Section deuxième- La spécialisation des règles de droit Paragraphe premier- Les divisions du droit La complexité croissante des rapports sociaux a entraîné le développement des règles et des solutions juridiques diverses et tout en faisant des distinctions et des sous distinctions. Il est donc nécessaire de procéder à des regroupements de cet ensemble volumineux constitué par les règles de droit. On tiendra compte notamment de leur objet et de leur domaine d’application. Les Romains avaient ainsi considéré que les institutions juridiques pouvaient être regroupées en deux grandes catégories suivant qu’elles sont orientées vers les intérêts publics ou vers les intérêts privés. Généralement la spécialisation du droit se manifeste par une division fondamentale et classique (la summa divisio) entre droit public et droit privé. La classification des branches du droit entendues comme des ensembles cohérents et autonomes de règles adaptées à un secteur déterminé d’activités n’est pas une chose aisée. A- Le droit public Le droit public est constitué par l’ensemble des règles juridiques concernant la complexion, le fonctionnement et les relations des Etats et des organisations ou collectivités qui les regroupent ou les composent et qui gouvernent les rapports de l’Etat et de ses agents avec les particuliers. En d’autres termes c’est l’ensemble des règles juridiques qui, dans un Etat donné, président à l’organisation de cet Etat et aux rapports entre ce dernier et les particuliers. Le droit public se subdivise en plusieurs sous branches ; nous pouvons citer à titre indicatif : Le droit constitutionnel qui détermine les règles relatives à la forme de l’Etat, et au fonctionnement des institutions. Le droit administratif qui réglemente l’organisation de l’Administration, des collectivités publiques et des services publics ainsi que leur rapport avec les particuliers. Le droit international public qui réglemente les rapports des Etats entre eux et avec les organisations internationales. 1 B- Le droit privé Le droit privé est l’ensemble des règles qui gouvernent les rapports des particuliers entre eux ou avec les collectivités privées, telles que les sociétés, les associations. Le droit privé se subdivise en de nombreuses sous branches, nous pouvons citer à titre indicatif : Le droit civil a pour objet la réglementation des rapports de droit privé c'est-à-dire des droits que les particuliers peuvent exercer dans leurs rapports entre eux et des obligations réciproques pesant sur eux. Le droit civil régit la famille, la propriété et les rapports d’obligations. Le droit commercial est l’ensemble des règles de droit applicables aux commerçants et aux actes de commerce. Il a aussi vocation à s’appliquer exceptionnellement à des non commerçants. Le droit du travail qui est l’ensemble des règles de droit régissant les rapports entre le salarié et l’employeur. C- Les droits mixtes Parfois il n’y a pas une nette distinction entre droit privé et droit public ; la distinction/ frontière n’est pas tout à fait étanche. En effet, il existe certaines branches du droit qui prennent en compte à la fois les préoccupations et les techniques propres au droit public et au droit privé. Si certaines branches entrent sans trop de difficulté dans l’un ou l’autre des rubriques, il est en revanche de nombreuses autres qui ne peuvent pas être soumises à un tel classement parce qu’elles participent des deux ; ce sont des droits mixtes. Un droit mixte est un droit qui réalise une combinaison des règles relevant pour les unes du droit public, et pour les autres du droit privé. Sont considérés comme du droit mixte : Le droit pénal : est l’ensemble des règles juridiques qui organise la réaction de l’Etat vis-à-vis des infractions et des délinquants. La procédure civile est un corps de règles gouvernant la justice civile et régissant la marche des procès qui permettent aux parties d’obtenir la reconnaissance et la sanction de leurs droits. Par ailleurs le droit est en constante évolution, il se crée d’autres branches que celles présentées : exemple du droit de l’environnement, droit de l’Internet… 2 Paragraphe deuxième- La science du droit La notion de « science du droit » comporte deux éléments distincts mais étroitement complémentaires. Dans un premier sens, elle désigne la connaissance de la règle et la maîtrise de sa mise en œuvre. Il s’agit alors de l’étude du droit positif, c’est à dire du droit effectivement applicable et appliqué (étude des branches du droit). Dans un second sens, la science du droit est une réflexion sur le phénomène juridique, réflexion qui peut avoir un objectif d’efficacité, d’amélioration des règles du droit positif ou une finalité spéculative, philosopher sur le droit. C’est cette deuxième conception qui retiendra notre attention. La science du droit rassemble alors différentes sciences et techniques appliquées au phénomène juridique. A- Les sciences auxiliaires du droit Ce sont des sciences qui jouent un rôle privilégié par rapport au droit soit parce qu’elles le prennent directement pour objet, soit parce qu’elles appréhendent, mais d’une autre manière l’objet du droit qui est la société. Elles permettent ainsi d’éclairer le sens de la règle, d’en découvrir les causes et les conséquences ; d’en demander des modifications ou la suppression. On distingue les sciences descriptives et explicatives. 1- Les sciences descriptives L’histoire est la science des évènements qui, dans leur succession, ont marqué l’évolution des sociétés humaines et constitué les civilisations. C’est une science descriptive. L’histoire du droit est l’histoire des institutions juridiques qui ont précédé, de plus ou moins loin, celles de l’époque contemporaine. L’histoire du droit présente un double intérêt. Premièrement, elle permet d’instruire quant aux antécédents des règles de droit positif ainsi que les évolutions qui y ont abouti. Dans un second temps, elle permet d’enrichir l’expérience du juriste et d’améliorer son aptitude à répondre aux besoins actuels de la société. 3 Le droit comparé n’est pas une branche du droit, mais une partie de la science du droit. Il consiste dans l’étude des droits étrangers dans une perspective de comparaison avec le droit positif national. 2- Les sciences explicatives La philosophie est définie comme la réflexion sur l’homme, son action ou son essence. La philosophie du droit désigne une réflexion sur le droit lui-même, à la recherche de ses fondements, de ses fins. La sociologie, est une science de l’homme qui s’attache à l’étude des faits sociaux et des institutions sociales ; elle est en lien direct avec le phénomène juridique. La sociologie juridique a pour rôle de scruter le vécu de la règle de droit. On peut citer également la science politique, la science administrative, les sciences économiques. B- Les méthodes et techniques de la science juridique La science juridique envisage la règle de droit dans la perspective de sa mise en œuvre, indépendamment de toute réflexion sur le phénomène juridique lui-même. 1- Le raisonnement juridique La problématique du raisonnement juridique est généralement présentée dans la perspective de la quête d’une solution à un litige, dans une perspective de contentieux. Le raisonnement juridique est une démarche intellectuelle qui permet de contrôler l’adéquation d’une norme donnée et d’un comportement déterminé susceptible de conduire à la solution des problèmes juridiques, grâce à un certain nombre de moyens rationnels. Pour se déployer, le raisonnement juridique doit évoluer à la fois dans l’abstrait (la formulation de la règle de droit) et dans le concret. Cela revient à disposer non seulement d’un certain nombre de qualités, aptitude à la distinction et une certaine capacité d’imagination, mais également de diverses connaissances techniques fondamentales (langages du droit, définition, des concepts et des catégories). – la définition expose la nature d’une chose ou la signification d’un terme. Elle essaie de caractériser une réalité de l’ordre juridique comme un élément du système juridique (l’article 411 du Code pénal définit le vol). La connaissance du langage juridique est importante, certains 4 termes sont spécifiques (emphytéose, usucapion...), d’autres ont un sens différent du langage courant (lésion, grosse, minute, disparition...). – les concepts ont pour objectif de dégager des règles communes à différentes situations qui se ressemblent. (par exemple le concept de responsabilité se décline en plusieurs catégories). – les catégories sont des regroupements de concepts caractérisés par un certain nombre d’éléments. Les catégories juridiques permettent de déterminer quelle règle juridique s’applique à telle ou telle situation. Ainsi en droit civil, il existe un régime juridique différent pour les meubles et les immeubles, ou bien pour les droits réels et pour les droits personnels. Le juge ou le juriste confronté à une situation de fait doit la qualifier juridiquement, c’est-à-dire la faire rentrer dans une catégorie juridique. Et, à chaque catégorie et concept correspondront des règles particulières. Ce cheminement permet le passage de la règle générale à la règle particulière. Le syllogisme judiciaire est la forme du raisonnement juridique. Pour parvenir à une conclusion ou solution, le juge s’en remet à divers moyens rationnels comme l’induction et la déduction qui assurent la confrontation des faits à la règle de droit. Il est classique de présenter le raisonnement juridique comme la mise en œuvre d’un syllogisme. Dans ce syllogisme, dit judiciaire, la majeure est représentée par la règle de droit, la mineure par les faits exprimés juridiquement en considération des concepts juridiques (souvent elle se dédouble : une première branche expose les faits et une seconde les qualifie) et la conclusion est déduite de cette confrontation. La conclusion traduit l’application de la règle aux circonstances de faits considérées. Elle constitue la décision ou solution. Dès que les affaires deviennent plus complexes, le syllogisme, à lui seul, ne suffit plus, même s’il constitue la base du raisonnement juridique. 2- La recherche juridique Une fois édictée, la règle de droit vit d’une vie propre et échappe à son auteur. A ce titre, il existe une recherche juridique et elle est nécessaire. 5