Le matériel de trachéotomie chez l`insuffisant respiratoire chronique

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Fiche
technique
N°15
Le matériel de trachéotomie
chez l’insuffisant respiratoire chronique
Sous la responsabilité de leurs auteurs
Le matériel de trachéotomie chez l’insuffisant respiratoire chronique
P. Corne*
CANULES DE TRACHÉOTOMIE
Le choix de la canule (modèle, type, taille) est fait par le médecin prescripteur selon les difficultés et le degré de dépendance de la
ventilation mécanique, l’aspect de l’orifice de trachéotomie, l’utilisation de valves de phonation et de canules parlantes, les besoins
d’oxygène additionnel, la tolérance. L’adaptation par rapport au geste chirurgical sera la plus précoce possible pour faciliter le
sevrage, sécuriser le patient et prévenir les complications locales. Des contrôles endoscopiques sont souvent nécessaires. Le calibre,
la longueur et la courbure doivent être clairement précisés afin d’éviter toute confusion entre les numéros de marques différentes.
Le médecin prescripteur précise également les modalités de gonflage du ballonnet et l’utilisation éventuelle d’une chemise interne.
La canule “idéale” n’existe pas. Toutefois, elle doit présenter certaines caractéristiques : biocompatibilité, bonne adaptation à la
forme de la trachée, diamètre interne le plus large possible, diamètre externe le plus petit possible.
Fiche à détacher et à archiver
Les matériaux
Ils sont variés : argent, latex, acrylique, chlorure de polyvinyl (PVC), élastomère de silicone, polyuréthane. Les canules en argent
ont une longévité importante (> 1 an), une épaisseur de paroi très fine et donc un diamètre interne plus grand que celui d’une
canule synthétique de même diamètre externe. En revanche, elles sont rigides, l’adaptation à la forme de la trachée est parfois
difficile et leur coût est élevé. Elles sont donc de moins en moins utilisées. Les canules non métallisées peuvent être rigides ou
souples (thermoplastiques). Ces dernières ont la propriété de s’assouplir à la température trachéale et, ainsi, de mieux s’adapter à
la trachée. Cependant, elles doivent être changées fréquemment.
Les différents types de canules
Canules sans ballonnet
Elles sont indiquées pour la ventilation spontanée (exemples : canule Shiley® en PVC, dure ; canule Tracoe®, semi-dure). Les plus
utilisées sont les canules Shiley®, qui ont une collerette articulée permettant leur bon positionnement. L’utilisation systématique
d’une chemise interne n’est pas recommandée en ventilation spontanée. Elle réduit le calibre interne de la canule et augmente
les résistances et le travail respiratoire. Elle est utile en cas de sécrétions abondantes car, si une obstruction se produit, il suffit
d’enlever la chemise interne pour retrouver un conduit libre. Les canules en version “parlante” possèdent des chemises externes
et internes fenêtrées (les deux fenêtres sont strictement en regard l’une de l’autre) pour permettre le passage de l’air entre les
cordes vocales. Les canules Tracoe® sont en plastique suffisamment souple pour que l’on puisse découper une fenêtre à l’endroit voulu.
Canules avec ballonnet
Elles sont indiquées pour la ventilation mécanique [exemples : canule Shiley® en PVC, dure (figure 1) ; canule Bioser®, souple, en
silicone ; canule Trachéoflex® en PVC, souple, armée (figure 2)]. Le tuyau du respirateur est relié à la chemise interne de la canule
par l’intermédiaire d’un raccord annelé et d’une rotule. Le ballonnet assure l’étanchéité des voies aériennes pendant les périodes
de ventilation en pression positive. Le ballonnet peut également éviter le passage des fluides (aspiration) dans les poumons. Les
ballonnets actuellement utilisés sont dits “à basse pression” car ils sont conçus pour exercer des pressions faibles sur la trachée
malgré des volumes de remplissage importants, cela afin d’éviter les lésions trachéales. Les canules Trachéoflex® sont souples et
s’adaptent parfaitement à la morphologie de la trachée. Elles ont une collerette mobile qui permet le réglage optimal de leur longueur. Une spirale d’acier est incrustée dans leur paroi, les rendant pratiquement indéformables. Elles sont opaques aux rayons X
mais doivent être remplacées par une canule non métallisée lors d’une IRM.
* Réanimation
médicale-assistance
respiratoire
(Pr O. Jonquet),
hôpital
Gui-de-Chauliac,
Montpellier.
Figure 1. Canule de trachéotomie de type Shiley® en PVC, rigide, fenêtrée, avec ballonnet, chemises internes (fenêtrées ou non), mandrin et
opercule de décanulation.
La Lettre du Pneumologue - Vol. IV - n° 3 - mai-juin 2001
Figure 2. Canule de trachéotomie de type Trachéoflex® en PVC,
souple (thermoplastique), armée, avec ballonnet basse pression
et mandrin.
I
Le matériel de trachéotomie
chez l’insuffisant respiratoire chronique
VALVES DE PHONATION ET APPORT D’OXYGÈNE
Il existe plusieurs types de valves de phonation : valves avec un clapet, valves avec une membrane. Le clapet ou la membrane
s’ouvrent à l’inspiration et se ferment à l’expiration, rendant possible la phonation. Les valves de phonation doivent être utilisées
uniquement avec des canules dont le ballonnet est dégonflé. Les canules Shiley® sont livrées avec un capuchon, et non pas une
valve de phonation, ce qui oblige le patient à inspirer et à expirer par le nez et la bouche. Ce bouchon peut être percé pour
admettre une sonde d’oxygène. La valve doit être retirée immédiatement en cas de mauvaise tolérance respiratoire. Les valves de
phonation ne doivent pas être utilisées chez les patients hypersécrétants car il y a un risque qu’elles s’obstruent. Certaines valves
de phonation sont également équipées d’un point latéral d’arrivée d’oxygène pour les patients nécessitant une oxygénothérapie
additionnelle.
PÉRIODICITÉ DES CHANGEMENTS DE CANULE ET ENTRETIEN
Le protocole d’entretien des canules comprend les étapes suivantes :
– tremper la canule (ballonnet gonflé, collerette dévissée) dans l’eau savonneuse pendant 5 à 10 mn, puis nettoyer l’intérieur et
l’extérieur avec un écouvillon ;
– rincer à l’eau courante ;
– tremper la canule dans une solution désinfectante (hypochlorite, aldéhyde, chlorhexidine, alcool à 70o) pendant 15 mn ;
– rincer à l’eau stérile ou à l’eau bouillie refroidie ;
– sécher avec une compresse stérile ;
– envelopper la canule dans une compresse stérile ;
– rangement dans une boîte propre et fermée.
INCIDENTS ET PROBLÈMES LIÉS À LA CANULE DE TRACHÉOTOMIE
L’éducation du patient (aspiration trachéale, changement de canule, soins quotidiens de l’orifice de trachéotomie), les structures
d’aide à domicile des insuffisants respiratoires chroniques (association ou secteur privé), les visites régulières dans le centre
d’appareillage permettent de prévenir la plupart des complications. Les plus fréquentes sont les suivantes :
– décanulation accidentelle avec impossibilité de remise en place de la canule : une canule de plus petit diamètre doit alors
être mise en place (par exemple la chemise interne) et le patient doit être transféré en milieu spécialisé pour la réouverture
chirurgicale de l’orifice ;
– obstruction de la canule par des sécrétions, en général prévenues par les aspirations régulières, une bonne hydratation, des
fluidifiants en aérosol ou par voie générale ;
– granulomes dus à l’irritation de la muqueuse trachéale par la canule. Ils sont localisés au niveau de l’orifice trachéal, de la
courbure ou de la fenêtre de la canule. Ils sont responsables de douleurs locales, de saignements lors des changements de canule.
Ils sont traités par laser, cryothérapie ou nitratage. Il faut prévenir les récidives par un changement du type de canule et des
contrôles endoscopiques ultérieurs ;
– colonisation systématique par des bactéries Gram négatives (bacille pyocyanique). La mise sous antibiotiques n’est justifiée
qu’en cas d’infection ;
– inflammation cutanée péri-orificielle due à une infection locale, en général staphylococcique : une désinfection locale avec
application d’antibiotique est souvent nécessaire ;
– sténoses trachéales après décanulation : elles sont localisées soit au-dessus de l’orifice de trachéotomie et secondaires à l’incision
chirurgicale, soit sous l’orifice et liées au ballonnet ou au bec de la canule. Elles doivent être recherchées systématiquement par
une endoscopie un à trois mois après la décanulation. Leur traitement peut être chirurgical ou endoprothétique.
POUR
E N S AV O I R P L U S . . .
❒ Groupe ad hoc de la commission médico-technique et sociale de l’Antadir. Bonnes pratiques relatives à l’utilisation des canules de trachéotomie
à domicile. Rean Urg 1998 ; 7 : 56-8.
❒ Viau F. Complications de la trachéotomie. Rev Mal Respir 1996 ; 13 : 89-92.
II
La Lettre du Pneumologue - Vol. IV - n° 3 - mai-juin 2001
Fiche à détacher et à archiver
La périodicité des changements est définie par le médecin prescripteur. Elle varie selon le patient, sa pathologie et le type de
canule. Elle est en moyenne de :
– une fois par semaine pour les canules en PVC souples (canule Trachéoflex®) ;
– une fois tous les deux mois pour les canules de type Shiley® ou Tracoe® sans ballonnet ;
– une fois par mois pour les canules de type Shiley® ou Bioser® avec ballonnet ;
– une fois tous les trois mois pour les canules en argent.
Chaque malade a deux jeux de canules. Dans tous les cas, la chemise interne doit être nettoyée au minimum une fois par jour.
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