Dos Cas 3 ABCÈS DU PSOAS Une femme âgée de 25 ans consulte pour des douleurs lombales. Dans les semaines suivantes, cette patiente présente une tuméfaction sensible de l'aine augmentant progressivement de volume. À l'interrogatoire, la patiente signale également une toux productive avec des expectorations constituées de mucus et de sang. Elle présente aussi un syndrome fébrile. La radiographie de thorax révèle une masse pulmonaire cavitaire apicale expliquant les symptômes respiratoires. Compte tenu de l'âge de la patiente, l'existence d'un cancer du poumon est peu probable. L'hémoptysie (toux avec expectoration sanglante) et l'ensemble des symptômes associés évoquent l'existence d'une infection pulmonaire. L'image cavitaire apicale sur la radiographie pulmonaire évoque le diagnostic de tuberculose. La tuberculose pulmonaire a été confirmée par la culture bactériologique du produit d'aspiration réalisée en bronchoscopie. Au cours de l'infection tuberculeuse, le bacille tuberculeux contamine la vertèbre LI par voie sanguine. La destruction de la vertèbre débute par l'atteinte de l'os spongieux à proximité du disque intervertébral. L'infection progresse vers le disque intervertébral et finit par le contaminer. Le disque a été détruit par l'infection et des portions du disque expulsées en avant du disque, dans les fibres du muscle psoas. Cette évolution n'est pas exceptionnelle au cours d'une tuberculose avec atteinte de la colonne lombale. Avec le temps, le pus se propage entre les fibres du muscle psoas, se glisse sous le ligament inguinal, constituant une masse indurée de la région inguinale. Cette évolution est typique d'un abcès du psoas. Heureusement, cette patiente ne présente pas d'atteinte du canal vertébral. L'abcès du psoas a été ponctionné sous contrôle radiographique puis traité par une antibiothérapie au long cours de 6 mois. L'état général de la patiente s'améliore rapidement. Les cavités pulmonaires persistent longtemps et finissent par cicatriser avec une cicatrice scléreuse. Cas 4 DISSECTION D'UN ANÉVRISME DE L'AORTE ABDOMINALE Un homme âgé de 72 ans, en bonne santé et de bonne constitution, est conduit au service des urgences en raison d'une douleur rachidienne importante qui débute entre les omoplates et s'étend jusqu'en région lombale. La douleur a d'abord été aiguë puis est devenue permanente. Le patient a été capable de marcher jusqu'au brancard pour entrer dans l'ambulance ; cependant, dans le service des urgences, il est devenu incapable de mobiliser ses membres inférieurs. Le médecin a examiné attentivement le dos du patient sans retrouver d'anomalies. Il a remarqué qu'il existait un déficit sensitif des deux membres inférieurs et une diminution de la force motrice des groupes musculaires fléchisseurs et extenseurs. Le patient était tachycarde, ce qui était rapporté à la douleur, et la mesure de la pression artérielle dans l'ambulance était de 120/80 mmHg. Il était précisé que les chiffres actuels du patient étaient de 80/40 mmHg, sans que le patient rapporte de symptômes liés à une hypotension. Au premier examen clinique, il est difficile de rattacher ces symptômes à l'examen. En résumé, nous sommes en présence d'une paraplégie progressive associée à des douleurs rachidiennes et à des chiffres tensionnels anormaux qui sont incompatibles avec l'état du patient. Il a été conclu que les chiffres tensionnels ont été obtenus par mesure sur les deux membres supérieurs, et une nouvelle mesure a été réalisée. Les chiffres étaient les bons. Au niveau du bras droit, la mesure était de 120/80 mmHg et au niveau du bras gauche, 80/40 mmHg. Cela implique une vascularisation insuffisante du membre supérieur gauche. Le patient a alors été conduit en radiologie pour la réalisation d'un scanner thoraco-abdomino-pelvien. Le scanner a permis de mettre en évidence la dissection d'un anévrisme de l'aorte abdominale. Cette dissection correspond à la séparation de l'intima et des tuniques média et adventice. Cela réalise un faux chenal. Le sang circule au sein de la lumière vasculaire normale, mais également au sein du faux chenal. Il réintègre le plus souvent la lumière aortique dans une portion plus basse. Il existe donc deux canaux de circulation sanguine. Le phénomène de dissection entraîne pour le patient une vive douleur qui apparaît brutalement. (Suite) 122.e1 Dos Cas 4 Suite La douleur est typiquement ressentie entre les deux épaules et irradie dans le dos, et bien que cette douleur ne soit pas générée par la musculature rachidienne ou par la colonne vertébrale, elle doit faire l'objet d'un examen rigoureux, avec l'idée que d'autres organes peuvent être impliqués. La différence de pression artérielle entre les deux bras indique à quel niveau a débuté la dissection artérielle. Le « point d'entrée » est en amont de l'artère subclavière gauche. À ce niveau, une petite déchirure s'est créée qui limite le passage du sang vers le membre supérieur, se traduisant par les chiffres tensionnels bas. Le tronc brachiocéphalique a été épargné par le phénomène de dissection, et les chiffres tensionnels sont donc restés normaux. La paraplégie a été causée par une ischémie médullaire. La vascularisation de la moelle dépend de l'artère spinale antérieure et de deux artères spinales postérieures. Ces artères sont alimentées par les artères segmentaires à chaque niveau rachidien. Il existe plusieurs artères renforçant ce réseau (artères médullaires segmentaires) tout au long du cordon médullaire, la plus importante étant l'artère d'Adamkiewicz. L'artère d'Adamkiewicz, artère médullaire segmentaire, rejoint l'artère spinale antérieure le plus souvent au niveau de la charnière thoracolombale, et malheureusement, chez ce patient, l'origine du vaisseau a été impliquée dans le phénomène de dissection. Cela a entraîné une ischémie aiguë de la moelle et, à la suite, une paraplégie. Le phénomène de dissection s'est malheureusement étendu chez le patient, entraînant une rupture aortique et le décès. Cas 5 TUMEUR SACRALE Une femme âgée de 55 ans consulte son médecin pour un trouble de la sensibilité de la région glutéale droite (fesse droite) et du sillon interfessier. L'examen a permis de découvrir une faiblesse musculaire des muscles du pied et un léger déficit des muscles long extenseur de l'hallux, long extenseur des orteils et troisième fibulaire droit. La patiente rapporte également des douleurs modérées de la région glutéale droite. Une lésion est située dans la partie gauche du sacrum. La douleur de la région sacro-iliaque droite peut être simplement rapportée à l'articulation sacro-iliaque, qui est très sensible à la douleur. La faiblesse de la musculature intrinsèque du pied, de l'extenseur de l'hallux, du long extenseur des orteils et du muscle troisième fibulaire soulève la possibilité d'une atteinte des nerfs sacraux et de la jonction lombosacrale. Les troubles de sensibilité de la région glutéale et périanale sont également en faveur de cette localisation lésionnelle. Des radiographies du bassin ont été réalisées. Les radiographies ont tout d'abord été interprétées comme normales. De ce fait, la patiente a bénéficié d'autres examens 122.e2 d'imagerie – TDM et IRM –, qui ont permis de mettre en évidence une lésion lytique impliquant la partie gauche du sacrum et s'étendant aux foramens sacraux de S1, S2 et S3. L'analyse des radiographies du bassin peut souvent être considérée à tort comme normale et d'autres investigations doivent être réalisées lorsqu'un patient est suspect de lésion sacrale. La lésion était expansive et lytique. La plupart des métastases osseuses ne sont pas expansives. Elles sont souvent lytiques, mais peuvent également engendrer des phénomènes de sclérose (métastases prostatiques et pulmonaires). De temps en temps, elles possèdent la double composante. Il existe des circonstances particulières associant lésion lytique et expansive. Cela survient plus fréquemment dans le cadre de métastase rénale ou de myélome multiple. L'importance anatomique de ce type de lésion réside dans sa capacité d'expansion et de compression des autres structures. Cette capacité d'expansion lésionnelle avec une compression des racines sacrales explique les symptômes de la patiente. La patiente a bénéficié de séances de radiothérapie, de l'exérèse d'une néoplasie rénale, et est actuellement en cure de chimiothérapie.