Dysfonction érectile d’origine vasculaire emc

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Dysfonction érectile d’origine vasculaire
P . Desvaux, J.-C. Surier
La dysfonction érectile (DE), de par sa fréquence et l’impact négatif qu’elle a sur la qualité de vie, devient
un problème de santé publique. L’hypothèse de l’origine vasculaire semble prééminente lorsque le patient
a passé la cinquantaine, a fortiori s’il existe des facteurs de risques vasculaires comme une hypertension
artérielle (HTA), une dyslipidémie ou un diabète. La fonction érectile semble représenter un véritable
« baromètre » de la santé générale et particulièrement vasculaire de l’homme. La fonction endothéliale,
et particulièrement la capacité sécrétoire de monoxyde d’azote (NO) semble en être le pivot, le pénis
apparaissant particulièrement sensible àcette sécrétion. La testostérone semblerait avoir un impact
favorable à ce niveau, ce qui en ferait une voie nouvelle de recherche. La DE vasculaire peut donc avoir
plusieurs causes :métabolique avec la dysfonction endothéliale, artérielle, en raison de l’athérome
arrivant précocement sur les artères caverneuse, et vasculotissulaire, responsable de dysfonction veino-
occlusive. Concernant l’apport artériel, il est important de connaître la distribution vasculaire car les
variations anatomiques ne sont pas exceptionnelles et sont sources parfois de situation àrisque,
favorisant une décompensation plus rapide oureprésentant unrisque iatrogénique. L’examen
échodoppler est l’examen de référence pour le diagnostic d’une atteinte artérielle. À l’opposé, son intérêt
pour le diagnostic d’une dysfonction veino-occlusive est beaucoup plus discuté. La véritable révolution est
que le traitement de la DE vasculaire, qui était en pratique quasi exclusivement chirurgical jusqu’à la fin
des années 1970, est devenu quasi exclusivement médical vingt ans plus tard !En première ligne des
traitements figurent les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type V(iPDE5), puis les injections
intracaverneuses et probablement, dans les prochaines années, l’utilisation de traitements hormonaux
substitutifs de testostérone. En cas d’échecs de ces traitements, des interventions de revascularisations
peuvent être proposées à des patients jeunes.
© 2007 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Dysfonction érectile ; Impuissance ; Dysfonction endothéliale ; Pharmacoéchodoppler pénien ;
Artère caverneuse ; Fuite veineuse ; Vascularisation pénienne ; Revascularisation pénienne ;
Monoxyde d’azote
Plan
Généralités 1
Définition de la dysfonction érectile (DE) 1
Prévalence 2
Dysfonction endothéliale 2
Marqueur de la maladie athéromateuse 2
Interférences psychologiques 2
Anatomie vasculaire de la verge 3
Gros troncs 3
Corps caverneux 3
Réseau veineux caverneux 3
Variations anatomiques 3
Diagnostic 4
Interrogatoire 4
Examen clinique 4
Érection pharmacologiquement provoquée 4
Échodoppler 4
Rigidimétrie des érections nocturnes 5
Cavernométrie 5
Cavernographie 6
Artériographie sélective 6
Imagerie par résonance magnétique 6
Causes vasculaires d’une dysfonction érectile 6
Déficit d’apport 6
Dysfonction veino-occlusive 7
Stratégies thérapeutiques 8
Prise en charge médicale de la maladie athéromateuse 8
Prise en charge médicale de la dysfonction érectile 8
Prise en charge chirurgicale de la dysfonction érectile vasculaire 10
Conclusion 10
Généralités
Définition de la dysfonction érectile (DE)
Le terme d’impuissance n’est plus guère utilisé pour différen-
tes raisons : au-delà de la connotation péjorative et sans appel,
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1Angéiologie
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c’est l’incapacité à traduire la réalité biologique de la situation
qui enafait abandonner leterme :peut-on être unpeu
impuissant, beaucoup ou complètement ? Lorsqu’il y a décom-
pensation organique, celle-ci survient progressivement, rendant
les relations sexuelles progressivement plus difficiles. La
dysfonction érectile est donc définie comme l’incapacité
persistante ou récurrente à obtenir ou à maintenir une érection
permettant une relation sexuelle satisfaisante
[1]
.
Prévalence
Longtemps, la prise en charge de la dysfonction érectile n’a
pas dépassé le niveau anecdotique et était réservée à quelques
équipes très spécialisées. La découverte d’un traitement médical
simple et efficace comme les injections intracaverneuses
[2]
aété
à l’origine d’une première diffusion de la prise en charge et a
vu les premières grandes publications sur la prévalence de la DE
depuis Kinsey. The Massachusetts Male Aging Study (MMAS)
[3]
,
publiée en 1993, représente une base de données assez complète
sur 1 290 hommes âgés de 40 à 70 ans, vivant dans la région
de Boston. Ils ont été suivis depuis plusieurs années dans une
étude longitudinale et de nombreux paramètres ont été enregis-
trés. La prévalence de la DE à différents degrés atteignait 52 %
(atteinte minime : 17,2 %, modérée : 25,2 %, complète : 9,6 %).
Le risque d’une DE complète passait de 5,1 % à 40 ans à15 %
à70 ans, le risque d’une atteinte modérée de 17 à34 %. La
maladie a également une influence : le risque de DE complète
passe de 9,6 à15 %en cas d’hypertension artérielle traitée, à
16 %si le high density lipoprotein (HDL) cholestérol est inférieur
ou égal à 30 mg/dl, à 28 % en cas de diabète traité et à 39 %
en cas de cardiopathie traitée. La commercialisation en 1998 de
la première molécule (sildénafil) active per os aréellement
«démocratisé »la prise en charge, ne faisant qu’augmenter
l’intérêt des médecins pour cette pathologie. De nombreuses
autres études sont venues compléter notre connaissance sur
l’incidence de la DE dans la population. Nous citerons l’étude
de Chew et al.
[4]
réalisée en Australie en 2000 par 62 médecins
omnipraticiens sur 1 240 patients :
en cas d’hypertension artérielle traitée, 52 % des patients se
plaignaient de troubles de l’érection àdes degrés divers et
26 % de DE complète ;
en cas d’ischémie myocardique, on retrouvait 61 %de DE
dont 38 % de DE complètes ;
en cas d’artériopathie, on retrouvait 86 % de DE dont 57 %
de DE complètes.
L’étude de Braun, dite «Cologne Male survey » a étudié le
risque de DE en fonction de l’âge, ainsi que les pathologies
associées à la DE. Ainsi l’odds-ratio (OR) pour le risque de DE
est de 11,02 pour les patients âgés de 60 à 69 ans par rapport à
ceux âgés de 30 à 39 ans, et de 22,42 pour les patients âgés de
70 à 80 ans, toujours par rapport à la même population de 30
à 39 ans. Dans la population de 30 à 80 ans, parmi les patients
se plaignant de DE :
20,2 % ont un diabète contre seulement 3,2 % de ceux qui
ne se plaignent pas de DE ;
32 %sont hypertendus contre 13,6 %de ceux qui ne se
plaignent pas de DE ;
72,2 %de patients souffrent d’hyperplasie bénigne de la
prostate (HBP) symptomatique contre 37,7 % de ceux qui ne
se plaignent pas de DE
[5]
.
Dysfonction endothéliale
Dans un certain nombre de cas, la dysfonction érectile relève
d’une altération du lit artériel et/ou d’un dysfonctionnement
des tissus caverneux (endothéliaux, musculaire lisse et conjonc-
tif). Depuis Leriche, l’incidence de l’obstruction artérielle sur les
érections est connue. Les publications sont nombreuses, mon-
trant bien la relation qu’il y a entre atteinte artérielle et DE.
Progressivement, les idées ont évolué, soulignant très clairement
le risque accru d’avoir un trouble de l’érection lorsque sont
présents des facteurs de risque vasculaires comme l’hypertension
artérielle, une dyslipidémie, un diabète de type 1ou 2(voir
supra, Épidémiologie). L’endothélium vasculaire et caverneux a
la capacité de synthétiser du monoxyde d’azote (NO), substance
agissant sur la guanylate cyclase pour augmenter la teneur en
guanosine monophosphate cyclique (GMP-c) et provoquer la
relaxation musculaire lisse. Le NO est connu comme l’un des
médiateurs essentiels dans le déclenchement des érections et les
inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5commercialisés
pour les troubles de l’érection agissent par son intermédiaire, en
diminuant la dégradation du GMP-c. Les différents facteurs de
risque précédemment cités sont connus pour avoir, entre autres
effets, une incidence sur le fonctionnement endothélial.
Marqueur de la maladie athéromateuse
La sensibilité du pénis aux différents facteurs de risque
vasculaire peut-elle faire que la DE soit en quelque sorte un
symptôme sentinelle de la maladie artérielle ?Un certain
nombre d’études semblent aller dans ce sens. Banks et al. ont
étudié 137 sujets souffrant de DE sans atteinte coronarienne.
L’échodoppler pénien apermis de définir plusieurs groupes :
sujets ne présentant pas d’atteinte artérielle jusqu’à sujets
présentant une atteinte sévère. Les facteurs de risque tradition-
nels (lipides, HTA, âge, indice de masse corporelle [IMC], tabac)
et émergeants (protéine C réactive, L (a), homocystéine) étaient
corrélés à la gravité de l’atteinte artérielle génitale. En analyse
univariée, même rapporté à l’âge, le taux de protéine C réactive
restait significativement plus élevé dans le groupe avec atteinte
artérielle
[6]
.
Greenstein atrouvé une corrélation positive entre le degré de
la DE et le nombre de troncs atteints à la coronarographie de
40 sujets coronariens connus
[7]
.Kawanishi, dans une étude
prospective, acomparé les données échodoppler des artères
caverneuses avec les épreuves d’effort réalisées chez 58 patients
souffrant de DE. Quand les sujets avaient un pic systolique
caverneux supérieur à35 cm/s, seulement 3,7 %d’entre eux
avaient une pathologie coronarienne silencieuse. Àl’opposé,
quand la vitesse systolique était abaissée (moyenne 22 cm/s),
41,9 %d’entre eux avaient une pathologie coronarienne
silencieuse
[8]
.
Kloner aétudié 300 patients coronariens ayant eu une
coronarographie. Parmi ceux-ci, 149 présentaient un trouble de
l’érection (49 %). Chez 99 sur 149 de patients coronariens
souffrant de DE (67 %), celle-ci était survenue avant l’angor,
avec une moyenne d’environ 3 ans (1 à 128 mois)
[9]
. Blumen-
tals a comparé, grâce à une large base de données (Integrated
Healthcare Information Services National Managed Care Bench-
mark Database), le risque de faire un accident coronarien selon
que l’on soit ou non atteint d’une DE. En étudiant 12825
patients atteints de DE comparés àun nombre équivalent de
sujets du même âge indemnes de DE, après régression logistique
multivariée, on constate que le risque de faire une atteinte
coronarienne si l’on souffre de DE est 3,8 plus élevé entre
40-44 ans et 4,04 fois plus élevé entre 50-55 ans
[10]
.
Interférences psychologiques
De tous temps, l’homme a assimilé l’érection à la virilité et,
bien souvent, les patients atteints de DE se plaignent «de ne
plus être un homme ». L’atteinte de leur image représente une
blessure narcissique bien souvent tue, mais source d’une
souffrance réelle. Le repli sur soi, la mésentente conjugale, voire
la dépression peuvent alors guetter le patient. En cas d’atteinte
organique, la décompensation est en général progressive (sauf
certaines pathologies alors évidentes), le côté aléatoire de la
possibilité d’une relation sexuelle devient un élément déstabili-
sant pour le couple avec beaucoup de non-dits. Lui se remet en
cause, anticipe son échec, développe une angoisse avec son
cortège de manifestations physiques liées au stress aboutissant
àune sécrétion inappropriée de catécholamines s’opposant à
l’érection, venant aggraver encore plus un équilibre fragile. Elle
se sent remise en cause, « il ne me désire plus » et, face à cette
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blessure narcissique, va avoir tendance àse replier sur elle,
parfois après une période active d’aide envers son partenaire.
Cette dimension psychologique et relationnelle devra toujours
rester présente dans l’esprit du thérapeute, car elle peut modifier
considérablement l’efficacité de n’importe quel traitement
médical ou chirurgical.
Anatomie vasculaire de la verge
Gros troncs
L’artère pudendale interne (honteuse interne) est l’artère
principale de l’érection. Elle naît de la branche antérieure de
division de l’artère hypogastrique. Après un court segment
intrafessier, elle chemine àla face interne de l’os iliaque, au sein
du canal d’Alcock. Elle émet alors la périnéale superficielle, puis
l’artère bulbaire, reconnaissable à l’artériographie par la « fla-
que »bulbaire. Classiquement, elle donne ensuite l’artère bulbo-
urétrale destinée au corps spongieux, puis l’artère caverneuse,
l’artère dorsale correspondant àla branche terminale (Fig. 1)
souvent anastomosée en arcade au niveau du gland à la dorsale
controlatérale.
Corps caverneux
Ils sont vascularisés par les artères caverneuses qui peuvent
émettre un rameau récurrent pour la racine des corps caver-
neux
[11]
.Classiquement, elles parcourent les corps caverneux
jusqu’à leurs extrémités, en donnant un réseau nourricier via
artérioles et capillaires et un réseau fonctionnel moteur via des
artères hélicines (Fig. 2)qui se divisent en bouquets pour
alimenter les alvéoles caverneuses. Bien souvent, l’artère
caverneuse peut soit se dédoubler (Fig. 3), soit émettre une ou
plusieurs branches destinées àla caverneuse controlatérale
(Fig. 4). Parfois, les caverneuses peuvent être courtes, n’allant
pas jusqu’à l’extrémité, le corps caverneux recevant alors des
branches perforantes issues des artères dorsales.
Réseau veineux caverneux
Le plexus veineux sous-albuginéal est constitué de la réunion
des veinules issues des espaces caverneux et celles postcapillaires
du système nourricier. Ce plexus émet des veines émissaires qui
vont traverser l’albuginée selon un trajet oblique et se jeter
directement dans la veine dorsale profonde pour la partie
supérieure des corps caverneux, les veines émissaires de la partie
inférieure et latérale se regroupent en veines circonflexes qui
iront se jeter dans la dorsale profonde. Les veines émissaires de
la partie proximale des corps caverneux, souvent appelées
caverneuses, sont plus volumineuses et se jettent soit directe-
ment dans le plexus de Santorini, soit dans les veines honteuses
internes.
Variations anatomiques
Les variations anatomiques sont très nombreuses concernant
la vascularisation des corps caverneux. Nous ne les décrirons pas
toutes mais il semble opportun de rapporter celles qui peuvent
avoir une influence sur les explorations et/ou un geste chirur-
gical. Les corps caverneux peuvent être alimentés par une artère
pudendale accessoire, naissant soit de l’hypogastrique, soit de
l’obturatrice ou de l’ischiatique
[12]
. Cette variation anatomique
est utile àconnaître car cette artère peut être lésée lors d’une
prostatectomie radicale, son trajet étant très proche de la
prostate
[13]
.Au niveau pelvien, les possibilités d’anastomoses
sont nombreuses entre les branches viscérales (vésicoprostati-
ques, hémorroïdale moyenne) ou musculaires (fessière, obtura-
trice, ischiatique) et la pudendale, rendant compte de possibilité
de suppléances en cas d’obstruction de la voie principale ou, à
l’opposé, étant responsable d’un phénomène de vol lors de
l’atteinte de l’iliaque externe. Au niveau intrapénien, l’existence
de collatérales entre les deux caverneuses peut expliquer un flux
rétrograde bien identifiable en échodoppler dans une caver-
neuse dont la voie principale est atteinte. Parfois, les deux
Figure 1. Bifurcation d’une artère pudendale (donnant la dorsale, la
caverneuse, et la bulbo-urétrale).
Figure 2. Artères hélicines.
Figure 3. Dédoublement de l’artère caverneuse.
Figure 4. Branche caverneuse controlatérale.
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caverneuses peuvent naître d’un tronc commun (Fig. 5). Enfin,
il existe une asymétrie fréquente entre les deux artères dorsales,
avec parfois une artère grêle d’un côté sans que cela n’ait de
caractère péjoratif. Enfin, les deux dorsales peuvent naître de la
même artère pudendale.
Diagnostic
Interrogatoire
L’interrogatoire reste une donnée essentielle dans la prise en
charge d’une DE quelle que soit l’origine suspectée de celle-ci.
Il convient bien évidemment de rechercher des facteurs de
risque vasculaire classiques comme un tabagisme, une dyslipi-
démie, une hypertension artérielle, un diabète, mais aussi des
facteurs moins connus comme la pratique intensive du cyclisme
(atteinte de l’iliaque externe à l’origine d’un phénomène de vol
ou lésion de l’artère pudendale par compression). Existe-t-il des
symptômes en faveur d’une artériopathie ? Les autres causes de
DE doivent également être recherchées comme un hypogona-
disme, une atteinte neurologique, une mésentente avec la
partenaire, des problèmes psychologiques. Il est également
indispensable d’essayer de faire la différence entre ce qui
pourrait être en partie àl’origine du trouble et ce qui en est
plutôt la conséquence. Ainsi, l’humeur dépressive et l’absence
de désir peuvent parfois égarer le thérapeute. Il est important de
pouvoir faire préciser le début des troubles :sont-ils de survenue
progressive ou de survenue brutale, àla suite d’un traitement ou
d’une intervention ?Existe-t-il des érections matinales ou
nocturnes ?Seraient-elles de rigidité et de durée suffisantes pour
avoir une relation sexuelle ? S’il existe encore un début d’érec-
tion, y a-t-il une déformation de la verge ?
Examen clinique
L’examen clinique doit absolument être complet, la valeur
d’orientation de chaque signe est importante car cela permettra
d’optimiser la demande d’examen complémentaire si cela
s’avérait nécessaire. Dans ce chapitre consacré aux causes
vasculaires de la DE, nous mettrons bien sûr l’accent sur l’aspect
circulatoire sans oublier les autres causes. L’inspection au niveau
des membres inférieurs permettra de relever un livedo, une
pâleur tégumentaire, une perte de la pilosité, voire une amyo-
trophie discrète. L’examen est complété par la palpation des
pouls et l’auscultation des gros troncs. La silhouette permet
parfois de suspecter une participation hormonale en présence
d’une répartition gynoïde des graisses, d’une adipomastie, voire
d’une vraie gynécomastie. L’examen des organes génitaux est
essentiel, permettant de révéler une atrophie testiculaire, une
induration de la verge en faveur d’une maladie de Lapeyronie
ou une fibrose liée à un priapisme ou à un traumatisme. Il est
parfois possible de percevoir un pouls pénien, sur une grosse
artère dorsale, le plus souvent d’un seul côté sans que cela n’ait
une valeur péjorative.
Érection pharmacologiquement provoquée
Pour beaucoup, ce test prolonge l’examen clinique et permet
d’avoir quelques éléments tout àla fois d’orientation et de
pronostic. En pratique, il est réalisé par l’injection intracaver-
neuse (IIC) d’une dose variable de 5 à 20 µg d’alprostadil
(analogue synthétique de la PGE1)
[14]
.L’érection se produit
habituellement dans les 5 à 20 minutes après l’injection, parfois
de manière plus retardée lorsqu’il existe une atteinte artérielle.
Le test est considéré comme positif s’il survient une érection
suffisante pour une relation sexuelle, érection se maintenant au
moins une dizaine de minutes. En cas d’échec, le test est refait
quelques jours plus tard, habituellement en doublant la dose.
S’il n’a pas de valeur absolue, ce test peut néanmoins être riche
d’enseignements. La déformation de la verge en érection permet
de repérer une fibrose des tissus pas toujours évidente en
flaccidité. L’obtention d’une érection rigide qui se maintient
permet d’éliminer la redoutable atteinte tissulaire caverneuse à
l’origine d’une dysfonction veino-occlusive mais ne permet pas
d’éliminer une atteinte artérielle modérée
[15, 16]
. La possibilité
de provoquer une érection apporte un argument pronostique
pour la suite de la prise en charge. En cas d’échec des autres
thérapies, le patient pourra avoir recours aux auto-injections.
Enfin, et ce n’est pas le moindre des avantages, la constatation
par le patient d’une bonne érection a toujours un effet psycho-
logique favorable sur la suite de la prise en charge. La difficulté
d’interprétation tient au fait que le test peut être faussement
négatif, notamment en raison d’une hyperadrénergie liée au
stress de l’examen. Il convient surtout de ne pas conclure sur la
négativité d’un seul test, qu’il faut savoir renouveler, parfois
avec une association médicamenteuse.
Échodoppler
Il s’agit de l’examen de première intention pour la recherche
d’une cause vasculaire àla DE. Entre des mains entraînées, il est
d’une grande fiabilité pour le diagnostic d’une atteinte artérielle,
mais son intérêt est très relatif dans le diagnostic des dysfonc-
tions veino-occlusives. Nous ne nous attarderons pas sur la
technique de l’examen à laquelle un chapitre est consacré dans
cet ouvrage. Précisons cependant que cet examen n’a d’intérêt
pour les artères génitales que couplé à une injection intracaver-
neuse habituellement de 10 ou 20 µg d’alprostadil (PGE1).
L’examen permet d’effectuer une étude anatomique des diffé-
rents axes vasculaires, de visualiser les artères caverneuses
(Fig. 6), dorsales et bulbo-urétrales ainsi que parfois les perfo-
rantes dorsales à destinée caverneuse ou des branches interca-
verneuses décrites supra. Le doppler puissance permet de
visualiser les branches de division des artères caverneuses.
Figure 5. Artère caverneuse unique vascularisant les deux corps. Figure 6. Artères caverneuses normales.
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L’étude hémodynamique permet d’enregistrer la vitesse du
pic systolique (PSV) (Fig. 7), l’accélération, la vitesse en fin de
diastole et l’index de résistance (RI) des différentes artères. Pour
Aboseif et Lue, la valeur moyenne du pic systolique chez le
sujet sain est de 34,8 cm/s
[17]
.Pour la Mayo clinic, un PSV
inférieur à25 cm/s est associé àune atteinte artérielle sur
l’artériographie avec une sensibilité de 100 % et une spécificité
de 95 %. Un PSV supérieur à 35 cm/s élimine quasiment une
atteinte obstructive
[18]
.C’est pour les valeurs comprises entre
25 et 35 cm/s que les mesures de l’accélération systolique
prennent leur intérêt. Serait pathologique une accélération
systolique inférieure à 4 m/s, ou un temps d’ascension systoli-
que supérieur à110 ms
[19]
.Pour Speel, le temps de montée
systolique est le caractère le plus fiable et il est bien corrélé avec
le rapport intima-média
[20]
.L’apport de l’échodoppler au
diagnostic d’une dysfonction veino-occlusive est beaucoup plus
discuté. Les paramètres considérés comme « pertinents » sont la
vitesse résiduelle en fin de diastole et/ou l’index de résistance.
Ces deux paramètres sont directement liés à la pression intraca-
verneuse (et donc le degré d’érection) influant sur les résistances
vasculaires. Les profils de vitesse sur les artères caverneuses au
cours de l’érection ont bien été décrits chez l’individu sain
[21]
.
Au cours de l’érection complète, le flux diastolique est quasi
nul, voire il existe une onde de reflux chez le sujet jeune. Lors
de l’examen échodoppler, la constatation d’un flux en fin de
diastole inférieur à 5 cm/s élimine une dysfonction veino-
occlusive
[18]
. Après une injection intracaverneuse, le sujet peut
ne pas présenter un flux diastolique pour deux raisons : soit les
résistances vasculaires restent élevées car il existe une fibrose des
tissus, auquel cas la tumescence est extrêmement modeste, voire
totalement absente, soit le sujet présente une érection rigide !
On peut donc simplifier en disant que l’apparition d’une
érection élimine une dysfonction veino-occlusive ! Malheureu-
sement, déclencher une érection est très dépendant de la nature
du vasodilatateur injecté (a-bloquant < papavérine < alprostadil
<associations IIC), de la dose injectée, des circonstances de
l’examen, du stress du sujet, de la pathologie présentée... Pour
ces raisons, il est difficile et hasardeux de porter un diagnostic
de dysfonction veino-occlusive sur un seul examen, ce qui
conduit à beaucoup de faux positifs.
Une étude fonctionnelle a été proposée par R. Virag
[22]
pour
tenter d’évaluer la réserve en NO au niveau caverneux, le NO
étant considéré comme l’un des médiateurs essentiels au
déclenchement de l’érection. Reprenant ce qui se fait au niveau
du bras, un brassard de 35 mm est gonflé àla racine de la verge
à une pression suprasystolique pendant 5 minutes. On mesure
alors le diamètre interne de l’artère caverneuse la plus accessible
avant le gonflage du brassard et ensuite à30 et 90 secondes
après sa levée. Le pourcentage d’augmentation du calibre artériel
est mesuré. Sur une étude de 95 patients répartis en trois
groupes, 22 sujets ne souffrant pas de DE (groupe 1témoin),
26 sujets présentant une DE psychogène (groupe 2) et 47 sujets
présentant une DE organique (groupe 3), le test a montré une
augmentation du calibre artériel de 65 ± 26,3 % dans le groupe
1, de 68 ±40 %dans le groupe 2, mais seulement de 16,4 ±
8,4 %dans le groupe 3(p=0,0001). En fixant le seuil de
pourcentage d’augmentation à35 %, le test serait, selon son
auteur, capable de prédire une atteinte organique avec une
sensibilité de 100 % et une spécificité de 92 %.
Rigidimétrie des érections nocturnes
Au cours de la nuit, un individu va présenter une alternance
de quatre àcinq cycles de sommeil, d’abord lent puis paradoxal.
Le sommeil paradoxal est un sommeil profond, marqué par
l’activité onirique, une diminution du tonus musculaire, des
mouvements oculaires rapides et l’apparition d’érections. Un
individu sain va donc présenter, au cours de la nuit, entre 3 et
5 érections de 10 à 30 minutes chacune.
La possibilité d’enregistrer le nombre, la qualité et la durée de
ces érections permet de se faire une idée sur la fonction érectile
d’un sujet.
En pratique
L’appareil de référence pour cette rigidimétrie nocturne est
actuellement le Rigiscan
®
.Il s’agit d’un appareil miniaturisé qui
peut être confié au patient pour que l’enregistrement puisse être
fait à domicile. Deux capteurs « à lasso » sont fixés sur la verge,
l’un àla racine l’autre sous le gland, l’appareil effectuant un
certain nombre de mesures à intervalles réguliers, mesurant la
tumescence (ouverture du lasso) et la rigidité (mesure de la
résistance àla mise en tension du lasso). Les données, qui
peuvent être stockées sur plusieurs nuits, sont retranscrites via
un système informatique et éditées sous forme de graphiques.
Interprétation
L’examen est considéré comme normal si le sujet présente
une érection supérieure ou égale à70 %de la rigidité maximale,
pendant plus de 10 minutes et avec une augmentation de
circonférence de 2 à 3 cm.
La constatation d’une telle érection permet de mettre hors de
cause un trouble vasculotissulaire de la verge.
L’absence d’érection permet-elle de conclure qu’il existe une
atteinte organique ?
Non de l’avis de différents auteurs et la première question est
de savoir si le patient adormi, aprésenté des phases de
sommeil paradoxal
[23, 24]
. Pour répondre à cette interrogation,
ilfaut unenregistrement concomitant dusommeil. Cela
alourdit considérablement le protocole et ne peut être fait à
domicile, nécessitant l’hospitalisation du sujet.
Pièges à éviter
Ainsi appareillé, il est fréquent que le sujet dorme mal,
surtout la première nuit, aussi est-il souvent nécessaire de
procéder à d’autres enregistrements si le tracé est perturbé.
Plusieurs auteurs ont comparé les résultats de la rigidimétrie
nocturne àceux d’explorations spécifiques pratiquées chez les
mêmes patients. Il en résulte que la valeur prédictive positive
s’échelonnait de 51 à 71 % et la valeur prédictive négative de
74 à81 %, mettant ainsi en évidence 20 à30 %de faux
négatifs.
Parmi les faux négatifs, on retrouve les troubles du sommeil,
le diabète et les dépressions nerveuses, parmi les faux positifs,
certaines maladies neurologiques et certains syndromes vascu-
laires (vol pelvien)
[25, 26]
.
Cavernométrie
Cet examen n’est que très peu utilisé en France, il est d’usage
plus fréquent chez les Anglo-Saxons. Son intérêt a très nette-
ment diminué au fur et à mesure que notre connaissance de la
Figure 7. Mesure de la vitesse circulatoire dans l’artère.
Dysfonction érectile d’origine vasculaire
19-1710
5Angéiologie
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