LIBÉRALE Dénutrition de la personne âgée Repérer et prendre en charge précocement Les personnes âgées ont des difficultés à retrouver un état nutritionnel satisfaisant après une carence protéino-énergétique. Il est donc important de détecter celle-ci tôt et d’agir rapidement. D ès qu’une personne âgée montre la perte du plaisir de manger ou exprime de la fatigue, une attention particulière doit être portée sur son état nutritionnel, car une perte importante de poids a des conséquences délétères. En effet, la dénutrition protéino-énergétique est un problème préoccupant chez ces personnes, soit environ 5 % des sujets de plus de 70-75 ans en ambulatoire et jusqu’à 50 % des patients âgés de plus de 65 ans en service de court ou de long séjour. La carence d’apports nutritionnels peut être due à une anorexie et/ou résulter d’une augmentation des besoins en cas d’agression ou de catabolisme. Elle peut être la suite d’un traumatisme, d’une infection ou d’une autre pathologie. Les conséquences de l’entrée dans le cercle vicieux de la dénutrition sont multiples : déficits immunitaires favorisant les infections, fonte musculaire délétère au regard du risque des chutes, altération des fonctions pulmonaires, retards de cicatrisation, altération des fonctions intellectuelles, hypo-albuminémie, etc. C’est dire l’importance de suspecter une dénutrition dans toutes situations où les apports recommandés risquent de ne pas être assurés. Surveillance indispensable Outre la surveillance régulière du poids et de l’indice de masse corporelle (IMC), il est utile de faire un dosage plasmatique d’albumine (dont la diminution témoigne d’une dénutrition installée), de préalbumine (dénutrition récente) et de CRP (pour vérifier s’il existe ou non un syndrome inflammatoire). On peut aussi évaluer le statut nutritionnel en faisant appel à des échelles simples telles les MNA (Mini Nutritional Assessment). Devant l’anorexie du sujet âgé, les causes sont souvent multiples et intriquées. Ainsi, l’on sait que la sénescence est susceptible d’entraîner une diminution de la prise alimentaire, elle-même secondaire à des modifications physiologiques liées à l’âge : un retard de vidange gastrique peut être à l’origine d’une sensation précoce de satiété. Toutefois, il est admis que les principales causes de l’anorexie chez le sujet âgé sont la dépression et la démence. Viennent ensuite le vieillissement sensoriel (diminution du goût, de l’odorat et de la vision), les troubles bucco-dentaires, les troubles de la déglutition, les pathologies digestives, les régimes inutiles ou excessifs (plats insipides) et les causes iatrogènes (psychotropes, médicaments cardiovasculaires, antirhumatismaux, etc.), sans oublier que des revenus insuffisants peuvent également devenir une cause de dénutrition. Quelques règles simples permettent d’apporter une solution à un trouble persistant de l’appétit et à une diminution des apports alimentaires : il faut lutter contre l’isolement grâce à l’accompagnement social, proposer des repas variés et goûteux (on connaît les bienfaits du plaisir), fractionner les repas dans la journée, augmenter les kilocalories des plats sans en majorer le volume par un enrichissement naturel de l’alimentation. Et si cela s’avère insuffisant, il est nécessaire de recourir à des compléments alimentaires et à des adjuvants de la nutrition tels l’oxoglutarate d’ornithine. En effet, il a été démontré qu’en dehors de leur rôle de substrat pour les synthèses protéiques, certains acides aminés sont impliqués dans la modulation de l’état nutritionnel. C’est le cas de la glutamine et de l’arginine et de leur précurseur l’oxoglutarate d’ornithine. On sait que la glutamine joue un rôle dans la régulation du métabolisme azoté et constitue le substrat préférentiel à des cellules à multiplication rapide comme les entérocytes ou les cellules immunitaires. Quant à l’arginine, elle favorise la réponse immunitaire ainsi que les sécrétions hormonales (hormone de croissance, insuline). Dans la plupart des études rapportées*, la supplémentation par l’oxoglutarate d’ornithine apparaît comme stabilisante du poids des sujets traités par rapport au groupe contrôle. On retiendra qu’en matière de renutrition la voie orale doit toujours être privilégiée, associée à d’autres stratégies pouvant favoriser la participation de la personne âgée. Ludmila Couturier * Lors du 1st Congress of the International Academy on Nutrition and Aging et aux Entretiens de Bichat 2001. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 31 - novembre 2001 41