R E V U E D E P R E S S E Revue de presse ● A. Travade* IMAGERIE Une bonne connaissance de la séméiologie mammographique et échographique est nécessaire pour éviter d’opérer trop de lésions bénignes sans laisser passer des cancers. Les articles suivants permettent d’approfondir et de compléter des notions de base. Gordon PB, Gagnon FA, Lanzkowsky L. Solid breast masses diagnosed as fibroadenoma at fine-needle aspiration biopsy: acceptable rates of growth at long-term follow-up. Radiology 2003;229:233-8. Les lésions classées comme “probablement bénignes” à la suite de critères cliniques, mammographiques et échographiques (ces derniers ayant été bien décrits par Stavros) peuvent être surveillées à court terme dans le but d’éviter des biopsies inutiles. L’échographie permet d’exclure les kystes typiques qui ne méritent ni complément d’examens ni surveillance, la plupart des autres lésions correspondant à des fibro-adénomes. Une fois le diagnostic confirmé par cytoponction, les auteurs ont évalué le taux de croissance éventuel de ces lésions bénignes et le seuil à partir duquel il faut proposer une chirurgie. Trois mesures sont colligées, le pus grand diamètre antéropostérieur, l’axe parallèle à la peau et l’axe perpendiculaire à la peau. En effet, le risque de malignité est très rare, même s’il y a une augmentation de volume. On peut continuer la surveillance sans risque si le taux de croissance est de moins de 16 % par mois avant l’âge de 50 ans, et moins de 13 % par mois à 50 ans ou plus. En moyenne, pour tous les âges, on peut accepter une augmentation de 20 % en 6 mois. Berg WA, Campassi CI, Ioffe OB. Cystic lesions of the breast: sonographic-pathologic correlation. Radiology 2003; 227: 183-91. Bonne revue des signes échographiques permettant de différencier les kystes simple typiques, les kystes atypiques méritant une cytoponction, et les kystes suspects nécessitant une biopsie percutanée ou chirurgicale. Tous ceux qui font des échographies et des ponctions mammaires devraient lire cet article très didactique qui s’accompagne d’une riche iconographie. * Centre République, 63100 Clermont-Ferrand. 26 Ariche-Maman S, Maruani A, Michenet P et al. Intérêt de la recherche échographique de cicatrice post-Mammotome® pour le repérage préopératoire des foyers de microcalcifications mammaires. J Radiol 2003;84:1747. La recherche d’une cicatrice échographique après prélèvements de foyers de microcalcifications par Mammotome® stéréotaxique devrait être systématique avant d’opérer. En effet, sa présence, fréquente, permet de réaliser facilement le repérage préopératoire sous contrôle échographique. Miglioretti DL, Rutter CM, Geller BM et al. Effect of breast augmentation on the accuracy of mammography and cancer characteristics. JAMA 2004;291:442-50. Les cancers du sein ne sont pas plus fréquents après augmentation du volume mammaire, mais leur détection peut être rendue plus difficile. Eklund a décrit, en 1988, une technique mammographique permettant de mieux analyser les seins porteurs d’implants prothétiques, avec des clichés supplémentaires en refoulant, lorsque c’est possible, la prothèse en arrière. Cette étude montre que la sensibilité de la mammographie chez les femmes asymptomatiques porteuses de prothèses est moins bonne, toutefois cela n’augmente pas le nombre de faux positifs. De plus, les cancers, une fois diagnostiqués, n’ont pas de critères de pronostic plus péjoratifs et ne sont pas trouvés à un stade plus avancé. SÉNOLOGIE INTERVENTIONNELLE La fiabilité du diagnostic par prélèvements percutanés dépend du choix des indications et d’une technique rigoureuse. Brenner RJ, Jackman RJ, Parker SH et al. Percutaneous core needle biopsy of radial scars of the breast: when is excision necessary? Am J Roentgenol 2002;179:1179-84. Les images stellaires ne sont, en général, pas une bonne indication de prélèvements percutanés. Toutefois, dans certains cas, le diagnostic de cicatrice radiaire peut être porté de façon fiable sans recourir à la chirurgie : si le diagnostic histologique de cicatrice radiaire n’est pas associé à une hyperplasie atypique, si la biopsie à l’aiguille comporte au moins douze prélèvements et si les données mammographiques sont réanalysées avec les résultats de la biopsie et qu’ils sont concordants. Dans les autres cas, il faut recourir à la chirurgie. La Lettre du Sénologue - n° 24 - avril/mai/juin 2004 Fishman JE, Milikowski C, Ramsinghani R et al. US-guided core-needle biopsy of the breast: how many specimens are necessary ? Radiology 2003;226:779-82. Les microbiopsies à l’aiguille 14 G, réalisées sous échographie, permettent le diagnostic non chirurgical de nombreuses opacités impalpables. Le diagnostic est fiable à condition qu’il y ait au moins quatre prélèvements, de préférence non fragmentés. Huber S, Wagner M, Medl M et al. Benign breast lesions: minimally invasive vacuum-assisted biopsy with 11-gauge needles-patient acceptance and effect on follow-up imaging findings. Radiology 2003;226:783-90. Les macrobiopsies avec aspiration, type Mammotome® 11 G, guidées par stéréotaxie ou par échographie, sont maintenant des procédures fréquentes de diagnostic non chirurgical. Elles sont bien tolérées par les patientes et, lors des contrôles à six mois, n’entraînent aucune séquelle susceptible de gêner la surveillance. FACTEURS DE RISQUE La recherche d’éventuels facteurs étiologiques se poursuit, mais est décevante. Tout au plus trouve-t-on quelques associations troublantes sans que cela puisse déboucher, pour l’instant, sur une attitude pratique. McCormack VA, Dos Santos I, De Stavola BL et al. Fetal growth and subsequent risk of breast cancer: results from long term follow up of Swedish cohort. BMJ 2003;326:248-51. Trichopoulos avait déjà émis, en 1990, l’hypothèse que l’exposition in utero à des doses élevées d’estrogènes pouvait augmenter le risque de cancer du sein à l’âge adulte. Cette étude réalisée en Suède va dans le même sens, en montrant une association entre la taille à la naissance (taille et périmètre crânien) et le risque de cancer préménopausique, et que le taux de croissance foetale (taille ajustée en fonction de l’âge gestationnel) plus que la seule taille à la naissance, est un facteur de risque important. Velicer CM, Heckbert SR, Lampe JW et al. Antibiotic use in relation to the risk of breast cancer. JAMA 2004;18,291,7. L’utilisation d’antibiotiques (mesurée en cumulant le nombre de jours avec antibiotiques et leur nombre) serait associée, dans cette étude, à une accentuation du risque de cancers du sein. Toutes les classes d’antibiotiques sont concernées. S’agit-il d’un effet sur la flore intestinale et/ou sur la réponse immunitaire et inflammatoire ? La responsabilité est-elle due aux antibiotiques eux-mêmes, à une éventuelle défaillance du système immunitaire, ou à l’état pathologique ayant conduit à la prescription de ces antibiotiques ? Les auteurs concluent qu’il faut être prudent dans l’utilisation au long cours des antibiotiques, et que des études complémentaires sont nécessaires pour faire la part de la responsabilité des antibiotiques, du système immunitaire ou d’autres facteurs. La Lettre du Sénologue - n° 24 - avril/mai/juin 2004 THÉRAPEUTIQUE Le fulvestrant n’est pas encore commercialisé en France mais les premiers essais semblent prometteurs, tandis que l’efficacité de la radiothérapie postchirurgie et les indications du tamoxifène sont rappellées. Mauriac L, Pippen EL, Quaresma Albano J et al. Fulvestrant (FaslodexTM) versus anastrozole for the second-line treatment of advanced breast cancer in subgroups of post menopausal women with visceral and non visceral metastases: combined results from two multicentre trials. European J Cancer 2003;39: 1228-33. Le fulvestrant est un anti-estrogène administré par voie intramusculaire qui a montré son efficacité après échec du tamoxifène. Actuellement, les inhibiteurs de l’aromatase sont indiqués dans cette situation et le fulvestrant devrait aussi être efficace après échec des inhibiteurs. Clinical Trial Service Unit and Epidemiological Studies Unit, Oxford. Mortality from cardiovascular disease more than 10 years after radiotherapy for breast cancer: nationwide cohort study of 90 000 Swedish women. Brit Med J 2003;326:256-7. Au-delà de dix ans, la mortalité par cancer du sein est la même qu’il s’agisse du sein droit ou du sein gauche. En revanche, la mortalité par maladie cardiovasculaire est un peu plus importante après traitement par radiothérapie du sein gauche avec un ratio de 1,1. Ce taux est peu important et pourrait être dû au hasard. De plus, il s’agit de techniques de radiothérapie utilisées en 1970 et en 1980, les techniques actuelles irradiant beaucoup moins le cœur. (UKCCCR), (DCIS) Working Party (UK, Australia, and New Zealand). Radiotherapy and tamoxifen in women with completely excised ductal carcinoma in situ of the UK, Australia, and New Zealand: randomised controlled trial. Lancet 2003; 362:95-102. Après zonectomie pour carcinome canalaire in situ, la radiothérapie diminue à la fois le risque de récidive de cancer in situ et celui de cancer invasif dans le sein traité, mais elle est, bien entendu, sans effet sur le sein controlatéral. En revanche, le tamoxifène, dans cette indication, semble de peu d’intérêt, en particulier, il ne réduit pas le risque de cancer invasif controlatéral dans cette étude. Schmid M, Jakesz R, Samonigg H et al. Randomized trial of tamoxifen versus tamoxifen plus aminoglutethimide as adjuvant treatment in postmenopausal breast cancer patients with hormone receptor-positive disease: Austrian breast and colorectal cancer study group trial 6 et al. J Clin Oncol 2003; 21:984-90. La durée habituelle du traitement adjuvant par tamoxifène chez les femmes ayant des récepteurs hormonaux est de 5 ans. Cette étude montre que l’adjonction de 2 ans d’aminoglutéthimide n’améliore pas le pronostic. 27 R E V U E D E THS APRÈS CANCER DU SEIN Holmberg L, Aderson H for the HABITS steering and data monitoring committees. HABITS (hormonal replacement therapy after breast cancer – is not safe?), a randomised comparison: trial stopped. Lancet 2004:453-5. En 1997, une étude randomisée sans aveugle, menée par une équipe nord-européenne avait pour objectif de comparer la survenue d’événements chez des femmes prenant ou non un traitement hormonal substitutif (THS) après un premier cancer du sein. Les critères de jugement étaient les suivants : récidives locale, régionale et/ou métastatique, second cancer du sein. Toutes femmes, en ménopause ou périménopause, ayant présenté un cancer du sein, in situ ou infiltrant (stade II au maxi- P R E S S E mum), quel que soit le statut des récepteurs hormonaux et se plaignant de troubles climatériques de la ménopause étaient éligibles. De 1997 à 2003, 434 femmes on été incluses (219 dans le groupe “THS” et 215 dans le groupe témoin). Devant la survenue de 26 événements dans le groupe “THS” versus 7 dans le groupe témoin (RR = 3,5 IC 95 % [1,5-8,1]), il a été décidé d’arrêter prématurément l’étude. Plusieurs remarques peuvent être faites : – premièrement, il n’apparaît pas de délai minimum à respecter entre la fin du traitement du premier cancer du sein et l’inclusion dans l’étude, c’est-à-dire la date de mise sous THS (ainsi, certaines femmes ont reçu un THS moins de 2 mois après la fin du traitement) ; – deuxièmement, les femmes sous tamoxifène ont été également randomisées, donc ont pu recevoir un THS simultanément ; – troisièmement, il n’y a pas de descriptif ni de prise en compte dans l’analyse statistique du délai entre le début de la prise du THS et la survenue de l’événement ; – quatrièmement, une étude similaire citée dans l’article, menée par une autre équipe nord-européenne, n’a pas mis en évidence de différence entre les deux groupes (RR = 0,82 IC 95 % [0,3-1,9]) sans qu’il y ait eu de réelle explication à cette différence de résultats. Cette étude a également été arrêtée prématurément suite aux résultats de l’étude HABITS. Toutes ces informations portent à prendre en compte ces résultats avec réserve. ■ ● N. Mallol, E. Desandes* * Centre Alexis-Vautrin, Vandœuvre-lès-Nancy. 26es journées de la Société Française de Sénologie et de Pathologie Mammaire Coordonnateurs : Anne Lesur, Yves Kessler et Jean-Luc Verhaeghe Secrétariat du congrès : Baron Communication Tél. : 03 83 35 10 50 Fax : 03 83 35 95 30 E-mail : [email protected]. 28 La Lettre du Sénologue - n° 24 - avril/mai/juin 2004