RIDE 253 0281 (2) DROIT CONCURR

Telechargé par acha91sako
PERSPECTIVES EUROPÉENNES SUR LA POLITIQUE DE LA
CONCURRENCE DANS L'ESPACE OHADA
Josef Drexl
De Boeck Supérieur | « Revue internationale de droit économique »
2011/3 t.XXV | pages 281 à 304
ISSN 1010-8831
ISBN 9782804165321
Article disponible en ligne à l'adresse :
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
https://www.cairn.info/revue-internationale-de-droit-
economique-2011-3-page-281.htm
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur.
© De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays.
La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les
limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la
licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie,
sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de
l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage
dans une base de données est également interdit.
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Revue Internationale de Droit Économique – 2011 – pp. 281-304 – DOI: 10.3917/ride.253.0281
PERSPECTIVES EUROPÉENNES
SUR LA POLITIQUE DE LA CONCURRENCE
DANS L’ESPACE OHADA
Josef DREXL1
Résumé: Sur le plan supranational en Afrique, le droit de la concurrence est visé
par les systèmes d’intégration existants ou émergents comme ceux de l’UEMOA en
Afrique de l’Ouest et de la CEMAC en Afrique centrale. Par contre, jusqu’à l’heure
actuelle, l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
(OHADA) ne s’occupe pas du droit de la concurrence, ce qui pose la question de
savoir si l’OHADA devrait avoir un rôle à jouer dans ce domaine. Le présent article
aborde cette question dans une perspective européenne, en analysant l’approche
de l’Union européenne en matière d’harmonisation du droit de la concurrence de
ses États membres. En particulier, cette analyse met en relief les particularités du
droit de la concurrence par rapport à d’autres matières du droit des affaires. Ces
particularités peuvent expliquer les raisons pour lesquelles l’UE, jusqu’à mainte-
nant, n’a pas harmonisé le droit de la concurrence dans les États membres. Mais la
nécessité d’appliquer le droit de l’Union d’une manière décentralisée et les règles
procédurales qui en résultent ont abouti à une harmonisation « souple » des droits
nationaux. Pour l’OHADA, l’expérience européenne explique que la création d’une
loi uniforme, en conformité avec l’approche traditionnelle de l’OHADA, ou la
création d’un droit de la concurrence supranational de l’OHADA, qui s’ajouterait
aux systèmes existants, ne produiraient guère des réponses adéquates. Par contre,
l’article propose la création d’une politique concurrentielle pour l’Afrique, basée
sur des recommandations ou des lignes directrices non contraignantes, qui pour-
raient être appliquées par les autorités nationales et supranationales existantes ou
émergentes en Afrique subsaharienne. De même, il fait l’analyse critique de la poli-
1. Dr. iur., LL.M. (Berkeley), directeur de l’Institut Max Planck pour la propriété intellectuelle et le
droit de la concurrence, Munich, professeur honoraire à l’Université de Munich.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
282 Perspectives européennes sur la politique de la concurrence dans l’espace OHADA
tique de l’UE envers les pays en développement qui, dans le cadre des négociations
pour des accords de partenariat économique (APE), pourrait facilement mener à un
« regroupement géographique » des systèmes d’intégration économique en Afrique.
Par conséquent, l’Europe ferait mieux de promouvoir l’idée d’un centre de politique
de la concurrence africain qui, en formulant des recommandations ou des lignes
directrices relatives à la politique de la concurrence pour l’Afrique, contribuerait
davantage au développement durable des économies africaines et à leur intégration
dans l’économie mondialisée.
1 Introduction
2 Avant-propos sur la nécessité d’une politique de la concurrence en Afrique
3 L’expérience européenne
3.1 Notions divergentes du concept de l’harmonisation dans l’UE et dans l’espace
OHADA
3.2 L’harmonisation dans le domaine du droit de la concurrence se distingue
fondamentalement de l’harmonisation dans d’autres domaines du droit des affaires
3.3 L’existence d’un droit de la concurrence national dans tous les États membres
3.4 Développement historique de l’harmonisation du droit de la concurrence en Europe
3.5 L’harmonisation souple du droit de la concurrence en Allemagne en particulier
3.6 Mesures pour promouvoir une harmonisation « souple » du côté européen
4 Conclusion pour l’OHADA
5 Conclusion pour l’Union européenne
6 Conclusion générale
Summary
1 INTRODUCTION
Ces dernières années, le droit de la concurrence a connu un développement extrê-
mement rapide dans les pays d’Afrique subsaharienne2. Ce développement s’est
effectué non seulement au niveau national, mais aussi et surtout dans le cadre d es
organisations d’intégration économique régionales. Avec la conclusion du traité sur
l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) en 19943, un accord
qui inclut des règles sur la concurrence4, l’Afrique francophone a été la première à
connaître l’émerge nce de systèmes supranationaux pour la protection de l a concur-
2. Cependant, l’Afrique est bien en retard en ce qui concerne le développement du droit de la concur-
rence. Sur les raisons de ce retard v. D. Gerber, Global Competition – Law, Markets, and Globali-
zation, Oxford, Oxford University Press, 2010, pp. 248-257.
3. Traité signé à Dakar le 10 janvier 1994, entré en vigueur le 1er août 1994. Texte disponible sur :
http://www.uemoa.int/documents/TraitReviseUEMOA.pdf. Aujourd’hui, l’UEMOA est composée
de huit États membres : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le
Niger, le Sénégal et le Togo.
4. Art. 88, 89 et 90 du traité. Ces dispositifs ont été mis en œuvre le 1er janvier 2003 par divers règle-
ments et directives. V. en général M. Bakhoum, L’articulation du droit communautaire et des droits
nationaux de la concurrence dans l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA),
Berne et Bruxelles, Stämp i Éditions et Bruylant, 2007, p. 11.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Perspectives européennes sur la politique de la concurrence dans l’espace OHADA 283
rence sur le continent. Aujourd’hui, des règles de la concurrence existent également
dans le cadre de la Communauté de l’Afrique de l’Est (East African Community,
EAC)5 et du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Common Market
for Eastern and Southern Africa, COMESA)6. En outre, la Co mmunauté Écono-
mique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO)7 est actuellement en train de
négocier une politique de la concurrence, même si une telle politique existe déjà à
l’intérieur de la CEDEAO pour le sous-groupe des États membres de l’UEMOA8.
En n, un projet vise également à élaborer une politique régionale de la concurrence
dans le cadre de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale
(CEMAC)9 et une autre dans celui de la Communauté de développement d’Afrique
5. L’art. 75 c) du Traité sur la Communauté de l’Afrique de l’Est inclut l’établissement d’une Union
douanière avec une politique concurrentielle. V. Treaty for the Establishment of the East African
Community, signé le 30 novembre 1999, entré en vigueur le 7 juillet 2000 ; texte disponible sur:
http://www.eac.int/treaty/. La Communauté a cinq États membres, le Burundi, le Kenya, l’Ouganda,
le Rwanda et la Tanzanie, dont deux sont francophones. La première étape pour l’établissement
d’un système de contrôle supranational a conduit à l’adoption d’une loi de la concurrence en 2006
(EAC Competition Act, 2006) par l’Assemblé législative de l’EAT ; texte disponible sur : http://www.
eac.int/trade/. Cette loi prévoit aussi l’établissement d’une Autorité de contrôle communautaire
(East African Community Competition Authority). En 2009, un règlement sur la concurrence a été
adopté qui prévoit des pouvoirs spéci ques pour l’Autorité, laquelle, à l’heure actuelle, n’a pas
encore été installée. V. le projet de règlement (The East African Community Competition Regula-
tions, 2010), disponible sur : http://www.eac.int/trade/index.php?option=com_docman&task=cat_
view&gid=38&Itemid=124. En outre, l’adoption d’une loi de la concurrence nationale en Ouganda
et au Rwanda fait défaut.
6. V. Treaty for the Establishment of COMESA, signé le 5 novembre 1993, entré en vigueur en
1994, disponible sur : http://about.comesa.int/attachments/149_090505_COMESA_Treaty.pdf. Le
COMESA compte actuellement 19 États membres : le Burundi, les Comores, le Djibouti, l’Égypte,
l’Érythrée, l’Éthiopie, le Kenya, la Libye, Madagascar, le Malawi, l’Île Maurice, l’Ouganda, la
République démocratique du Congo, le Rwanda, les Seychelles, le Soudan, le Swaziland, la Zambie
et le Zimbabwe. L’art. 55 para. 1 du traité interdit les ententes restrictives. Selon l’art. 55 para. 2, le
Conseil des ministres peut déclarer inapplicable cette interdiction en suivant le modèle de l’art. 101
para. 3 TFUE. Selon l’alinéa 3, le Conseil a le pouvoir supplémentaire de régler la concurrence à
l’intérieur du Marché commun. Sur la base de ces dispositifs, le COMESA, en 2004, a adopté un
règlement de la concurrence (COMESA Competition Regulations) avec des règles substantielles,
institutionnelles et procédurales ; texte disponible sur : http://www.givengain.com/cause_data/
images/1694/COMESACompetitionRegulations.pdf. Surtout, ce règlement prévoit la création
d’une autorité de contrôle (COMESA Competition Commission), qui a été établie à Blantyre, au
Malawi, en 2008.
7. V. Traité du CEDEAO de 1993, disponible sur : http://www.parl.ecowas.int/french/documentations/
traite.pdf.
8. Tous les États membres de l’UEMOA sont aussi membres de la CEDEAO. Les autres États membres
sont le Cap Vert, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Liberia, le Nigéria et la Sierra Leone.
9. V. http://www.cemac.int/. La CEMAC est composée de six États membres : le Cameroun, le Congo-
Brazzaville, le Gabon, la Guinée équatoriale, la République centrafricaine et le Tchad. V. surtout
l’étude commissionnée par la CEMAC et réalisée par G. Charrier, Projet de révision du dispositif
institutionnel concurrence de la CEMAC, février 2010, disponible sur : http://patronat-ecam.org/
Documents/Projet_de_revision_Dispositif_institutionnel_concurrence_Cemac.pdf.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
284 Perspectives européennes sur la politique de la concurrence dans l’espace OHADA
australe (Southern African Development Community, SADC)10. Il résulte de cette
coexistence de diverses politiques régionales de la concurrence une image d’une
extrême complexité dont l’af liation d’un nombre d’États à plusieurs régimes
supranationaux est la cause principale.
Le droit de la concurrence fait partie du droit des affaires. Au regard de la forte
activité législative menée en droit de la concurrence dans les autres organisations
régionales, il est étonnant que, jusqu’à présent, l’Organisation pour l’Harmonisa-
tion en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) n’ait pas légiféré en droit de la
concurrence. En tant qu’organisation de grande expertise en droit des affaires, qui,
traditionnellement, s’occupe du droit en Afrique francophone, elle pourrait surtout
s’orienter dans le sens d’une politique uniforme pour tous les États francophones de
l’Afrique, en regroupant les États membres de l’UEMOA et de la CEMAC.
Par conséquent, dans notre analyse, nous allons examiner le rôle que l’OHADA
peut ou pourrait jouer dans le développement d’une politique concurrentielle et d’un
droit de la concurrence en Afrique. Pour ce faire, nous allons explorer trois pistes
de ré exion. Premièrement, nous nous pencherons sur l’expérience européenne en
matière d’harmonisation du droit de la concurrence. Certes, le droit de la concurrence
de l’Union européenne est le droit supranational le plus performant du monde. Tou-
tefois, dans notre analyse, ce droit n’est pas recommandé en tant que tel pour servir
de modèle pour l’Afrique, mais plutôt comme source de comparaison et d’inspiration
dans la recherche d’un droit de la concurrence adapté à l’Afrique. Deuxièmement,
sur la base de notre analyse, nous dé nirons le rôle de l’OHADA par rapport au droit
de la concurrence et, troisièmement, nous évaluerons la politique de l’Union euro-
péenne vis-à-vis des États africains dans le domaine de la concurrence. Auparavant,
il nous semble néanmoins important de mettre en relief, sous forme d’avant-propos,
la nécessité de promouvoir une politique de la concurrence plus ef cace en Afrique.
2 AVANT-PROPOS SUR LA NÉCESSITÉ D’UNE
POLITIQUE DE LA CONCURRENCE EN AFRIQUE
Il n’est pas évident pour tout le monde de considérer la concurrence comme étant
une politique pertinente. En effet, la question se pose de savoir si, à l’ère de la mon-
dialisation, les pays en développement seront capables de faire face à la concurrence
et au pouvoir économique des grandes entreprises multinationales. À cet égard, la
concurrence économique peut même apparaître comme une menace et peut être un
facteur générateur de soucis et d’angoisses pour les citoyens des pays en dévelop-
pement. À coup sûr, la mondialisation peut avoir des perdants, bien que, à l’échelle
globale, les béné ces économiques prédomineront au moins à long terme.
10. V. http://www.sadc.int/. La SADC a 15 États membres : l’Afrique du Sud, l’Angola, le Botswana,
le Lesotho, Madagascar, le Malawi, l’Île Maurice, le Mozambique, la Namibie, la République
démocratique du Congo, les Seychelles, le Swaziland, la Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe.
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 197.253.230.104 - 23/02/2020 00:28 - © De Boeck Supérieur
1 / 25 100%

RIDE 253 0281 (2) DROIT CONCURR

Telechargé par acha91sako
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !