domaine de la sociologie

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DOMAINE DE LA SOCIOLOGIE
Semestre 1 : De la folie à la santé mentale
Comment prendre des distances avec ces évidences ?



En analysant comment se construisent ces évidences et les catégories par lesquelles on pense
notre société. Analyse historique : permet de prendre du recul et de mesurer à quel point ce
qui nous parait normal s’est construit. Recul historique.
Les évidences sont multiples, chaque point de vue a son périmètre de validité. Analyse des
controverses : analyse des différents arguments/points de vue proposés.
Tenter de mobiliser les acquis de la sociologie, prendre appui sur des auteurs. Analyse
scientifique.
Initiation par la pratique : La sociologie ne propose pas de science exacte mais plutôt différentes
démarches sociologique, il n’y a pas UNE démarche sociologique. Les approches de la sociologie sont
en concurrence ou sont complémentaires. Il y a des contextes, des techniques d’analyses différentes ;
chaque démarche sociologique est inscrite dans son contexte.
Phobie et santé mentale :
Dans notre langage familier on a l’habitude de décrire un état/sentiment à partir d’expression qui
relève de la santé mentale. Très souvent dans nos pratiques quotidiennes nous qualifions les
personnes en utilisant des termes de la santé mentale tels que « déprime », « hystérie »…
Plus largement, les questions relatives à la santé mentale font irruption dans notre actualité et
suscitent beaucoup de commentaires, de débats... Ex : Drame de Pau : une personne internée a tué
une infirmière et une aide-soignante. Ce fait divers a relancé des débats sociologique qui reviennent
souvent (liberté des citoyens, etc…). Un thème qui peut sembler très spécialisé ou de type
médical/psychologue, peut être lié à la société et donner lieu à des questions sociologiques donc faire
l’objet d’étude sociologique.
Les travaux des sciences humaines :
La santé mentale renvoi à divers domaines de la sociologie : sociologie de la santé et de la médecine,
sociologie de la politique publiques (manifestations…), sociologie de la déviance (qu’est-ce qui dans
notre société est déviant ?), sociologie des institutions (étudie comment fonctionne les institutions
hospitalière. La santé mentale peut être abordée au travers des institutions qui la prennent en
charge), sociologie de la famille (un grand nombre de personne ayant des troubles mentaux vivent en
famille).
Différentes facettes d’une question que mobilise un seul thème. Il y a une pluralité de mode
d’approche.
Les frontières entre les disciplines ne sont pas étanches, chaque discipline s’est constituée en
délimitant progressivement son champ d’investigation, ses méthodes, ses concepts…
La sociologie apparait au 19ème siècle grâce aux institutions. Le travail sociologique n’est pas acquis, ce
terme n’est pas totalement défini.
Domaines voisins : Il faut s’intéresser aux transformations des Politiques publiques pour voir la
manière dont la santé est prise en charge, l’Histoire va aussi nous permettre de questionner l’évidence
des catégories de classement (est-ce que la folie à le même sens qu’il y a deux siècles ?), et
l’Anthropologie permet de confronter une représentation…
CHAPITRE 1 : Histoire de la folie
Comment s’est construit la catégorie de la folie et la santé mentale ? L’approche par laquelle le
sociologue s’intéresse à la construction du domaine dans lequel il travail est qualifiée d’approche
constructiviste. Cette approche est très partagée, elle est à mi-chemin entre l’approche objectiviste
et subjectiviste.
Selon l’approche objectiviste le monde social se donne à voir selon l’observateur comme une
réalité sociale extérieure. D’après cette approche il existe des structures objectivistes du monde social
indépendant des agents (l’observateur se met à l’extérieur et les agents sociaux dans cette analyse ne
sont pas au courant de ces lois). Le but de la sociologie objectiviste est de découvrir les lois de ce
phénomène.
A l’opposé, l’approche subjectiviste tente d’analyser les agents et non leurs lois car pour
comprendre la réalité sociale il faut comprendre les agents eux-mêmes.
Avec l’approche constructiviste on considère que dans une structure donnée, pour appréhender le
monde social, on donne des évidences aux individus, ils héritent de catégories qui sont solidifié dans
des structures, des règles sociales… (ex : la catégorie « famille » renvoi à la famille nucléaire c’est-à-
dire parents/enfants ; l’institution du mariage, les allocations, etc… prennent en compte cette
catégorie.). Les individus aux travers de leurs pratiques vont peu à peu transformer les schémas et
donc inventer de nouveaux cadres et de nouvelles catégories de pensée. Les catégories émergentes
parviennent à se fixer et deviennent des catégories d’évidences, ce qui était exceptionnel devient donc
banal et ces nouvelles catégories seront ensuite assimilées par les institutions (ex : familles
monoparentales). Ccl : les catégories émergentes parviennent à se faire reconnaitre, ainsi les
catégories institutionnalisées deviennent des catégories évidentes.
Auteur : Norbert ELIAS, a beaucoup insisté sur la nécessité de l’Histoire. Dans « La société des
individus » ELIAS étudie la lente émergence de la conscience de soi, cela n’a pas toujours existé.
Quel regard les différentes sociétés portaient-elles sur les « fous » ? En avaient-ils peur ? Etaient-ils
exclus ? Etaient-ils porteurs d’un message ? Quelles frontières mettaient-elles entre la folie et la
raison ?
Auteur : Michel FOUCAULT « Histoire de la folie à l’âge classique » 1961. (Ce livre est un livre de
référence mais difficile d’accès.)
Claude QUETEL « Histoire de la folie de l’antiquité à nos jours » 2009.
Quels sont les questions que l’on va se poser sur l’histoire sociologique de la folie ?
Comment les sociétés identifient-elles certaines personnes comme « fous » ?
Quelles sont les frontières entre folie et raison ?
Quels sont les traitements ? Protection, exclusion, indifférence, porteur de messages…
Nous allons mettre en perspective la manière dont est traitée la folie de la santé mentale. La
principale idée à retenir est comment cette question est-elle abordée au Moyen-Âge, il n’y a pas une
seule et même manière d’aborder cette question.
Quels sont les principes que revêt le fou au Moyen-Âge ? C’est à la foi :
- Un possédé du démon : quand on pense que le fou est possédé on dit que c’est le démon qui
le fait agir, il est donc du ressort de l’église (institution) de tenter de les guérir (nombreux
sanctuaires).
- Un malade qu’il faut soigner : quand on prend le fou pour un malade, au Moyen-Âge on
redécouvre l’héritage de la médecine grecque donc de la tradition d’Hippocrate. La folie peutêtre du ressort du médecin (institution –> médecine). Elle l’interprète comme le résultat du
déséquilibre des humeurs du corps (liquide ex sang, bile), ses humeurs étaient dites trop
chaudes, trop froides, trop sèches, trop humide… On tente de corriger ses humeurs par
exemple diététiquement, c’est le début de la chirurgie. La science pouvait peut-être faire
quelque chose.
- Il existe des figures du fou beaucoup plus valorisées, figure un peu métaphorique car on
l’imitait pour transgresser l’Etat, faire de la dérision. Il y a même une fête des fous/sots
durant laquelle un membre du clergé élisait un évêque des fous en chantant et faisant des
pitreries et ils se déguisaient. C’était une sorte de défouloir, considéré comme le moyen
pacifique et d’éviter la violence.
- Il y a aussi le fou/bouffon : entourage du prince ou du roi. Cette image à perdurer très
longtemps, jusqu’au 17ème siècle avec Louis XIV. Il permet de dénoncer une certaine image
critique de la société. On retrouve cette image dans un certain nombre d’œuvres comme « La
-
nef des fous » de Sebastian BRANT. Au Moyen-Âge, la mise en scène de la folie permet de
poser une parole critique, donc de dénoncer la folie du monde. Il devient le personnage
principal et important, d’une grande inquiétude sociale. Il ne faut pas en déduire qu’ils étaient
acceptés, il faut faire la différence entre fou = métaphore sociale plutôt valorisée et fou =
individu qui n’est pas toujours bien traité.
Ou quelqu’un de dangereux dont il faut se protéger. Lorsqu’il n’est pas dangereux il peut être
un villageois que l’on accepte malgré ses difficultés, il pouvait avoir une certaine place au sein
de son village, travailler et donc ne pas être mis à l’écart. Cette proximité, le fait qu’il puisse
être au milieu des autres, ne veut pas dire qu’ils étaient totalement intégrés comme on
pourrait le penser. Ils étaient tolérés mais pas considérés comme égal. Contrairement aux
sociétés actuelles, les sociétés du Moyen-Âge étaient très hiérarchisées. Les fous dangereux,
eux, étaient sans hésitation emprisonnés.
Au 17ième siècle a lieu une grande coupure historique, en 1656 l’édit royal ordonnant le « grand
enfermement » entraine la création de l’Hôpital Général. Par cet édit Louis XIV décide de créer ces
hôpitaux (ex : La Pitié en 1612, La Salpêtrière en 1634, Bicêtre). « Tous ces bâtiments sont affectés
aux pauvres de Paris, de tout sexe, lieu, âge, de quelque qualité et naissances et peu importe en quel
état ils pouvaient être : valide ou invalide, malade ou convalescent, curable ou incurable ». On voit
dans cet édit que tous les pauvres sont regroupés. Cette création de l’Hôpital Général a été considéré,
par certain, comme l’acte par lequel on a décidé d’enfermer les fous.
Auteur : Michel FOUCAULT, philosophe du 20ième siècle, auteur d’une œuvre complètement
prolifique : « Histoire de la folie ». Les critiques, les mécaniques de pouvoir qui s’exercent à travers les
institutions qui devraient être (prison, hôpitaux, psychiatrie…). La thèse de Michel Foucault est
que l’Hôpital Général est le « grand enfermement », donc le pouvoir décide d’enfermer les
fous. Ce grand enfermement va avec la mise en exergue de la raison donc de l’avènement d’une
coupure radicale entre la raison et la folie, au travers de la création de l’Hôpital Général le pouvoir
royal a décidé. Michel Foucault dit : « La Folie dont la Renaissance vient de libérer la voix, mais dont
elle a maitrisé déjà la violence, l’âge Classique va la réduire en silence par un étrange coup de force. »
Pour les historiens, la création de l’Hôpital Général vise essentiellement à aider les pauvres avant
les fous, et à l’époque pour régler le problème des pauvres il fallait les enfermer, pour eux, ce n’est
en aucun cas le renfermement des fous mais plutôt la prise en charge étatique des
pauvres. Cette mesure peut être interprétée comme un mouvement de charité qui consiste à prendre
en charge ceux qui ne peuvent pas subvenir à leur besoin puisqu’elle consiste à lutter contre la
mendicité, mais elle est aussi une lutte contre l'irréligion des mendiants donc leur immoralité et le but
est de les punir pour ça.
Du 15ième au 16ième siècle, la pauvreté est mal vue dans la mesure où le travail arrive et est menacé
par l’oisiveté dans les sociétés marchandes, cela entraine une sorte de chasse aux mendiants. Les
pauvres et les mendiants sont vus comme des personnes inutiles.
L’édit de 1656 répond à cette chasse aux mendiants. En 1657 a lieu un rassemblement cour de La
Pitié de tous les mendiants pour les interner, parallèlement, la mendicité est officiellement interdite.
Lors du grand enfermement des pauvres, les fous sont pris dans cette spirale. A cela s’ajoute la place
possible de la folie dans la société au 17ième siècle. Pour Marcel GAUCHET, à partir de cette époque la
folie cesse d’avoir une vision symbolique. Le traitement de la folie s’inscrit dans un traitement de
laïcisation de la société qui va s’affirmer au 17ième siècle.
La laïcisation offre une rupture avec une vision d’un monde qui faisait recourir à Dieu la vérité
absolue. On utilise alors la raison pour donner des explications, la raison est affranchie de toutes
tutelles religieuses. La Folie perd alors ses explications mystiques et religieuses. En second plan, la
laïcisation se manifeste par des tâches d’évolution donc l’état commence à s’intéresser à la pauvreté
et donc aux insensés. M. Gauchet dit que la folie cesse d’avoir une fonction symbolique mais il ramène
ce mouvement aux mouvements de déhiérarchisassions de la société.
Dans le schéma hiérarchique de la société, il existe différents statuts donc des inégalités. On
commence à observer ce mouvement à la fin du 16ième qui va de pair avec un mouvement
d’individualisation. Avec cette transformation les personnes ne trouvent plus d’explication aux
différences, on passe de groupe à individus différents mais égaux. L’enfermement est une manière de
résoudre provisoirement cette question.
Comment penser la différence dans l’identité, dans la ressemblance ? L’enfermement est une réponse
transitoire à cette question. Michel Gauchet dit : « L’exclusion de fait recouvre une inclusion de droit.
Enfermer c’est séparer en surface mais incorporer en profondeur. ».
Ces personnes sont considérées comme semblables. Finalement les Hôpitaux Généraux ont accueillis
très peu d’insensés, que 5% et 10% un siècle plus tard.
Pour ce qui est des fous riches, quand ils ne sont pas enfermés chez eux, ils sont envoyés dans une
maison de force (lettres avec cachet).
Les mendiants sont emmenés dans des dépôts de mendicités, peu à peu on accueille des mendiants
invalides, les insensés indigents.
Avec le siècle des Lumières et la monté du mouvement philosophique, la condition des fous
commence à émouvoir. Manifestation d’un souci des pouvoir politiques, séparation dans chaque
dépôts des mendiants et des insensés. Au moment de la Révolution, il y a beaucoup de critiques des
hôpitaux et des lettres de cachets. Par la Révolution, ses lettres sont supprimées ainsi que le clergé à
la disposition de l’Etat. Dans l'attente de création de nouvelles structures, les fous sont encore
enfermés dans des maisons de force ce qui va conduire à créer l'asile, un lieu thérapeutique
d'accueil…
C'est en 1802 que sont mises en place les préconisations de la pré-révolution. Il est décidé de créer
des lieux pour les insensés qui étaient mélangés aux mendiants auparavant. C'est le résultat d'un
changement culturel profond qui fait advenir une nouvelle représentation de la folie : une maladie
curable. Dans le contexte général, le mouvement de laïcisation qui opère une rupture avec la vision
précédente, on pense plutôt que c'est un phénomène naturel et historique. Ce mouvement affirme la
pré-imminence de la raison et la possibilité d'une maîtrise humaine sur le cours des choses. La science
appliquée à la maladie peut améliorer la folie. Il y a deux médecins théoriciens de cette nouvelle
approche de la folie : l’aliénisme :
 Philippe Pinel : médecin à la Salpêtrière, il écrira un traité médico-philosophique sur
l’aliénation mentale ou la manie. Il était supposé libérer les fous de leurs chaînes.
 Jean-Etienne Esquirol : disciple de Pinel, inquiet du sort réservé aux fous, il a visité les
établissements dans lesquels les fous étaient enfermés.
Ils avaient la conviction que la folie est curable, une maladie avec un début et une fin. Ils pensent
qu'elle n'a pas d'origine organique donc pas de traitement médicamenté. Entre la raison et la folie, il
s'agit moins d'une question de nature que de degré. Il existe donc une part de raison, grâce à laquelle
on peut entrer en contact avec la personne malade. Ce sont des aliénés avec une part d'altérité qui
s'insinue en eux. Il faut donc faire preuve de douceur, de bienveillance, d'empathie, et il faut les
écouter. Philippe Pinel dit : « Les aliénés désignés à leur arrivée comme très emportés et très
dangereux, semblent tout à coup prendre un naturel opposé, parce qu'on leur parle avec douceur,
qu'on compatit à leurs maux, qu'on leur donne l'espoir consolant d'un sort plus heureux ». Il faut faire
comprendre au malade son aliénation. On définit son anormalité donc la normalité (norme politicomorale). Le traitement repose sur plusieurs principes :
 L'isolement au nom de la thérapeutique car on lui prête plusieurs avantages : on soustrait
l'aliéné à toutes ses habitudes, son environnement social, on l'éloigne des conditions qui ont
produit son trouble. L'isolement est le moyen le plus énergique et le plus utile pour protéger
le malade.
 La construction d’une microsociété totalement ordonnée : la vie collective est extrêmement
organisée. Pinel explique : « Un ordre constant et une régularité invariable dans tous les
rouages de la maison, cette régularité doit être aussi rigoureuse que le mouvement d'une
horloge qui, une fois montée, se meut et marche sans interruption. Toute les périodes de la
journée ont donc leurs emplois et leurs devoirs ».
On cherche à offrir un environnement apaisant (exemple : jardins) ; la maison est l’agent
thérapeutique le plus puissant contre les maladies mentales. On instaure une discipline stricte
avec un système de punition gradué. La maison à deux facultés : premièrement elle protège
de la société (donc fonction d’exclusion), deuxièmement elle sert d’observatoire pour
connaitre les mécanismes de la folie et permettre le progrès dans la compréhension de la
maladie mentale.
C'est le début de la constitution d'une classification de la maladie mentale : la nosographie. Il
faut un lieu spécialisé dans le traitement de la folie (loi de 1838) et qui réglemente les conditions dans

lesquels les personnes peuvent être internées (un des buts est de limiter les internements abusifs).
Deux types de placements sont acceptés :
- Le placement volontaire, à la demande des familles avec certificat médical d’un médecin
étranger à l’établissement et à la famille.
- Le placement à la demande de l’autorité publique, ordonné par le préfet, placement dont l’état
d’aliénation compromet la sécurité publique ou personnelle.
La loi de 1838 dite « loi des aliénés » consacre donc juridiquement le rôle thérapeutique de
l’institution asilaire, l'asile n'étant pas tant un lieu où on prodigue des soins mais plutôt un lieu de soin
en lui-même.
Cela va entrainer la construction de bâtiments et des réaménagements. Les dispositions misent en
acte par la loi de 1838 sont un succès mais les asiles sont surpeuplés et cela engendre de mauvaises
conditions de vie et une grande violence. Il s’agit plutôt de garder les malades que de les soigner. Ce
n’est qu’en 1910 que viennent des infirmiers dans les asiles (et non pas des gardiens venus en asile
pour chercher un emploi mais sans aucune qualifications). Il y a alors de nombreux cas de mauvais
traitement.
La 1ière critique de l'asile viendra des médecins de l'asile car ce qui devait être un lieu de guérison est
devenu un lieu de vie. On découvre alors la chronicité de la maladie et la notion de curabilité est mise
en cause. L'asile thérapeutique institutionnel est devenu une fabrique d'incurables, un lieu
d'enfermement à vie avec les malades et une rupture avec la famille.
La psychanalyse se développe au début 20ième avec Freud. Il y a une évolution dans le domaine de la
théorisation de la maladie mentale et des nouveaux moyens thérapeutiques font leur apparition : les
électrochocs (1930), de nouvelles classes de médicaments, surtout neuroleptiques, qui suspendent les
effets aiguë de la maladie (1952).
Auteur : Erving Goffman, « Asile »
L’asile est discrédité, les malades sont abandonnés. Pendant la guerre, on parle d’«hécatombe des
fous» c’est environ 44000 morts dans les asiles, de faim, de maladie, de carence etc… Sous l'effet de
ces critiques, de la découverte de nouveaux médicaments, de la prise en compte du coût de
l'hospitalisation, du nouveau regard des psychiatres, de la prise en charge de la carence de cette
chronicité… Le besoin d'une prise en charge intermédiaire en amont et en aval de l'hôpital se fait
ressentir. En 1952, validation par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), il faut désormais trouver
des systèmes de prise en charge. La sectorisation psychiatrique est instaurée : le territoire est
découpé en unités de 70 000 habitants, chaque unité correspond à un secteur psychiatrique où il y a
toute une chaîne psychiatrique, de l'hôpital au traitement ambulatoire. Le but est le traitement
précoce de la maladie, la prévention et le repérage, ne pas séparer le patient de son environnement
affectif, assurer un suivi pour éviter une ré-hospitalisation… C'est la fin de l'hospitalisation centriste.
Les fous sont considérés comme tout autre mais trouve une place dans une hiérarchie de la société et
font l’objet de traitements différents pendant l’ancien régime.
Conclusion : 17ième : grand renfermement, exclusion.
19ième : folie maladie curable, institution asilaire.
20ième : le fou s’inscrit dans la cité, hôpital, moment de la thérapie, prise en charge.
CHAPITRE 2 : La critique de l’asile
La critique de l'asile telle qu'elle a été portée par des philosophes (Swain, Foucault, Gauchet,
Goffman)
Rappel sur Foucault : Il a analysé la création de l'institution asilaire au 19ième comme étant le
prolongement du grand renfermement initié par la création de l'Hôpital général (à la foi lieu
d'exclusion et d'assistance), qui visait exclusivement les fous selon lui. C'est un mouvement selon
lequel on valorise la raison. La création de l'asile n'est que le prolongement du renfermement, thèse
qu'il a développé dans « Histoire de la folie ». L'asile est une entreprise de normalisation, donc le
savoir médical qui est à l'origine de sa création occulte cette normalisation. « N'est-il pas important
pour notre culture que la déraison n'ait pu y devenir objet de connaissance que dans la mesure où elle
a été au préalable objet d'excommunication? ».
Gauchet et Swain contestent l'idée de Foucault selon laquelle l'internement des malades mentaux
dans les asiles serait dû à une montée d'une intolérance contre ceux qui sont jugés différents. Ils
expliquent au contraire que la naissance des asiles est à mettre en parallèle avec l’avènement d'une
société égalitaire, où les fous sont considérés comme des humains à part entière qui ont une
conscience, un esprit, et dès lors peuvent être soignés.
Outre Atlantique, Goffman a écrit « Asiles » (1961), il n’est pas historien mais un sociologue et a
donc un mode d'approche différent. Il a écrit son livre après avoir passé 3 ans dans un hôpital
psychiatrique en se faisant passer pour l'assistant du directeur. Dans son ouvrage il prend le point de
vue des reclus. C'est un sociologue interactionniste, il a focalisé son œil sur les interactions entre
individus. Son objet d'étude porte sur des moments de la vie sociale où les individus se rencontrent et
interagissent les uns avec les autres. L'interaction sociale selon Goffman regroupe les actions
réciproques qu'exercent des partenaires quand ils sont en présence les uns des autres. Tout son
travail a été d'observer et décrire.
 Quelles sont les formes, les règles et les rôles que chacun joue dans l'interaction ?
Les acteurs de l'interaction partagent un sens commun qui guide leur interaction. Ils doivent faire en
sorte que leurs actes soient compréhensibles pour autrui. Il faut donc s'adapter aux contextes et à
l’espace. Dans l'espace public, le malade mental est celui qui ne respecte pas les règles de l'interaction
(ex : une des règles de l'interaction est la limites du territoire de chacun).
Goffman a une définition strictement sociologique du malade mental. Dans son analyse, il ne
s'intéresse pas à l'existence réelle ou supposée de troubles psychiques chez celui qui est supposé être
malade mental. « La folie ou le comportement anormal attribué aux malades résulte pour une grande
part non pas de sa maladie mais de la distance sociale qui sépare ce malade de ceux qui le déclare tel
». Ceux qu'il définit comme malades mentaux sont donc tous ceux qui se retrouvent pris dans le
processus de l'hospitalisation. Pour Goffman, la maladie mentale est complètement
indissociable de son institutionnalisation, comme il le décrit dans son ouvrage. L'institution crée
donc son malade mental. Pour lui, l'asile est une « institution totale » = « un lieu de résidence et
de travail où un grand nombre d'individus placés dans une même situation, coupés du monde
extérieur pour une période relativement longue, mènent une vie recluse dont les modalités sont
explicitement et rigoureusement réglées ».
Une institution totale regroupe quatre caractéristiques :
 Ce qui qualifie l'asile en tant qu'institution totale est la coupure avec le monde extérieur
qui se matérialise physiquement par des obstacles à la circulation.
 Tous les besoins et toutes les activités des pensionnaires sont pris en charge par
l'institution. Alors que dans la vie hors-institution l'individu joue une multiplicité de rôles, à
chaque fois dans des sous milieux différents. Dans les institutions totales, chaque action se
joue dans un même milieu, sous la même autorité, dans un même groupe.
 Un mode de fonctionnement bureaucratique, on doit obéir à des règles et des
protocoles quelle qu'en soit l'efficacité.
 « Un fossé infranchissable entre le groupe restreint des dirigeants et la masse des
personnes dirigées ».
Il intègre dans son analyse un ensemble de lieux d'enfermement comme les prisons, les casernes, les
institutions pour vieillards et personnes handicapées… Ce qui intéresse Goffman c'est la manière dont
ces institutions détruisent l'identité des personnes qui y sont recluses. Elles définissent une
carrière du malade mental, c’est-à-dire ce qui se passe au croisement de l'institution et des
biographies individuelles, dans la durée. Elle articule à la fois la situation publique de l'individu
(extérieur à l'individu) et l'image que l'individu a de lui-même. Cela lui permet de décrire ce que les
individus reclus font à partir de ce que les institutions font d'eux.
 Quelles modifications interviennent dans la personnalité des reclus du fait de leur
hospitalisation et comment agissent-ils à partir de cela ?
Goffman identifie 3 phases de cette carrière :
o La Phase Pré-Hospitalière : Ceux qui viennent volontairement dans l'asile sont ceux qui
ont l'impression d'avoir perdu l'esprit, qui se fonde sur un ensemble de stéréotypes ancrés
o
dans la société qui donnent sens à certains symptômes (ex : entendre des voix). Dès qu'ils
sont entrés dans l'asile, ils suivent le même traitement que ceux qui sont internés sans
consentement. Goffman s'intéresse plus à ceux qui sont internés par force. Ces personnes
viennent souvent à la suite d'un comportement jugé scandaleux par l'entourage. Néanmoins il
fait remarquer qu'il n'y a pas de liens directs entre le comportement scandaleux et le fait
d'être enfermé, qui dépend d'un certain nombre de contingences de carrière. Les
intermédiaires sont multiples : agent de police, médecin, proche parent. Le malade a
l'impression d'être au milieu d'une conspiration du silence, face à une coalition qui rassemble
les autres partenaires. Le malade va donc être un acteur de l'internement contre son gré, le
malade se sent abandonné de ce qui le touche de plus près.
La Phase Hospitalière : Le malade fait tout pour éviter de se voir identifier à ce qu'il est
devenu, en refusant tout échange ou en les limitant au minimum. Il arrive avec une certaine
représentation de lui-même, mais peu à peu, il se trouve privé de tous les moyens par
lesquels en temps normal se constituait la valeur de son moi. L'institution totale détruit
l'identité des personnes qui y sont recluses. Le « moi » est la résultante des rôles
joués par l'individu, et du regard d'autrui sur ces rôles. Cette constitution du moi
s'appuie sur des ressources matérielles (ex : objets, tenue), ou des ressources symboliques
(ex : contrôler son information personnelle, le droit de choisir ce que les autres savent sur
nous…). Dès qu'il arrive à l'hôpital, le reclus est dépouillé de l'ensemble des conditions
matérielles qui lui permettent d'assurer les conditions de son moi (formalités administratives :
photos, pesée, empreintes digitales, inventaire des effets personnels, coupe de cheveux,
distribution de vêtements uniformes…). « Ces formalités d'admission mériteraient d'être
nommées mise en condition ou programmation parce qu'ainsi dépouillé, l'arrivant se laisse
niveler, homogénéiser, et transformer en un objet qu'on peut livrer à la machine de
l'établissement de telle façon que rien ne vienne entraver la marche routinière des opérations
administratives ». Cette dépossession du moi est renforcée par le système des quartiers, ce
o
sont des unités de base très hiérarchisées, en bas de l'échelle confort rudimentaire avec
liberté limitée, en haut de l'échelle inverse. Cela renforce le conflit d'opinion que les individus
ont d'eux-mêmes, d'autant plus que ces conditions moins bonnes sont présentées aux
malades comme non pas relevant d'impératifs extérieurs mais comme étant directement
reliées à son comportement, donc correspondant à ses besoins actuels et donc comme
exprimant l'état dans lequel il est tombé. Les conditions matérielles qui sont offertes
modifient l'idée que l'individu se fait de lui-même. Le malade tente de réagir en se
racontant « des histoires de malheur » pour prouver à lui-même et aux autres que sa
condition est liée à une suite de malheurs qui lui sont arrivés. Le personnel de l’hôpital montre
que l'histoire des malades est fausse, il faut qu'il adopte ou fasse semblant d'adopter l'opinion
que l'hôpital a de lui. La tâche du personnel soignant pour faire adopter cette version aux
malades est rendue d'autant plus facile qu'ils disposent du dossier du malade donc tous les
éléments décrits dans les étapes de la maladie, et tout ce qui est du ressort de l'intime.
L'ensemble du personnel disposent de ces informations.
La Phase Post-Hospitalière : L'asile permet à un certain nombre de reclus de montrer leur
résistance face aux institutions, c'est ce qu'on appelle une institution secondaire. Une
adaptation primaire est lorsque l'identité des individus s'adapte à l'organisation,
se conforme à ce qu'on leur demande pour se fondre dans leur rôle. Les
adaptations secondaires sont des adaptations au travers desquels les individus vont
manifester leur résistance par rapport à l'institution. Par adaptation secondaire, Goffman
entend « le moyen de s'écarter du rôle et du personnage que l'institution lui
assigne naturellement ». Elles sont : la disposition à utiliser tous les moyens (ex : faire
sécher son linge sur le radiateur, utilisation de journaux pour dormir n'importe où), le
détournement de rôles et de stratégie (ex : se faire passer pour malade pour attirer l'attention
et avoir une position privilégiée vis à vis des gardiens), la recherche des activités à l'intérieur
de l'asile pour les bénéfices secondaires qu'elle apporte (ex : aller en gym pour pouvoir dormir
sur les tapis moelleux), l'utilisation de zones franches qui sont des zones où la surveillance de
l'institution est un peu relâchée. Tout cela requiert de la part des reclus une connaissance
intime de l'institution. Il ne faut pas surestimer le poids de ces adaptations. Les contrôles sont
extrêmement puissants, mais il y a parmi les reclus une certaine honte rattachée à
l'enfermement donc la solidarité entre reclus est moins faciles et moins fortes. Si par les
adaptations secondaires les individus tentent de garder une certaine emprise sur eux-mêmes,
il y a d'autres stratégies plus courantes comme le repli sur soi, l'adaptation totale à
l'institution, le défaitisme.
Conclusion de Goffman: La représentation que l'individu se fait de lui-même n'est pas seulement
celle que l'organisation se fait de lui. Elle est aussi ce que l'individu peut construire en se distanciant
de l'institution. Le « moi » se construit aussi contre l'institution, en opposition à celle-ci. « [l'individu
peut se définir] comme un être capable de distanciation, c'est-à-dire capable d'adopter une position
intermédiaire entre l'identification et l'opposition à l'institution et prêt, à la moindre pression, à réagir
en modifiant son attitude dans un sens ou dans l'autre pour retrouver son équilibre. » L'institution est
donc essentielle dans la construction de l'individu. Goffman est un des sociologues qui a construit
intellectuellement une pensée critique contre l'institution asilaire.
CHAPITRE 3 : Un grand mouvement de déshospitalisation
Le mouvement de déshospitalisation émerge d'un grand mouvement de critique de l'hôpital, mais
on se rend aussi compte, dans les années 60, du coût énorme des asiles et des hôpitaux
psychiatriques. D'un point de vue économique, on veut limiter les séjours. Le deuxième élément est
découverte de nouveaux médicaments (neuroleptiques) qui élaguent les états aiguës, ils
enlèvent les symptômes les plus violents et donc rendent moins indispensable l'hospitalisation.
Le premier mouvement est celui de l'antipsychiatrie, né dans les années 60. Il est assez radical
car selon lui la maladie mentale, y compris dans ses formes les plus graves (ex : schizophrénie) n'est
pas vraiment une maladie car sa cause est psycho-sociale. Pour eux, les schizophrènes ne sont pas
des malades mais des déviants par rapport à une norme sociale donc leur internement n'a pas d'autre
but que de leur faire accepter l'ordre établi.
R. Laing et D. Cooper en Angleterre, Basaglia en Italie.
Family Life montre une schizophrène dans son contexte social et familial.
Ces antipsychiatres trouvent des alternatives sous forme de communauté thérapeutique où vivent
ensemble soignant et soignés car il n’y pas de frontières entre eux...
Le deuxième mouvement est celui de la psychothérapie institutionnelle, moins radicale. En
France, ce courant est associé à L. Bonnafé et F. Tosquelle, qui sont des psychiatres qui considère
l'institution malade. Il faut faire en sorte que les institutions soient thérapeutiques. Ils veulent
annuler la hiérarchie et tenter de leur rendre leur liberté en s'ouvrant vers l'extérieur. L’Hôpital de
St-Alban est expérimenté, c’est une nouvelle forme de thérapie où on enlève les barreaux, tout est
ouvert, les infirmiers ne jouent plus le rôle de gardiens, les patients prennent part aux décisions
concernant la vie commune. Clinique de la Borde initiée par J.Oury lieu de rencontre.
La Circulaire du 15 mars 1960 institue la sectorisation psychiatrique. Le principe de cette
réforme est de découper le territoire en secteurs comprenant chacun 70000 habitants. Au sein de
chacun des secteurs, des équipes soignantes pluri-professionnelles chargée de plusieurs fonctions :
prévention, diagnostic précoce, traitement… Leur fonction est d'harmoniser les réponses de tous les
troubles psychiques de la population. C'est donc une unité géographique de soin au sein de laquelle
l'hôpital n'est qu'un des éléments, transfo radicale car avant l’organisation des soins était entièrement
centrée sur l'hôpital. Plusieurs principes: la proximité c’est-à-dire assurer le plus possible le traitement
des malades au plus loin de l'hôpital et au plus près de leur milieu de vie, de leur domicile ; la
prévention c’est-à-dire entreprendre des soins médicaux au stade le plus précoce possible ; la
continuité c’est-à-dire que la prise en charge d’une personne est fait par une même équipe qu'elle soit
à l'hôpital ou qu'elle en sorte.
On a donc dans chaque secteur une gamme élargie de structures permettant des prises en charge
adaptées à chaque cas. Par exemple, les CMP (Centres Médico-Psychologiques) ont un rôle d’accueil,
de prévention et de soins, les équipes au sein du CMP se déplacent aussi à domicile, l’hôpital de jour
permet une prise en charge à la journée ou à temps-partiel, les centres d'accueil thérapeutique à
temps partiel, et les appartements thérapeutiques.
Il faut organiser l'ensemble du réseau entre ces structures. Il faut aussi ramifier d'autres structures
qui ne sont pas directement liées aux soins psychiatrique comme les maisons de retraite, les mairies,
les instituts spécialisés dans la prise en charge des moments aiguë de la maladie mentale. Cela fait
que chaque étape est adaptée à des moments particuliers de la maladie.
La transformation de statut : Les personnes souffrant de troubles psychiatriques vont bénéficier
du statut d’handicapés. Le 30 juin 1975 : mise en place de dispositions qui prendront en charge le
handicap. Soit on est malade, soit on est handicapé. Les malades peuvent être soignés et ont une
prise en charge médical, les handicapés ont une prise en charge par assistance. Les personnes qui
souffrent de handicap mental sont celles qui ont une déficience mentale stabilisée renvoyant souvent
à une origine organique. Celles souffrant d'un trouble psychique ne sont donc pas pris en
charge par la loi de 75. Pour eux, inclure le trouble psychique sous le statut du handicap est antithérapeutique dans la mesure où c'est compter sur leur mobilisation. On parle désormais de
personnes ayant un handicap d'origine psychique d'après la loi de 2005. Ces personnes
peuvent bénéficier de l'ensemble des prestations. La maladie mentale est donc considérée comme
chronique et donc comme un handicap.
La maladie chronique étudiée par les sociologues de la santé notamment par H. Strauss « La trame de
la négociation » dans lequel il pause un cadre de réflexions sociologiques, permet de comprendre les
problèmes que posent les maladies chroniques dans nos sociétés. Ce développement est lié aux
avancées de la médecine et cela a permis de maintenir en vie des personnes qui avaient des maladies
chroniques (ex : le cancer). La médecine a permis d'éradiquer certaines maladies. Il y a une
stabilisation de la maladie et on a gommé les crises et les maladies mentales sous contrôle. La
maladie chronique est sur le long terme et pose le problème de la gestion de la maladie. La prise en
charge continue de la maladie implique différents acteurs : médecins, familles, employeurs, malades.
I.Vasinguer « La maladie chronique entraîne les acteurs de la maladie au-delà du monde médical
dans toute les sphères de la vie sociale pour une période de temps indéterminé mettant en interaction
des acteurs de plus en plus nombreux. »
CHAPITRE 4 : Les pathologies de l’individualisme contemporain
Qu'est-ce que les sciences humaines et sociales peuvent-elles amener aux pathologies mentales
contemporaines ?
Dans les premières séances on a vu que la conception, la définition de pathologie mentale évolue non
seulement au cours du temps mais aussi au cours de l'espace. On ne fixe pas les mêmes frontières
selon les époques et les lieux entre la folie et la raison. On ne considère pas les fous de la même
manière. Ce n'est qu'au tout début du 19ième que la folie a été considérée comme une pathologie
curable. Les SHS permettent donc de prendre des distances avec ces catégories de folie et santé
mentale. Ces catégories sont l'issue d'un héritage. Les SHS permettent de comprendre que ces
catégories sont amenées à évoluer. On va voir grâce aux SHS que la folie et la santé mentale sont
conditionnées par le social. C'est une proposition des SHS et pas de la médecine car il s'agit de
psychologie.
QUESTION 1 : Existent-ils des facteurs, des déterminants sociaux aux troubles mentaux ?
Durkheim est considéré comme fondateur de la sociologie moderne. Dans son ouvrage « Le suicide
», il défend l'idée que le phénomène du suicide est un fait social à part entière. Le suicide est un
phénomène social normal, régulier, que l'on retrouve dans la plupart des sociétés, et au sein de
chaque société le taux de suicide évolue peu. La tendance au suicide dont chaque société est
collectivement affligée est assez constante. Il utilise une démarche statistique pour étudier les
variations du suicide dans le temps et dans l'espace. Il détermine un nombre de corrélation entre le
taux de suicide, et un certain nombre de variables qui peuvent être à l'origine des variations du taux
de suicide. Le taux de suicide, c'est la variable dépendante c’est-à-dire celle qu'on va tenter
d'expliquer (les variables indépendantes vont l'expliquer). Les personnes qui sont inscrites dans une
religion ou dans une famille s’adonnent moins au suicide. Le fait est que la religion et la famille sont
des instances d'intégration, l'individu se sent appartenir à un groupe. De même, pendant les périodes
de guerre et de révolution, les suicides sont moins nombreux car sentiment d'appartenance à la
nation, ou à une classe sociale. Les sentiments d'identité collective sont ravivés. Pour Durkheim, l'une
des causes déterminante du suicide est celle de l'intégration.
« Le suicide varie en fonction inverse du degrés d'intégration des groupes sociologiques dont fait
partie l'individu. Quand la société est fortement intégrée, elle tient les individus sous sa dépendance,
considère qu'ils sont à son service, et par conséquent ne leur permet pas de disposer d'eux-mêmes à
leur fantaisie. »
C'est une 1ère tentative d'expliquer le suicide par des causes sociales.
Introduction : Aujourd'hui, on a une prévalence (= nombre de personnes atteintes à un moment
donné d'une certaine maladie dans une population donnée) importante des maladies mentales.
Les organisations internationales disent que les troubles psychiatriques viennent au 3ème rang des
maladies mondiales, derrière le cancer et les maladies cardiovasculaire qu'ils pourraient supplanter.
20% de la population nationale souffrirait de troubles psychiques et du comportement au cours d'une
année. 1/3 des personnes souffriraient d'un trouble psychique au cours de sa vie. Les maladies
mentales seraient responsable de 13000 morts par an à cause du suicide, auxquels s'ajoute l'alcool,
les overdoses etc... Les maladies mentales pèsent très lourd dans le budget de la santé nationale, car
la plupart sont chroniques. On doit prendre en compte les difficultés à recueillir les données, car
d'abord les statistiques sont recueillis par les services psychiatriques, quand on parle de personnes qui
souffrent de troubles mentaux au cours d'une année, on compte ceux qui sont venus au moins une
fois. Cette file active ne compte pas ceux qui n'ont pas recours aux soins. 3ème raison : incertitudes
de diagnostique qui affectent les statistiques. La psychiatrie ne bénéficie pas de tests biologiques ou
cérébraux qui permettent de justifier le diagnostic. Il n'y a pas d'accord général sur la maladie
mentale et leur cause, ce qui veut dire que les catégories utilisées par les médecins sont très
différentes donc pas d'homogénéité au sein de la maladie mentale → absence de consensus global
des médecins. Il existe pourtant une classification standard, internationale des maladies mentales,
qu'on appelle la CIM 10 (Classification Internationale des Maladies, 10 est la branche) crée par l'OMS.
Aux États-Unis, c'est le DSM 4 (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) qui change tous
les ans. Le seul ensemble commun pour les médecins au niveau de la maladie mentale sont des
symptômes, des critères, mais qui n'expliquent pas la maladie. Ce sont donc des classifications plus
administratives que diagnostique. Les chiffres sont donc un ordre de grandeur. Il y a donc une
inégalité sociale par rapport aux troubles mentaux. Établir une corrélation entre facteurs sociaux et
troubles mentaux n'est pas établir une explication, c'est juste la mise en relation de deux variables.
Comment se manifeste les inégalités de santé à partir de la genèse des troubles ?
On peut imaginer que l'a précarité sociale fait apparaître l'anxiété et la dépression. Troubles sociaux et
psychologiques. Il y a aussi un accès différencié à des soins continus et de qualités. On accède
souvent à l'hôpital qu'à un stade avancé du trouble (coût). Les inégalités en matière de santé
psychique se manifestent aussi au niveau des conséquences différenciées de ces troubles, c’est-à-dire
que selon la situation éco, le statut des individus, les effets des troubles psychiques sur leur situation
éco ou sociale est plus ou moins grave.
Est-ce que l'apparition et la disparition de nouvelles maladies peu avoir une dimension sociale ? Est ce
qu'il existe des maladies mentales propres à une époque ou à une société ?
Hystérie maladie du XIXème qui semble avoir disparue, elle avait des symptômes spectaculaires
comme pertes de connaissance, spasmes… Rendue connu car soignée à la Salpêtrière par Charcot
avec l'hypnose. Freud analysait ce trouble comme une frustration d'origine sexuelle.
Aujourd'hui, la dépression est au premier plan puis on ajoute l’anorexie et les différentes
toxicomanies. 90% des femmes se retrouveraient dans un état dépressif pathologique au moins une
fois dans leur vie. Explication de ces nouvelles maladies :
- La dépression serait un nouveau terme pour désigner un mal-être social et pour le dépolitiser (c’està-dire ne plus le relier à l'emploi…). On aurait tendance à psychiatriser un malheur social.
- P. Pignasse dit que la dépression est l'ensemble des troubles qui sont soignés par des
antidépresseurs. Il existe des molécules qui peuvent changer les humeurs.
- La dépression n'est pas nouvelle mais elle était prise en charge par d'autres institutions comme la
religion.
- Il y a bien de nouveaux symptômes qui peuvent s'expliquer par l'anthropologie.
A. Ehrenberg constate d'abord un effritement des utopies dans les sociétés par lesquelles on pensait
que le bonheur de chacun allait passer par le bonheur de tous. Les individus pensent de moins en
moins que le destin collectif n'est plus lié à leur destin personnel. Très fort individualisme. Dans la
famille, les liens sont beaucoup moins acquis, ils sont de plus en plus affinitaires, tout repose sur
l'individu pour garantir ces liens. De plus en plus, les destins individuels sont considérés comme
imputables à l'individu lui-même. Chaque individu a tendance à se sentir responsable de ce qu'il lui
arrive. C'est ce qu'on appelle l'impératif d'autonomie, qui s'impose à tous. Il explique dans son
ouvrage le culte de la performance, le règne de la compétition car le monde du travail est fondé sur
l'implication personnelle.
L. Boltanski et E. Chiapello se sont intéressés au nouvel esprit du capitalisme. D'un côté, un individu
conquérant et entrepreneur de sa propre vie, il parvient à répondre à ses objectifs d'autonomie, de
l'autre un individu souffrant de la dépression nerveuse. La dépression est inhérente à une société où
la norme n'est plus fondée sur la discipline, mais sur la responsabilité et l'initiative.
Dans son ouvrage « la fatigue d'être soi », Ehrenberg dit que la fatigue d'être soi, est la contrepartie
de l'injonction à être soi. La dépression serait donc une vraie pathologie qui serait une mutation
anthropologique de nos sociétés.
CHAPITRE 5 : Santé mentale et souffrance psychique
Les expressions « santé mentale » et « souffrance psychique » sont intégrés dans un certains
nombres de textes officiels. Malgré l’introduction de cette nouvelle expression, cette circulaire
concerne essentiellement une réforme de la psychiatrie. En gros, la psychiatrie doit s’intéresser aussi à
la santé mentale, c’est pourquoi un rapport de Piel et Roelandt a été rédigés en 2001, sur une
commande de Kouchner intitulé le plan « santé mentale, l'usager au centre d'un dispositif à rénover »,
la même année, l'OMS déclare que c'est l'année de la santé mentale.
Pour A. Ehrenberg, l'usage et le développement de ces deux notions ce n'est pas qu'un changement
de vocabulaire. Il traduit une nouvelle préoccupation sociale dont le point central est un souci pour les
troubles de masse de la subjectivité individuelle. Deux aspects complémentaires : on accorde d'une
part l'importance à ce qui est de la subjectivité de l'individu, d'autre part on a un souci collectif pour
ce qui peut être des troubles qui touchent des populations d'individus. Au travers de l'usage de ces 2
termes « santé mentale » « souffrance psychique », on assiste à une évolution. On sort des frontières
de la médecine du moins on élargit le périmètre d'intervention de la médecine. On est plus dans le
registre de la maladie. On résonne moins en termes d'opposition franche entre maladie et absence de
maladie, on résonne plutôt en termes de continuum, entre « normal » et « pathologique ».
D'un côté, notion « santé mentale » qui déborde la notion d'absence de symptômes, il s'agit d'une
notion beaucoup plus large qui inclus un certain nombre de valeurs positives (ex : bien être
psychique, qualité de vie, résilience = capacité à surmonter les chocs de l'existence). Elle n'est donc
pas du seul ressort de la psychiatrie. Elle excède l'absence de maladie. A l'opposé, la « souffrance
psychique » qui regroupe un ensemble de souffrances diverses apparues il y a une trentaine
d'années et qui déborde elle aussi les seules pathologies psychiatriques.
Pour Ehrenberg, ce couple souffrance psychique/santé mentale s'est imposé dans notre vocabulaire
au fur et à mesure que les valeurs d'autonomie et d'accomplissement personnel s'ancraient dans
l'opinion. Le destin de chaque individu se sentait relié à un destin collectif. « La dynamique
d'émancipation généralisée depuis les années 60 a produit l'idée que chaque individu est responsable
de sa propre vie, que chacun peut être à la source de la norme. Il en résulte une insécurité
personnelle de masse. » On considère que plus l'individu est autonome, plus l'intériorité de chaque
individu est mis en avant. L'essentiel se passe dans l'intériorité de soi.
→ L'apparition du couple de notion signale une dissolution des frontières du normal et du
pathologique au profit d'un continuum.
Le pôle de la normalité est la valorisation de la santé mentale. L'autonomie suppose donc la
valorisation d'un individu qui est souple, peut s'adapter, est indépendant, mobile (peut se déplacer
dans des mondes différents), et surtout trouve par lui-même ses repères dans l'existence. L'individu
autonome se réalise par son action personnelle. Cette valorisation se traduit par une première
expression dans les techniques de développement personnel. Ce sont des techniques qui consistent à
faire réaliser à l'individu un travail sur soi. La PNL (Programmation Neurolinguistique) est une de ces
méthodes selon laquelle il existe des fonctionnements mentaux selon les individus, dont tout le travail
est de faire prendre conscience aux individus de leur programme de fonctionnement mental afin de
les utiliser ou de les reprogrammer. Toutes ces techniques fonctionnent comme un vaste marché avec
des sous marchés que les entreprises aiment beaucoup. Ces techniques visent l'épanouissement du
potentiel, le dépassement de soi. La valorisation de cette norme d'autonomie va de pair avec un
déplacement des représentations des médicaments psychotropes. Ils sont non seulement des
médicaments qui guérissent et/ou soulage des pathologies avérées mais aussi un moyen d'augmenter
les performances et le confort psychique.
Le psychiatre E. Zarifian : « Le prix du bien-être » où il contestait le développement et les multiusages de « la pilule du bonheur » qui traite d'un grand nombre de troubles sans effets secondaires.
Les antidépresseurs sont des sortes de désinhibiteurs, ils changent la personnalité etc… donc il y a des
effets secondaires. Les capacités de l'individu sont accrues grâce à un médicament. La frontière entre
drogue illicite et psychotrope prescrit se brouille.
Ehrenberg parle d'un individu sous perfusion de psychotrope (frontière entre normal et pathologique
floue).
Peter Kramer : « Prosac, le bonheur sur ordonnance » : « La frontière entre la personnalité normale
et le trouble de la personnalité n'est qu'une question de convention, tout dépend de l'endroit où nous
fixons les différents échelons le long de chaque axe. »
On peut retenir que la santé mentale a pour but l'accomplissement de soi, et que ce
mouvement qui valorise l'autonomie de l'individu, la bonne santé mentale et la
valorisation de soi, a produit la « tyrannie du moi idéal ».
Guillaume Leblanc « Les maladies de l'Homme normal » addiction à la normalité.
Le pôle de la souffrance psychique déborde du domaine de la pathologie.
Le premier point qui va l'illustrer est la multiplication de troubles au-delà des maladies classiques. Pour
Zarifian, la psychiatrie ne doit s'intéresser pas seulement à la maladie mais aussi au sujet souffrant. Le
deuxième point est le fait qu’on a de plus en plus une médiatisation de ces troubles psychiques avec
des émissions de télé qui sont des mises en scène de soi qui montre une évolution. Ces émissions
signalent un processus de dé-stigmatisation (pas de honte à parler de soi). D'après Goffman, le
processus de retournement du stigmate c’est-à-dire le fait de retourner la stigmatisation qui infériorise
en la présentant comme une différence qui rend semblable est une manière d'affirmer sa singularité.
Cette banalisation de la souffrance psychique se retrouve au niveau de l'évolution des nomenclatures
des maladies, il existe des classifications internationales des maladies (mentales ou non) qui servent à
homogénéiser les maladies. La maladie mentale est pensée en termes de handicap psychique
depuis la loi de 2005, c'était considéré comme un désordre momentané dont les thérapeutiques
pourraient venir à bout hors on se représente plutôt la maladie psychique comme un trouble
chronique. Cela veut dire qu'on intègre dans la maladie psychique dans la socialisation de l'individu,
on s'intéresse aux conséquences de la maladie sur la vie sociale de l'individu. On relativise la maladie
au profit des conditions de la maladie. Aucune situation actuelle n'est abordée sans rendre en compte
la dimension souffrance psychique (ex chômage, délinquance …) donc elle concerne beaucoup
d'institutions. Il existe un nouveau vocabulaire qui décrit cette souffrance psychique (harcèlement
moral, stress…). L'ensemble des intervenants sont les témoins d'une nouvelle souffrance sociale qui
désigne de plus en plus une souffrance psychique qui aurait à voir avec une souffrance sociale. Il y a
donc une psychologisation des institutions qui n’étaient pas dédiées à ça au départ.
Conclusion : La reconsidération des frontières entre normal et pathologique, avec un continuum, une
graduation… Il est difficile d'identifier ce qui relève du pathologique et ce qui relève de la difficulté
sociale entraînant la souffrance psychique. Ehrenberg dit : « Les troubles de la normalité font basculer
la santé mental dans le palliatif et l'accompagnement avec son cortège de personnages, ni malades ni
guéris, flottants à la frontière du pathologique et du normal. »
CHAPITRE 6 : Les usagers de la psychiatrie
Comment les patients parviennent-ils à concilier le rapport au soin avec les autres inscriptions sociales
?
Se fabriquer une vie acceptable malgré les contraintes qui pèsent sur eux. Etudes de qualité de vie :
études quantitatives : saisissent la qualité de vie (maladies chroniques). Souvent réalisé en
interviewant les soignants que les internés. Objet d'évaluation par les soignants, trouver des
indicateurs pertinent dans leur travail. Evaluer la satisfaction du patient. La performance des soins
dépend de la satisfaction/insatisfaction du patient.
Les résultats de ces études sont difficilement interprétables ou alors avec une certaine prudence car
inciter des personnes à s'exprimer sur la dimension subjective de leur qualité de vie suppose que la
subjectivité des personnes ne soit pas trop altérée. De plus il n'est pas très évident de solliciter les
préférences des personnes souffrantes. Ces études peinent à comprendre les écarts entre satisfaction
/ insatisfaction, et les perceptions des soignants. D'un point de vue sociologique ces études ne sont
pas satisfaisantes.
Il y a d'autres études menées par des sociologues qui n'ont pas d'objectif opérationnel et immédiat, et
qui tentent de suivre une autre démarche.
On peut citer Livia Velpry : « Le quotidien de la psychiatrie, sociologie de la maladie mentale » étude
ou encore « Vivre et dire sa psychose » étude collective. Ces recherches changent un peu de point de
vue car elles considèrent que les personnes suivies en psychiatrie sont des « informant légitimes sur
leur situation et leur expérience, sans recourir à une grille d'évaluation clinique ». Ces études
s'intéressent à la manière dont les patients donnent sens à leur expérience. Il s'agit de comprendre
comment les patients intègrent le rapport à la maladie dans l'ensemble de leur expérience et dans
l'ensemble de leur histoire de vie :
–
1er point, est de recueillir l'interprétation des patients.
–
2ème point, une dimension temporelle.
–
3ème point, la notion de parcours ce qui sous-entend une succession d'étapes, une linéarité,
deuxième point après la linéarité la notion de carrière idée d'une rupture qualitative entre deux
états telle qu'elle a été évoquée par Goffman dans « Asiles » qui marque le basculement d'un état à
un autre. Cette notion de carrière est moins utilisée car les histoires de vie sont maintenant plus
hybrides, moins simples, avec la déshopitalisation. 3ème notion celle de la trajectoire
particulièrement évoquée par Anselm Strauss : La trajectoire de la maladie renvoie « non seulement
au développement physiologique de la maladie de tels patients, mais également à toute l'organisation
du travail déployée à suivre ce cours, ainsi qu'au retentissement que ce travail et son organisation ne
manque pas d'avoir sur ceux qui s'y trouvent impliqués ». Cette 3ème notion permet de saisir
l'indétermination des stades de la maladie. Elle permet d'étudier à travers quels processus s'effectue
son affiliation à la psychiatrie pour une personne. C'est en prenant appui sur cette notion que L.
Velpry a essayé d'étudier la vie quotidienne de 18 personnes souffrantes de troubles psychiques
sérieux. Elle dit que l'affiliation à la psychiatrie de ces personnes commence en général par une
rupture, par une désorganisation de leur vie, et c'est cette rupture qui provoque et entraîne un
premier contact avec la psychiatrie → rupture biographique, selon Bury « la rupture biographique est
un type d'expérience où se produit une rupture des structures de la vie quotidienne et des formes de
connaissance qui les sous-tendent ». Ce qui est souvent sollicité dans les entretiens est ce qui est
arrivé en premier pour eux n'est pas tant une manifestation de la maladie qu'une série de difficultés.
Un événement à désorganisé leur vie relationnel, professionnelle etc... La psychiatrie apparaît dans
ces cas comme une réponse au(x) problèmes(s).
Le premier passage de l'affiliation à la psychiatrie est l'hospitalisation avec deux aspects :
abrutissement aux médicaments, et enfermement. 2ème élément : toute l'activité déployée par la
personne elle-même pour se sortir de la maladie, il n'y aura plus que des liens ponctuels avec la
psychiatrie. La maladie a un rôle désorganisateur et les personnes doivent gérer cela sur leur rapport
aux autres. Difficultés à trouver un logement car peur d’habiter seul, difficulté à habiter le logement
dans des conditions qui ne gênent pas le voisin, difficulté pour celui qui loue de laisser le logement
aux personnes souffrantes de troubles (appartements thérapeutiques sont une solution).
Souvent un double objectif anime la prise en charge des personnes souffrantes d'un trouble psychique
: il s'agit d'aider la personne à retrouver son autonomie et de la protéger d'elle-même donc quelque
fois exercer sur elle une contrainte. En effet dans le régime français il peut être porté atteinte à
l'autonomie de la personne et à la possibilité de juger par elle-même de son propre intérêt. En effet le
patient peut se retrouver à tout moment dans le régime de la contrainte ce qui est propre à la
psychiatrie, depuis la loi de mars 2002 qui régit la relation médecin / malade et les droits
des malades. Par exemple le médecin est obligé de transmettre au patient toute l'info sur son état
de santé et sur les thérapeutiques possibles, la décision revient au patient au sujet du traitement à
suivre. Avant, avec la loi de 1838 qui avait instauré le régime asilaire, il pouvait recevoir des
soins sans consentement. Il pouvait être interné au vue d'une aliénation sur décision judiciaire.
L’hospitalisation sous contrainte se fait selon deux modalités : à la demande d'un tiers (HDT), ou
d'office (HO) lorsqu'il y a trouble à l'ordre public. La loi du 5 août 2011 a suscité de nombreuses
controverses, car elle est assez ambiguë : d'un côté elle introduit le contrôle du juge des libertés et de
la détention, qui dans les quinze jours qui suivent la décision d'hospitalisation sous contrainte, viens
contrôler les modalités de l'internement. Cette loi étend les champs de la contrainte car elle prévoit
désormais des soins sous contrainte en dehors de l'hôpital. Un programme de soin obligatoire est
établi. Certain trouvent cette loi liberticide, prise dans un contexte de faits divers très médiatisé.
Place de l'empowerment (= processus d'autonomisation) au travers de la construction d'associations,
de collectifs. Les patients commencent à s'auto-organiser. Mouvement plus général d'autonomisation
des patients. En parallèle avec le « mouvement du SIDA ». L’organisation est renforcée, autonomie
face à la médecine. Loi de 2002 renforcée par loi de santé publique : 2004, renforce les
droits collectifs des patients et a donné une place dans les associations de patients. Face à ces
nouveaux droits, les malades sont dans des situations particulières : LOVELL. Stigmatisation, fait
divers et peur de la maladie sont des obstacles pour la reconnaissance du droit des patients. Des
associations de malades se sont constituées :
–
association de famille (années 60)
–
associations d'usagers (années 80) : entraide entre usagers
–
fédération des associations en 1992 qui regroupe des associations d'usagers (FNAPSI). Ils
collaborent pour défendre droits entre les usagers et favoriser leur accès aux soins. Créer les groupes
d'entre-aide mutuelle(GEM) 2005. Mettre à disposition un espace d'accueil pour que les personnes
handicapées psychiques puissent « prendre leur destin en main ». Favoriser la participation des
handicapés dans la société, leur organisation est laissée à leur initiative. Présence forte de soignants
selon les GEM. Dans ICEBERG à Lyon (troubles bipolaires) se constitue comme les associations d'auto
organisation par les personnes souffrantes de troubles : partage d'expérience.
DOMAINE DE LA SOIOLOGIE
CHAPITRE 1 : HISTOIRE SOCIOLOGIQUE DE LA FOLIE
Comment à différentes époques les sociétés portent des regards différents sur ce qu’elles appellent
« la folie » ? Quelles sont les frontières entre « folie » et « raison » ? Ont-ils peur des « fous » ? Ces
derniers sont-ils exclus ou totalement intégrés ? Sont-ils porteurs d’un message ?
Il s’agit de mettre en perspective au regard de périodes passées, la manière de regarder la folie et la
maladie mentale.
Comment la folie a-t-elle été qualifiée ? Et comment a-t-elle été identifiée ?
La notion de « maladie mentale » est relativement récente. Ce que nous pensons aujourd’hui de la
maladie mentale est reçu d’un héritage. Etudier l’histoire de la sociologie revient à étudier la
périodisation et la chronologie.
1) Signification de la folie au Moyen Age
Il n’y avait pas une seule signification de la folie mais plusieurs. En effet, le fou revêtait de multiples
figures.
-
Le possédé qu’il fallait exorciser
-
Le malade qu’il fallait soigner
-
Le délinquant/ déviant/ dangereux dont il faut se protéger
-
Celui qui par son comportement n’induit pas une menace pour la communauté et peut donc
vivre avec nous.
Le fou est possédé lorsque le démon s’est emparé de son corps, il parle et agit à travers lui. Pour
l’exorciser, on va faire appel à un homme de religion. Seul le système religieux est capable de
l’exorciser. « Fou en pèlerinage » : Rituel religieux pour régler ce problème. Dans la littérature du
Moyen Age, on trouve des sanctuaires où se trouvent des ossements d’environ 90 Saints qui
permettent (selon la légende) la guérison soudaine des fous.
Quant au malade à soigner, la médecine pouvait le traiter, la médecine grecque est l’une des
premières sciences qui constatent un dysfonctionnement du corps, la folie résultait d’un
dysfonctionnement d’humeur, il s’agit d’un déséquilibre des humeurs froides, chaudes, sèches ou
humides. Pour remédier à une maladie, le patient recevait une thérapie diététique. Par exemple, le
mélancolique souffrait d’une affection froide. Par conséquent, il devait consommer des aliments
chauds, se mettre sous la lumière et dans des endroits chauds. La connaissance du corps humain
permet de régler une maladie.
Il y a également le fou « mis en scène » sous le Moyen-Age lors des fêtes. Il s’agissait d’une fonction
très importante, où les personnes faisaient semblant d’être folles afin de signifier quelque chose
d’important, il s’agissait d’une manière de transgresser l’ordre établit. Il ne s’agit plus d’une figure
imposée mais jouée (rôle). « La fête des fous » ou des « innocents » pratiquée dans l’enceinte des
Eglises (autorisée dans un premier temps puis interdite suite à des débordements). Lors de cet
évènement, le Clergé mineur portait des déguisements grotesques et élisait un Evêque des fous. Des
chansons grotesques étaient chantées, il s’agit d’un symbole de transgressions de l’ordre établit, sens
premier du carnaval. C’est donc une fonction défouloir, acceptée par l’Eglise, elle libérait les énergies
et endiguait la violence. Présence valorisée du fou. Le bouffon faisait partie de l’entourage des
princes et des rois. Le fou du roi, amuse le roi et son entourage. Il a le droit de tout dire même les
pires critiques, il est un peu comme le chancelier de l’époque, « C’est Laurent Ruquier de l’époque »,
il était accepté car il informait le roi, il fournissait des informations auxquelles il n’avait pas accès.
Forte charge critique dans les arts, « La nef (bateau) des fous », tableau de Sébastian Brant (cidessus) où les fous dénonçaient tous les vices du monde. Charge d’énonciation, vision du fou.
Cette image du fou en tant que personnage mimée ne doit pas laisser entendre que les fous étaient
acceptés en société, le fou réel n’avait pas une place de roi, quand bien même il faisait partie de son
entourage. Les plus dangereux d’entre eux étaient enchaînés. Il avait une certaine place dans la
société, ils étaient tolérés, ils pouvaient travailler, mais n’étaient pas considéré comme un égal, mais
davantage comme un inférieur. Le serf habitait près du seigneur mais n’était pas son égal, malgré la
proximité (spatiale : habitait près du seigneur, personnelle).
La conception très élargit de la maladie mentale se traduit depuis 20 ans par l'apparition d'une
notion : la santé mentale. C'est une question qui devient publique dans le langage politique.
Alain Ehernberg s'est intéressé à ce qu'il appel "les troubles de masses de la subjctivité
individuel". Cela concerne énormément de gens. Au travers de l'apparition de ces nouveaux
termes, on assite à une évolution. On sort des frontières de la médecine, qui s'empare des
questions auxquelles elles ne s'intéressaient pas avant. Aujourd'hui on résonne moins en terme
de maladie mais en graduation.
Santé mentale
Avoir la notion de bonne santé mentale ce n'est pas seulement ne pas être malade. C'est une
notion plus large, c'est être en état de bien être mental.
La souffrance psychique.
Elle regroupe la souffrance diverse plus ou moins apprus depuis une treintaine d'années et qui
vont bien au delà des pathologies. Des symptômes qui ne sont pas pris en charge par les
spécialistes de la maladie.
2 ouvrages de Alain Ehernberg :
–
"Le culte de la performance"
–
"La fatigue d'être soi"
Au fur et à mesure que la valeurs d'autonomie et d'accomplissement personnel s'imposait,
pour lui, être autonome est une valeur sûr.
"La dynamique d'emansipation généralisé depuis les années 60 a produit l'idée que chaque
individu est responsable de sa propre vie, que chacun peut être à la source de la norme. Il en
résulte une insécurité personelle de masse."
Auparavant, on considérait que les destins individuels étaient vécu comme des
déterminations. Aujourd'hui ils vivent comme moins assignés à une place. Pour lui, on est
tous soumis à être autonome. La sujectivité devient une pensée collective.
Deux types d'individus :
–
Conquérant : celui qui réussit parce qu'il est autonome.
–
Souffrant : la maladie de l'autonomie. Il est censé effectuer ces propres choix, ces
échecs sociaux sont vécu comme des échecs personnels.
L'autonomie est un ensemble d'injonction à être soi-même. Cela suppose que l'individu qui
prouve par son existence et qui cherche une valorisation par l'essort des techniques de
développement personnel, qui doivent aider l'individu à s'accomplir, permettre aux individus
d'utiliser leurs capacités. Ce qui est visé c'est le développement du potentiel et doit l'utiliser
pour réussir et se dépasser afin d'obtenir encore plus de bien être.
On n'a aussi des déplacements de représentations et utilisations des médicaments psychotrope
pour soigner des pathologies qui sont utilisés pour améliorer les performances. On sait rendu
compte que ces médicaments ne donnaient pas d'effets secondaires notables, qu'ils pouvaient
aussi produire une amélioration des compétences et favorisaient les relations, en particulier
dans les classes plus marquées.
La morbidité psychique se traduit par la place relative aux profit de nouveaux troubles. Cela
influe sur la fonction des psychiatres. La psychiatrie n'est plus la science des malades
mentales mais plutôt de troubles de sujets souffrants. Il y a une plétore de rapports qui insiste
sur les difficultés psychologique qui influe sur une grande partie de la population.
Une très grande médiatisation avec des témoignages et des mises en scènes.
Goffman a écrit le livre "retournement du stigmate" pour expliquer avec quelles manières on
voit les gens facilement s'exprimer à la télévision. Quand on n'a un trouble peu sévère, il est
possible de le présenter comme une manière d'être, singulier, original etc
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