Chapitre 5: flot d’une ´
equation diff´
erentielle ordinaire
Philippe Chartier
23 octobre 2014
1 D´
efinition du flot et propri´
et´
es ´
el´
ementaires
Dans ce chapitre, Dd´esigne un ouvert connexe de Rd. On consid`ere le probl`eme de Cauchy sous
forme autonome :
˙y(t) = f(y(t))
y(t0) = y0,(1)
o`u fest une fonction d´efinie sur Det (t0, y0)un point de R×D. On suppose en outre que fest
continue et localement Lipschitzienne, de sorte que pour tout (t0, y0)R×D, le syst`eme (1) admet
une solution maximale unique sur un intervalle ouvert J(t0, y0)R. Alors, l’application
(t, t0, y0)7→ y(t;t0, y0)
qui associe la valeur en tde la solution de (1) est bien d´efinie sur l’ouvert
Ω = {(t, t0, y0)R×R×D;tJ(t0, y0)}.
On note en outre
0={(t, y0)R×D;tJ(0, y0)}
D´
efinition 1.1 On appelle flot de l’´
equation diff´
erentielle (1) l’application :
0Rd
(t, y0)7→ ϕt(y0) = y(t; 0, y0)
Il est clair que ϕt(y0)satisfait l´equation suivante :
d
dt ϕt(y0) = f(ϕt(y0))
ϕ0(y0) = y0
,(2)
et qu’on a en outre, pour tout (t, t0, y0),(tt0, y0)0et y(t;t0, y0) = ϕtt0(y0), ce qui justifie
la d´efinition de ϕtcomme une application ind´ependante de t0.
1
Remarque 1.2 On peut aussi d´
efinir le flot d’un syst`
eme non-autonome, mais on rappelle que tout
syst`
eme non-autonome peut se r´
e´
ecrire comme un syst`
eme autonome par l’adjonction de la variable
t. L’hypoth`
ese d’autonomie ne constitue donc pas une restriction.
Proposition 1.3 L’application (t, y)7→ ϕt(y)de 0dans Rdest continue. En particulier, pour tout
(t, y)0, il existe un voisinage Vde ytel que l’application ϕt(·)soit d´
efinie et continue sur V.
Proposition 1.4 On suppose que D=Rdet que fest C1et globalement Lipschitzienne. Alors le
flot est d´
efini sur tout R×Rd(c’est-`
a-dire que 0=R×Rd), et l’application
RDiff(Rd)
t7→ ϕt(·)
est un homomorphisme du groupe (R,+) dans le groupe (Diff(Rd),), o`
u Diff(Rd)est l’ensemble des
diff´
eomorphismes de Rddans lui-mˆ
eme.
Preuve. Pour tout (s, t)R2, on a ϕsϕt=ϕtϕs=ϕs+t, en vertu de l’unicit´e de la solution
de (1) (Theor`eme de Cauchy-Lipschitz). En cons´equence ϕtest une bijection, (ϕt)1=ϕtet son
inverse est continue. En anticipant sur le paragraphe suivant, on a en outre que ϕtest continˆument
diff´erentiable d’inverse continˆument diff´erentiable.
2 Diff´
erentiabilit´
e par rapport `
a la condition initiale
Dans cette partie, nous nous int´eressons `a la d´ependance de la solution en la condition initiale, et
plus pr´ecis´ement `a la
diff´erentiabilt´e
du flot ϕt(y)par rapport `a la variable y. En admettant provisoi-
rement que cette diff´erentiabilit´e est assur´ee et que les d´erivations par rapport `a tet ycommutent, on
obtient, en d´erivant l’´equation diff´erentielle satisfaite par ϕt:
y0
tϕt(y0) =
y0
(f(ϕt(y0))) = f
y (ϕt(y0))
y0
ϕt(y0),
c’est-`a-dire encore d
dt ϕt
y0
(y0)=f
y (ϕt(y0))ϕt
y0
(y0).
En posant Ψt=ϕt
y0(y0), il apparaˆıt que Ψtest solution de l’´equation diff´erentielle matricielle
˙
Ψt=f
y (ϕt(y0)) ·Ψt
Ψ0=Id
,(3)
dite ´
equation variationnelle associ´ee `a (1). Il s’agit d’un syst`eme lin´eaire du type
˙
Y(t) = A(t, y0)Y(t)
2
o`u A(t, y0) = f
y (ϕt(y0)) ne d´epend pas seulement du temps tmais aussi d’un “param`etre” y0. La
r´esolvante exhibe donc elle-mˆeme une d´ependance en y0, mais aucune en t0(seul tt0compte), et
on la note pour cette raison S(t;y0). D’apr`es la discussion pr´ec´edente, on a alors
S(t;y0) = ϕt
y0
(y0).
Nous allons maintenant justifier rigoureusement cette ´egalit´e dans la preuve du th´eor`eme suivant :
Th´
eor`
eme 2.1 Soit fune fonction de Ddans Rdcontinue et localement Lipschitzienne, telle que
f
y (y)existe et soit continue sur D. Alors, le flot de (1) est une application continˆ
ument diff´
erentiable
par rapport `
ayet sa d´
eriv´
ee Ψt(y0) = ϕt
y0(y0)v´
erifie l’´
equation variationelle associ´
ee `
a (1) :
(˙
Ψt(y0) = f
y (ϕt(y0))Ψt(y0)
˙
Ψ0(y0) = Id
(4)
Preuve. Dans un premier temps, nous allons montrer que ϕt
y0(y0)existe pour tout (t, y0)0: pour
ce faire, il suffit d’´etablir, pour (t, y0)fix´e, qu’il existe une fonction ǫ(·)de R+dans R+et un rayon
r > 0tels que
y0Br(0),kϕt(y0+ ∆y0)ϕt(y0)S(t;y0)∆y0k=ky0kǫ(ky0k)(5)
avec
lim
ky0k→0ǫ(ky0k) = 0.
Pour s[0, t], on d´efinit donc z(s) = ϕs(y0) + S(s;y0)∆y0:z(·)n’est pas solution du syst`eme
diff´erentiel (1), mais peut-ˆetre vue comme une solution “approch´ee”
˙z(s) = f(z(s)) δ(s)
z(0) = y0+ ∆y0,
avec
δ(s) = fϕs(y0) + S(s;y0)∆y0f(ϕs(y0)) f
y (ϕs(y0))S(s;y0)∆y0.
La r´esolvante S(s;y0)´etant continue en la variable s[0, t], elle est born´ee par une constante M > 0,
de sorte que si rρ/M, la fonction z(s)ne sort pas du cylindre compact
K={yRd;s[0, t],kyϕs(y0)k ≤ ρ}
qui est lui-mˆeme contenu dans 0pour ρsuffisamment petit (l’intervalle [0, t]est en effet compact).
3
ρ
ρ
ϕs(y0)
y0
K
L’id´ee principale de la preuve est d’appliquer le th´eor`eme des accroissements finis `a la fonction
G(∆z) = f(z+ ∆z)f(z)f(z)∆z
c’est-`a-dire
kG(∆z)G(0)k ≤ sup
0µ1
kG(µz)kkzk
puis d’utiliser l’uniforme continuit´e de f(z)sur le compact K. Il vient alors
sup
0µ1
kG(µz)k= sup
0µ1
kf(z+µz)f(z)k
=β(kzk)
o`u β(kzk)est une fonction qui peut ˆetre choisie monotone en escalier, ind´ependante de z, et qui
tend vers 0lorsque kzktend vers 0. Finalement, f´etant Lipschitzienne (au moins localement et
donc sur K) de constante de Lipschitz L, on a d’apr`es le lemme de Gronwall :
kz(s)ϕs(y0+ ∆y0)k ≤ βMky0kMky0keLt 1
L
ce qui prouve la validit´e de (5) avec ǫ(x) = β(Mx)MeLt1
L.
Il reste alors `a montrer que S(t;y0)est continue par rapport `a (t, y0)1. Pour (t, y0)0, soit Dun
voisinage compact de y0tel que [0, t]× D 0. On d´efinit
L= sup
s[0,t],y∈D
kf(ϕs(y))k.
Alors, pour tout ˜y0∈ D, on a
˙
S(s; ˜y0)˙
S(s;y0) = f(ϕs(˜y0)) ·S(s; ˜y0)S(s;y0)+ ∆(s)
o`u
∆(s) = f(ϕs(y0)) f(ϕs(˜y0))·S(s;y0)
1. On ne peut pas conclure directement car y0n’est pas une valeur initiale pour S(s;y0)mais un param`etre : le
second membre du syst`eme obtenu par l’adjonction de l’´equation ˙y=f(y)`a l’´equation variationnelle n’est donc pas
Lipschitzien, sauf `a supposer que fest de classe C2.
4
de sorte que si sups[0,t]k∆(s)k ≤ δ, alors (d’apr`es le th´eor`eme de Gronwall)
sup
s[0,t]
S(s; ˜y0)S(s;y0)
δ(etL1)
L.
Par composition, f(ϕs(y0)) est continue en y0et on peut donc conclure `a la continuit´e de S(t;y0)par
rapport `a y0, puis par rapport `a (t, y0).
Th´
eor`
eme 2.2 Si fest de classe Cksur D, alors (t, y)7→ ϕt(y)est ´
egalement de classe Cksur 0.
Preuve. Par r´ecurrence.
3 Propri´
et´
es g´
eom´
etriques du flot
Dans cette partie, nous ´enonc¸ons quelques propri´et´es g´eom´etriques du flot : il s’agit de r´esultats
de conservation de quantit´es dont l’interpr´etation physique est pertinente dans de nombreuses appli-
cations.
3.1 Conservation du volume
Suposons que f, de classe C1, soit de divergence nulle, c’est-`a-dire que
yD, div (f)(y) = Trf
y (y)=
d
X
i=1
fi
yi
(y) = 0
Consid´erons alors un ensemble mesurable Ade Rdpour la mesure dy et
Vol(A) = ZA
dy
son volume. Le flot ϕt(·)consid´er´e comme application de Rddans Rdenvoie chaque point yde A
sur un point ϕt(y)de ϕt(A)et il est naturel de consid´erer le volume de l’ensemble image ϕt(A), `a
savoir : Zϕt(A)
dy
On a alors :
Th´
eor`
eme 3.1 Pour un syst`
eme diff´
erentiel de la forme ˙y=f(y), avec fde classe C1sur Dtelle
que divf0, alors
Vol(ϕt(A)) = Vol(A)
pour tout ensemble mesurable ARd.
5
1 / 16 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !