Dynamique des structures Techniques d’analyse et d’essai par Alain GIRARD Expert technique de la division Études et Recherche d’INTESPACE Professeur vacataire à l’École nationale supérieure de l’aéronautique et de l’espace et à l’École nationale supérieure d’ingénieurs de constructions aéronautiques 1. 1.1 1.2 Généralités sur les techniques d’analyse.......................................... Problème et solutions ................................................................................. Techniques d’analyse .................................................................................. B 5 150 - 2 — 2 — 4 2. 2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 2.6 Analyse dynamique des systèmes ...................................................... Système à un degré de liberté.................................................................... Systèmes à N degrés de liberté.................................................................. Approche modale ........................................................................................ Systèmes continus ...................................................................................... Sous-structuration ....................................................................................... Conclusions sur l’analyse ........................................................................... — — — — — — — 6 6 8 11 16 17 18 3. 3.1 3.2 3.3 Techniques expérimentales................................................................... Généralités ................................................................................................... Identification par essai modal .................................................................... Simulation par générateurs de vibrations................................................. — — — — 18 18 19 20 4. Conclusion ................................................................................................. — 21 Références bibliographiques ......................................................................... — 21 es structures se rencontrent dans tous les domaines : ce sont elles qui assurent une fonction de support pour des objets de toutes natures. Ainsi, un mât, un pont, un bâtiment, une caisse de voiture, un fuselage d’avion..., sont des structures plus ou moins complexes, dont la première mission est de résister à l’environnement. Si l’environnement est statique, c’est-à-dire ne dépendant pas du temps, comme la gravité ou une pression constante, il s’agit de vérifier que les contraintes restent dans les limites admissibles par les matériaux. Si l’environnement dépend du temps, il faut d’abord étudier le mouvement qui en résulte. Ce comportement dynamique peut, par amplification, donner lieu à des niveaux bien supérieurs à ceux du comportement statique. Il importe donc de maîtriser la prévision de ces phénomènes pour comprendre, remédier, optimiser : c’est l’objet de la dynamique des structures. La prévision peut reposer sur deux types d’activités : l’analyse et l’expérimentation. Négliger l’un au profit de l’autre est dangereux : l’analyse seule n’est pas suffisamment fiable, l’expérimentation seule ne donne pas une vue complète de la situation. Aussi, ces deux mondes doivent-ils être parfaitement imbriqués dans le développement d’une structure. Cet article est une introduction aux techniques d’analyse et d’essai en dynamique des structures. Des généralités sur les techniques d’analyse seront d’abord présentées pour poser le problème et parler de sa résolution. La formulation est ensuite développée, tout en restant limitée au profit des résultats pratiques et en insistant sur la compréhension physique des phénomènes. Enfin, les techniques expérimentales sont abordées, en relation avec l’analyse. B 5 150 4 - 1997 L Pour plus de détails, on se reportera aux références bibliographiques donnant quelques ouvrages ou publications de base et, notamment, à la référence [19] qui donne une vue d’ensemble sur le sujet. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 1 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ Notations et symboles Symbole Scalaires, matrices C, c E F f G H h Ι i K, k L M, m Q q S T t u, v, w x ζ η λ θ Φ φ Ψ ω Désignation 1.1 Problème et solutions amortissement visqueux, combinaison linéaire module d’Young force fréquence flexibilité (déplacement/force) fonction de transfert, facteur d’amplification dynamique réponse impulsionnelle identité, inertie –1 raideur (force/déplacement) facteur de participation modale, longueur masse (force/accélération) amplification à résonance : Q = 1/(2 ζ ) déplacement modal densité spectrale de puissance (DSP), section transmissibilité (déplacement/déplacement, ...) temps déplacement physique coordonnée (position) amortissement visqueux réduit amortissement structural valeur propre rotation mode propre coefficient de cisaillement mode de jonction pulsation : ω = 2 π f Abréviations ddl DSP 1. Généralités sur les techniques d’analyse degré de liberté densité spectrale de puissance 1.1.1 Structure et conditions aux limites On considère une structure soumise à un environnement dynamique donné. Des forces de diverses natures (volumiques, surfaciques, ponctuelles) s’appliquent sur elle et provoquent un mouvement que l’on peut décrire par des déplacements, des vitesses ou des accélérations en tous ses points. La notion d’appui, ou de condition aux limites, est souvent réservée aux parties de la structure où le mouvement est bloqué (déplacements correspondants imposés nuls). Elle peut être généralisée à un mouvement imposé quelconque. Ainsi, toute structure peut être décomposée en deux parties exclusives, comme schématisé figure 1 : — une partie où des forces sont imposées (éventuellement nulles) : ce sont les forces d’excitation. Le mouvement de cette partie est alors une réponse. On qualifiera par la suite cette partie d’interne et on lui affectera l’indice mnémotechnique i ; — une partie où le mouvement est imposé (éventuellement nul) : ce sont les conditions aux limites (éventuellement absentes). Les forces de réaction correspondantes sont alors des réponses. On qualifiera par la suite cette partie de jonction (ou liaison, ou interface) pour lui affecter l’indice mnémotechnique j. Cette décomposition naturelle, d’une grande généralité, va influer sur les développements qui suivent de manière fondamentale. Exemple d’un pylône La jonction j sera constituée de tous les points d’ancrage au sol, la partie interne i de tout le reste. Des forces, par exemple dues au vent, éventuellement nulles par endroits, pourront être imposées sur la partie interne. Un mouvement, par exemple dû à un tremblement de terre, pourra être imposé sur la jonction. Sous l’action, éventuellement simultanée, de ces deux sollicitations, la partie interne répondra par un mouvement et la jonction par des forces de réaction. 1.1.2 Structure et discrétisation Indices d e i j k m r res s x, y x, y, z dynamique élément interne jonction (appui) mode propre relation linéaire (multi-ddl) rigide (jonction isostatique) résiduel sélection, secondaire excitation, réponse repère cartésien Toute structure réelle est continue au départ. Quelle que soit la nature de l’excitation et de la réponse, les équations qui régissent le mouvement sont des équations aux dérivées partielles. La difficulté de les résoudre analytiquement dans le cas de structures complexes incite à discrétiser ces dernières, par exemple par la méthode des éléments finis. Dans ce cas, les équations deviennent matricielles, la taille des matrices dépendant directement de la discrétisation considérée. Un cas intermédiaire est celui d’une structure continue avec des excitations (en force ou en mouvement) discrètes. Les équations restent aux dérivées partielles, mais les résultats peuvent se mettre sous forme matricielle. Exposants T * • X transposé conjugué ∂ ⁄ ∂t Figure 1 – Structure et conditions aux limites paramètre effectif B 5 150 − 2 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ Par la suite, on se place toujours dans le cas d’excitations discrètes ou discrétisées. De plus, sauf avis contraire, on considère des structures discrétisées. L’état de la structure est alors défini par un nombre fini de paramètres que l’on appelle degrés de liberté (en abrégé ddl) et sur lesquels on rapporte les excitations comme les réponses. Une approche continue peut être faite sur les mêmes bases, mais n’est pas développée ici, son application pratique restant limitée : seuls des cas particuliers simples sont abordés au paragraphe 2.4 pour servir de référence. 1.1.3 Domaine temporel et domaine fréquentiel L’analyse du comportement dynamique d’une structure soumise à une excitation quelconque peut, d’une manière générale, être effectuée en restant dans le domaine temporel. Ainsi, si l’on considère une excitation fonction du temps x (t ), la réponse structurale y (t ) sera, sous réserve de linéarité, donnée par la relation (intégrale dite de Duhamel) : (1) où hyx (t ) est la réponse y à une excitation x sous forme d’impulsion unité. Cette relation (1) s’interprète en disant que le résultat est la superposition des réponses à l’excitation décomposée en impulsions. Cette approche nécessite donc le calcul d’une intégrale. Une autre solution consiste à passer dans le domaine des fréquences f (ou des pulsations ω = 2 πf ), ce qui conduit à des opérations différentes et permet des interprétations complémentaires. Cela peut être fait grâce à la transformée de Fourier qui, par sa réversibilité, permet une bonne communication entre les deux domaines, à certaines réserves près (cf. ouvrages de base sur le traitement du signal) : X (ω) = +∞ –∞ x ( t )e –i ω t 1 dt ⇔ x ( t ) = ------2π +∞ –∞ X (ω )e iωt dω (2) DYNAMIQUE DES STRUCTURES matrice de fonctions de transferts entre le vecteur des excitations X et le vecteur des réponses Y. Ce formalisme nécessite l’emploi de notations appropriées pour développer efficacement la formulation : elles sont introduites au paragraphe 1.2.1. 1.1.4 Basses fréquences et hautes fréquences Plus les fréquences d’excitation sont élevées, plus les longueurs d’onde sont faibles et plus les formes engendrées par les réponses sont complexes. Les méthodes de discrétisation habituelles s’essoufflent, soit par le volume de calcul engendré, soit par les erreurs dues à une perte d’information. Le seuil au-delà duquel leur efficacité devient médiocre délimite le domaine des basses fréquences : c’est celui où l’on sait caractériser économiquement le comportement dynamique des structures et calculer ainsi de manière convenable leurs réponses à une excitation de nature quelconque. On verra plus loin que la caractérisation dynamique d’une structure peut être faite en introduisant la notion de mode propre, qui est une forme associée à une fréquence. La basse fréquence est alors le domaine qui n’implique qu’un nombre limité de modes propres. Ce domaine dépend donc essentiellement de la structure considérée. En haute fréquence, le mode propre devient une caractéristique trop volumineuse, et l’on doit faire appel à des notions plus globales comme la densité modale. En fait, ces méthodes sont surtout utilisées pour des sollicitations acoustiques, domaine où la formulation est difficile [13]. La plus connue est celle de l’analyse énergétique statistique (Statistical Energy Analysis : SEA). Ces problèmes ne sont pas abordés ici. 1.1.5 Différents types de mouvements Dans le domaine fréquentiel, l’excitation la plus simple est l’excitation sinusoïdale de fréquence f = ω /2 π, de type x (t ) = X max sin (ωt + ϕ ). En utilisant le formalisme complexe, elle se note x (t ) = X eiω t, X pouvant être complexe, son amplitude étant l’amplitude du mouvement et sa phase étant le déphasage à t = 0. La première relation exprime la décomposition de la fonction du temps en fonctions sinusoïdales et la deuxième reconstitue cette même fonction à partir de ces fonctions sinusoïdales. X (ω ) est une fonction complexe, avec partie réelle et partie imaginaire, ou amplitude et phase. La réponse d’une structure linéaire est une fonction sinusoïdale de même fréquence y (t ) = Y eiω t, Y étant donnée par : Dans le domaine des fréquences, l’équivalent de la relation (1) s’écrit : Dans le cas d’une excitation périodique, donc décomposable en un nombre fini de fonctions sinusoïdales, on peut appliquer la relation (4) à chaque harmonique et reconstituer ensuite le signal temporel. Une excitation x (t ) qui ne dure qu’un temps limité sera qualifiée de transitoire. Dans ce cas, suivant la stratégie préconisée au paragraphe 1.1.3, on peut encore utiliser la relation (3) grâce à la transformée de Fourier (TF) : (3) où H yx (ω ) est la réponse y à une excitation x sous forme de sinusoïde de pulsation ω. C’est une fonction complexe de la fréquence, dite fonction de transfert, dont l’amplitude traduit l’amplification du mouvement et la phase le déphasage entre excitation et réponse à la fréquence considérée. C’est en fait la transformée de Fourier de h yx (t ), ce qui justifie sa notation. La relation (3) fait intervenir un simple produit, au lieu d’une intégrale dans (1), la liaison avec le domaine temporel étant assurée par transformée de Fourier. C’est cette approche qui sera adoptée par la suite, avec une présentation centrée sur l’utilisation des fonctions de transfert. Dans le cas de plusieurs excitations et/ou de plusieurs réponses, la relation (3) peut se généraliser, toujours sous réserve de linéarité, avec l’emploi du formalisme matriciel. H yx représente alors une Y = Hyx (ω ) X (4) conséquence directe de la relation (3). x (t ) TF X (ω) Y (ω) = H y x (ω) X (ω) Y (ω) TF –1 y ( t ) (5) Exemple Si l’excitation est une superposition de deux fonctions sinusoïdales : x (t ) = x 1 sin (ω 1 t + ϕ x 1) + x 2 sin (ω 2 t + ϕx 2) la transformée de Fourier va extraire ces deux fonctions ( ω 1 , x 1 , ϕ x 1) et (ω 2 , x 2 , ϕ x 2), la relation (3) va calculer les deux réponses sinusoïdales correspondantes avec les amplitudes y 1 = |H (ω1)| x 1 et y 2 = |H (ω 2)| x 2 et les phases ϕ y1 = ϕ x 1 + ϕ [H (ω1)] et ϕ y 2 = ϕ x 2 + ϕ [ H ( ω 2 )], et la transformée inverse restituera y (t ) = y 1 sin(ω1 t + ϕ y 1) + y 2 sin(ω 2 t + ϕ y 2). Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 3 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ En fait, toute excitation réelle a un début et une fin et est donc transitoire. Si sa durée est brève, on parle plutôt de choc, mais cette stratégie reste applicable. Si, au contraire, sa durée est longue, sans être périodique, on parle d’excitation aléatoire [4] [7]. Dans le cas d’un mouvement quasi stationnaire (ne dépendant pas du temps) et ergodique (non répétitif dans ses réalisations), l’excitation se caractérise dans le domaine fréquentiel par sa DSP (densité spectrale de puissance), ou autospectre, Sxx (ω ), que l’on peut définir comme la moyenne quadratique de x (t ) en fonction de la fréquence. Plusieurs excitations simultanées seront caractérisées par leur matrice d’auto et interspectres Sxx [moyenne des produits x i (t ) x j (t )] et les réponses y seront données par : S yy ( ω ) = H * yx ( ω ) S xx ( ω ) H xy ( ω ) (6) avec H* yx = H yx conjugué, H xy = H yx transposé. Ces notations matricielles sont explicitées plus loin. On retiendra que, quelle que soit la nature du mouvement, les réponses dans le domaine des fréquences se déduisent des excitations par de simples produits matriciels faisant intervenir les fonctions de transfert. 1.1.6 Fonctions de transfert Introduite au paragraphe 1.1.3, la fonction de transfert est donc le rapport dans le domaine fréquentiel entre une excitation et une réponse. À noter que ce n’est pas, comme on pourrait l’envisager dans certaines circonstances, un rapport entre deux réponses, ce qui engendrerait des erreurs dans l’utilisation des développements qui suivent. Suite aux considérations du paragraphe 1.1.1, les excitations, comme les réponses, sont de type force ou de type mouvement. Ce dernier peut être défini en termes de déplacements u, vitesses u̇ ou accélérations ü, et la forme u (ω ) eiω t dans le domaine fréquentiel implique les relations : 2 ü = i ω u̇ = – ω u (7) leur utilisation étant strictement équivalente. Par la suite, on considère principalement les déplacements. Suivant le type d’excitation et de réponse considérées, on obtient les fonctions de transfert du tableau 1, les dénominations indiquées étant les plus courantes (éventuellement suivies du qualificatif dynamique ). (0) Tableau 1 – Fonctions de transfert Réponse Excitation F F u Souplesse Transmissibilité Flexibilité (1) G T Compliance 1.2 Techniques d’analyse 1.2.1 Généralités Afin de développer efficacement la formulation impliquant un certain formalisme matriciel, on utilise par la suite des notations où les indices vont jouer un grand rôle : mnémotechnique d’abord (dans la mesure du possible), évitant ensuite la multiplicité des notations pour les matrices, et enfin garants de la cohérence des produits matriciels par enchaînement des indices. Par convention, X ij désigne une matrice de dimension (n, p ) dont les lignes sont relatives aux n ddl i et les colonnes aux p ddl j (sauf indication contraire). Cela implique la relation X ji = X Tij , et le fait que X ii soit symétrique, ce qui est licite dans le présent contexte grâce au principe de réciprocité valable en mécanique (en excluant les structures en rotation). Toujours par convention, un indice souligné a une valeur fixée : ainsi, X i j désigne la ligne i de X ij . Les relations entre : — les excitations en forces F i et en déplacements u j d’une part ; — les réponses en déplacements u i et en forces de réaction F j d’autre part ; peuvent alors s’écrire dans le domaine fréquentiel : (8) Cette relation fait ainsi apparaître les matrices de flexibilité G ii et de raideur K jj (symétriques par réciprocité), ainsi que les matrices de transmissibilité en déplacements T i j et en forces T j i (avec T ji = T Tij par réciprocité), le signe (–) pour les forces venant du fait que l’on considère ici les réactions, opposées aux forces transmises. On voit ici la pertinence de la convention sur les indices. Avec l’exemple du pylône cité au (§ 1.1.1), les forces F i seront celles créées par le vent sur les ddl i, certaines composantes pouvant être nulles, les déplacements u j seront ceux engendrés par le tremblement de terre aux points d’ancrage, certains pouvant être nuls. Les réponses en déplacements internes u i et réactions F j seront obtenues par superposition des effets des deux sollicitations, comme indiqué par la relation (8), à partir des fonctions de transfert caractéristiques du pylône. u̇ ü Mobilité Admittance iω G Accélérance – ω2 G On va maintenant déterminer ces fonctions de transfert en fonction des propriétés physiques de la structure considérée, pour en déduire ses réponses à des excitations de nature quelconque (cf. § 1.1.5). Les principales notations utilisées par la suite sont récapitulées dans le tableau Notations et symboles placé en tête de cet article. 1.2.2 Système à un degré de liberté et modes propres u Rigidité Raideur (1) K Transmissibilité (1) T iω T – ω2 T u̇ Impédance K/i ω T/i ω Transmissibilité (1) T iω T ü Masse (1) apparente M = K/(– ω 2) T/(– ω 2) T/i ω Transmissibilité (1) T Le système le plus simple à analyser est le système à un degré de liberté (1 ddl) c’est-à-dire un système dont l’état est défini par un seul paramètre. Sa représentation classique est celle de la figure 2, le paramètre en question étant la position de la masse par rapport à la position de repos. Il est composé de : — une masse de valeur m, conférant au système une énergie cinétique ; (1) Terme utilisé dans cet article. B 5 150 − 4 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ — un ressort de raideur k, conférant au système une énergie élastique ; — un amortisseur de constante c, permettant au système de dissiper de l’énergie. Ce ddl est de type i (interne). Suite aux considérations du paragraphe 1.1.1, on peut lui adjoindre un ddl de type j (jonction) représentant le mouvement imposé à la base. On a alors, comme indiqué sur la figure 2, toutes les excitations et réponses possibles de l’équation (8) où chaque terme est ici un scalaire (i et j de taille 1). La résolution des équations du mouvement, exposée plus loin, permet de déterminer sans difficulté les 3 fonctions de transfert impliquées : flexibilité, raideur et transmissibilité. Non seulement le système à 1 ddl est le système le plus simple, mais on verra par la suite que tout système, aussi complexe soit-il, peut se ramener à une collection de systèmes à 1 ddl mis en parallèle, comme schématisé sur la figure 3. Chacun de ces systèmes représente en fait un mode propre de la structure considérée, dont la notion a déjà été évoquée au paragraphe 1.1.4. Les fonctions de transfert de l’équation (8) sont alors obtenues en sommant les contributions de chaque mode k (indice k fixé) : c’est la technique dite de superposition modale : u i (ω ) F j (ω ) = ∑ G ii, ∑ – T ji, k (ω ) modes k modes k ∑ T ij, ∑ K jj, k (ω ) k (ω ) u j (ω ) modes k k (ω ) F i (ω ) (9) DYNAMIQUE DES STRUCTURES À chaque étape, correspond une technique de sous-structuration, c’est-à-dire de calcul d’une structure à partir de ses sousstructures : — à partir des matrices des sous-structures, on obtient les matrices de la structure par assemblage matriciel ; — à partir des modes des sous-structures, on obtient les modes de la structure par manipulation adéquate : c’est ce qui est appelé la synthèse modale ; — à partir des fonctions de transfert des sous-structures, on obtient les fonctions de transfert de la structure par manipulation adéquate : c’est ce qui est parfois appelé le couplage impédanciel. Figure 2 – Système à un degré de liberté modes k Le système à 1 ddl est donc la clé de voûte de l’analyse : la connaissance de son comportement permet de déterminer celui de toute structure, continue ou discrétisée. Une structure discrétisée à N ddl comportera N modes, une structure continue une infinité. Cependant, en basse fréquence, seuls les premiers seront contributifs, en gros ceux dont la fréquence associée se situe dans la bande d’excitation : la somme de l’équation (9) ne concernera que ceux-ci, les autres pouvant être globalement représentés par un terme résiduel (opération de troncature modale). Ces modes propres s’obtiennent en résolvant les équations du mouvement sans excitation, ce qui revient à un problème aux valeurs propres : les valeurs propres fournissent les fréquences propres, et les vecteurs propres les formes associées. Dans la mesure où les modes contributifs sont peu nombreux, l’effort à consentir pour les calculer sera largement compensé par le gain relatif au calcul des réponses par l’équation (9) : là réside l’efficacité de cette technique par rapport à une intégration directe des équations, toujours possible. Signalons enfin une autre utilisation du système à 1 ddl : il constitue un système de référence pour une caractérisation des excitations par spectres de réponse. Un spectre de réponse se définit comme une certaine réponse d’un système à 1 ddl à l’excitation considérée en fonction de sa fréquence propre, d’où la notion de spectre de choc ou de réponse aléatoire que l’on introduira plus loin. Figure 3 – Système complexe La même démarche est utilisée pour définir le dommage par fatigue d’une excitation. 1.2.3 Analyse et essais L’analyse par superposition modale se fait schématiquement en trois étapes, comme indiqué sur la figure 4 : — constitution de matrices représentant les propriétés de masse, raideur et amortissement de la structure discrétisée ; — recherche des modes propres par résolution d’un problème aux valeurs propres ; — détermination des fonctions de transfert par superposition modale. Figure 4 – Analyse et essais Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 5 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ En ce qui concerne les essais, les étapes se font en sens inverse : — détermination des fonctions de transfert par mesure des excitations et des réponses de la structure ; — recherche des modes propres par identification des fonctions de transfert (d’autres techniques sont possibles, cf. § 3.2) ; — restitution éventuelle de matrices expérimentales. Lorsque les excitations en force F i et en déplacement u j sont séparées, la première se réduit aux équations suivantes : mü i + cu˙ i + ku i = F i • F i seul : (14) La comparaison entre analyse et essais pour recaler les modèles mathématiques peut se faire à tous les niveaux, mais le plus intéressant est celui des modes propres, de par la valeur de l’information qu’ils représentent. Ces considérations seront reprises au paragraphe 3. La relation (14) est la classique équation du mouvement du système limité au ddl i. La relation (15), correspondant au système excité par sa base, montre que ce cas est équivalent au cas précédent, u i étant remplacé par le déplacement relatif (u i – u j) et F i par la force d’inertie (– mü j). • u j seul : m ( ü i – ü j ) + c ( u˙ i – u˙ j ) + k ( u i – u j ) = – mü j (15) 2.1.2 Résolution des équations 2. Analyse dynamique des systèmes Ce paragraphe développe les notions d’analyse dynamique présentées précédemment, avec le formalisme introduit au paragraphe 1.2.1. La résolution de l’équation (13) dans le domaine des fréquences, c’est-à-dire pour des forces et des déplacements de la forme X ei ω t, se fait schématiquement de la manière suivante : on considère d’abord la première équation à la seule inconnue u i , dont le premier membre est celui de l’équation (14) et qui devient (– ω 2 m + i ω c + k ) u i ( ω ), d’où la solution u i , que l’on reporte ensuite dans la deuxième équation pour en déduire F j . On aboutit alors au résultat suivant : u i (ω ) 2.1 Système à un degré de liberté F j (ω ) Le système à un degré de liberté est analysé en détail dans divers ouvrages de base [3] [11] [17] [18]. On ne retiendra ici que les résultats utiles à la suite de l’article. avec Gii (ω ) T ij (ω ) K jj (ω ) H 1 (ω ) 2.1.1 Équations du mouvement et résolution T 1 (ω ) 2 1 1 T = --- m u˙ i = --2 2 m u˙ i u˙ j 0 ˙ 0 ui 0 u˙ j (10) T ij ( ω ) F i ( ω ) K jj ( ω ) u j ( ω ) (16) 1 = H 1 ( ω ) ---- , k = T 1 (ω ) = T ji (ω ), = T 1 (ω ) (– m ω 2) ou encore M jj (ω ) = T 1 (ω ) m, 1 = ------------------------------------------------------------- facteur d’amplification ω 2 ω 1 – -------- + i 2 ζ 1 -------ω1 ω1 ω 1 + i 2 ζ 1 -------ω1 = ------------------------------------------------------------- facteur de transmissibilité ω ω 2 1 – -------- + i 2 ζ 1 -------ω1 ω1 dynamique, k = 2 π f 1 = ------- pulsation propre du système non m amorti, c ζ1 = ---------------------- amortissement réduit (fraction, que l’on 2 k m supposera petite, de l’amortissement critique, à partir duquel le mouvement libre n’est plus oscillant). Les fonctions de transfert G ii , T ij et M jj résultent ainsi du produit de deux termes : — un terme indépendant de la fréquence et de même dimension que le transfert considéré : 1/k pour G, 1 pour T, m pour M, que l’on peut qualifier de statique puisqu’il correspond à ω = 0 ; — un terme sans dimension dépendant de la fréquence, H1 (ω ) ou T 1 (ω ) suivant le transfert (l’indice 1 signifie mode propre k = 1 du système, unique ici, cf. § 1.2.2). Les deux fonctions H 1 (ω ) et T 1 (ω ), très semblables en dehors des hautes fréquences, sont tracées sur la figure 5 en amplitude/phase. ω1 ■ énergie élastique : 1 1 2 U = --- k ( u i – u j ) = --2 2 u iu j k –k –k k ui (11) uj ■ énergie dissipée : 2 1 1 c –c D = --- c u˙ i – u˙ j = --- u˙ i u˙ j 2 2 –c c u˙ i (12) u˙ j Les équations du mouvement peuvent s’en déduire en appliquant les principes énergétiques fondamentaux de la mécanique, pour trouver l’expression suivante qui traduit tout simplement l’équilibre des forces pour chaque ddl : m 0 üi + c – c 0 0 üj –c c u˙ i + k –k –k k u˙ j Forces : d ′ inertie de dissipation ui uj = Fi Fj (13) élastiques extérieures Si l’on scinde la relation (13) en 2 équations, la première permet de résoudre u i , alors que la deuxième restitue F j à partir de u i . B 5 150 − 6 G ii ( ω ) – T ji ( ω ) dynamique, Les énergies mises en jeu par le système à 1 ddl de la figure 2 s’écrivent : ■ énergie cinétique : = ■ L’amplitude représente l’amplification du mouvement due aux phénomènes dynamiques. ● Elle est voisine de 1 aux fréquences petites devant la fréquence propre f 1 du système : le comportement est quasi statique. ● Elle est grande devant 1 au voisinage de f 1 où l’on dit que le système est en résonance. Le maximum est atteint pour f ≈ f 1 et vaut approximativement Q1 = 1/(2 ζ1). Les structures faiblement amorties, cas habituel en l’absence de dispositif spécifique, ont typiquement Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ DYNAMIQUE DES STRUCTURES où h 1 (t ) est la transformée inverse de Fourier de H1 (ω ), c’est-à-dire : ω1 –ζ1 ω1 t sin ω 1 h 1 ( t ) = --------------------- e 2 1 – ζ1 1 – ζ 21 t (18) qui représente la fonction sinusoïdale amortie résultant de la réponse impulsionnelle du système à une excitation F i (cf. § 1.1.3). Dans le cas d’une excitation aléatoire dans la bande de fréquence [f min, f max], la relation (6) remplace la relation (5) pour donner la DSP de la réponse connaissant celle de l’excitation. La moyenne quadratique y 2 de la réponse s’en déduit par intégration sur la bande considérée : y2 = f max f min S yy ( f ) df = f max f min 2 H yx S xx ( f ) df (19) Dans le cas d’une DSP d’excitation S xx (f ) variant peu avec la fréquence, en particulier au voisinage de la fréquence propre f 1 , et avec f min f 1 f max ∞ , on aboutit aux résultats suivants : f max f min H 1 ( f ) df ≈ ≈ Fj -------------------SF i ( f 1 ) f max f min T 1 ( f ) df ≈ --π2 f1 Q1 (20) 2 2 m üi – -------------------S Fi ( f 1 ) 2 2 ≈ ui -------------------Su j ( f 1 ) 2 ≈ Fj -------------------------------2 m Su j ( f 1 ) π ≈ ---2 f 1 Q1 2.1.4 Spectres de réponse Figure 5 – Facteurs d’amplification et de transmissibilité dynamiques des Q de 5 à 50 suivant la nature des matériaux et des liaisons. C’est dans cette amplification importante qui peut engendrer de grands déplacements ou forces, donc de fortes contraintes, que réside le danger du comportement dynamique. 2 ● Elle s’atténue aux hautes fréquences, en 1/ω pour H1 (ω ), en 1/ω 2 puis 1/ω pour T 1 (ω ). On a là le principe de la suspension : l’excitation est filtrée par ce dispositif lorsque sa fréquence est suffisamment grande devant la fréquence propre du système. ■ La phase représente le déphasage entre excitation et réponse (toujours négative ici : la réponse suit l’excitation) ; elle est : — de 0 aux fréquences petites devant f 1 (excitation et réponse en phase) ; — de π/2 à la résonance (excitation et réponse en quadrature) ; — de π au-delà (excitation et réponse en opposition de phase). 2.1.3 Réponses Les résultats précédents permettent de déterminer directement les réponses y (t ) = Y ei ω t à une excitation sinusoïdale x (t ) =X ei ω t, connaissant sa fréquence f = ω /2π, son amplitude |X | et sa phase ϕ (X ), d’après la relation (4), H yx (ω ) étant donné par la relation (16). Dans le cas d’une excitation transitoire, les relations (1), (2), (3), (4), (5), (14), (15) et (16) permettent de déterminer les réponses après passage dans le domaine temporel. On peut écrire, par exemple : 1 u i ( t ) = --k t –∞ F ( τ ) – mü j ( τ ) h 1 ( t – τ ) d τ + u j ( t ) (17) Comme signalé précédemment, le spectre de réponse pour une excitation donnée est une certaine réponse d’un système à 1 ddl en fonction de sa fréquence propre. En fait, un deuxième paramètre intervient nécessairement, l’amortissement, qu’il faut donc préciser pour définir complètement le spectre, par exemple ζ1 = 5 % (Q1 = 10). Le plus souvent, l’excitation et la réponse considérées sont des mouvements. Ainsi, pour une excitation transitoire u j (t ), le spectre de réponse extrême, souvent appelé spectre de choc, est la réponse maximale de u i (t ) en fonction de la fréquence propre f 1 , pour un amortissement donné ζ1 . On obtient diverses variantes de spectres suivant la réponse considérée : — déplacement u i (t ), vitesse u̇ i ( t ) ou accélération ü i (t ) ; — réponse absolue u i (t ) ou relative u i (t ) – u j (t ) ; — partie positive (spectre positif) ou négative (spectre négatif) ; — réponse pendant le choc (spectre primaire) ou après le choc (spectre résiduel). On s’intéresse le plus souvent au spectre de déplacement relatif qui renseigne sur les contraintes maximales (certains réservent l’appellation spectre de réponse extrême au spectre de déplacement relatif multiplié par ω 2 pour le rendre homogène à une accélération) ou au spectre d’accélération absolue qui renseigne sur les efforts maximaux. La figure 6 donne l’exemple du spectre d’accélération absolue d’un choc en forme de demi-sinus. Le fait de ne retenir de la réponse qu’une amplitude implique une perte d’information, ce qui rend la transformation non réversible, contrairement à la transformée de Fourier : on ne peut pas restituer l’excitation à partir de son spectre de choc et il existe une infinité d’excitations correspondant à un spectre donné. En contrepartie, l’excitation est ici caractérisée par une réponse physique aisément interprétable et exploitable pour un dimensionnement (on verra § 2.3.5 la manière d’utiliser cette information pour une structure quelconque). C’est aussi un critère pour comparer deux excitations ou pour déterminer une excitation enveloppe par enveloppe des spectres de choc. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 7 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ ■ Cette notion n’est applicable qu’en régime harmonique où u̇ = i ω u , donc dans le domaine fréquentiel. Le retour au domaine temporel pose problème. ■ Si l’on associe la force de dissipation à la force élastique, il vient : F élastique + F dissipée = k (1 + i η1)u (21) qui introduit la notion de raideur complexe k (1 + i η1), à rapprocher de la notion de module complexe d’un matériau E (1 + iη), η facteur de perte que l’on peut mettre sous la forme η = tan δ, δ angle de perte traduisant le déphasage entre contraintes et déformations. ■ Le rapport entre l’énergie dissipée par cycle et l’énergie élastique maximale vaut 2 π η1 , ce qui donne un moyen de déterminer η1 . Si l’on compare les deux représentations, on a l’équivalence (k η1) ⇔ (ω c), c’est-à-dire η1 ⇔ 2 ζ1 ω /ω1 que l’on peut utiliser dans les expressions de H 1 (ω ) et T 1 (ω ) des formules (16) pour remplacer l’amortissement visqueux par l’amortissement structural. Ainsi, là où le rôle de l’amortissement est important, c’est-à-dire au voisinage de la résonance ω = ω1 , η est équivalent à 2 ζ. D’autres représentations de l’amortissement peuvent être envisagées, mais au détriment de la linéarité. Pour une analyse dynamique classique, on préférera en général se ramener à un amortissement visqueux équivalent qui produit la même énergie dissipée par cycle. Figure 6 – Spectre de choc 2.2 Systèmes à N degrés de liberté La même notion peut se transposer à une excitation aléatoire, en considérant par exemple la réponse efficace (racine carrée de la moyenne quadratique) de u i (t ) au lieu de la réponse maximale. On peut aussi retrouver la notion de spectre de réponse extrême en considérant la réponse maximale en moyenne pour une durée donnée, ce qui permet de comparer une excitation aléatoire et une excitation transitoire, et plus généralement deux excitations de nature quelconque, du point de vue de la réponse maximale. La même démarche est utilisée pour définir le dommage par fatigue d’une excitation. La réponse maximale de u i (t ) est remplacée par la notion de dommage, basée sur la courbe d’endurance du matériau impliqué et sur la loi de Miner qui permet de cumuler les effets des cycles de contrainte de niveau donné. Le spectre de réponse extrême et le spectre de dommage par fatigue sont les deux caractéristiques usuelles qui permettent d’évaluer la sévérité d’un environnement donné. Ces aspects ne sont pas développés ici. 2.2.1 Équations du mouvement et techniques de résolution On considère une structure dont l’état est défini par un certain nombre de ddl internes i et de jonction j. En généralisant ce qui a été dit au paragraphe 2.1.1 pour le système à 1 ddl, les énergies mises en jeu par un système à N ddl s’écrivent : C ii C ij u˙ i 1 ■ énergie cinétique : D = ----- u˙ T u˙ T (22) i j C 2 C jj u˙ ■ énergie élastique : ■ énergie dissipée : 1 U = ----- u T i 2 u T j 1 D = ----- u˙ T i 2 u˙ T j ji j K ii K ij u i K ji K jj u j C ii C ij u˙ i C jj u˙ j C ji (23) (24) 2.1.5 Amortissement : rôle, représentations On a vu, à la suite des équations (16), le rôle de l’amortissement représenté par le coefficient ζ1 : c’est lui qui limite l’amplification à la résonance à la valeur Q1 = 1/(2ζ1) approximativement. Par contre, loin de la résonance, son effet est faible dans la mesure où il reste petit devant 1. Ce coefficient ζ1 sans dimension provient de l’introduction du coefficient c dans l’expression de l’énergie de dissipation de l’équation (12), qui correspond à une force de dissipation de type visqueux, c’est-à-dire proportionnelle à la vitesse : F dissipée = cu̇ [équations (13), (14) et (15)]. Si le mouvement est sinusoïdal de pul2 sation ω, l’énergie dissipée par cycle vaut π c ω u max . Or l’expérience montre que, dans les structures, cette énergie dissipée est plutôt indépendante de ω. Cela correspond à une force de dissipation de la forme : F dissipée = η 1 ku̇ ⁄ ω = i η 1 ku , donc en quadrature avec le déplacement, η1 étant un coefficient sans dimension appelé amortissement structural. Cette nouvelle représentation appelle diverses remarques. B 5 150 − 8 Les matrices [M ], [K ] et [C ] sont les matrices de masse, de raideur et d’amortissement de la structure, traduisant la répartition de ces propriétés sur les ddl considérés. Le principe de réciprocité les rend symétriques. On verra au paragraphe 2.2.3 comment les obtenir. Les équations du mouvement s’écrivent alors : M ii M ij ü i M ji M jj ü j Forces : d ′ inertie + C ii C ij C ji C jj u̇ j u̇ i de dissipation + K ii K ij u i K ji K jj u j = Fi Fj (25) élastiques extérieures Comme pour la relation (13), cette relation (25) se scinde en 2 équations, la première permettant de résoudre u i , la deuxième restituant F j à partir de u i . Pour la résolution, deux techniques sont possibles : — une intégration directe dans le domaine temporel, en discrétisant ces équations avec un pas de temps ∆t, en général constant. C’est l’objet du paragraphe 2.2.2 ; — une résolution préalable de l’équation sans excitation, dont les solutions sont les modes propres de la structure. La solution de Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ l’équation complète peut alors être obtenue en la projetant sur ces modes propres, ce qui conduit à des équations découplées que l’on résoudra indépendamment, puis en revenant aux ddl physiques par superposition des contributions des modes propres, comme mentionné (§ 1.2.2). Cette stratégie n’est efficace que si les modes les plus contributifs sont peu nombreux. C’est l’objet du paragraphe 2.3. 2.2.2 Résolution par intégration directe DYNAMIQUE DES STRUCTURES d’amortisseurs, traités ci-après. Dans tous les cas, les étapes à franchir sont les suivantes. ■ Détermination des matrices M e , K e , C e de ces éléments dans leurs propres repères. Il est commode de raisonner à partir des énergies, c’est-à-dire des équations (22), (23) et (24). Ainsi : — pour une masse concentrée m e sur le ddl i : K e = C e = 0 et M e déduit de : 1 T e = --- m e u˙ i2 ⇒ M e = m i associé au ddl i (30) 2 On ne donne ici que les idées directrices. Lorsque la taille du système est élevée, des problèmes de stabilité numérique apparaissent, dus au fait que les valeurs propres les plus élevées n’ont pas de signification physique, mais conditionnent la résolution [1]. On distingue habituellement : — pour un ressort k e entre deux ddl i et j : M e = C e = 0 et K e déduit de : ■ les méthodes explicites pour lesquelles la solution au pas (n + 1) est obtenue à partir des équations au pas (n ). Un exemple simple est celui de la méthode des différences centrées qui écrit : — pour un amortisseur c e entre deux ddl i et j : M e = K e = 0 et C e déduit de : 2 1 D e = ----- c e ( u˙ i – u˙ j ) ⇒ C e = c e 1 2 –1 1 ü n = -----------2- ( u n + 1 – 2 u n + u n – 1 ) ∆t 1 u˙n = ------------- ( u n + 1 – u n – 1 ) 2 ∆t ce qui, appliqué à l’équation (25) Mü n + Cu̇ n + Ku n = F n , conduit à : au (26) pas n, Ces schémas d’intégration sont conditionnellement stables, c’est-à-dire qu’ils peuvent diverger suivant les cas, ce qui est à éviter ; –1 1 –1 1 associé aux ddli et j (31) associé aux ddl i et j (32) ■ Pour chaque matrice élémentaire, passage du repère local ( ) au repère global (g). Si le changement de repère s’écrit : ( u ) = λ g ( u ) g soit 1 2 1 ----------2- M + ------------- C u n + 1 = F n – K – ----------2- M u n 2 ∆t ∆t ∆t (27) 1 1 – ----------2- M – ------------- C u n – 1 2 ∆ t ∆t 1 2 U e = ----- k e ( u i – u j ) ⇒ K e = k e 1 2 –1 (33) l’indépendance des énergies vis-à-vis du repère implique : ( M e , K e ou C e ) g = λ g ( M e , K e ou C e ) λ g (34) Ainsi, dans un problème plan, pour un nœud à 3 ddl (u, v, θ ), désignant respectivement la translation suivant l’axe x, la translation suivant l’axe y et la rotation autour de l’axe z, le changement de repère correspondant à une rotation dans le plan xy d’un angle ϕ s’écrira : ■ les méthodes implicites pour lesquelles la solution au pas (n + 1) est obtenue à partir des équations au pas (n + 1). Ces schémas sont inconditionnellement stables suivant les cas. Un exemple classique est celui de la méthode de β-Newmark [15] qui écrit : 2 ü n + β ∆t ü n + 1 = u˙ n + ( 1 – γ )∆ t ü n + ∆ t ü n + 1 1 u n + 1 = u n + ∆tu̇ n + --- – β 2 u˙ n + 1 ∆t 2 (28) Ce schéma est inconditionnellement stable pour 2 β γ 1 ⁄ 2 . Lorsque 2 β = γ = 1/2, il conduit à : 2 4 2 4 ----------2- M + -------- C + K u n + 1 = F n + 1 + ----------2- M + -------- C u n ∆t ∆t ∆t ∆t (29) 4 + -------- M + C u˙ n + M ü n ∆t 2.2.3 Détermination des matrices structurales Les matrices M, K et C de l’équation (25) peuvent être obtenues par une décomposition de la structure en éléments structuraux simples e. Cette décomposition fait généralement appel à la méthode des éléments finis (§ 2.2.4) à moins que la structure ne se prête directement à des équivalences de masses concentrées, de ressorts et u v θ cos ϕ sin ϕ = – sin ϕ cos ϕ 0 0 0 u 0 v 1 θ (35) g À 3 dimensions, on prendra en compte les cosinus directeurs de chaque direction locale. Le plus souvent, chaque nœud de la structure servant à définir les éléments possède jusqu’à 6 ddl : 3 ddl de translation et 3 ddl de rotation. ■ Assemblage des matrices élémentaires exprimées dans le repère global. En écrivant que l’énergie de la structure est la somme des énergies élémentaires, on construit les matrices M, C et K relatives à l’ensemble des ddl de la structure en positionnant les termes des matrices élémentaires sur les ddl correspondants de l’ensemble. Deux termes ayant la même position s’ajoutent. Cette opération d’assemblage revient à écrire l’équilibre des forces aux liaisons. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 9 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ Ainsi, les matrices M, K et C du système à 3 ddl de la figure 7 (2 ddl de type i et 1 ddl de type j, mais cela n’a pas d’importance ici), s’écrivent : u1 u= u = 2 u3 uj M= ui m1 0 0 m2 0 0 0 0 m3 (36) k1 K = – k1 0 – k1 0 k1+k2 – k2 c1 C = – c1 k2 – k2 – c1 0 c1+c2 – c2 0 – c2 c2 Nota : les traits sous u 1 et u j indiquent la partition de u en deux sous-vecteurs : u j Figure 7 – Système à 3 ddl (2 ddl i + 1 ddl j) avec u 1 et u i avec u 2 et u 3 . d’où : 2.2.4 Détermination des matrices élémentaires par la méthode des éléments finis Ke = On trouvera dans la littérature d’amples développements sur le sujet [1][2][12]. On se limite ici aux grands principes et à quelques applications pratiques. La méthode des éléments finis permet de traiter un élément structural donné en projetant ses propriétés (continues) sur les ddl (discrets) associés aux nœuds qui le définissent. Cette discrétisation est réalisée en exprimant les déplacements du point courant de l’élément en fonction des déplacements aux nœuds, schématiquement : [u (x, t )]e = A e(x ) u e(t ) avec [u (x, t )]e Ve T A D T CDA d v (39) La matrice d’amortissement C n’est en général pas calculée au niveau élémentaire : l’amortissement est pris en compte le plus souvent de manière forfaitaire au niveau de l’ensemble (cf. § 2.3.3). L’exemple le plus simple est celui de l’élément de barre se déformant suivant son axe. Une interpolation linéaire entre ses deux extrémités conduit à : (37) déplacement du point courant de e, fonction de sa position x et du temps t, u e (t ) vecteur des déplacements aux nœuds, dépendant uniquement du temps t, A e (x ) matrice ligne des fonctions permettant d’interpoler les u e (t ), dépendant uniquement de la position x. L’introduction de la relation (37) dans l’expression des énergies de l’élément conduit aux expressions suivantes : x x u1 u e ( x,t ) = 1 – ----- ----L L u2 me M e = -------- 2 6 1 ■ énergie cinétique de l’élément par intégration sur tout son volume V e : Te = avec Ve 1 T ----- u˙ u˙ ρ d v 2 avec ρ masse volumique au point courant ; d’où : Me = Ve T A A ρ dv e ES K e = --------L (38) 1 2 (40) e masses concentrées : M 1 –1 –1 1 e me = --------- 1 2 0 0 1 (41) L longueur de la barre, m masse de la barre, E module d’Young, S section de la barre. Du point de vue raideur, l’élément se comporte comme un ressort de raideur k = ES /L suivant son axe. Cette relation fournit une matrice de masse pleine, dite cohérente (avec le champ de déplacement pris pour l’élément). On pourrait aussi obtenir une matrice de masse diagonale, dite concentrée, après avoir ramené la masse de l’élément directement sur ses nœuds : cette approche, plus simple, est aussi moins précise ; Dans le cas d’un élément de poutre joignant 2 nœuds à 6 ddl, comme indiqué sur la figure 8, le problème peut être décomposé en quatre parties, sous réserve que les déformations correspondantes soient découplées. ■ énergie de déformation de l’élément par intégration sur tout son volume V e : ■ Poutre en extension (ou traction/compression) : ddl concernés à chaque nœud : u. C’est l’élément de barre formulé précédemment, conduisant aux matrices (41). Ue = avec Ve 1 T ----- σ ε d v 2 σ et ε contrainte et déformation au point courant, vérifiant des relations du type, σ ε = C ε (loi de Hooke), = Du (relations cinématiques exprimant les déformations comme dérivées des déplacements, d’où l’opérateur différentiel D ). B 5 150 − 10 ■ Poutre en torsion : ddl concernés à chaque nœud : θ x . Le problème est analogue à celui de l’extension, en remplaçant la masse par l’inertie et la raideur d’extension ES/L par la raideur de torsion GJ/L. ■ Poutre en flexion dans le plan xy : ddl concernés à chaque nœud : v, θz . Le problème est différent et nécessite un développement approprié conduisant aux résultats ci-après. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ DYNAMIQUE DES STRUCTURES — d’où les matrices transformées [opération analogue à celle de l’équation (34)] : Mnn = Tn i M ii T in Knn = Tn i K ii T in (45) 2.3 Approche modale Figure 8 – Élément de poutre 2.3.1 Modes réels et modes complexes ■ Poutre en flexion dans le plan xz : ddl concernés à chaque nœud : w, θy . Le problème est analogue à celui de la flexion xy, mais avec une orientation de repère différente (x → y, z → x ) se traduisant par une modification de certains signes. Les matrices généralement utilisées pour l’élément de poutre en flexion dans le plan xy sont les suivantes : m M = ----------420 156 22L 54 – 13 L 22 L 4L 2 13 L – 3L 2 54 13 L 156 – 22 L – 13 L – 3L 2 – 22 L 4L2 (42) 12 6L 12 E I - 6L K = -------------------------3 L ( 1 + φ ) – 12 6L (4 + φ)L – 6L 2 (2 – φ)L 2 – 12 6L – 6L 12 (2 – φ)L – 6L 2 – 6L (4 + φ)L 2 avec L longueur, m masse, E module d’Young, I inertie de flexion, φ coefficient de cisaillement. [φ = 12 E I /(kGSL2), G module de cisaillement, k facteur de forme], ce dernier permettant de prendre en compte les effets d’effort tranchant dans les raideurs. Si l’élément de poutre ne pose pas de problème particulier, il n’en est pas de même avec les éléments de plaque pour lesquels la flexion est délicate à traiter et peut être formulée de différentes façons [2]. D’une manière générale, les codes de calcul par éléments finis mettent à la disposition de l’utilisateur une bibliothèque diversifiée d’éléments à une, deux ou trois dimensions pour offrir de grandes possibilités de modélisation de la structure. On trouvera dans la littérature diverses considérations sur les formulations, l’établissement des maillages et les précautions d’emploi, qui sortent du cadre de cet article. Signalons simplement, en complément des éléments déjà mentionnés, la possibilité d’introduire dans la modélisation des relations linéaires entre degrés de liberté pour représenter des parties indéformables, des mécanismes, etc. Un traitement possible est d’éliminer autant de ddl qu’il y a de relations par les opérations suivantes : — ensemble m de relations linéaires entre les ddl i (et éventuellement j) écrites sous la forme : Cmi u i = 0 (43) — sélection d’un sous-ensemble u m de ddl u i , à éliminer pour ne garder que le sous-ensemble complémentaire un , d’où la relation Cmm um + Cmn un = 0, et la transformation : –1 u i = T in u n avec T i n = – C mm C mn I nn (44) L’approche modale consiste à résoudre l’équation du mouvement (25) en deux étapes : résolution de l’équation sans excitation qui fournit les modes propres de la structure, puis superposition des modes. L’équation (25) sans excitation, c’est-à-dire avec F i = 0 et u j = 0, donne les deux équations : M ii ü i + C ii u˙ i + K ii u i = 0 (46) M ji ü i + C ji u˙ i + K ji u i = F j (47) Comme pour la relation (25), la première équation (46) permet de résoudre u i , la deuxième relation (47) restituant F j à partir de u i . L’équation (46) est homogène. La présence du second terme, due à l’amortissement, complique sa résolution. Deux stratégies sont alors possibles : — enlever ce terme d’amortissement de l’équation pour simplifier sa résolution, puis réintroduire cet amortissement dans la deuxième étape. C’est l’approche modes réels, qui conduit à des composantes modales réelles : elle a l’avantage de la simplicité, mais elle comporte une difficulté, décrite plus loin, que l’on ne peut contourner qu’au prix d’une hypothèse réductrice ; — conserver ce terme d’amortissement dans la résolution. C’est l’approche modes complexes , qui conduit à des composantes modales complexes (au sens algébrique) : la difficulté précédente disparaît, mais au détriment de la simplicité et du volume de calcul. La pratique courante utilise les modes réels en s’accommodant de l’approximation qui en résulte. Les modes complexes sont en général réservés à des cas particuliers comme les structures fortement amorties, ou les structures en rotation pour lesquelles l’effet gyroscopique introduit une matrice antisymétrique en complément de la matrice C. Dans ce qui suit, on décrit sommairement la spécificité des modes complexes avant de se focaliser sur les modes réels. Si l’on garde tous les termes de l’équation (46), cette dernière peut se mettre sous la forme : 0 ii üi 0 ii – K ii u˙ i M ii + C ii K ii K ii u˙ i = 0 0 ii u i (48) le système étant maintenant de taille double (2 fois le nombre N de ddl i), avec un vecteur d’état composé des déplacements et des vitesses. Les deux matrices ainsi construites, que l’on nomme A ii et B ii , sont symétriques. En cherchant des solutions de la forme : λt u̇ i ( t ) = Ui e u i (t ) (49) on aboutit au problème aux valeurs propres : ( λ A ii + B ii ) U i = 0 (50) qui admet : — 2 N valeurs propres complexes conjuguées : λk = – ζk ωk ± i ωk 2 1–ζk (indice souligné = indice fixé ; ω k , ζ k : voir modes réels) Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 11 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ — 2 N vecteurs (formes) propres à composantes complexes conjuguées : Φ i k , Φ * de la forme : ik Φi k = λk φik Φ i*k φik λ*k φ * ik = φ* ik ■ Élimination des ddl u s en négligeant les forces d’inertie correspondantes, d’où la relation K sd u d + K ss u s = 0, traduisant une interpolation statique des u s entre les u d , d’où la transformation : (51) ui = La valeur λ k et la forme Φ i k définissent le mode propre k . Ces formes propres vérifient des propriétés d’orthonormalité qui découlent de la symétrie de A ii et B ii [14]. La suite de l’approche est alors la même qu’avec les modes réels pour lesquels les matrices A ii et B ii sont remplacées par les matrices M ii et K ii . ud us = T id u d avec T id = I dd (57) –1 – K ss K sd à appliquer aux matrices M ii et K ii comme pour l’équation (45). Cette condensation n’est efficace que pour une élimination massive des ddl, car les matrices obtenues ont une forte densité, ce qui, conjugué avec la perte de précision engendrée, peut en limiter l’intérêt. Reste l’attrait d’un modèle matriciel de taille réduite. 2.3.2 Modes réels 2.3.3 Réponses par superposition modale Si l’on enlève le terme d’amortissement de l’équation (46), cette dernière s’écrit : (52) M ii ü i + K ii u i = 0 En cherchant des solutions de la forme : u i (t ) = u i e λt (53) La technique de superposition modale consiste à projeter les ddl physiques sur les modes propres préalablement calculés. Comme ces modes propres sont à composantes nulles sur les ddl de la jonction et ne peuvent donc pas représenter son mouvement, il est nécessaire de leur adjoindre des formes à composantes non nulles sur ces ddl. Cela conduit à écrire : on aboutit au problème aux valeurs propres : ui 2 ( λ M ii + K ii ) u i = 0 (54) qui admet — N valeurs propres imaginaires : λ k = i ω k ; — N vecteurs (formes) propres à composantes réelles : Φ i k . uj avec La pulsation ω k et la forme Φ i k définissent le mode propre k . Ces formes propres Φ i k vérifient des propriétés d’orthonormalité qui découlent de la symétrie de M ii et K ii : Φ i M ii Φ i k = 0 si ≠ k Φ i K ii Φ i k = 0 si ≠ k Ψij (55) 2 Le calcul des modes propres d’une structure, c’est-à-dire la résolution de l’équation (54), est souvent l’étape la plus coûteuse de l’analyse. Pour la mener efficacement, il est nécessaire de disposer d’un algorithme adapté au problème dont les principales caractéristiques sont la taille du système, sa densité (proportion de termes non nuls) et le nombre de modes désirés [16]. Un des plus usités pour ses performances et l’algorithme de Lanczos. Ce calcul peut être précédé d’une condensation des matrices M ii et K ii qui consiste à les transformer sans trop perdre de précision sur les propriétés aux basses fréquences. La plus simple et la plus utilisée est la condensation dite de Guyan qui découle des opérations suivantes. ■ Choix de ddl d (dynamiques) à conserver, sur lesquels on va projeter toutes les propriétés, les autres ddl s (secondaires) étant destinés à être éliminés, d’où la partition de l’équation (54) : – ω2 M dd M ds u d M sd M ss u s + K dd K ds u d K sd K ss u s = 0 (56) Ce choix est la partie délicate de l’opération, dont dépend la précision des résultats. B 5 150 − 12 Ψ ij q k 0 jk I jj (58) uj matrice des formes statiques relatives aux ddl j : Ψ i j est la forme obtenue sur les ddl i en imposant à 1 le déplacement j et à 0 tous les autres (donnant Ψjj = I jj). De par sa définition : = ω k m k raideur généralisée Si la structure est libre (pas de ddl j), les modes propres k incluent des modes rigides r, c’est-à-dire sans déformation, les pulsation propres correspondantes étant nulles. Dans le cas général à 3 dimensions, il y en aura 6 : 3 translations et 3 rotations autour du centre de gravité. Si le mode rigide a une translation ou une rotation unité, sa masse généralisée sera égale à la masse ou l’inertie correspondante. Φ ik Φ ik matrice des formes propres Φ ik (à jonction fixe, donnant Φ jk = 0jk ), en nombre N au départ, mais que l’on peut limiter aux plus contributifs (opération de troncature), en pratique aux n premiers, d’où n composantes modales q k pour N composantes physiques u i , Φ k i M ii Φ i k = m k masse généralisée Φ k i K ii Φ i k = k k = –1 Ψ ij = – K ii K ij (59) Si la jonction est isostatique (jusqu’à 6 ddl j, par exemple les 6 ddl d’un nœud de jonction unique), ces formes seront rigides (sans déformation) et l’on posera : j = r (rigide) pour distinguer ce cas particulier. La première des deux relations (58) traduit simplement la décomposition du mouvement interne en un mouvement relatif, par rapport à la jonction, exprimé dans la base des modes, et un mouvement d’entraînement par la jonction. La deuxième est une identité. Cette transformation (58), appliquée à l’équation (25), (introduction de (58) dans (25) et prémultiplication par la matrice de transformation transposée) conduit à : m kk L jk avec L kj M jj q̈ k üj + c kk 0 k 0 0 q˙k + kk 0 K jj 0 u̇ j qk uj = Φ ki F i F j + Ψ ji F i (60) mkk = Φk i Mii Φ ik matrice diagonale, grâce aux relations d’orthonormalité (55), ckk = Φk i Cii Φ ik matrice a priori pleine, kkk = Φk i Kii Φ ik matrice diagonale, grâce aux relations d’orthonormalité (55), M jj = Ψ ji I jj M ii M ij Ψ ij M ji M jj I jj matrice de masse condensée à la jonction. Si la jonction est isostatique (jusqu’à 6 ddl j = r comme mentionné précédemment), Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ c’est la matrice de masse de corps rigide, directement liée aux propriétés de masse M, centrage (x, y, z )G , et inertie (tenseur I ). Dans le cas d’un nœud de jonction unique à 6 ddl : M 0 0 0 M 0 0 0 M 0 – Mz G /r 0 + My G /r – Mx G /r + Mx G /r 0 + Mz G /r – My G /r K jj 0 – Mz G /r + My G /r = Ψ ji I jj K ii K ij Ψ ij K ji K jj I jj I xx /r – I yx /r – I zx /r + Mz G /r – My G /r 0 + Mx G /r – Mx G /r 0 – I xy /r I yy /r – I xz /r – I yz /r – I zy /r I zz /r = K jj – K ji K –1 ii = Φk i 0k j M ii M ij Ψ ij M ji M jj I jj , K ij matrice de = Φ ki ( M ii Ψ ij + M ij ) matrice des facteurs de participation (couplage entre les formes propres et statiques). Comme pour la relation (25), cette relation (60) se scinde en 2 équations, la première permettant de résoudre q k , la deuxième restituant F j à partir de q k . Le fait que la matrice c kk ne soit pas diagonale empêche de découpler les équations vérifiées par q k . Là est la contrepartie de l’approche par modes réels : on ne peut profiter de cette approche simplifiée qu’en faisant l’hypothèse, dite de Basile ou de Rayleigh, de matrice c kk diagonale, c’est-à-dire d’amortissements découplés dans la base des modes propres. On peut montrer que cette hypothèse est justifiée sous certaines réserves, la plus importante étant celle de modes non voisins ; traduite par le facteur de séparation en fréquence ( ω ⁄ ω k ) 2 – 1 qui ne doit pas être trop petit. Dans ce dernier cas, l’équation matricielle (60) en q k se décompose en n équations scalaires découplées : m k q¨ k + c k q˙ k + k k q k = Φ k i F i – L k j ü j (61) Chaque équation k est de la même forme que l’équation (14), ce qui montre qu’un mode propre peut être représenté par un système à 1 ddl, comme annoncé au paragraphe 1.2.2, avec une pulsation ω k et un amortissement visqueux réduit ζ k . Ainsi, grâce à l’hypothèse de Basile, l’amortissement peut être directement affecté sous cette forme à chaque mode. La résolution des équations (61), suivie de la restitution des déplacements physiques u i par la relation (58) qui traduit véritablement la superposition des modes, et celle des réactions F j par la deuxième relation (60), conduit à [8] : u i (ω ) F j (ω ) = G ii ( ω ) T ij ( ω ) F i ( ω ) – T ji ( ω ) K jj ( ω ) u j ( ω ) Φ ik Φ k i H k ( ω ) -----------------------2 ωk m k =1 N avec Gii (ω ) = ∑ k Φi r Φ r modes rigides r : -----------------------∑ 2 - , r – ω mr N T ij (ω ) = ∑ k =1 Φi k L k j –1 T k ( ω ) ----------------------- – M ii M ij , mk N Lj k L k j 2 –1 = – ω ∑ T k ( ω ) ---------------------- + M jj – M ji M ii M ij + K jj , m k =1 k 2 = – ω M jj ( ω ) 1 H k ( ω ) = --------------------------------------------------------------, ω 2 ω 1 – --------- + i 2 ζ k --------ω k ωk ω 1 + i 2 ζ k --------ωk T k ( ω ) = --------------------------------------------------------------. 2 ω ω 1 – --------- + i 2 ζ k --------ω k ωk raideur condensée à la jonction (matrice nulle si jonction isostatique), Lk j K jj(ω ) DYNAMIQUE DES STRUCTURES C’est une généralisation de l’équation (16), qui n’est strictement vraie que si la somme sur k est étendue aux N modes. Cette somme est le résultat de la superposition modale : chaque mode propre k se comporte comme un système à 1 ddl et sa contribution est le produit de deux termes : — un terme indépendant de la fréquence et de même dimension que le transfert considéré, que l’on appelle paramètre effectif du mode [9] (§ 2.3.4) ; — un terme sans dimension dépendant de la fréquence, H k ( ω ) ou T k ( ω ) suivant le transfert, fonctions des paramètres modaux ω k et ζ k . Ils sont semblables aux H 1 (ω ) et T 1 (ω ) du paragraphe 2.1.2 et toutes les remarques faites à leur sujet restent valables. Les termes de masse hors du signe somme s’interprètent comme des propriétés directement liées à la jonction, d’autant plus petits que le modèle est raffiné au voisinage de cette dernière : ce sont en fait des termes correctifs dus à la discrétisation. 2.3.4 Paramètres modaux effectifs et troncature L’équation (62) fait apparaître les paramètres modaux effectifs suivants : Φi k Φ k i G ii, k = -----------------------2 ωk m k flexibilités effectives Ljk Lk j M jj, k = ----------------------mk transmissibilités effectives (63) masses effectives Ces paramètres mesurent l’importance des modes vis-à-vis des transferts considérés, puisque leur contribution y est proportionnelle. Par ailleurs, ils vérifient des règles de sommation déduites de l’équation (62) à ω = 0 : N G ii, k = G ii ∑ k =1 N ∑ –1 T ij, k = Ψ ij + M ii M ij k =1 N (62) Φi k L k j T ij, k = ----------------------mk ∑ –1 M jj, k = M jj – ( M jj – M ji M ii k =1 M ij ) (64) G ii étant la matrice de flexibilité statique (pseudo-flexibilité pour une structure libre, c’est-à-dire flexibilité autour du centre de gravité). Le cumul des paramètres effectifs redonne la propriété statique (ω = 0). Lorsqu’on veut éliminer les modes supérieurs pour réaliser la troncature indispensable à l’efficacité de l’approche, les équations (62) montrent que leurs amplifications dynamiques sont voisines de 1 et donc que leur contribution globale est voisine du cumul de leurs Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 13 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ paramètres effectifs. Ce terme résiduel représentant les modes supérieurs peut, grâce aux règles de sommation (63), être exprimé en fonction des données statiques : N G ii, res = k = n+1 ∑ –1 T ij, k – M ii M ij = Ψ ij – ∑ k = n+1 N M jj, res = G ii, k k =1 N T ij, res = n G ii, k = G ii – ∑ n ∑ T ij, k k =1 n –1 M jj, k + M jj – M ji M ii M ij = M jj – ∑ k = n+1 ∑ M jj, k k =1 n étant le nombre de modes retenus parmi les N modes. Les équations (65) conduisent à une approximation équations (62) avec les n premiers modes seuls : G ii ( ω ) ≈ n H k ( ω )G ii, k + G ii, res ∑ k =1 T ij ( ω ) ≈ n ∑ Tk ( ω ) T ij, k + T ij, res k =1 K jj ( ω ) ≈ – ω2 ∑T n k ( ω ) M jj, k + M jj, res k =1 2 + K jj ≈ – ω M jj ( ω ) (65) des (66) Dans le cas particulier d’une jonction isostatique j = r, le plus souvent avec un nœud de jonction unique, diverses simplifications sont apparues dans les développements précédents, permettant une compréhension plus physique : Ψij = Ψir modes rigides ; K jj = K rr = 0 ( K jj est directement lié à l’hyperstaticité de la jonction) ; M jj = M rr masses de corps rigide (masse, centrage, inerties) ; M j j, k = M rr, k À titre d’exemple avec le modèle de la figure 7 et les valeurs m 1 = m 2 = m 3 = m, k 1 = 3 k 2 / 2 = k, on obtient les résultats du tableau 2. La somme des paramètres effectifs est bien égale à la valeur statique correspondante, hors jonction, pour la masse (M ij = 0 mais M jj = m ). On peut en déduire le modèle masses effectives de la figure 11, strictement équivalent du point de vue de la jonction en l’absence de troncature. Si l’on tronque le deuxième mode tout en gardant le terme résiduel, cela revient à souder sa masse à la base pour une masse résiduelle m + m/5. Tableau 2 – Paramètres modaux du modèle de la figure 7 Mode k 1 2 Σ 2 ωk k/3m 2k/m – Φ ik +1 +2 –2 +1 – mk 5m 5m – ψ ij = 1 ⇒ L k j 1 3m –m – G ii, k T ij, k M jj, k 3 1 +2 -------5k +2 4 1 4 –2 -----------10 k – 2 1 + 3⁄5 + 6⁄5 + 2⁄5 – 1⁄5 +1 +1 9/5 m 1/5 m 2m masses effectives usuelles. Les masses effectives M j j, k = M rr, k peuvent alors être directement utilisées pour représenter chaque mode par un système à 1 ddl (figure 3) : les masses, agissant dans une direction donnée, sont directement issues des masses effectives, les ressorts sont déduits de fréquences propres et les amortisseurs des amortissements modaux [10]. Figure 9 – Modèle masses effectives axial Dans le cas particulier d’un modèle axial (jonction à 1 ddl : u = ddl 1) ou latéral (jonction à 2 ddl : [v, θz ] = ddl [2, 6]), on aboutit aux représentations des figures 9 et 10. Dans le cas général, la masse agit suivant un mouvement hélicoïdal combinant translation et rotation dans un rapport donné. On pourrait généraliser ces considérations à une jonction hyperstatique ou aux paramètres effectifs autres que les masses, mais avec une perte de sens physique rendant l’interprétation plus difficile. Cette représentation par masses effectives peut être directement utilisée pour élaborer un modèle dynamiquement équivalent vis-à-vis de la jonction. (0) B 5 150 − 14 1 1 --k +1 Figure 10 – Modèle masses effectives latéral Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique +1 5⁄2 __________________________________________________________________________________________________________ DYNAMIQUE DES STRUCTURES Figure 11 – Modèle masses effectives du système de la figure 7 2.3.5 Paramètres modaux effectifs et réponses dynamiques Les fonctions de transfert G ii (ω ), T ij (ω ), M jj (ω ) des équations (66) sont toutes de la forme : X (ω ) = ∑A k ( ω ) X k + X res (67) k avec A k (ω ) Xk X res amplification dynamique, paramètre effectif, terme résiduel dû à la troncature. ce qui est traduit graphiquement par la figure 12 pour l’amplitude du transfert en fonction de la fréquence. L’allure de la courbe est régie par les règles suivantes : — à très basse fréquence, on retrouve l’asymptote vers la valeur statique égale au cumul des paramètres effectifs, c’est-à-dire ceux des modes retenus augmentés du terme résiduel représentant les modes tronqués ; — chaque mode provoque un pic qui correspond à sa résonance où il est prépondérant si son paramètre effectif n’est pas trop petit et s’il est relativement isolé. Dans le cas contraire, il peut se mélanger avec les modes voisins et/ou disparaître pratiquement de la courbe ; — entre deux modes adjacents non voisins d’importance analogue se situe un minimum qui, d’après les phases impliquées, se présente sous la forme d’un antipic (antirésonance) si les deux paramètres effectifs correspondants sont de même signe, sous forme d’un minimum plat dans le cas contraire. Ainsi, pour un transfert ponctuel (excitation et réponse au même endroit) où les paramètres effectifs sont nécessairement de même signe, on aura une succession d’antirésonances, alors qu’un transfert non ponctuel pourra comporter les deux cas, au gré des signes. Cette allure, modelée par les différents paramètres dans de grandes proportions, peut, dans un contexte expérimental, être plus ou moins modifiée par les bruits de mesure qui perturbent parfois profondément le profil des pics et masquent les antirésonances. Pour un transfert de la forme (67), la réponse y (t ) à une excitation transitoire x (t ) est de la forme : y ( t ) = ∑ X k h k ( t ) + y res ( t ) k de l’excitation, on en déduit directement l’accélération maximale de chaque masse effective. On peut alors en tirer : — en multipliant par la masse effective, la réaction maximale de chaque mode ; — en multipliant par la transmissibilité effective entre la jonction et un ddl donné, la contribution maximale de chaque mode au mouvement de ce ddl. Cependant, comme les maximums des différents modes n’ont aucune raison, en général, d’arriver en même temps, on ne peut pas restituer correctement les réponses physiques par superposition : là est la conséquence de la perte d’information du spectre de choc qui ne retient que des amplitudes (§ 2.1.4). On peut seulement recombiner forfaitairement ces contributions modales, par exemple par un cumul direct (conservatif), quadratique (probablement plus précis, mais pas nécessairement conservatif) ou mixte. De même, la réponse y (t ) à une excitation aléatoire de DSP Sxx (f ) donne, par application des formules (19) et (20), la moyenne quadratique suivante : y2 2 ≈ ∑X k (68) h k ( t ) la réponse impulsionnelle sans dimension du mode k , de la forme (18), y res(t ) le terme résiduel dû à la troncature. Dans le cas d’un transitoire dont on connaît le spectre de réponse, par exemple le spectre d’accélération absolue S ü , de par sa définition et la représentation par masses effectives de la figure 9 dans le sens avec Figure 12 – Allure des fonctions de transfert G, T ou M k π --2- f k Qk S xx 2 ( f k ) + X res x2 (69) sous réserve que Sxx (f ) ne varie pas rapidement au voisinage des fréquences propres f k et que les modes ne soient pas trop voisins, afin que l’intégrale de la somme soit égale à la somme des intégrales. Là encore apparaît la contribution de chaque mode sous forme d’un système à 1 ddl. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 15 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ 2.4 Systèmes continus 2.4.1 Généralités Les équations qui régissent le mouvement d’un système continu sont des équations aux dérivées partielles (§ 1.1.2). Dans le cas d’excitations ponctuelles, les résultats peuvent se mettre sous forme matricielle pour un ensemble discret de réponses, comme pour les structures discrètes. La résolution des équations sans excitation conduit aussi à un problème aux valeurs propres qui fournit les modes propres k de la structure en pulsations ω k et en formes Φ i k aux ddl de réponse i, en nombre infini dont on peut, en basse fréquence, ne retenir que les premiers. Ces formes propres Φ i k vérifient des propriétés d’orthonormalité qui découlent du principe de réciprocité, et l’approche modale vue avec les structures discrètes s’applique ici de la même manière. Dans le cas de structures simples, la résolution des équations peut se faire de manière analytique. Les résultats obtenus ont l’avantage d’être indépendants d’une quelconque discrétisation et constituent ainsi une référence. On traite ci-après l’exemple de la barre suivant son axe et celui de la poutre en flexion pure avec, pour conditions aux limites dans les deux cas, un encastrement à l’une des extrémités. 2.4.2 Barre encastrée/libre Avec les mêmes notations qu’au paragraphe 2.2.4, l’analyse de la barre encastrée au nœud 1 et libre au nœud 2 donne les développements suivants. ■ Équation du mouvement u (x, t ) sans excitation (M masse de la barre) : Par rapport à ces résultats de référence, les équations (40) et (41) relatives à l’élément de barre à champ linéaire (au lieu d’un sinus) conduisent, pour un modèle à un seul élément, à un mode propre unique avec : — pour la pulsation : un facteur 3 ou 2 suivant que les masses sont cohérentes ou concentrées, au lieu de π/2 ; — pour la masse ou la flexibilité effective : un facteur 3/4 ou 1/2, au lieu de 8/π 2 ; — pour la transmissibilité effective : un facteur 3/2 ou 1, au lieu de 4/π. Ces erreurs diminuent avec le nombre d’éléments utilisés pour représenter la barre. ■ Résolution avec excitations aux extrémités u 1 et F 2 , et une hypothèse d’amortissement structural que l’on peut traduire par un module de matériau complexe E (1 + iη ) comme mentionné à la suite de l’équation (21) : u 2 (ω ) F 1 (ω ) = 1 ω L --------------------- tan ----------M c ω ----- c L 1 – -----------------------ω L cos ---------c 1 ----------------------ω L cos ---------F2 ( ω ) c (73) M ω L u1 ( ω ) – ω -------- c tan -----------L c = E ( 1 + i η ) SL ⁄ M , vitesse de propagation complexe dans le matériau. Les fonctions trigonométriques qui s’introduisent résultent de la superposition des modes qui fournit leur développement limité, mais peuvent aussi être obtenues directement à partir de l’équation complète du mouvement. avec c 2.4.3 Poutre en flexion encastrée/libre (70) Avec les mêmes notations qu’au paragraphe 2.2.4, mais sans effet d’effort tranchant (φ = 0), l’analyse de la poutre en flexion encastrée au nœud 1 et libre au nœud 2 donne les développements suivants. ■ Résolution avec séparation des variables u (x, t ) = Φ (x ) f (t ), et la condition d’encastrement u 1 = u (0) = 0 : ■ Équation du mouvement v (x, t ) sans excitation (M masse de la poutre) : 2 2 ∂ u M ∂ u ES -------------- = ----- -----------L ∂ t2 ∂ x2 4 π ω k = ( 2 k – 1 ) ----2 π Φ k ( x ) = sin ( 2 k – 1 ) ----2 d’où les paramètres effectifs aux extrémités ( G au nœud nœud 1, T entre les nœuds 1 et 2) : ES ---------ML ES 1 8 1 -------- G k = ------ M k = -------- --------------------------2 L M π 2 (2 k – 1) x ----L 2, M au k–1 4 (– 1) T k = ----- ----------------------- (72) π 2 k–1 On peut vérifier dans chaque cas que la somme de tous les paramètres effectifs (jusqu’à l’infini) restitue la propriété statique correspondante : les deux séries du second membre convergent vers 1. Le modèle masses effectives qui en résulte est celui de la figure 13. 2 ∂ v M ∂ v EI -------------- + ------- ----------- = 0 L ∂ t2 ∂ x4 (71) (74) ■ Résolution avec séparation des variables v (x, t ) = Φ (x ) f (t ), et les conditions d’encastrement v1 = v (0) = 0 et θ z1 = dv/dx (0) = 0 : EI -----------3- λ k solutions de : cos λ k cosh λ k + 1 = 0 ML – sin λ k + sinh λ k x x ( x ) = cos λ k --- – cosh λ k --- – ------------------------------------------------------L L cos λ k + cosh λ k ωk = λk Φk x x sin λ k --- – sinh λ k --- L L (75) d’où les valeurs numériques du tableau 3, complétées par les para mètres effectifs aux extrémités [ G au nœud 2, M au nœud 1, T entre les nœuds 1 et 2 ; ddl (v, θz ) = (2, 6)]. Le modèle masses effectives qui en résulte est celui de la figure 14. (0) La résolution avec excitations aux extrémités (v 1 , θ z1 ) et (F 2, Mz 2), et la même hypothèse d’amortissement structural η que pour la barre donne des résultats analogues à ceux de Figure 13 – Modèle masses effectives de la barre B 5 150 − 16 l’équation (73), avec des termes en sin λ , cos λ , sinh λ , cosh λ , avec λ = ω L ⁄ c f et c f = ω E ( 1 + i η )IL ⁄ M vitesse de propagation en flexion dans la poutre. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ DYNAMIQUE DES STRUCTURES Tableau 3 – Paramètres modaux d’une poutre en flexion encastrée/libre k ---------------------------3 EI ⁄ M L M 22, k G 66, k ----------------- = ---------------G 66 M 22 M 26, k G 26, k ----------------- = ---------------G 26 M 26 G 22, k M 66, k ----------------- = ---------------G 22 M 66 3,516 22,03 61,70 120,9 0,613 1 0,188 3 0,064 7 0,033 1 0,890 8 0,078 8 0,016 5 0,006 0 0,970 7 0,024 7 0,003 2 0,000 8 + 1,566 0 – 0,867 9 + 0,508 8 – 0,363 8 + 1,137 7 – 0,181 5 + 0,064 8 – 0,033 1 + 2,155 6 – 4,149 4 + 3,993 6 – 4,000 2 >4 2 k – 1 )π 2 (------------------------- 2 2 4 -------------------------- ( 2 k – 1 )π 3 4 -------------------------- ( 2 k – 1 )π 4 3 4 ----- --------------------------- 4 ( 2 k – 1 )π – 8 (– 1) k --------------------------( 2 k – 1 )π – 16 ( – 1 ) k ---------------------------------2[ ( 2 k – 1 )π ] – 4 (– 1)k Σ – 1 1 1 1 1 ±2 k 1 2 3 4 3 G ii Statique L -----------3 EI = 2 L -----------2 EI 2 L -----------2 EI M ML --------2 ML --------2 ML 2 -----------3 M rr = L -----EI Figure 14 – Modèle masses effectives de la poutre en flexion 2.5 Sous-structuration 2.5.1 Généralités La sous-structuration peut s’effectuer à trois niveaux (cf. § 1.2.3). ■ À partir des matrices des sous-structures , par assemblage matriciel. Cette technique est la même que celle décrite au paragraphe 2.1.3 pour les éléments et ne sera pas reprise ici. De mise en œuvre très simple, elle peut conduire à des systèmes de taille très élevée, d’où l’intérêt des autres niveaux. ■ À partir des modes des sous-structures, par synthèse modale. Puisque les premiers modes propres sont les ingrédients de base du comportement basse fréquence de la structure, l’idée est d’utiliser cette information condensée pour la représenter. Le point faible de cette approche réside dans la troncature des modes qui peut provoquer des erreurs significatives. ■ À partir des fonctions de transfert des sous-structures, par manipulation adéquate de ces fonctions. Cette approche, la plus proche du monde des essais, présente la difficulté de traiter des entités de nature continue au départ, qu’il faut discrétiser par un échantillonnage en fréquence pour les besoins numériques, avec un compromis T 22, k = T 66, k T 26, k ---------------L Ψ ir = 1 0 T 62, k L 1 à trouver entre précision et volume des données. Divers problèmes numériques peuvent survenir, surtout en présence de données d’origine expérimentale. Les deux derniers niveaux présentent en fait une certaine complémentarité dont on s’efforcera de tirer partie suivant les cas. La démarche, commune, se fait en trois étapes : — caractérisation de chaque sous-structure dans une configuration donnée (conditions aux limites et chargements éventuels sur divers ddl, pas nécessairement ceux impliqués dans la liaison avec les sous-structures adjacentes). Le choix de la configuration peut être guidé par la représentativité des conditions de travail de la sous-structure couplée, et éventuellement la compatibilité expérimentale ; — couplage en écrivant la compatibilité des déplacements et l’équilibre des forces aux liaisons, et résolution des équations obtenues ; — restitution des réponses des sous-structures à partir des solutions de l’étape précédente. 2.5.2 Synthèse modale Suivant la configuration considérée pour l’analyse de chaque sous-structure, la formulation sera différente, d’où les multiples méthodes que l’on peut trouver dans la littérature, utilisant les modes propres correspondants, éventuellement complétés par d’autres modes de nature statique [3][12]. Les trois étapes se déroulent schématiquement de la manière suivante : — caractérisation de chaque sous-structure : projection dans la base Φ des modes choisis (propres et éventuellement statiques), par la transformation u = Φ q (u déplacements physiques, q déplacements modaux, d’où les matrices M, C, K de l’équation (25) transformées ; — assemblage des matrices transformées de chaque sousstructure traduisant la compatibilité des déplacements de l’équilibre des forces aux liaisons, et résolution pour trouver les réponses modales q ; — restitution des réponses des sous-structures par la relation u = Φ q. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 17 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ Un exemple typique est celui où chacune des deux sous-structures est analysée avec tous les ddl de liaison fixés (= ddl j). La transformation (58), utilisant les modes propres correspondants complétés par les modes statiques de liaison, peut alors s’appliquer pour fournir la relation (60) pour chaque sous-structure. L’assemblage des matrices se fait de manière classique puisque les déplacements u j sont communs aux deux sous-structures. Après la résolution par superposition modale donnant les u j et q k , les déplacements physiques u i sont restitués par la relation (58). Cette méthode est celle de CraigBampton, et revient à coupler des modèles de masses effectives, puisque ces derniers utilisent les mêmes ingrédients. 3. Techniques expérimentales 2.5.3 Couplage par fonctions de transfert Cette approche est plus directe puisqu’elle ne passe pas par une base intermédiaire, et se rapproche du monde des essais où les fonctions de transfert sont les premières caractéristiques accessibles. Les trois étapes se déroulent schématiquement de la manière suivante : — caractérisation de chaque sous-structure par ses fonctions de transfert entre ddl d’excitation, de réponse et de liaison, de type G, T ou K suivant les conditions aux limites. Les transferts nécessaires pour les étapes suivantes sont : • pour l’étape 2 (phase de résolution) : les transferts entre ddl d’excitation et ddl de connexion, et entre les ddl de liaison euxmêmes, • pour l’étape 3 (phase de restitution) : les transferts entre ddl de liaison et ddl de réponse ; — couplage par manipulation des transferts traduisant la compatibilité des déplacements et l’équilibre des forces aux liaisons, et résolution aux liaisons ; — restitution à l’intérieur de chaque sous-structure à partir des résultats aux liaisons. À titre d’exemple, le cas où chacune des deux sous-structures A et B est analysée avec tous les ddl de liaison fixés (= ddl j), avec une excitation sur des ddl internes s (sélection) de A et des réponses sur des ddl internes s (sélection) de B, conduit à : A A B — transferts nécessaires pour la résolution : T js , K jj , K jj , et pour B la restitution : T sj ; — couplage et résolution aux liaisons : • équations pour chaque sous-structure : A F j = – T jsA F sA + K A jj A uj F B j =K B jj B uj • compatibilité et équilibre : A uj = u • résolution : — restitution : F jA + F B j u A j = u B j B A B j = 0 B –1 = K jj ( K jj + K jj ) A T jsA F s u sB = T sjB u B j 2.6 Conclusions sur l’analyse Les développements qui précèdent montrent les possibilités et les limites de l’analyse. Toutes ces techniques permettent de représenter convenablement la structure considérée, sous certaines réserves : moyens informatiques adaptés, complexité structurale raisonnable, comportement linéaire, bande de fréquence limitée... Les limitations concernant la taille des modèles reculent d’année en année avec la capacité des ordinateurs et l’efficacité des logiciels, sans compter les possibilités de sous-structuration. Cette analyse, en permettant une prévision de comportement suffisamment fine, a donc un rôle important à jouer dans le développement d’une structure sensible à son environnement dynamique : c’est elle qui va constituer le point de départ des activités, pour la phase de conception et de dimensionnement. B 5 150 − 18 Cependant, malgré tous les raffinements possibles, la représentativité des modèles ne peut être garantie : difficulté de modélisation de parties complexes, erreurs sur les caractéristiques réelles, nonlinéarités, ignorance sur les phénomènes de dissipation... L’expérimentation doit alors prendre le relai pour combler ces lacunes en renseignant sur une certaine réalité. L’analyse devra ensuite prendre en compte cette réalité en recalant les modèles pour améliorer leur fiabilité et extrapoler les calculs à l’environnement réel. Enfin, la vérification de la structure se fera à nouveau par l’expérimentation, sur la base de l’analyse qui lui apportera sa justification et ses spécifications. Ces points sont développés dans ce qui suit. 3.1 Généralités 3.1.1 Essais dans le plan de développement d’une structure Malgré la diversité des pratiques pour la réalisation des structures, on peut dégager quelques lignes communes. Ainsi, le plan de développement d’une structure donnée fait plus ou moins apparaître les étapes suivantes où s’enchevêtrent les activités d’analyse et d’essais. ■ Conception d’après le cahier des charges. Des données concernant l’environnement que doit supporter la structure, on déduit des spécifications permettant une première définition de la structure par des calculs préliminaires de dimensionnement. ■ De cette première définition, on réalise un modèle de développement destiné à vérifier les modèles mathématiques mis en œuvre : l’identification des caractéristiques de la structure permet d’ajuster les modèles pour les rendre plus représentatifs de la réalité. ■ Ces modèles mathématiques recalés sont alors utilisés pour faire une analyse détaillée du comportement de la structure soumise à son environnement et, si celui-ci est influencé par la structure, faire évoluer les spécifications. Diverses itérations peuvent être nécessaires à ce niveau avant d’aboutir à une configuration figée. ■ On réalise alors un modèle prototype de la structure finale que l’on vérifie par des essais de simulation d’environnement, à des fins de qualification. Une partie de ces essais seront reconduits, éventuellement à des niveaux moindres, sur la structure finale, à des fins de réception et de déverminage. On voit donc apparaître deux types d’essai : des essais d’identification pour caractériser la structure et des essais de simulation pour la qualifier ou la réceptionner. En ce qui concerne l’environnement dynamique, la pratique courante est la suivante. ● Identification : par essai modal, dont l’objectif est de déterminer expérimentalement des modes propres de la structure qui constituent les propriétés les plus caractéristiques du comportement basse fréquence [5] [6]. ● Simulation : tout dépend de l’environnement réel, qui peut être mécanique ou acoustique. La simulation acoustique nécessite de générer un champ acoustique approprié à l’aide de moyens d’essai comme les chambres réverbérantes. Elle n’est nécessaire que pour des structures sensibles, c’est-à-dire comportant des surfaces exposées légères et de grande taille. Comme pour les techniques d’analyse, ce point ne sera pas développé ici. Reste l’environnement mécanique, de source mécanique ou acoustique d’ailleurs, que l’on peut simuler à l’aide de générateurs de vibrations. 3.1.2 Matériel d’essai Que ce soit pour l’identification ou la simulation, l’excitation est en général réalisée par des générateurs de vibrations, de taille plus ou moins grande : petite taille pour appliquer des forces ponctuelles Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ sur la structure (typiquement jusqu’à 200 N), grande taille pour imposer des mouvements aux appuis. Le plus souvent, ils sont de type électrodynamique qui permet un bon contrôle jusqu’à des fréquences élevées (typiquement 2 000 Hz). Leurs principales limitations sont les débattements faibles (typiquement 2,5 cm crête à crête), ce qui leur interdit la très basse fréquence (typiquement < 5 Hz), et la force délivrable (300 kN pour les plus grosses installations actuelles). On peut alors envisager des vérins hydrauliques si les fréquences restent basses (typiquement < 100 Hz). Les réponses de type mouvement sont en général mesurées à l’aide d’accéléromètres piézo-électriques qui sont simples de mise en œuvre pour un encombrement réduit et une précision souvent suffisante. D’autres types de capteur peuvent être utilisés pour des besoins spécifiques (accéléromètres capacitifs, interférométrie laser...). En ce qui concerne les réponses de type force de réaction, les mesures directes sont beaucoup plus délicates de mise en œuvre, car le dispositif, placé en série, ne doit pas perturber la configuration. On peut éventuellement accéder aussi à des efforts par l’intermédiaire de jauges de contrainte préalablement calibrées. Des deux points précédents, on retiendra qu’il est plus facile : — pour l’excitation, de contrôler les forces que le mouvement ; — pour la réponse, de mesurer le mouvement que les réactions ; donc de déterminer expérimentalement des flexibilités (ou des accélérances) dynamiques que des transmissibilités ou des raideurs (ou des masses) dynamiques. Du point de vue conditions aux limites, le plus facile à approcher est la configuration libre en utilisant une suspension dont les fréquences seront faibles vis-à-vis des premiers modes de la structure. Une condition d’encastrement est souvent plus délicate à réaliser, la souplesse du dispositif pouvant modifier sensiblement le comportement de la structure, malgré toutes les précautions prises. 3.2 Identification par essai modal 3.2.1 Généralités L’essai modal a pour but de déterminer expérimentalement des modes propres de la structure. D’après les développements du paragraphe 2.3.3 et en particulier l’équation (61), chaque mode k est caractérisé par : — sa pulsation ω k ; — sa masse généralisée m k (d’où sa raideur généralisée 2 kk = ωk mk ) ; — son amortissement visqueux réduit ζ k dans le cas de modes complexes ou de modes réels avec l’hypothèse de Basile (d’où son amortissement généralisé c k = 2 ζ k ω k m k ), ou les amortissements couplés c k sans cette hypothèse ; — sa forme propre Φ i k sur tous les ddl i souhaités ; — ses facteurs de participation L k j , c’est-à-dire les réactions modales, s’il y a des appuis (u j = 0). On peut faire sur ces paramètres modaux les remarques suivantes : — ω k et ζ k sont sans dimension, ainsi que Φ i k , forme définie à un coefficient multiplicatif près : ces paramètres peuvent se déduire uniquement de la mesure du mouvement ; — les amortissements couplés c k exigent une grande précision de mesure et la difficulté de leur prise en compte dans l’analyse n’incite pas à les considérer ; — L k j est délicat à déterminer puisqu’il se déduit de mesures de réaction, et sa validité est d’autant moins bonne que les appuis sont plus souples (u j ≠ 0). Ce n’est pas une pratique courante ; DYNAMIQUE DES STRUCTURES — hormis L k j , m k est le seul paramètre dimensionnel (masse). Il nécessite la détermination d’une force, ce qui conduit habituellement à une précision moins grande. Les techniques utilisées pour cet essai se divisent en deux grandes catégories. ■ La méthode de séparation des modes, ou appropriation, ou résonance de phase, consiste à isoler successivement chaque mode par une excitation appropriée et à en mesurer directement les caractéristiques. ■ L’essai avec excitation non appropriée, ou méthode de séparation de phase, sollicite un ensemble de modes dont on détermine ensuite les caractéristiques par traitement des résultats de mesure. 3.2.2 Essais par appropriation Ces essais sont apparus les premiers, dans les années 50. La mise en œuvre était longue et délicate, car l’excitation doit être appliquée avec beaucoup de soin pour approprier chaque mode, mais en retour, la mesure proprement dite des caractéristiques modales, simple, était compatible avec les moyens de l’époque. Depuis, ils ont été constamment améliorés : contrôle automatisé de l’excitation, optimisation du processus d’appropriation, mesures simplifiées des paramètres généralisés, etc., pour aboutir aujourd’hui à une utilisation opérationnelle efficace par des laboratoires spécialisés. Cette approche nécessite l’hypothèse de modes réels pour bénéficier du critère de phase : si un mode est approprié, tous les points de la structure vibrent en phase ou en opposition de phase. L’excitation doit être sinusoïdale et proche de la fréquence propre du mode pour obtenir des réponses importantes, donc plus précises. Le nombre de forces d’excitation, en théorie infini pour une structure continue, peut, en pratique, être très réduit, de deux à une dizaine suivant la complexité des formes cherchées. Le déroulement des essais est schématiquement le suivant : — balayage sinus préliminaire dans la gamme de fréquence considérée, afin de détecter la présence des modes recherchés d’après l’apparition des résonances ; Nota : le terme sinus est une abréviation pour en régime sinusoïdal assez courante dans le domaine, à mettre au même plan que transitoire ou aléatoire : environnement sinus, essai sinus, balayage sinus (sinus dont on fait varier lentement la fréquence). — appropriation des modes par réglage des forces d’excitation. Pour chaque mode, la répartition des forces est donnée par les équations du mouvement (60) relatif au mode seul. Lorsque la fréquence d’excitation est égale à la fréquence propre, c’est-à-dire à la résonance, excitations et réponses sont en quadrature ; — détermination des caractéristiques modales : la fréquence propre est immédiatement déterminée par la résonance, ainsi que la forme propre et éventuellement la réaction modale. Pour la masse généralisée et l’amortissement, diverses méthodes peuvent être utilisées pour les déterminer séparément ou simultanément : masses additionnelles, lâcher, forces en quadrature, cercle d’admittance dans le plan complexe, puissance complexe, etc., cette dernière méthode étant la plus élaborée. Le principal atout de cette approche est de conserver l’aspect physique des phénomènes : chaque mode est mis tour à tour en évidence et le critère de phase permet de confirmer son existence. Les résultats sont ainsi très fiables, avec une précision souvent très bonne. Pour cette raison, elle a toujours la faveur de certains. Cependant, elle a des inconvénients : outre ses problèmes de mise en œuvre et sa limitation aux modes réels, la difficulté d’accès à certaines zones peut rendre l’appropriation de qualité insuffisante. C’est pourquoi, depuis les années 70, diverses méthodes ne nécessitant pas d’appropriation, donc avec une excitation simplifiée, ont été élaborées, grâce surtout à la capacité croissante des ordinateurs à traiter les mesures. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique B 5 150 − 19 DYNAMIQUE DES STRUCTURES ___________________________________________________________________________________________________________ 3.2.3 Essais sans appropriation Parmi les méthodes proposées pour éviter l’appropriation, il en est une qui s’est rapidement imposée pour sa généralité et sa souplesse d’utilisation. Son principe est simple : identifier directement les fonctions de transfert issues d’un essai sur la structure. Cela revient à réaliser l’inverse de la superposition modale donnée par l’équation (62), comme indiqué sur la figure 4 : on applique une excitation quelconque mais connue et on mesure les réponses pour en déduire les fonctions de transfert dont on identifie les paramètres d’après leur expression analytique, d’où les paramètres modaux. Par rapport à l’appropriation, les avantages sont les suivants : — l’excitation peut être quelconque, non seulement du point de vue spatial, mais aussi temporel : une excitation sinusoïdale n’est plus nécessaire et l’on peut très bien utiliser une excitation transitoire (marteau doté d’une cellule de force) ou de l’aléatoire, puisque l’on se base directement sur les fonctions de transfert, c’est-à-dire les rapports réponses/excitations dans le domaine des fréquences. L’important est de bien exciter tous les modes cherchés : au besoin, on appliquera plusieurs excitations les unes après les autres ; — l’excitation peut se réduire à une seule force, ce qui élimine le problème de l’accessibilité et simplifie considérablement la mise en œuvre, puisque aucun réglage n’est requis. Dans le cas de comportement pouvant être découplé, à l’image de celui d’une poutre avec son mouvement dans l’axe, ses deux flexions et sa torsion, on utilisera une force adaptée à chaque cas, à moins de ne vouloir qu’une force excitant tout à la fois ; — la mise en œuvre de l’essai peut être complètement découplée du traitement, ce qui diminue d’autant la période d’immobilisation de la structure. En fin d’essai, il s’agit simplement de vérifier que les transferts à identifier ont une qualité suffisante et que tous les modes cherchés ont bien été excités ; — on peut faire l’hypothèse de modes réels ou complexes : il suffit pour cela d’utiliser l’expression analytique correspondante dans la phase d’identification. En contrepartie, toute la difficulté est reportée sur l’identification des fonctions de transfert par les fonctions analytiques intervenant dans les équations (62). C’est l’étape la plus délicate : elle nécessite de bons algorithmes de calcul, ainsi qu’une solide expérience en la matière, car la présence de bruit de mesure ne peut être totalement résorbée par l’analyse. Divers systèmes combinant matériel et logiciels sont commercialisés pour réaliser l’essai, depuis la génération de l’excitation jusqu’à la sortie des résultats. En pratique, l’excitation transitoire avec marteau, la moins précise, n’est utilisée que pour définir rapidement les tendances ou pour dégrossir le problème. L’excitation aléatoire est la plus simple à conduire, mais on préférera une excitation sinusoïdale bien contrôlée avec, si possible, plusieurs forces d’excitation, en fait pour se rapprocher de l’appropriation qui donne les meilleurs résultats. En ce qui concerne l’étape d’identification, diverses méthodes peuvent être utilisées [5]. ■ La plus simple est de considérer chaque mode séparément, au voisinage de sa résonance où il prédomine. Le transfert à identifier est alors celui d’un système à 1 ddl et donne un cercle dans le plan complexe. L’identification des paramètres de ce cercle fournit les paramètres modaux cherchés. La présence des autres modes perturbe cette analyse mais, après une première identification de tous les modes, on peut procéder à une correction et itérer jusqu’à convergence. ■ En considérant plusieurs modes simultanément dans une même bande de fréquence, le transfert est celui d’un système multiddl et diverses méthodes de séparation peuvent être utilisées. On distingue habituellement les méthodes temporelles, la plus connue étant celle de l’exponentielle complexe, et les méthodes fréquentielles, la plus connue consistant à décomposer les transferts en éléments simples pour identifier les pôles, qui donnent les fréquences propres et les amortissements, et les résidus, qui donnent les composantes modales. B 5 150 − 20 De par ses avantages, simplicité de mise en œuvre et souplesse d’utilisation, cette approche est très utilisée. Elle requiert cependant beaucoup de savoir-faire pour le traitement qui peut s’avérer long et délicat. Enfin, les résultats obtenus n’auront pas la même fiabilité qu’avec l’appropriation dont la compréhension physique est immédiate. 3.3 Simulation par générateurs de vibrations 3.3.1 Généralités La simulation mécanique sur la structure est à faire en fonction de ce que l’on connaît de l’environnement réel. Ce dernier peut nécessiter une analyse lorsqu’il est influencé par la structure ellemême : c’est le cas typique d’une configuration porteur/matériel où le porteur est le siège de l’excitation qu’il communique à son matériel. Il faut alors déterminer les interactions dynamiques à partir de modèles mathématiques de chaque partie, et l’on aura intérêt à combiner judicieusement résultats de calcul et résultats d’essais partiels pour rendre l’analyse plus fiable. Ces résultats d’analyse peuvent être directement reproduits au cours de l’essai de simulation, ou forfaitisés pour simplifier et/ou envelopper l’environnement réel. Cette forfaitisation doit se faire avec certaines précautions pour ne pas rendre la simulation trop éloignée de l’environnement réel. C’est ainsi qu’un balayage sinus piloté en déplacement (ou en accélération) devra être réduit en amplitude, au voisinage des principales résonances du matériel, s’il s’avère que les réponses issues de l’analyse porteur/matériel ont un faible contenu à ces fréquences suite aux échanges d’énergie vibratoire entre les 2 parties. Il est en général préférable de renoncer à la forfaitisation si la situation et le matériel d’essai le permettent. D’une manière générale, les environnements suivants peuvent être simulés. ■ Un environnement sinus, parfois représentatif de la réalité dans le cas de fréquences privilégiées, souvent issus d’une forfaitisation comme indiqué précédemment. L’essai est alors réalisé par un balayage sinus (le plus souvent logarithmique) dans la bande de fréquences considérée, avec une vitesse permettant un mouvement quasi permanent tout en conduisant à une durée d’essai raisonnable. ■ Un environnement transitoire reproduisant les excitations déterminées en fonction du temps. Les développements récents en matière de pilotage permettent certaines réalisations dans le contexte industriel. Pour les transitoires courts, ou chocs, parfois générés par des dispositifs spécifiques, la notion de spectre de choc introduite au paragraphe 2.1.4 peut être utilisée pour simplifier la mise en œuvre de l’excitation par équivalence des effets sur un système à 1 ddl. ■ Un environnement aléatoire donné par ses DSP (auto et intercorrelations des excitations), dans les cas où l’environnement réel est trop long pour être représenté par un transitoire. C’est, par exemple, le cas des vibrations d’origine acoustique que l’on simule habituellement dans une large bande de fréquences, typiquement jusqu’à 2 000 Hz. D’autres cas peuvent être envisagés, comme le sinus sur bruit qui consiste à superposer un manuel sinusoïdal à un mouvement aléatoire de DSP donnée pour se rapprocher d’un environnement où certaines fréquences émergent d’un bruit sans que leurs effets soient prépondérants. 3.3.2 Mise en œuvre La simulation mécanique est en général assurée par des générateurs de vibrations de type électrodynamique ou hydraulique pilotés en force ou en déplacement. La difficulté dépend de : — la nature de l’excitation : sinusoïdale/aléatoire/transitoire, force/déplacement ; — la nature de l’interface : nombre de ddl, iso/hyperstaticité. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Génie mécanique __________________________________________________________________________________________________________ Le cas le plus simple et le plus courant est l’excitation monoaxiale. La difficulté de mise en œuvre croît ensuite très rapidement avec le nombre de ddl à contrôler. L’excitation monoaxiale est justifiée dans le cas d’une seule force d’excitation sur la structure ou d’un seul déplacement (ou accélération) imposé dans une direction bien déterminée : — la force d’excitation pourra être simulée par un générateur suspendu et piloté en force ; — le déplacement imposé pourra être simulé en plaçant le spécimen sur un générateur fixe et piloté en déplacement. L’interface est alors rigidifiée par les raideurs de la table vibrante. Ce cas est fréquent dans la pratique industrielle. Il est courant de réaliser ce type d’essais même s’il existe plusieurs forces ou plusieurs déplacements, en supposant un découplage des effets. C’est ainsi que l’on pourra réaliser des essais suivant chacun des 3 axes de référence, en imposant à chaque fois la force ou le déplacement concerné, cette excitation pouvant d’ailleurs être issue d’une moyenne dans le cas de plusieurs points de fixation. Les erreurs que l’on commet dans ce contexte peuvent être estimées par analyse. Lorsque les effets de couplage entre axes ne peuvent plus être négligés, il est nécessaire de réaliser une excitation multiaxiale, c’est-à-dire plusieurs excitations simultanées. La difficulté est de bien représenter non seulement chaque excitation, mais aussi les relations entre excitations : phases en mode sinus, intercorrélations en aléatoire, simultanéités en transitoire. En ce qui concerne le pilotage en force, on peut disposer plusieurs générateurs suspendus autour du spécimen pour appliquer autant de forces simultanées. C’est ce que l’on fait couramment en DYNAMIQUE DES STRUCTURES essai modal. La limitation vient du montage (positions générateurs/spécimen) et du pilotage simultané des forces. En ce qui concerne le pilotage en déplacement, certains moyens d’essai permettent le contrôle du déplacement d’une table rigide suivant 2 à 6 ddl simultanément, mais ce n’est pas actuellement une pratique courante car la mise en œuvre est relativement lourde. Dans le cas d’une interface hyperstatique (fixations multiples) où la contribution de l’hyperstaticité est significative (déformation importante de l’interface qui ne peut plus alors être considérée comme rigide), on peut envisager des dispositifs d’excitation en plusieurs points, par exemple un spécimen sur table vibrante lui-même excité en force. Ce type de montage commence à apparaître dans la pratique industrielle. 4. Conclusion Les principales techniques d’analyse et d’essai en dynamique des structures ont été présentées de manière synthétique. Moyennant certaines hypothèses, l’analyse permet de représenter convenablement les phénomènes et de traiter des structures relativement complexes à condition de disposer d’outils de calcul et d’expérimentation adaptés, et d’adopter une logique de développement cohérente. À noter que cet article, tout en ayant été rédigé avec un certain souci de généralité, ne prétend pas avoir un caractère exhaustif, car le domaine concerné et ses applications sont vastes. Références bibliographiques [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7] BATHE (K. J.) et WILSON (E. L.). – Numerical methods in finite element analysis. Prentice Hall (1976). BATOZ (J. L.) et DHATT (G.). – Modélisation des structures par éléments finis. Hermès (1990). CRAIG (R. R.). – Structural dynamics. John Wiley and Sons (1981). CRANDALL (S. 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