcas). (1) Cette opération culturale doit ainsi se réaliser avant tout élagage du tuteur. — 367 — Avant de passer à la fleur il reste à examiner quelques conséquences du comportement des racines sur l'orientation des recherches et sur les pratiques cullurales. Recherche d'abord : la génétique de la vanille a pour buts majeurs : 1°) L'arôme (la vanille c'est essentiellement 2°) La résistance à la fusariose. l'arôme). Après seulement viennent les buts secondaires : l'indéhiscence des fruits, la rusticité et la résistance à la sécheresse. C'est à l'Ivoloïna, au laboratoire du vanillier, à 4 km de Tamatave (Madagascar), que sont conduites les recherches. Passons sur les différentes phases de la fabrication des plantes à partir des graines. Il faut savoir que sur les dix ou douze ans nécessaires à l'obtention de lignées éprouvées, 48 mois de culture en serre sont réservés aux tests de sensibilité à la fusariose (1). En outre des vérifications doivent être faites par la suite en plein champ pendant quelques années. Des recherches ont également lieu à Mayaguez (Porto-Rico). Pratique de la culture. 1° La descente des lianes ou bouclage (ce terme évoque mieux l'opération) tend à placer l'ensemble des lianes formant le plant de vanille à portée de la main du « vanillard ». Il ne s'agit ni plus ni moins que d'arcure en vert, à 180°, utilisant au mieux les fourches résultant des tailles anuelles du tuteur. Cette opération a aussi pour fin de rapprocher les racines adventives du sol où elles s'implanteront. Il arrive d'ailleurs que le bouclage autour des fourches du tuteur soit une descente de liane qui se termine par un marcottage. C'est le cas en Polynésie au début d'une plantation et parfois ailleurs après un cyclone. Il s'agit alors de regarnir le tuteur jusqu'au degré d'encombrement jugé suffisant. Cette constitution, ou parfois reconstitution du plant de vanille lui donne une vigueur plus grande que, si on avait planté de nouvelles boutures au pied du même tuteur. La descente des lianes se fait avec précaution, les lianes étant cassantes. On les attache au tuteur par un lien lâche. On s'arrange pour replacer les feuilles de la partie devenue descendante de sorte que la face ventrale du limbe regarde vers l'extérieur, cela, pour faciliter le retournement des feuilles que la plante (1) En 1963, Delassus a indiqué l'obtention à Madagascar de 10 000 plants différents issus d'autofécondation de V. fragrans et 20 000 plants hybrides issus de dix croisements. — 368 — effectue d'elle-même en quelques semaines. Les yeux se développent alors soit en bourgeons végétatifs, soit en boutons à fleurs. Il faut ajouter enfin que, compte tenu de la longueur possible du fruit, on ne doit pas placer les yeux ramenés par le bouclage à un niveau exagérément bas, 30 cm du sol au moins car ces yeux sont susceptibles d'évoluer en boutons floraux. La raison en est la suivante : il faut que les fruits issus des fleurs les plus basses puissent se développer sans toucher le sol; il faut qu'ils puissent prendre librement leur position pendante verticale de chaque côté de l'axe de l'épi (axe théoriquement horizontal mais que le poids des gousses infléchit un peu). Lorsque cette précaution n'est pas prise les gousses sont malformées, « escargotées », «raguées»; elles peuvent se briser au cours de la cueillette et du transport. A l'occasion de l'opération de descente, on choisit et on prélève les boutures à planter ce qui est proprement tailler. La descente des lianes se présente donc comme une opération horticole (arcure en vert) et comme une opération de taille qui ne doit pas perdre de vue le couple parties souterraines et parties aériennes et son équilibre. 2° Pour prolonger la vie des pieds malades on peut, après avoir éliminé les parties atteintes ou suspectes de fusariose, constituer, par une première taille du tuteur, un berceau de tiges de 0,70 m d'épaisseur et, sur ce berceau, installer un panier rempli de matières organiques qu'on maintient fraîches et dans lesquelles on enfouit les racines adventives. Celles-ci n'atteignent plus ainsi le sol infecté. La suggestion est d'un eminent phytopathologiste, le professeur Roger. Sans doute est-elle compliquée et peut-être alors devrait-on réduire la récolte par une fécondation mesurée de 3 à 4 fleurs par balai (le balai c'est l'épi de fleurs ou de fruits). Mais on doit toujours se souvenir qu'il s'agit de jardinage. Ce procédé rappelle un peu la vieille coutume aztèque des petits jardins sur radeaux d'osier flottant sur les canaux. On y rapportait la matière organique puisée au fond des lagunes. Le vieux Mexique pratiquait déjà le conseil de l'haïkaï : « Creuse ce jardin comme une tasse où tu viendras goûter l'élixir... » La fleur et sa fécondation. Le second organe de la vanille qui en fait une plante remarquable, est sa fleur avec son ovaire infère qui en constitue le faux pédoncule, cette étrange fleur qui s'ouvre la nuit, et ne dure que quelques heures. — 369 — La floraison est sous la dépendance de la latitude et de la lumière. Mais surtout de la sécheresse. Dans les pays tropicaux la sécheresse tient la place du froid. Elle déclanche la floraison qui apparaît à la saison chaude et pluvieuse, notamment pour V. fragrans. Dans les cultures d'altitude qui sont l'exception, il y a une dénivellation thermique notable et c'est le couple (température, humidité) qui est déterminant. Dans les conditions naturelles de culture la floraison dure 3 à 4 mois. Cependant chez V. tahitensis on rencontre des floraisons échelonnées sur 180 jours. Comme celle des autres orchidées, la fleur du vanillier est zygomorphe et certain dispositif particulier de l'androcée et du gynécée la fait hercogame. Zygomorphe est une fleur non régulière dans laquelle le périanthe ou l'une de ses composantes est symétrique par rapport à un plan antéro-postérieur. Types : la pensée et la balsamine. Comme chez les autres orchidées, dans la vanille, c'est la corolle qui est zygomorphe du fait du 3e pétale, pétale inférieur nommé labelle, plus large et coloré et qui embrasse les parties mâle et femelle, soudées sur une partie appelée gynostème, parties qui s'individualisent ensuite. On explique qu'hercogame signifie obstacle, barrière au mariage. C'est vrai mais trop élémentaire. On retrouve la première partie du mot dans hercotectonique qui est l'art de bâtir des enceintes, des retranchements. Et c'est bien un retranchement que les botanistes ont voulu dire. Le retranchement c'est la disposition prise pour couvrir une position et arrêter les assaillants. Ici la position couverte c'est la partie fonctionnelle du gynécée c'est-à-dire deux papilles stigmatiques et les assaillants ce sont les deux pollinies libres et granuleuses, recouvertes par un capuchon, de l'unique anthère fertile. Quant au retranchement c'est proprement la pièce florale intermédiaire en forme de languette épaisse appelée rostellum, qui est interposée entre les pollinies supérieures et les stigmates inférieurs. Le rostellum ne constitue pas, comme on l'a cru à tort, une troisième papille stigmatique, il est donc l'obstacle majeur à l'autofécondation, puisqu'il s'interpose entre les pollinies supérieures et les stigmates inférieurs. Pour effectuer à la main la pollinisation, c'est-à-dire l'autofécondation, on procède de la manière suivante : on abaisse et Journal d'Agriculture tropicale 16 — 370 — déchire tout d'abord le labelle qui entoure le gynostème, puis on relève le rostellum, en sorte de pouvoir appliquer et mettre en contact pollinies et stigmates. Il y a chez certaines fleurs un rostellum mal constitué, plus court qui permet des fécondations fortuites. Mais ces fleurs sont rares. Le Mexique seul possède les trigones et les pélipones, hyménoptères capables de féconder la vanille, mais dont le rôle demeure bien insuffisant. Il fallait donc penser à l'intervention humaine. Et c'est sans doute en entendant ses maîtres raconter à table l'histoire de la pollinisation faite à Liège en 1836, sur la vanille, par Morren, qu'Edmond Albius, jeune esclave à Sainte-Suzanne de la Réunion, eût l'idée au début de 1841 d'appliquer en la simplifiant la méthode au vanillier, jusque-là multiplié en vain dans l'île depuis environ vingt ans. Il en devint libre, tout comme ses maîtres. Et ce fut l'éclatement prodigieux de la culture de la vanille à Bourbon d'abord, puis à Nossi-Bé (1870), aux Comores (1873), à Madagascar (1891), à Tahiti en 1848 et à Porto-Rico en 1900. La pollinisation déclanche l'allongement de l'ovaire qui double de longueur en quelques jours. Mais la fécondation elle-même n'a lieu qu'après 40 jours environ, alors que la longueur définitive du fruit est atteinte. Il en est de même chez les autres orchidées dont les ovules ne se développent qu'après l'excitation de l'ovaire par les grains de pollen. Lorsque la pollinisation de la vanille n'est pas réussie, la fleur se flétrit et tombe. Lorsqu'elle réussit les pièces du périanthe demeurent et pendent au bout du fruit, constituant ce qu'on appelle le nombril. Le petit fait technique de la pollinisation manuelle (qu'on pratique aujourd'hui au Mexique) est parfois célébré d'une manière puérile : ...« d'un geste rapide et d'une main légère, lit-on dans la Botanique de l'Encyclopédie de la Pléiade, à l'aide d'une épingle (1) dont elles ornent leurs cheveux, les femmes se font les agents de la pollinisation. » L'intervention de l'homme a une importance considérable surtout pour une espèce dont la fécondation n'est possible que pendant quelques heures (de 6 à 9). Il permettait en 1841 à Bourbon de préciser les meilleures conditions de culture, car jusqu'alors l'in(1) On se sert normalement d'un stylet avec lequel on déchire le labelle qu'on abaisse ensuite pour dégager le gynostème. Puis on relève, à l'aide du stylet, le rostellum qu'on place sous la partie libre (non soudée) du filet de l'étamine. Après quoi par une légère pression on applique les pollinies désencapuchonnées sur les stigmates. — 371 — cidence de la fécondation ne pouvait être imaginée. Les méthodes propres à la bonne préparation purent également être précisées. Et, c'est en 1848, qu'eût lieu à Bourbon la première exportation commerciale; elle porta sur 50 kg de vanille préparée. Voyons un peu plus en détail l'opération fécondation. Le balai comporte au plus une quinzaine de fleurs dont une ou deux s'épanouissent chaque jour. En règle générale on doit ajuster la pollinisation à la vigueur des lianes. On peut féconder toutes les fleurs ou quelques-unes seulement. Si l'on voulait féconder toutes les fleurs, il faudrait revenir huit ou neuf fois sur le même balai. On peut, sans grand effort, se rendre compte du prix d'une telle opération. Les lianes sont, en effet, plantées à 1 ou 2 m, mais, décimées par les parasites, elles ne sont, après quelques années qu'à 2 m tout au plus. Enfin, les balais qui s'étagent à différents niveaux autour du tuteur, ne fleurissent pas forcément en même temps. Il y a même un décalage naturel. En général, on règle la production au niveau qu'on désire en fécondant seulement quelques fleurs par balai plutôt qu'en supprimant des balais entiers. Mais il faut quand même visiter les lianes, au moins au départ de la floraison, car il n'est pas du tout indifférent de féconder les fleurs sans tenir compte de leur position sur le balai. En effet, les cinq ou six dernières fleurs donnent des fruits plus courts, et les premières des fruits présentant quelques imperfections. Il se pourrait qu'elles soient moins parfaites que les autres, comme si elles n'en étaient encore que l'ébauche «lente à venir», ou encore qu'elles aient trouvé des mains mal assurées et des doigts encore malhabiles à les « prendre » après huit mois de repos ! C'est donc les six ou sept fleurs à partir de la quatrième qui, en général, donnent les fruits les plus beaux, les plus longs, les plus parfaits. Le fruit atteint sa maturité technologique sept ou huit mois après (1). On l'appelle alors «vanille verte». A ce stade il est propre à la préparation. Après le fait de la fécondation, la notion de maturité technologique est essentielle, puisqu'en dernière analyse la vanille préparée demeure, toutes choses égales par ailleurs, le reflet direct et fidèle de la « vanille verte », c'est-à-dire bonne à être préparée. Cette préparation a lieu dans des bâtiments dont l'ensemble s'appelle la préparation, alors que la partie active en est nommée l'atelier de préparation. (1) Pour V. fragrans on peut compter environ 220 jours entre la fécondation et la récolte. Pour V. tahitensis (capsules plus courtes et indéhiscentes) cette période est de 200/240 jours. — 372 — II est évident que le rythme de la pollinisation s'ajuste à celui de la floraison et que la cueillette (ainsi est nommée la récolte) en dépend également, compte tenu de l'option initiale du vanillard. S'il féconde toutes ou presque toutes les fleurs du balai, la cueillette durera quatre bons mois, les fruits étant cueillis un par un, à raison d'une cueillette par semaine. S'il n'en féconde que quelquesunes (auquel cas on « pince » l'extrémité de l'inflorescence) la cueillette commencera plus tard et finira plus tôt, mais il faudra également surveiller les nuances du coloris des fruits, pour les cueillir au moment précis de la maturité technologique, toujours un par un. Si les fruits étaient cueillis avant ce moment, on aurait un produit commercial sans grand arôme et dont la conservation serait mauvaise. Cueillies postérieurement, elles n'auraient plus leur intégrité physique, les capsules s'ouvrant, et donneraient des gousses d'allure dépréciées pour l'œil, sinon pour l'odorat. Une exception à cela, la vanille de Tahiti est à peu près indéhiscente, elle peut donc attendre sur le balai. C'est pour cela qu'elle est cueillie par balais entiers. On voit par tout cela, que toutes les organisations et réglementations, ainsi que toutes opérations de financement et de commercialisation concernant la vanille ont pour bases techniques la fécondation et la maturité technologique. On est ainsi conduit à juger du choix inital des « vanillards ». Pour cela on établit par préparation ce que j'appellerai, par analogie avec les courbes de floraison, la courbe fécondation-cueillette. En abcisses le temps des réceptions des vanilles vertes et en ordonnées les poids des cueillettes. Courbes « Fécondation-Cueillette 4 ÙD 30 60 90 120 je 60 j Temps — 373 — Dans le premier cas la courbe (I) sera étalée sur quatre bons mois et dans le second cas (II) elle aura une allure ramassée» contractée à un temps d'une durée de 80 jours ou moins. Ces durées n'ont qu'une valeur relative, dépendantes qu'elles sont et de la floraison et du climat de l'année considérée. Le résultat est très net et les conséquences aussi : — dans le premier cas, la main-d'œuvre, occupée pendant plus longtemps, sera recrutée et formée sur place; l'atelier de préparation gardera ainsi l'allure artisanale. C'est normalement le cas des pays placés dans le champ des cyclones. On comprend pourquoi. — dans le second cas, la masse importante de vanille verte rassemblée pendant un laps de temps relativement court forcera le préparateur à aller au-delà de la formule traditionnelle et à concevoir une formule d'atelier de préparation d'allure industrielle (capitaux plus importants, transports des récoltes sur de plus longs parcours, concentration, main-d'œuvre saisonnière hiérarchisée, etc., etc.). Dans le premier cas, multiplication des ateliers de préparation; dans le second, réduction (1). En fonction des circonstances, les deux formules sont valables techniquement. Mais elles restent, en fait, idéales et ne paraissent appliquées telles quelles nulle part. Toutes les fois, cependant, que dans la réalité on s'éloigne par trop de l'allure des précédentes courbes il y a lieu de s'inquiéter et de remonter jusqu'au producteur individuel. Le contrôle des préparations de vanille et en particulier le simple relevé du livre de réception des vanilles vertes permet d'établir, pour chacun des producteurs, la courbe réelle des apports et ainsi de juger de la conduite de la cueillette au moment supposé de la maturité technologique. On a la possibilité de redresser l'erreur au moment même de sa naissance. Toute réglementation est simple et d'application aisée à partir de ce moment-là, comme du reste toutes opérations bancaires. De fait, la vanille se prête admirablement bien aux prêts sur récoltes pendantes et aux avances sur récoltes, d'autant qu'elle porte, sur l'épiderme à la partie inférieure du fruit, la marque (déposée à la mairie) du propriétaire. La vanille se prête ainsi fidèlement à l'identification de provenance, au recensement, et à la statistique. Les marques ont été instituées pour parer au vol des vanilles vertes. (1) Le nombre des préparations est d'ailleurs surtout sous la dépendance des structures sociales, des contingences politiques locales et des moyens de communication et de financement. — 374 — En Polynésie, ces marques sont quasi inexistantes, de même que le vol. La vanille préparée, elle aussi, se prête sous certaines conditions, au warrantage. Evidemment les ouragans restent la pierre d'achoppement. Le fruit» On vient d'en parler à propos de la fleur. Cet lui qui a donné son nom à la vanille. Avec sa forme arquée en bancal d'artilleur, la gousse de vanille verte ressemble un peu à une gaine, à un étui à couteau. Et c'est du mot esagnol vainilla diminutif de vaina, gaine, et qui signifie gousse mince (et non petite gousse) que la vanille tire son nom. Le fruit est une capsule non pédicellée et non caliculée. La partie plus étroite par laquelle il s'attache au balai est un peu recourbée, d'où son nom de crosse. L'extrémité libre, qui s'ouvre à la maturité, s'appelle le talon. Les derniers fruits du balai sont moins arqués que les autres. Le fruit s'allonge pendant quarante jours avant que la fécondation ait lieu. Les ovules, en effet, évoluent beaucoup plus lentement que les grains de pollen, dont les tubes polliniques croissent très lentement. Il semble, si l'on en juge par la répartition des graines dans le fruit, que le nombre d'ovules soit très sensiblement plus élevé dans la zone du talon que dans celle de la crosse. Celle-ci est parfois « vide » comme disent les praticiens, c'est-à-dire dépourvue de graines; elle se distingue alors par une teinte plus pâle et un corps beaucoup plus flasque, elle se montre enfin assez sensible aux attaques des cryptogames. Tout se passe comme si la présence des graines (malheureusement il en est beaucoup d'avortées) était une chance de bonne tenue, de bonne conservation des vanilles. Pendant de longs mois le fruit reste trigone vert et même d'un vert foncé brillant. Peu à peu enfin les angles s'atténuent et la teinte verte s'adoucit, l'épicarpe devient plus mat, cependant qu'apparaît aux deux lignes de future déhiscence un trait blanc verdâtre très fin et qu'on appelle « filet ». La capsule uniloculaire trivalvaire, dont la section est subtriangulaire, est assez précocement déhiscente chez Vanilla fragrans. Mais, fait remarquable, sa déhiscence ne se produit pas suivant la limite des carpelles, mais le long des angles de la plus grande des trois faces du fruit. La capsule physiologiquement — 375 — mûre est jaune le long des deux zones de déhiscence, elle s'ouvre suivant ces deux lignes en deux valves seulement, ce qui est largement suffisant pour déprécier le produit. Lorsque le fruit reçoit directement la lumière solaire, on a la sensation que le talon jaunit. C'est alors que le stade de la maturité technologique est atteint et que la cueillette doit se faire. Les gousses ont alors 7 à 8 mois. Pour se faire une idée approximative du changement d'allure du fruit qui approche de la maturité technologique, il suffit de se rappeler les modifications de forme et de couleur que subissent les bananes, entre le moment où, en régimes et vertes dans leur coiffe de polyethylene, elles sont débarquées des bateaux et gagnent les dépôts, et celui où, débitées en mains jaune verdâtre, elles sont offertes au public sur les éventaires des marchés, avant d'être d'ailleurs tout à fait mûres. Le moment de la récolte de la vanille est facilement décelé lorsque l'ensemble de la vanillière est soumis à un même éclairement et qu'il fait soleil. Lorsque l'éclairement est différent suivant les lieux et qu'il pleut il faut faire très attention. De même, si des élagages intempestifs des arbres d'abri sont intervenus après la formation des fruits, ceux-ci jaunissent plus rapidement, on a alors une fausse impression de maturité. Il faut donc connaître son affaire et avoir une conscience professionnelle scrupuleuse pour cueillir à bon escient. Lorsque la cueillette est bien faite, au moment voulu, la préparation est relativement simple, une bonne vanille verte ayant en elle tout ce qu'il faut pour cela. On cueille en exerçant, avec le pouce et l'index de la main droite, une torsion-pression qui détache le fruit sans entamer l'axe du balai. Il est bon que les ongles qui peuvent blesser racines, lianes, fleurs et fruits soient taillés court chez tous ceux qui font de la vanille, à quelque titre que ce soit. Les fruits sont marqués. Marquer un fruit c'est y apposer, au moyen d'un bouchon portant de fines aiguilles débordant d'un millimètre environ, un signe qui est généralement constitué par les initiales du propriétaire. La marque établit l'origine du fruit. Les marques sont déposées à la mairie et reproduites sur la carte d'identité du planteur de vanille, carte instituée à la Réunion en 1941. Le moment d'apposer les marques précède le début de la maturation technologique (disons 40 jours avant cette maturation) de telle sorte que les réactions cicatricielles du fruit qui reproduisent la marque s'installent et demeurent sans provoquer de troubles physiologiques ni de dépréciation. Il ne faut pas « marquer » les jours de pluie. — 376 — On appose les marques dans la région du talon, au tiers inférieur du fruit sur pied et sur une de ses deux petites faces. Pourquoi là? Parce que la région basse de la gousse est toujours la plus lourde, la plus riche en huile et en vanilline, la moins atteinte par les cryptogames et celle où la cicatrisation est la plus sûre et la plus rapide. Il faut enfin penser que le lien unique assurant le bottelage des gousses chez les vanilles préparées de l'Océan Indien se trouve placé au-dessus de la zone marquée, zone sensible à la pression du lien. Voici, avec quelques observations, le tableau des opérations de préparation et de contrôle des vanilles de V. fragrans de l'Océan Indien : 1. Réception des « Vanilles Vertes » : fin mai juin-juillet-août, début septembre de Tannée a. Pesée, triage et classement (une fois la semaine). Tenue des livres. 2. Echaudage (quelques minutes). 3. Etuvage (couvertures, caissons, soleil) : 6 à 10 jours. 4. Soleillage (sur tablettes, au soleil) : 6 à 10 jours. 5. Séchage (à l'intérieur de l'atelier, à l'ombre, sur claies) : 2 à 3 mois. 6. Mise en malles (et quelques visites) : 3 mois. 7. Dressage et classement (lres, 2es et 3es des lots commerciaux ordinaires) (hors lots-vrac). Mesurage (de demi-centimètres en demi-centimètres): grandes, moyennes et petites « longueurs ». 8. Chemisage et mise en paquets (3 liens provisoires). 9. Mise en observation (30 à 45 jours). 10. Visites. Un lien au centre de gravité du paquet (botte) de vanille. 11. Constitution des lots (boîtes et papier paraffiné-bordereau) et possibilité réglementaire de négocier : postérieurement au 1er février de l'année a + 1. 12. Contrôle (administratif) : sous scellés 30 jours et plus et visites. 13. Mise en caisses et expédition des Vanilles préparées dite& « Vanille BOURBON ». Transport par mer, pratiquement à partir du U> avril de l'année qui suit la cueillette. Observations : a) (2), (3), (4) élevée. Au contraire, les (9) et (12) ont aussi basse que et (5) se font à une température opérations en caractères gras (6), lieu à une température naturelle possible. — 377 — b) L'opération (4), le soleillage est à la fois de l'étuvage, du post-étuvage, du préséchage et parfois, dangereusement, du séchage. c) Les vanilles de juin, juillet, août sont de « bonnes vanilles » fournissant les lots commerciaux dans une proportion très élevée. En revanche, les premières réceptions (fin mai) et les dernières (début septembre) sont essentiellement des vanilles de triage qui fournissent la catégorie hors lot dites «ordinaires». d) Un certain contrôle (administratif et professionnel) s'exerce sur la cueillette et sur toute la préparation des vanilles. Reprenons ces opérations pratiquées à Bourbon en essayant de les expliquer. La vanille verte étant cassante, la gousse cueillie est placée aussitôt et avec soin à l'abri du soleil dans des paniers souples ou des sacs faits de lanières de feuilles tressées de Pandanus. Les récoltes, qui voyagent sous laissez-passer de la police, gagnent l'atelier de préparation. Entre le moment où le fruit est cueilli et celui où, livré à l'atelier, il va subir le premier traitement (échaudage), il s'écoule un temps dont la durée est fonction du lieu de culture et des moyens de transport, celle-ci évolue entre 10 heures et 72 heures. Pendant cette période de survie, le fruit perd un peu de son poids et continue de manifester une activité biologique. C'est-à-dire qu'agissent sur lui, outre le temps-durée, les facteurs suivants : température, lumière, degré hygrométrique, oxygène, gaz carbonique... Pour réaliser les conditions d'ambiance propres à garder les gousses aptes à la préparation, on devra : — leur conserver une température voisine de 18-20° C; — les placer, sinon à l'obscurité, du moins hors de l'atteinte directe de la lumière; — faire en sorte que l'air ambiant (naturellement assez humide) circule lentement autour et dans le tas qu'elles constituent, tas de dimensions modestes; - — enfin réaliser un transport sans chocs, sans heurts. Ces précautions sont d'autant plus nécessaires que les gousses sont cueillies une à une (V. fragrans). Lorsque les balais entiers sont récoltés (V. tahitensis), il se produit des échanges entre les fruits et l'axe du balai, qui permettent d'observer moins scrupuleusement les règles d'ambiance. — 378 — A l'atelier les vanilles sont pesées, examinées et classées. Le classement est fait en bonnes vanilles et en vanilles ordinaires. Celles-ci ne figurent pas dans les lots normaux exportés, elles sont appelées, après préparation, vanilles ordinaires ou inférieures sans que ce mot ait un sens péjoratif. Les bonnes vanilles sont classées en deux catégories : — celles qui sont corsées, à épiderme épais; — et celles qui sont dites fines et qui proviennent de vanillières d'altitude, ou de zones fortement ombragées. Ces catégories sont échaudées séparément, les vanilles fines l'étant plus modérément. Le maître de l'œuvre, le préparateur, est obligatoirement présent à la réception, au classement, et à l'échaudage des vanilles vertes. L'échaudage se fait au thermomètre, au chronomètre et surtout à l'œil. Il est la première opération de la préparation. Son but est de favoriser la formation du parfum en conservant au fruit sa forme, il lui donne l'aspect qu'on sait et lui confère les qualités naturelles requises pour sa conservation. Echauder, c'est plonger un grand panier de vanille verte (20 kg environ) dans de l'eau douce portée à une certaine température, jusqu'au moment où la brillance des fruits s'atténue. Alors, très rapidement le panier est retiré de l'eau et la vanille est versée dans une couverture de laine de dimensions appropriées pour qu'on puisse la replier et en bien recouvrir toute la masse échaudée. Cette opération d'enveloppement se réalise au-dessus d'un « caisson » (grande caisse de bois épais) intérieurement revêtu de couvertures de laine. On y descend au fur et à mesure de l'échaudage, l'un après l'autre, les paquets bien enveloppés de vanilles ainsi traitées. On échaude en fin d'après-midi pour que la totalité des vanilles échaudées demeure bien au chaud le temps le plus long possible (jusqu'au soleil du lendemain). Il est très important que les paniers soient neufs et qu'ils conservent leur forme cylindrique, pour que, plongés verticalement dans la marmite de même forme, ils placent, chaque fois, les 20 kg de vanille verte dans les mêmes conditions thermiques. Avec de vieux paniers la partie la plus fine du fruit, la crosse, risquerait de passer au travers et de se trouver au contact de la paroi brûlante de la marmite à echauder, ce qui altérerait son épiderme et la noircirait. On aurait alors de la vanille « poiquée » (du mot poix) c'est-à-dire des « ordinaires ». La vanille de Tahiti ne subit pas l'échaudage. Elle prend naturellement, gousse par gousse, la teinte chocolat sur le parquet où elle est entassée. — 379 — Les autres phases tendent à favoriser les actions diastasiques et la dessiccation jusqu'à un taux qui permet la formation de l'arôme, tout en gardant la gousse souple et onctueuse. Les phénomènes sont mal connus. On peut dire qu'au cours de l'échaudage (qui dure quelques minutes) les vanilles sont lavées, que l'on paralyse les ferments extérieurs possibles et qu'en même temps on réduit les facultés de déhiscence des fruits en les stabilisant physiquement. Cette modification, qui est réalisée au Mexique par la chaleur sèche, précède l'étuvage. Etuver la vanille c'est la garder enfermée dans sa robe de laine à une température suffisamment élevée pour qu'elle sue, qu'elle devienne moins cassante, plus flexueuse — et non pas encore flexible — et qu'elle commence à prendre la teinte brun clair qui doit aller par la suite jusqu'au chocolat clair. Cette teinte brun clair indique que l'action diastasique commence, en même temps que la teneur en eau diminue. Pour réaliser l'étuvage, on réchauffe chaque jour de soleil la masse qui au cours de la nuit s'est un peu refroidie dans le caisson. La couverture de laine a pour rôle de tenir chaude la masse des vanilles et d'éponger les gouttes de « transpiration » des gousses « en travail », un peu comme fait le peignoir de laine dont s'enveloppe pour quelque temps le rhumatisant au sortir du bain de boue chaud. On peut découvrir un peu les fruits au soleil pour les remuer à la main, mais on doit veiller à ce que la transformation soit très graduelle, très lentement progressive. C'est dire qu'une fois réchauffée au soleil, la vanille doit être recouverte aussitôt. L'étuvage dure quelques jours. Echaudage et étuvage se font respectivement à des températures voisines de 60 et de 45 degrés. Le soleillage qui suit l'étuvage et précède le séchage participe de l'un et de l'autre. Le soleillage se fait à quelque 50-70 cm du sol, sur des « tablettes » de bois dur (plateau plein, à rebord qui atténue l'action éventuelle du vent), la vanille en couche mince est exposée directement au soleil, reposant sur des couvertures moins neuves que celles de l'étuvage. On peut cependant se passer de ces couvertures. Le soleillage parfait la couleur des gousses et assure une sorte de pré-séchage. La masse en cours de soleillage doit être remuée de temps en temps. Le soir, avant de rentrer les tablettes, on sépare les fruits devenus propres au séchage, qui sont portés aux claies. — 380 — II arrive que, pour aller vite, on prolonge le soleillage, procédant ainsi à un véritable séchage au soleil. Dans ce cas, la souplesse, la douceur au toucher et le parfum même des gousses ne sont plus ce qu'ils doivent être et les défauts ainsi conférés ne peuvent plus être corrigés. Les vanilles soumises ainsi à un sursoleillage sont, comme certaines viandes, saisies. Ces avatars arrivent surtout aux derniers fruits récoltés sur les balais, constituant les « petites longueurs » des lots commerciaux. Ceci tient au fait que les caractères de maturité technologique de ces fruits se trouvent accélérées à la suite de la cueillette des premières gousses du balai ( « éclaircissage » ) . En vérité, la régularité et la progressivité indispensables de la dessiccation ne sont jamais assurées qu'à l'intérieur de l'atelier, hors du contact des rayons solaires. Le séchage, au cours duquel la température reste elle assez élevée se fait dans l'atelier, ce qui explique la toiture en tôle plane et l'absence de vrai plafond. Il a lieu sur claies, en atmosphère très largement aérée et éclairée. L'atelier est donc un rez-de-chaussée, parfois un étage (l'étage est meilleur parce que plus sec), allongé et formant une seule salle longue, possédant sur les quatre faces de nombreuses ouvertures (portes et fenêtres) et éventuellement des baies vitrées. Il se situe au milieu d'un terre-plein pavé ou engazonné libre, donc ensoleillé par temps clair. Les vanilles d'une même cuvée, si l'on peut ainsi appeler le couple échaudage-étuvage, ne vont pas, en même temps sur les mêmes claies. Les plus corsées, chez lesquelles les actions diastasiques paraissent moins vives exigent en effet un étuvage et un ensoleillage plus longs en outre, sur claies, elles perdent moins aisément que les autres leur humidité. Les claies ne sont jamais très garnies pour permettre à chacune des gousses d'être aérée très largement. Disposées les unes sur les autres et créant ainsi entre elles des couloirs qui facilitent la circulation horizontale et verticale de l'air, ces claies sont fréquemment reprises et les vanilles, retriées et regroupées en fonction de leur dessiccation. Elles passent ainsi de main en main un très grand nombre de fois, avant d'avoir toutes acquis le taux d'humidité, la flexibilité et la couleur jugés convenables. Elles sont alors mises en caissettes («malles») de fer blanc, protégées de papier paraffiné et placées en lieu frais. C'est en «malles» et tassées (1) qu'elles franchiront ce seuil encore mystérieux qui les amènera à l'arôme suave et fin de la (1) Un lot commercial est, entre autres choses, caractérisé par un pourcentage (variable) de « lres » et par une moyenne (également variable) des « longueurs ». — 381 — vanille préparée, à la souplesse, à la couleur et à l'onctuosité voulues. Le séjour en « malles » est de plusieurs mois. Mais, tous les trente ou quarante jours, on les « visite » comme on dit. Ce séjour harmonise la couleur des gousses, laquelle est alors un peu celle du pruneau, il les rend également homogènes du point de vue de la souplesse. Jusqu'au séjour en « malles » le rythme de travail est rapide et même un peu bousculé. Bousculé surtout par la pluie, car le travail de l'étuvage et, naturellement, le soleillage exigeant le soleil. Il faut avoir vu tout le monde se précipiter au dehors sur les couvertures grises qui renferment et recouvrent les vanilles en cours d'étuvage, au moment où un grain s'annonce. Il faut avoir vu, se poussant les uns les autres tout le personnel affairé, mettre rapidement en caissons, hors de l'atteinte de l'eau et de la fraîcheur, les vanilles qui, à une température de 45°, commencent à brunir, pour retrouver sans y penser le moins du monde, l'étymologie gaillarde du verbe bousculer. Il faut, pendant cette phase, faire vite et le personnel, après tout, doit surtout montrer de la bonne volonté, les petites erreurs possibles pouvant encore se corriger. Dès le stade dit « d'observation » de la mise en « malle » il faut, en outre, compétence et conscience aiguës. Quelques ouvriers et ouvrières seulement peuvent faire ce travail qui réclame une grande délicatesse du toucher, le souci des nuances, un odorat et une vue bien habitués et une propreté scrupuleuse. Le petit monde occupé au séchage cède la place à deux ou trois experts au moment de la mise en « malle ». Il se reconstituera un peu par des ouvriers plus choisis possédant quelque qualification, lorsque se présenteront, à l'issue de cette importante phase, les opérations finales de dressage des fruits, de mesurage, de classement et de bottelage. Il se réduira enfin une dernière fois lorsque les bottes seront mises en boîtes au cours de la seconde phase d'« observation » qui, cette fois, vise la seule conservation. On notera qu'après l'échaudage-étuvage la première partie de la préparation fait intervenir une chaleur relative, une aération très large et la lumière ; alors que la seconde, la mise « en observation » en malles, réduit considérablement la température, limite au maximum l'aération et annule la lumière. On « observe » à une température naturelle basse favorable au développement des parasites éventuels. Tous les phénomènes de fermentation et de dessiccation ont lieu à l'intérieur de chaque fruit. Il n'y a vraiment jamais d'effet de masse. — 382 — Les transformations sont continues et soutenues après une espèce d'uniformisation conférée par la mortification-échaudage et la sudation-étuvage. A partir de cette étape tout est individuel. Le phénomène est un peu, mais en beaucoup plus complexe, celui du blétissement, encore que la mise en jeu de l'armement diastasique intervienne dans le cas du blétissement après stabilisation du fruit par la maturation physiologique. Les dimensions de l'atelier de préparation doivent être ajustées aux apports. C'est pourquoi les planteurs de vanille passent des contrats avec le préparateur. Ainsi celui-ci s'assure-t-il les quantités et la qualité qu'il désire en vue de fabriquer une vanille préparée commerciale (1) à laquelle il confère d'ailleurs une personnalité liée à la préparation. Malgré ce qui peut sembler, pour une même espèce cultivée, il n'y a pas de crus de vanille liés au terroir alors qu'il y a des années à vanille. C'est pourquoi il n'y a pas de mélange d'années dans un lot de vanilles exportées pas plus qu'il n'y a de coupage possible avec des vanilles de préparations différentes. Tout cela est logique, si l'on se souvient que le sol à vanille n'est guère que de l'humus et que les bonnes années sont rares. Rares parce qu'elles doivent réunir à la fois des vents modérés, une température moyenne assez faible, une humidité relative élevée, une luminosité plus grande à la floraison et un ciel clair à la cueillette. Ces années-là, les vanilles préparées sont excellentes, et l'arôme plus affiné s'accompagne de l'apparition vers le talon, puis de la progression sur la gousse du givre, ce dernier cotonneux, farineux ou cristallisé comme des paillettes de mica n'est jamais que la cristallisation de la vanilline qui exsude. Seule la vanille de Tahiti, très spéciale, pauvre en vanilline, ne givre normalement pas. La graine. Présenter la graine de la vanille, c'est présenter des éléments si nombreux, si petits et si extraordinairement simples qu'on n'y trouve pas d'albumen nourricier et qu'on n'y peut distinguer qu'un embryon sphérique sans organe différencié. C'est pourtant sur le patrimoine héréditaire de ces graines minuscules que repose l'avenir de la vanille. L'avenir c'est d'abord de continuer d'être et donc de résister aux causes d'affaiblissement, de destruction. Déjà le J. O. du (1) La vanille représente en pourcentages des exportations totales de ces pays les chiffres suivants : Madagascar : 7,2; — Réunion : 2,5; — Comores : 35; — Polynésie française : 20. — 383 — 10 août 1874 indique (selon Littré), le renouvellement des vanillières tous les 7 ou tous les 15 ans suivant l'intensité de la fécondation. Mais plutôt que le mariage des fleurs, ce sont les fusarioses qui, ici et là, dominent maintenant la situation. Car si Vanilla Pompona leur résiste absolument, V. fragrans leur est sensible et V. tahitensis, très sensible. Par la fécondation croisée et le semis de graines (aujourd'hui mis au point, grâce à une meilleure connaissance de la graine, de sa maturation, du champignon symbiote et de sa culture pure), on a commencé à fabriquer des lianes résistantes dont les fruits auront l'arôme suave de la vanille Bourbon. Peut-être parviendrat-on en outre à élargir la zone de culture. A Porto-Rico et à Madagascar les travaux ne sont plus très loin d'aboutir. Pauvre liane arrachée à la forêt natale, accueillie au Jardin des Plantes et de là basculée d'un hémisphère à l'autre, dans la région de la mer indienne la plus traversée d'ouragans meurtriers ! Là elle attendra près de vingt ans que le génie d'un humble esclave de 12 ans la tire de l'infertilité naturelle. Alors de modestes agriculteurs entreprendront de rechercher le secret de l'arôme de la vieille « gousse noire » des Aztèques. Et un quart de siècle après ils parviendront à donner une bonne solution aux multiples problèmes de la préparation. Dans le même temps, au sein de la forêt ombreuse, ouverte un peu à la lumière, au cœur du printemps éternel qui est son climat, la liane ignorera la dégénérescence clonale. Elle l'ignore encore, du moins nous le croyons. Constamment libérée par les nettoyages de toutes ses parties anciennes (aériennes et souterraines), en état de provignage naturel permanent grâce aux racines naissant de chacun de ses nœuds, incapable de fructifier naturellement, non soumise — et pour cause — aux brutalités de la taille d'hiver, la vanille paraît bien être restée jeune. Elle a pu ainsi franchir détroits, mers et océans pour prendre pied partout où elle a pu trouver réunies circonstances et conjoncture favorables. Alors seulement ont commencé pour elle les furieux assauts des champignons. Et elle s'affaiblit. Cependant, grâce aux travaux de Noël Bernard et de Magrou, le voile s'est un jour levé sur la germination des graines des Orchidées. Et la conduite des semis et la production des « vanilles de graine » déjà observées çà et là à l'état subspontané par des praticiens se? trouvent aujourd'hui réalisées. — 384 — Les recherches commencées à Tananarive par Bouriquet sont transportées à Antalaha (le champ) et à l'Ivoloïna (le laboratoire), à Madagascar Côte-Est. Ainsi les persévérantes observations et études de « planteurs » débouchent dans la Recherche moderne et nous avons le droit d'espérer que « les fruits passeront la promesse des fleurs ». On peut aussi espérer que les travaux de génétique concernant les fusarioses de la vanille réalisés par la France à Madagascar serviront également la cause des vanilles des autres îles intéressées : Réunion, Comores, Polynésie française. BIBLIOGRAPHIE G. P. E. R. P. Bouriquet. — Le Vanillier et la Vanille dans le monde. Claudel. — Connaissance de l'Est (le Cocotier). Hibon. — Les Vanilles des Etablissements français de l'Océanie (1949). Millaud. — Note sur la culture du Vanillier, Papeete (1963). Rivals. — Etudes sur la végétation naturelle de l'île de la Réunion, Toulouse (1952). J. Soustelle. — La vie quotidienne des Aztèques. Service météorologique de la Réunion : Etude mécanographique des trajectoires des cyclones (octobre 1963).