Soins libéraux 19/04/04 16:07 Page 39 Soins Libéraux Dysfonctionnements érectiles Une véritable détresse En 1993, l’étude Spira montrait que 19 % des hommes de 18 à 65 ans présentaient des troubles de l’érection, contre 25 % pour une étude parue en 2002, avec même un taux de 44 % pour les plus de 45 ans. Aujourd’hui, des hommes (et des femmes) osent en parler. Le sujet est moins tabou, mais pas encore facile. E n tête des causes de dysfonction érectile, l’origine psychogène est la première à rechercher. Qu’un problème personnel se produise, que se passe un changement de vie professionnel ou affectif et la fonction érectile est la première touchée. Lorsqu’une telle situation se présente, il est souvent inutile d’entamer les explorations complémentaires avant d’avoir envisagé une consultation psychosexologique. Cependant, l’étiologie psychogène ne peut tout expliquer, et d’autres causes intriquées et multiples peuvent intervenir. La première des causes sont organiques, telles que l’HTA, les cardiopathies ischémiques, l’insuffisance cardiaque, puis les troubles métaboliques lipidiques. Par exemple, un diabète induit une pathologie mixte, artérielle et neurologique, et a donc une double responsabilité. En dehors du diabète, les atteintes neurologiques peuvent provenir d’une sclérose en plaques, d’une atteinte médullaire infectieuse, dégénérative ou vasculaire. La diminution de la libido peut aussi être due à un trouble endocrinien : l’hypo-androgénie plus, alors, que l’hypothyroïdie. Parmi les autres étiologies, sont à envisager d’emblée les causes iatrogènes, car elles sont fréquentes mais faciles à diagnostiquer, et les médicaments, susceptibles de causer une dysfonction érectile sont, en effet, nombreux. Que ce soit les antiépileptiques, les neuroleptiques, les antidépresseurs, ou encore les diurétiques, les antihypertenseurs centraux, les hypolipidémiants. Les médications destinées à lutter contre l’hypertrophie bénigne de la prostate comme les alpha-bloquants et les inhibiteurs de la 5-alpha réductase sont aussi responsables. La chirurgie oncologique pelvienne sur la prostate, bien sûr, mais aussi sur la vessie et le côlon, peut avoir un effet délétère. Ainsi, la prostatectomie provoque une anéjaculation définitive mais très souvent également une dysfonction érectile. La radiothérapie externe est de même effet. La première consultation Tout patient présentant une plainte sexuelle doit être écouté et subir un examen médical complet, même si une cause psychologique peut être avancée. L’examen débute par une analyse des organes génitaux externes à la recherche d’une anomalie testiculaire : atrophie, dysgénésie, ou d’une anomalie pénienne : induration des corps caverneux avec angulation. L’examen se poursuit par un toucher rectal, à faire systématiquement après 50 ans. Le praticien peut ainsi apprécier l’état de la prostate, sa taille, son volume, sa consistance. L’analyse clinique peut, si besoin, être précisée par un approfondissement échographique. Le reste de l’examen s’attache à rechercher l’existence de facteurs de risque cardiovasculaires comme une HTA, une ischémie myocardique, une artériopathie périphérique, des troubles lipidiques, une alcoolisation, un tabagisme. Une anomalie neurologique de type neuropathie centrale ou périphérique peut être recherchée. Pour contribuer à cette recherche, parmi les explorations complémentaires à cette première consultation, on ne conseillera que les dosages lipidique et glycémique s’ils ne sont pas déjà connus et normaux. À distance du toucher rectal, qui peut fausser son estimation, un taux de PSA est utile à réaliser pour dépister les maladies prostatiques, surtout tumorales. Un examen concernant le taux de testostérone est aujourd’hui conseillé. Au terme de cette consultation, la dysfonction érectile a ainsi pu être appréciée, les étiologies énumérées ont été repérées, en sachant que le trouble sexuel est rarement d’origine monofactorielle. Traitement Qu’il soit cause ou conséquence, le volet psychologique des troubles de l’érection est essentiel à traiter. La prise en charge peut alors être effectuée par le médecin de famille, sinon par un psychothérapeute ou un psychosexologue. Symptomatiques exclusivement, les traitements oraux n’en sont pas moins utiles. On utilise alors essentiellement les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (sildénafil, tadalafil). Mais il faut savoir que sans le désir, ces médicaments sont décevants. Certaines recherches montrent l’intérêt d’un apport de testostérone. Il est encore possible d’utiliser un traitement local par voie intra-urétrale ou intracaverneuse. En dernier recours, la pose d’un implant pénien permet encore de trouver des solutions lorsque tout semble avoir échoué. A noter que la DHEA n’a pas démontré, chez l’homme, de capacité à lutter contre les dysérections. JB Professions Santé Infirmier Infirmière N° 54 • avril 2004 39