Mais,
les événements de 1968 vont bouscu-
ler quelque peu cette préséance : la trans-
formation des missions de l'ENSEPS (à
partir de 1970), la loi sur la formation
professionnelle continue (16/7/1971) et
l'intégration universitaire des études en
STAPS (1975) vont radicalement transfor-
mer le profil des auteurs. L'ENSEPS perd,
progressivement, son monopole dans la
formation des professeurs d'E.P. au profit
des U.E.R. nouvellement érigées. Mais,
surtout, le développement de la formation
professionnelle continue (F.P.C.) va don-
ner un dynamisme nouveau à l'innova-
tion : les professeurs d'E.P. des établisse-
ments scolaires (E.S.) vont assurer, le plus
souvent en liaison avec les UEREPS. leur
propre formation, leur propre recyclage,
créant ainsi les conditions de leur entrée en
force dans les colonnes de la Revue EPS.
Preuve éclatante que la profession a su se
dégager de la tutelle de l'ENSEPS - pen-
dant longtemps véritable maison mère et
nourricière.
Aussi, dans son éditorial d'octobre 1953
(EPS 17) l'auteur
a-t-il
raison de souligner
que le Comité d'Etudes et d'Informations
de la Revue EPS « n'est pas une cha-
pelle ». Il est effectivement largement ou-
vert à tous ceux qui s'attachent à la promo-
tion de l'E.P.
11
reste que cette position doit
être nuancée en fonction des périodes.
A la lente érosion de l'ENSEPS, s'oppose
la lente ascension des centres de formation
régionaux, mais, surtout, la percée specta-
culaire des E.S. depuis 1971. On ne peut,
cependant, rester insensible à l'apparition
de plus en plus massive d'articles didacti-
ques en provenance du secteur sportif
extra scolaire (cf. tableau A). Tendance qui
devrait s'accentuer dans les années à venir
du fait du rattachement de l'Education
Physique au Ministère de l'Education. Les
structures traditionnelles. « Jeunesse et
Sport-Temps Libre » peuvent, dès lors (et
bien souvent avec la contribution des pro-
fesseurs d'E.P.) envisager une intervention
éducative qui, à l'animation, ajoute des
cursus de formation qui empruntent lar-
gement à l'enseignement des APS (cf. les
projets du professorat de sport ainsi que
les offres de formation des directions dé-
partementales).
| Du monopole aux concurrences ]
La dynamique de l'innovation
Lorsque la Revue naît, en 1950, elle dis-
pose de trois sources pour alimenter ses
colonnes :
r>
l'ENSEPS qui est à cette époque et pour
l'essentiel un centre national de forma-
tion ;
> les IREPS et les CREPS qui sont des
centres régionaux de formation des ensei-
gnants d'E.P. ;
> les établissements scolaires (E.S.) qui
sont les lieux privilégiés où s'appliquent et
s'expérimentent plus ou moins empiri-
quement les actions didactiques.
Pour reprendre les analyses de Louis Le-
grand (à l'époque Directeur de recherche à
l'INRDP). nous dirons que trois possibili-
tés s'offrent à la Revue EPS pour promou-
voir l'innovation didactique en F.P. :
t-
La revue EPS peut être considérée
comme un centre de décision en matière de
politique rédactionnelle : sa position insti-
tutionnelle ainsi que les conditions de sa
création lui permettent d'établir des rela-
tions privilégiées avec l'ENSEP. Dans ces
conditions il est probable que cette der-
nière bénéficiera, au moins dans les pre-
mières années, d'un monopole de fait dans
la diffusion des articles didactiques : d'au-
tant qu'elle possède les enseignants et les
étudiants les plus compétents pour mettre
en œuvre et expérimenter les contenus de
l'E.P. auprès des classes d'application. La
revue joue alors un rôle de diffuseur du
« centre » à la « périphérie » constitué par
les IREPS d'une part (avec les CREPS) et
les E.S.
r~
Peut-on faire l'hypothèse que, cette mise
en place étant réalisée, s'opérera un ren-
versement de tendance ? Pour les raisons
précédemment évoquées, il est probable
que les E.S. ainsi que les centres de forma-
tion régionaux joueront progressivement
un rôle non négligeable dans l'approvi-
sionnement de la revue EPS en articles
didactiques. On devrait alors constater un
mouvement inverse, allant de la périphérie
(UER, CREPS, E.S.) au centre (essentiel-
lement la revue EPS). En ce qui concerne
l'ENSEPS, ses missions ayant changé, elle
ne devrait plus jouer qu'un rôle discret
dans l'innovation didactique.
> Quant au mouvement réciproque (de la
périphérie au centre et du centre à la
périphérie) il n'existe que dans la mesure
où les professeurs d'E.P. sont abonnés à la
revue EPS : mais dans ce cas il ne
s'agit
nullement d'une action concertée et
contrôlée par l'une ou l'autre des parties.
La revue ne
s'est
jamais fixée pour mission
d'orienter et de guider la recherche péda-
gogique : elle ne fait que prendre acte de
l'évolution de l'E.P., et, si elle joue inévita-
blement une fonction dans l'innovation
didactique, celle-ci n'a jamais fait l'objet (à
notre connaissance) d'une décision expli-
cite (5).
L'âge d'or de l'ENSEPS
Afin d'approfondir cette première analyse,
nous avons dénombré les articles didacti-
ques concernant l'athlétisme, la gymnasti-
que et les sports collectifs, la natation, la
danse, la G.R.S. et le judo (ce choix nous
est dicté évidemment, par la réalité des
pratiques d'APS en milieu scolaire). (Cf.
graphiques 1, 2. 3).
L'ENSEPS monopolise la production
d'ar-
ticles didactiques entre 1950 et 1960. Si elle
maintient sa pression pendant la période
suivante, elle commence à être sérieuse-
ment concurrencée par les centres de for-
mation régionaux et les établissements
scolaires. La période 1972 1982 concrétise
le déclin de l'ENSEPS. Globalement, la
période 1961/1971 correspond à un effort
Les sources institutionnelles
de l'innovation didactique
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Revue EP.S n°192 Mars-Avril 1985 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé