Professions Santé Infirmier Infirmière N° 54 • avril 2004
Soins Libéraux 39
n tête des causes de dysfonc-
tion érectile, l’origine psycho-
gène est la première à
rechercher. Qu’un problème per-
sonnel se produise, que se passe
un changement de vie profession-
nel ou affectif et la fonction érectile
est la première touchée. Lorsqu’une
telle situation se présente, il est sou-
vent inutile d’entamer les explora-
tions complémentaires avant d’avoir
envisagé une consultation psycho-
sexologique. Cependant, l’étiologie
psychogène ne peut tout expliquer,
et d’autres causes intriquées et mul-
tiples peuvent intervenir. La pre-
mière des causes sont organiques,
telles que l’HTA, les cardiopathies
ischémiques, l’insuffisance cardia-
que, puis les troubles métaboliques
lipidiques. Par exemple, un diabète
induit une pathologie mixte, arté-
rielle et neurologique, et a donc une
double responsabilité. En dehors du
diabète, les atteintes neurologiques
peuvent provenir d’une sclérose en
plaques, d’une atteinte médullaire
infectieuse, dégénérative ou vascu-
laire. La diminution de la libido peut
aussi être due à un trouble endocri-
nien : l’hypo-androgénie plus, alors,
que l’hypothyroïdie.
Parmi les autres étiologies, sont à
envisager d’emblée les causes iatro-
gènes, car elles sont fréquentes
mais faciles à diagnostiquer, et les
médicaments, susceptibles de cau-
ser une dysfonction érectile sont, en
effet, nombreux. Que ce soit les
antiépileptiques, les neuroleptiques,
les antidépresseurs, ou encore les
diurétiques, les antihypertenseurs
centraux, les hypolipidémiants. Les
médications destinées à lutter
contre l’hypertrophie bénigne de la
prostate comme les alpha-bloquants
et
les inhibiteurs de la 5-alpha
réductase sont aussi responsables.
La chirurgie oncologique pelvienne
sur la prostate, bien sûr, mais aussi
sur la vessie et le côlon, peut avoir
un effet délétère. Ainsi, la prostatec-
tomie provoque une anéjaculation
définitive mais très souvent égale-
ment une dysfonction érectile. La
radiothérapie externe est de même
effet.
La première consultation
Tout patient présentant une plainte
sexuelle doit être écouté et subir un
examen médical complet, même si
une cause psychologique peut être
avancée. L’examen débute par une
analyse des organes génitaux
externes à la recherche d’une ano-
malie testiculaire : atrophie, dysgé-
nésie, ou d’une anomalie pénienne :
induration des corps caverneux avec
angulation. L’examen se poursuit par
un toucher rectal, à faire systémati-
quement après 50 ans. Le praticien
peut ainsi apprécier l’état de la pros-
tate, sa taille, son volume, sa consis-
tance. L’analyse clinique peut, si
besoin, être précisée par un appro-
fondissement échographique. Le
reste de l’examen s’attache à recher-
cher l’existence de facteurs de
risque cardiovasculaires comme une
HTA, une ischémie myocardique,
une artériopathie périphérique, des
troubles lipidiques, une alcoolisa-
tion, un tabagisme. Une anomalie
neurologique de type neuropathie
centrale ou périphérique peut être
recherchée. Pour contribuer à cette
recherche, parmi les explorations
complémentaires à cette première
consultation, on ne conseillera que
les dosages lipidique et glycémique
s’ils ne sont pas déjà connus et nor-
maux. À distance du toucher rectal,
qui peut fausser son estimation, un
taux de PSA est utile à réaliser pour
dépister les maladies prostatiques,
surtout tumorales. Un examen con-
cernant le taux de testostérone est
aujourd’hui conseillé. Au terme de
cette consultation, la dysfonction
érectile a ainsi pu être appréciée, les
étiologies énumérées ont été repé-
rées, en sachant que le trouble
sexuel est rarement d’origine mono-
factorielle.
Traitement
Qu’il soit cause ou conséquence, le
volet psychologique des troubles de
l’érection est essentiel à traiter. La
prise en charge peut alors être effec-
tuée par le médecin de famille, sinon
par un psychothérapeute ou un
psychosexologue. Symptomatiques
exclusivement, les traitements oraux
n’en sont pas moins utiles. On utilise
alors essentiellement les inhibiteurs
de la phosphodiestérase de type 5
(sildénafil, tadalafil). Mais il faut
savoir que sans le désir, ces médica-
ments sont décevants. Certaines
recherches montrent l’intérêt d’un
apport de testostérone. Il est encore
possible d’utiliser un traitement local
par voie intra-urétrale ou intracaver-
neuse. En dernier recours, la pose
d’un implant pénien permet encore
de trouver des solutions lorsque tout
semble avoir échoué. A noter que la
DHEA n’a pas démontré, chez
l’homme, de capacité à lutter contre
les dysérections.
JB
Dysfonctionnements érectiles
Une véritable détresse
En 1993, l’étude Spira montrait que 19 % des hommes de
18 à 65 ans présentaient des troubles de l’érection,
contre 25 % pour une étude parue en 2002, avec même un
taux de 44 % pour les plus de 45 ans. Aujourd’hui, des
hommes (et des femmes) osent en parler. Le sujet est
moins tabou, mais pas encore facile.
E