DROIT DES BIENS

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COURS DE DROIT DES BIENS / M. AÏDARA / 2018-2019
CHEIKH T. MBENGUE M2 DROIT DE LA DECENTRALISATION ET GESTION DES COLLECTIVITES LOCALES
Quelle pertinence à maintenir aujourd’hui le domaine public ?
La pertinence du maintien du domaine public en question constitue le fil conducteur ou le
thème de notre travail. Parce que l’actualité législative, jurisprudentielle et doctrinale poussent
à revisiter un tel sujet.
Au plan législatif
Le Sénégal a adopté récemment la loi N°2011-07 du 30 mars 2011 portant
réorganisation du régime de la propriété foncière. En 2008, avec la loi du 20 août
portant code de l’urbanisme, le législateur sénégalais prévoit l’approbation de schéma
directeur d’aménagement et d’urbanisme par la région.
L’élaboration de plan directeur d’urbanisme par la commune qui dispose également de
l’initiative pour entreprendre des opérations d’urbanisme telle que la rénovation urbaine, le
remembrement urbain ou les ZAC.
D’une manière générale, la domanialité reste protéiforme au Sénégal. Il existe 3 grands
ensembles :
Le domaine national institué par la loi 64-66 du 17 juin 1964 constitué plus de 90/° du
sol sénégalais et dont le régime est marqué par la gratuité de l’accès à la terre et
l’absence de propriété.
Le domaine de l’Etat, régi par la loi 76-66 du 2 juillet 1976 qui distingue entre un
domaine public et un domaine privé. Le domaine privé comprend les biens et droits
mobiliers et immobiliers appartenant à l’Etat ; alors que le domaine public comprend
les biens insusceptibles d’appropriation.
Le domaine des particuliers : les titres fonciers des particuliers régis par un décret du
26 juillet 1932 remplacé par la loi du 30 mars 2011 précitée.
En France, c’est en 2006 que le législateur affirme que les personnes publiques restent
propriétaires de leurs domaines. Il a adopté le code général de la propriété des
personnes publiques qui date de l’ordonnance du 20 avril 2006 ratifiée par la loi 2009-
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526 du 12 mai 2009. Avec ce code, le législateur français réintroduit une certaine unité
dans le régime applicable aux biens du domaine publique. Mais il a surtout développé
une approche propriétariste des biens publics.
Evolution jurisprudentielle
Au Sénégal
La Cour Suprême issue de la réforme judiciaire de 2008 a rendu récemment plusieurs décisions
importantes relatives à la domanialité. L’arrêt du 21 septembre 2015 entre la SONATEL et la
Commune de Mboumba (près de Podor). Le juge suprême sénégalais considère à travers cet
arrêt que les autorités locales disposent de la compétence d’accorder des permissions de voirie
en vertu du CGCL et en conséquence ont le pouvoir de fixer les modalités de paiement de la
redevance qui en est la contrepartie. La CS a aussi considéré que la cession des biens de l’Etat
à une entreprise privée ne saurait concerner le domaine sur lequel la personne privée ne dispose
d’aucun droit ou titre.
En 2009, le 27 janvier da la même année, la CS a précisé l’intérêt à agir du requérant en matière
de contestation de biens domaniaux. En effet, il a jugé que « la libération attaquée en
affectant le même terrain à Issa POUYE CISS, vaut décision implicite de désaffectation à
l’égard du requérant qui a aussi intérêt à agir ».
Dans une autre affaire du 11 mars 2010 opposant Charles Mouhamed FAYE à la Commune
Malikounda, la CS considère que la décision du conseil rural encoure l’annulation dès lors
« qu’il n’est pas établi une mise en demeure a été régulièrement adressé au requérant pour
enclencher la procédure de désaffectation d’office.
Dans la même veine, la Chambre Administrative de la CS dans un arrêt rendu le 12 août 2010
à annulé la décision du sous-préfet de Mbaane qui exigeait la mise en demeure préalable à
toutes les affectations au motif que « dans sa déliration le conseil rural a releque les terres
désaffectées sont inexploitées depuis une dizaine d’année ». Il faut rappeler que le régime de
désaffectation d’office est destiné aux terres abandonnées sans mise en demeure.
Dans l’affaire opposant Ahmadou SYLLA au CR de Sangalkam, la CS a rendu une décision le
23 novembre 2010 pour rappeler « qu’aucune action judiciaire autre que les actions
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possessoires ne peuvent à peine d’irrecevabilité être tentée contre une CL qu’autant que le
demandeur a préalablement adres au représentant de l’Etat par lettre recommandée un
mémoire exposant l’objet et les motifs de sa réclamation.
Toutes ces décisions mettent en exergue les difficultés d’application du régime de la
domanialité. Dans un rapport d’activiressent du médiateur, 90/° des saisines de l’institution
ont un rapport plus ou moins étroit avec la domanialité. Le régime est devenu désuet, obsolète,
et inadapté. Il ne permet ni aux personnes publiques ni aux particuliers de valoriser les terres
du domaine.
En France
Dès 1986, le Conseil Constitutionnel a considéque la constitution « s’oppose à ce que des
biens ou des entreprises faisant partie des patrimoines publiques soient cédées à des personnes
poursuivant des fins d’intérêts privés pour des prix inférieurs à leurs valeurs ; que cette règle
découle du principe d’égalité invoquée par les autorités auteurs de la saisine ; qu’elle ne
trouve pas moins un fondement dans les dispositions de la déclaration des droits de l’homme
de 1989 relatives au droit de propriété et à la protection qui lui est due ; que cette protection
ne concerne pas seulement la protection des propriété privées des particuliers mais aussi à
titre égal la propriété de l’Etat et des autres personnes ».
Voir : décision 86-2007 DC loi autorisant au gouvernement à prendre diverses mesures
d’ordre économique et social.
A travers cette décision, le juge constitutionnel fait bénéficier la propriété de l’Etat et des autres
personnes morales de droit public que la propriété des particuliers. Ainsi tout transfert d’un
bien de l’Etat ou d’une personne publique doit être précédé d’une indemnité juste versée à la
personne publique qui sera privée de son bien.
Quelques années plus tard dans sa décision N°94-346 du 21 juillet 1994, les commentateurs
ont considéré que l’existence du domaine public serait constitutionnalisée par le juge
constitutionnel. En effet ce dernier considère qu’« il incombe au législateur lorsqu’il modifie
les dispositions relatives au domaine public de ne pas priver les garanties légales les exigences
constitutionnelles qui résultent de l’existence et de la continuité des services publics ».
En clair, lorsque le domaine public est affecté à un service public le législateur doit respecter
les exigences constitutionnelles que le juge attache à l’existence et à la continuité du service
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public. Cependant dans ses décisions, le Conseil Constitutionnel refuse d’admettre une valeur
constitutionnelle au principe de l’inaliénabilité des biens du domaine public.
Quant à la jurisprudence administrative, depuis l’arrêt rendu par le CE 17 janvier 1923
PICCIOLI RDP 1923, conclusion CORNEILLE NOTE GEZE. Dans cette affaire du charbon
avait été trouvé au fond de la mer au bord d’ORAN, le conseil de préfecture a condamné
l’Algérie à payer à Piccioli une somme d’argent pour le sauvetage du charbon. Le CE saisi a
considéré que le terrain qui eut descendance du domaine public que le terrain appartient à
l’Etat. Dès lors, le débat posé sur la possibilité des personnes publiques d’être propriétaire de
leur domaine trouve pour la 1ère fois une solution.
Le Débat doctrinal
Il est aujourd’hui plus vif que jamais et met en évidence cette belle formule de jean RIVEREAU
selon laquelle le domaine public est la terre d’élection des constructions doctrinales, « des
faiseurs de systèmes promptes à idéaliser et à rendre de la complexité présumée être de notre
époque ».
Ce débat a été lancé au but du 20ème siècle. Il se rapportait en grand partie sur la
problématique de la propriété des biens domaniaux. Selon une partie de la doctrine, la notion
de propriété qui est assimilé au code civil est antinomique aux dépendances du domaine public
parce que l’affectation à l’usage du public postule une ouverture au lieu d’une exclusivité.
L’affectation interdit l’abusus affirme Barthélemy dans son trai élémentaire de droit
administratif paru en 1963.
Cette conception est rejetée par AURIOU qui défend la thèse proprétariste. Selon lui la
propriété public est une propriété de même nature que la propriété privée. Son originalité réside
en ce qu’elle est régie par 2 principes : l’insaisissabilité et l’incessibilité. Il évoque une
propriété administrative. C’est-à-dire une propriété grevée d’une servitude d’affectation
publique. Il faut dire que le contexte était domi par la théorie de PROUDON depuis 1830
soit dès l’apparition du code napoléonien avait distingué entre un domaine public et un domaine
privé. PROUDON a développé la tse selon laquelle le fondement de la distinction entre
domaine public et domaine privé repose sur la nature du bien. C’est selon que le bien est
susceptible de propriété privée ou non qu’il appartienne à l’un des domaines. Et pendant près
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d’un siècle 1830 jusqu’à 1920, la jurisprudence a suivi le raisonnement de PROUDON pour
déterminer le régime des biens. Mais à partir de 1902, HENRY BARCKAUSEN (AUTEUR
DE BORDEAU) dénonce le rattachement des autorités publiques à ce qu’il qualifie
d’errements de PROUDON. Il souligne dans article intitulé « étude sur la théorie générale
du domaine public 1902 page 401. Que la distinction domaine public domaine privé opérée
par la jurisprudence n’a aucun fondement textuel mais repose sur la position doctrinale de
PROUDON et il appelle les autorités a voté une loi sur le domaine public ».
C’est à sa suite que LEON DUGUIT « constate qu’en vérité jusqu’ici (1923) aucune théorie
satisfaisante du domaine public n’a été élaborée ». DUGUIT explique cette carence par la
vision ou la représentation binaire du domaine. L’on s’enferme dit-il dans un raisonnement
rigide consistant à intégrer de gré ou de force toutes les dépendances du domaine dans deux
catégories : domaine public ou domaine privé. Et dans chaque catégorie, l’on persiste à
soumettre tous les biens aux mêmes règles juridiques. Voilà l’erreur dit DUGUIT ! rejetant la
représentation classique, LEON DUGUIT avance une nouvelle conception de la domaniali
fondée sur une échelle : c’est l’échelle de la domanialité. Qui dit échelle dit l’image d’une
succession de strate de degré de niveau et donc forcément absence de toute unité ou uniformité.
Les biens domaniaux dans la logique de DUGUIT ne sont pas soumis aux mêmes règles. Il
n’existe pas une unité de régime applicable aux biens relevant du domaine public.
Plus tard MAURICE DUVERGER optera pour une distinction tripartite. Il va distinguer entre
le domaine affecté à l’usage du public, le domaine affecté au service public et le domaine privé.
Le débat va évoluer avec la position défendue par JEAN MARIE AUBY qui entre en
opposition avec DUGUIT mais sur un autre front. Alors que dans la construction de DUGUIT
l’échelle ne concerne que la domanialipublique. AUBY s’attaque aux idées principales qui
régissent le domaine privé. Ces idées concernent la fonction patrimoniale du domaine
privé ; sa soumission à un régime de droit privé ; et la compétence du juge judiciaire pour
connaître les litiges.
Jean marie AUBY considère au contraire que la gestion du domaine pri constitue une activité
d’intérêt général pouvant être qualifiée de service public. Il soutient ainsi que le régime
juridique du domaine prin’est pas exempt des règles exorbitantes du droit privé des biens.
Ce débat classique a abouti à des controverses doctrinales encore plus vives concernant cette
fois-ci non plus la pertinence de la distinction domaine public-domaine privé mais plutôt la
notion de propriété publique elle-même. La question s’est posée de savoir si les principes qui
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