2 ème partie : médecine d`urgence et polytraumatologie

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Calédonien & Polynésien
Soins podologiques
pour les diabétiques
du Grand Nouméa
2 ÈME PARTIE : MÉDECINE D’URGENCE
ET POLYTRAUMATOLOGIE
N° 51 - Mai 2008
A.D.I.M-N.C. - BP 14 999
98 803 NOUMEA Cédex
Tel: ( 687 ) 26.03.84
Email: [email protected]
http:// www.bmc.nc
A.D.I.M-P.F. - BP 52 580
98 716 PIRAE TAHITI
12 ème année
trimestriel
Prix au numéro : gratuit
V
oici la deuxième partie consacrée au congrès des
urgentistes et vous y verrez encore la tonicité
de nos intervenants, sirènes du quotidien, surtout en
nocturne et en week-end les pauvres !
Les réseaux se montent et l’interactivité entre les
praticiens et les acteurs de santé augmente.
C’est certainement la voie de la médecine moderne.
Pourtant la prévention restera certainement LA clé
de notre futur bien-être, et aussi celle de voûte de
nos cotisations demain.
L’exemple du diabète est frappant avec un nombre
d’amputation par habitant... de pays sous développé…
Dépistage et prévention… Là aussi, sachons tous
regarder au plus tôt les claquettes de nos patients,
et surtout éduquons les au plus vite. L’aide attentive
des autres soignants, comme les podologues qui
trouvent là une place méritée, est trop souvent
oubliée. Elle pourra maintenant s’intégrer plus
simplement à la prise en charge du diabétique.
Bonne lecture.
E Lancrenon
DOSSIER
Edito : Médecine d’urgence du Pacifique.
La place du MEOPA.
La mise en condition d’un patient polytraumatisé.
Imagerie du polytraumatisé hors CHU: impact décisionnel.
La prise en charge du traumatisme crânien:
le point de vue de l’urgentiste.
Les tachycardies à complexe large.
CONSEIL DE L’ORDRE
Actualités ordinales.
AGENCE SANITAIRE ET SOCIALE DE NOUVELLE CALEDONIE
Mise en place d’un forfait de soins podologiques
pour les diabétiques du grand Nouméa.
EXERCER AUJOURD’HUI
Pendant l’épidémie de dengue, n’oublions pas la leptospirose!
PACIFIQUE
Halte à la tuberculose dans le pacifique.
Le nouveau site web du Département Santé Publique de la CPS.
Des nouvelles de la Société océanienne pour la santé sexuelle et
la médecine du VIH (OSSHHM)
L'ASSOCIATION DES MEDECINS URGENTISTES
DE NOUVELLE CALEDONIE
remercie l’ensemble des administrations, sociétés et personnes
qui ont participé à l’organisation et au bon déroulement
de ces 3èmes journées Internationales
de Médecine d’Urgence du Pacifique
[email protected]
Mai 2008 - N° 51
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Directeur de la publication : E Lancrenon.
Secrétaire de Rédaction : P. Nicot.
Conception, Maquette, Mise en page : J. Nicot
***
Comité de Rédaction de Nouméa pour le
B.M. n° 51
AMUNC, B. Rouchon, J M Tivollier, F. Vangheluwe.
***
Les articles signés sont publiés sous la seule responsabilité de leurs auteurs.
***
Tiré à 2 000 exemplaires par ARTYPO.
Distribué à 1400 ex. en Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna. et à 450 exemplaires en
Polynésie Française
COMMUNIQUÉ
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DOSSIER
TO
I
D
É
Médecine d’urgence du Pacifique
2ème partie
D
euxième partie consacrée aux 3èmes Journées Internationales de Médecine d’Urgence du Pacifique
organisées par l’Association des Médecins Urgentistes de Nouvelle-Calédonie en partenariat avec le
CHT et qui se sont déroulées du 27 au 29 novembre 2007 . Ce second volet développe les interventions
plus particulièrement consacrées à la mise en condition et à l’imagerie du polytraumatisé, au point de vue
de l’urgentiste sur la prise en charge du traumatisme crânien. Enfin, un article est consacré
aux tachycardies à complexes larges. Mais nous débuterons ce second numéro spécial
« Médecine d’Urgence » par l’utilisation dans les services d’urgence du MEOPA*
Nous vous rappelons que rendez vous est dores et déjà pris en 2009 à Saint Denis de La Réunion
pour le 3 ème Congrès des SAMU-Urgences d’Outremer ainsi qu’en 2010 à Papeete pour les
4 èmes Journées Internationales de Médecine d’Urgence du Pacifique.
Bonne lecture à tous.
*: Mélange Équimolaire Oxygène - Protoxyde d’Azote
17bis, rue Georges Claude - Ducos
BP 1411 - 98845 NOUMEA CEDEX
Tel : (687) 24-61-44
Fax : (687) 26-38-69
Mai 2008 - N° 51
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Médecine d’urgence
La place du MEOPA
F Adnet, V Monmarteau
Samu 93, hôpital Avicenne, 93000 Bobigny
En France, malgré une utilisation régulière en pédiatrie depuis les années quatre-vingt, ce
n'est que le 15 novembre 2001 qu'une autorisation de mise sur le marché a été délivrée
au mélange équimolaire oxygène - protoxyde d'azote ou MEOPA, après avoir bénéficié
d'une autorisation temporaire d'utilisation en mars 1998.
Actuellement, environ 50% des services d'urgence utilisent le MEOPA.
Historique
C'est en 1772 que le pasteur anglais Joseph
PRIESTLEY découvrit le protoxyde d'azote
qu'il baptisa " gaz hilarant ". Il mourut sans
avoir pu appliquer les vertus anesthésiques
de sa découverte chez l'homme.
Ce n'est que 12 ans plus tard qu'un dentiste,
Horace Wells, utilisa le protoxyde d'azote
comme anesthésique pour arracher les dents
de ses patients après l'avoir expérimenté sur
lui-même. Le protoxyde d'azote était obtenu
par distillation de nitrate d'ammoniaque et
conservé sous forme liquéfiée dans un gazomètre. En 1879, Paul Bert proposa pour la
première fois de l'associer à l'oxygène pour
éviter les effets secondaires dus à l'hypoxie.
En 1961, l'anglais TUNSTALL réalisa le
premier mélange stable d'oxygène et de
protoxyde d'azote à 50 % qu'il appela
ENTONOX. Ce qui montre bien que le
MEOPA n'a de récent que la dénomination…
Celui-ci est stocké dans une bouteille
blanche et bleue de 5 litres (marquage
conventionnel) remplie à 170 bars (soit 1,5 m3
de gaz). Il existe également des bouteilles de
20 litres (soit 6 m3 de gaz).
La bouteille contient un mélange gazeux
tout préparé, équimolaire, d'oxygène et de
protoxyde d'azote, stable si la température
est supérieure à -13 °C. C'est un médicament
inscrit sur liste I, réservé à l'usage hospitalier
et aux véhicules de transport d'aide médicale
d'urgence.
Indications
En urgence, les indications sont surtout
les actes douloureux de courte durée
(inférieur à 45 min) chez l'enfant mais aussi
chez l'adulte, comme toute ponction chez
l'enfant (pose d'une voie veineuse périphérique, ponction artérielle, lombaire, réalisation
d'un myélogramme …), comme la réfection
d'un pansement chez le brûlé, la pose de
points de suture, la réduction de fracture (ou
de luxation périphérique) simple, l'ablation
d'un corps étranger (écharde, hameçon …)
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Mai 2008 - N° 51
ou la réalisation d'une infiltration articulaire.
Sont également des indications à l'utilisation
du MEOPA, la mobilisation d'un membre
fracturé lors de la pose d'une attelle, lors de la
réalisation de radios ou d'un examen clinique
par un médecin ; le transport de patients
douloureux en SMUR ; l'analgésie de la femme
enceinte lors d'un accouchement inopiné.
soit en libérant des médiateurs opiacés. Il
stimule la sécrétion des endomorphines. Son
effet dure tant que l'inhalation se poursuit.
Le réflexe de déglutition est maintenu. Sur le
système nerveux, le MEOPA provoque la
diminution de la fonction corticale et modifie
les sensations entraînant une diminution de
l'audition, du goût, de l'odorat et de la sensibilité à la douleur, au toucher, à la pression,
Pharmacologie
à la température. Il induit également, chez le
patient, une relaxation générale, une anxioConcernant les propriétés pharmacologiques, lyse, une amnésie et parfois une euphorie.
il faut retenir que l'absorption et l'élimination
sont rapides (3 min), exclusivement pulmonaires et sans métabolisme par l'organisme. Effets secondaires
À cette concentration (50%), le protoxyde
Comme tout médicament, le MEOPA
d'azote ne possède pas d'effet anesthésique, il
n'y a pas de dépression respiratoire ou de perte peut provoquer des effets secondaires, en fait
de conscience induites. L'effet analgésique plutôt des effets indésirables comme des
est d'intensité variable selon l'état psychique nausées (qui sont sans incidence clinique car
des patients : Le N2O agirait au niveau des les réflexes laryngés sont présents), une agirécepteurs morphiniques, soit directement, tation (à cause d'un effet antalgique insuffisant
Médecine d’urgence
ou d'un effet paradoxal comme décrit avec
tous les produits sédatifs et anxiolytiques
chez l'enfant), une angoisse (chez la personne
qui se sent " partir ") ou au contraire de
l'euphorie (due aux nouvelles sensations
sensorielles procurées par l'inhalation de
MEOPA). Parfois peuvent survenir une perte
de contact verbal, des paresthésies
(picotements, fourmis) au niveau buccal, et
exceptionnellement une bradycardie ou une
désaturation avec au pire une apnée.
Ce qu'il faut souligner, c'est que ces
effets secondaires sont rares (moins de 3 %)
et rapidement réversibles dès l'arrêt de
l'administration. Ils surviennent surtout en
cas d'inhalation prolongée (au-delà de 40 min).
Par contre, il faut savoir qu'ils sont majorés
par l'association de morphiniques et de
benzodiazépines et également chez l'enfant
de moins de 1 an.
Contre-indications
Les contre-indications sont peu nombreuses
et sont liées à la grande capacité de diffusion
du protoxyde d'azote dans les espaces organiques clos, ce qui majore les volumes et les
pressions. Il s'agit en premier lieu de l'hypertension intracrânienne, des troubles de la
conscience et du traumatisé crânien non
évalué. Il est également contre-indiqué chez les
patients ayant un pneumothorax non drainé, de
l'emphysème, une embolie pulmonaire, une
distension gastrique ou abdominale, un
traumatisme maxillo-facial, nécessitant une
ventilation en oxygène pur, ayant eu un
accident de plongée. Pour finir, la température
ambiante ne doit pas être inférieure à -5° C
(sinon le mélange se dissocie).
Administration
Il faut toujours privilégier l'auto administration par le patient lui-même. Le masque ne
doit jamais être appliqué de force sur le visage
mais au contraire être accepté spontanément.
Le matériel nécessaire est le suivant :
- une bouteille équipée d'un manodétendeur spécifique permettant de connaître
la pression résiduelle dans la bouteille et de
régler un débit entre 1 et 15 litres par minute.
- le système utilisé pour faire inhaler le
MEOPA comprend un ballon souple d'anesthésie muni d'une valve anti-retour, dont le
volume sera adapté au poids du patient, et
qui sera relié au manodétendeur par un
tuyau flexible.
- un filtre antibactérien sera intercalé
entre la valve et le masque qui sera choisi
parfumé pour les enfants (ce qui en facilitera
grandement l'acceptation). Ceci permet de
réutiliser 15 fois le circuit patient.
L’ensemble des moyens de réanimation
classique seront à portée de main (chariot
d’urgences, aspiration fonctionnelles,
BAVU + O2).
La surveillance du patient est primordiale
pour dépister et éviter tout effet secondaire
préjudiciable au patient. Elle est essentiellement
clinique et consiste à dépister tout trouble de
la conscience par maintien du contact verbal,
tout trouble de la ventilation en mesurant la
fréquence respiratoire et en observant la
coloration du patient. La mesure de la
saturation en oxygène est fortement recommandée mais non obligatoire car le mélange
est hyperoxique. L'évaluation de la douleur
doit également être faite.
Renseigner par la suite le dossier de soins
du patient : EVA, temps d’administration de
MEOPA…
Pour terminer, en fonction des protocoles
de l'hôpital, ne pas oublier de remplir si besoin
le relevé nominatif d'utilisation du MEOPA
qui sera retourné à la pharmacie avec la
bouteille vide.
Précautions d’emploi
Pour utiliser le MEOPA en toute sécurité,
des précautions doivent être respectées :
- le matériel d'urgence, et notamment celui
nécessaire à une ventilation artificielle, doit être
vérifié et à portée de main. Le temps d'inhalation
continue ne doit pas dépasser 1 heure.
- concernant plus précisément les bouteilles
de MEOPA, celles-ci seront stockées et utilisées
verticalement à une température ambiante
supérieure à O° C.
- on prendra soin, également, de toujours
laisser une pression résiduelle de 10 bars
minimum dans la bouteille pour permettre un
nouveau remplissage ultérieur.
Limites d’utilisation
La puissance du MEOPÄ est faible mais
elle contribue à sa sécurité d'utilisation.
Il existe environ 10 % d'échecs avec cette
méthode, liés surtout à l'angoisse et à l'appréhension du patient et nécessitant un recours à
une autre technique d'analgésie.
De plus, cette technique ne peut pas être
employée chez des patients agités car une
bonne coopération du patient est requise.
D'autre part, chez les enfants de moins de 3 ans,
les effets sont légèrement moins marqués.
Conclusion
Le MEOPA permet de réaliser en urgence une
analgésie rapide et efficace après seulement 3
minutes d'inhalation, une analgésie sécurisante
car facilement réversible en moins de 5 minutes
dès l'arrêt de l'administration, et une analgésie
à faible coût à condition d'en respecter les
indications et contre-indications.
Les personnes habilitées à faire inhaler
du MEOPA sont les médecins anesthésistes et
les IADE. Y sont aussi autorisés les médecins
urgentistes et les IDE après avoir reçu une
formation théorique et pratique. Le personnel
paramédical le faisant sur prescription médicale
et/ou en application d'un protocole de service
écrit. La personne responsable ne doit
s'occuper qu'exclusivement du contrôle de
l'administration du MEOPA et de la surveillance du patient.
Cette personne doit absolument expliquer
au patient la technique qui va être utilisée
afin de le convaincre, de le mettre en
confiance et de le rassurer. Il faut insister sur
le fait que l'inhalation ne fait pas dormir mais
qu'elle peut induire des sensations bizarres
comme une envie de rire et qu'elle permet de
diminuer très fortement la douleur.
Mai 2008 - N° 51
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Médecine d’urgence
La mise en condition d’un patient polytraumatisé
Frédéric Adnet
Samu 93, Upres 3409, Hoptal Avicenne, 93000 Bobigny
Si la nécessité d’une mise en condition spécifique et d’un monitorage adapté d’un patient
polytraumatisé n’est plus actuellement discutée, le clinicien doit bien évaluer avant chaque
prise de décision la balance bénéfice/risque pour le patient. La valence « risques » des
polytraumatisés est probablement déterminée par le délai qui sépare le moment de l’accident
de la réalisation de l’hémostase chirurgicale définitive au bloc opératoire.
Cependant, le concept de « golden hour »
ou de « platinum ten minutes » [1] semble ne
pas être supporté par des niveaux de preuves
importants [2]. Il est toutefois raisonnable de
considérer que les techniques de relevage, de
mise en condition et le choix du monitorage
doivent être guidés par l’optimisation de la
balance entre le temps consacré à leur mise
en place et les bénéfices immédiats pour le
patient avant son transfert et son accueil au
bloc opératoire. Ceci étant posé, un certain
nombre de gestes apparaissent nécessaires
malgré la consommation de temps qui leur
est associée car ils permettent d’orienter ou
d’établir un diagnostic, de poser l’indication
d’un traitement rapide, de suivre son efficacité
à la phase préopératoire et peuvent même
être déterminants dans le choix de l’orientation
hospitalière du patient.
Il est reconnu que la nature de la réponse
physiologique d’un patient à une agression
détermine largement son pronostic. Il est
donc vital d’évaluer, par un minimum
de monitorage, le comportement physiologique
du patient puisque cette appréciation
permet non seulement d’évaluer les réserves
physiologiques mais aussi de déterminer une
« ligne de base » qui servira de référentiel
pour suivre l’efficacité de la prise en charge
et des traitements entrepris.
Une bonne connaissance des techniques de
monitorage et de l’interprétation des résultats
est fondamentale puisqu’une mauvaise appréciation peut aboutir à une stratégie thérapeutique erronée. Ce mauvais « aiguillage »
initial, diagnostique ou thérapeutique, peut
engager le pronostic vital à très court terme
car il est souvent difficile de redresser les
erreurs initiales commises à la prise en
charge d’un patient traumatisé grave. Ainsi,
malgré l’impression d’un temps consommé
important, il apparaît vital qu’une prise en
charge de haut niveau soit réalisée à la phase
initiale chez le patient polytraumatisé [3-5].
Cette notion est cependant toujours controversée par certains auteurs anglo-saxons [6, 7].
La prise en charge initiale d’un
patient polytraumatisé
Réception de l’appel
La prise en charge d’un patient polytraumatisé commence dès la régulation de
l’appel. Une étude a montré que le choix
d’un effecteur (premier secours, ambulance
médicalisée, pompiers) dépendait de la
localisation de la réception de l’alerte et de
son traitement (Samu, police ou pompiers) [8].
06
Mai 2008 - N° 51
Médecine d’urgence
Un certain nombre d’éléments anamnésiques décrits par les témoins doivent influer
sur le choix de l’effecteur à envoyer sur place
(équipe médicalisée ou simples secouristes). Ces
éléments peuvent être la présence d’un
patient décédé, un motard ne se relevant pas,
etc... Un certain nombre de ces éléments sont
regroupés dans le tableau 1 [9].
Notion de cinétique importante
Déformation des véhicules
Intrusion de structures dans l’habitacle
Impact latéral violent
Disproportion des vecteurs (piéton/automobile par exemple)
Notion de victime éjectée
Notion d’une victime décédée
Notion d’une victime ne se relevant pas
Chute d’une hauteur supérieure à 6 mètres
Plaie par arme à feu ou arme blanche
Relevage
La prévention de lésions supplémentaires
ou de l’aggravation de lésions existantes et
en particulier de lésions rachidiennes passe
par des techniques d’immobilisation simples.
Le patient est relevé, ou désincarcéré en
respectant l’axe tête-cou-tronc par la pose
systématique d’une minerve. La traction
active du rachis cervical est abandonnée car
est susceptible d’aggraver des lésions rachidiennes [10]. Le patient est placé dans un
matelas à dépression ou sur une « planche
olivier » qui permet de maintenir le rachis sur
une surface dure, indéformable. Les fractures
de membre avec déplacements importants
sont réalignées sous analgésie en utilisant des
morphinomimétiques de première intention [11].
Des techniques de désincarcération rapide
peuvent être employées en diminuant le
niveau de précaution si une détresse vitale
est présente.
Gestion des fonctions vitales
Les trois grandes fonctions vitales sont à
évaluer en priorité en traumatologie lourde :
ce sont la ventilation, l’hémodynamique et les
fonctions neurologiques (en particulier l’atteinte
médullaire). Les étiologies immédiatement
curables d’une détresse respiratoire doivent
être recherchées et traitées (exsufflation d’un
pneumothorax compressif par exemple). La
gestion des voies aériennes vise à faire bénéficier
au patient d’une intubation trachéale après
induction en séquence rapide (tableau 2), s’il
existe un coma profond défini par un Glasgow
coma scale (GCS) ≤ 8, une détresse respiratoire hypoxémiante ou une agitation extrême
[11, 12]. Les posologies des médicaments
hypnotiques pour l’intubation et la sédation
d’entretien doivent être minorées en présence
d’un choc hémorragique [13]. Un état de
choc hémorragique doit être recherché et au
moins une voie d’abord veineuse fiable établie
rapidement. L’examen clinique (pression
artérielle, fréquence cardiaque, conscience)
permet d’estimer approximativement les pertes
sanguines (Tableau 3) [14]. Les objectifs du
remplissage vasculaire et les produits à utiliser
sont toujours discutés [15]. Globalement, une
stratégie d’hypotension contrôlée (pression
artérielle systolique maintenue autour de 80 mmHg
Tableau 1 : Éléments de gravité à l’appel permettant de décider de l’envoi
d’une équipe de réanimation préhospitalière
1. Équipement prêt à l’emploi et vérifié:
- Matériel a ventilation manuelle de taille appropriée relié à une source d’oxygène.
- Appareillage à aspiration (fixe ou portable) avec sonde de gros calibre connecté.
- Sondes d’intubation prêtes et vérifiées (ballonnet), deux tailles au moins.
4. Préoxygénation
Faire ventiler le patient dans le masque relié à une source d’oxygène à haut débit. Assister le
patient le moins possible. Surveiller la SpO2 qui doit rapidement augmenter. Contrôler
l’absence de fuite. Durée 3 minutes.
5. Induction
Etomidate (Hypnomidate®) 0,3 mg/kg en IVL immédiatement suivie par suxaméthonium
(Celocurin®) 1 mg/kg IVD.
6. Manoeuvre de Sellick
Appliquer une pression cricoïdienne (manoeuvre de Sellick) dès la perte de conscience
du patient. Cette pression doit être maintenue jusqu’à ce que le ballonnet soit gonflé.
7. Repérer les fasciculations.
Elles apparaissent (60% des patients) environ 60 secondes après l’injection du curare et
durent 30-45 secondes. Elles sont bien visibles sur la région supérieure du thorax et au
niveau des paupières.
8. Intubation endotrachéale par voie orale sous laryngoscopie directe
Procéder à l’intubation juste après la fin des fasciculations. Vérifier la bonne position de
la sonde par l’auscultation pulmonaire, l’inspection et la courbe de la PETCO2. Surveiller
la SpO2.
Tableau 2 : Induction en séquence rapide pur l’intubation d’un patient en urgence
Volume des pertes
< 750 mL
800-1500 mL
1500-2000 mL
> 2000 mL
PAS
Inchangée
Normale
Diminuée
Basse
PAD
Inchangée
Augmentée
Diminuée
Basse
FC
Normale
100-120
120
>120
Recoloration cutanée
Normale
> 2sec.
> 2 sec ;
Indétectable
FR
Normale
Normale
> 20
> 20
Débit urinaire (mL/h)
>30
20-30
10-20
0-10
Extrémité
Normales
Pâles
Pâles
Froides
Coloration
Normale
Pâle
Pâle
Grise
Conscience
Normale
Anxiété ou agité
Altérée
Altérée ou coma
PAS = pression artérielle systolique ; PAD = pression artérielle diastolique ; FR = fréquence respiratoire ;
FC = fréquence cardiaque
Tableau 3 : Estimation des pertes sanguines en fonction de paramètres cliniques
Mai 2008 - N° 51
07
Médecine d’urgence
est un objectif tensionnel admis guidant le
remplissage vasculaire en l’absence de
traumatisme crânien grave [16-18]. En présence
d’un traumatisme crânien grave (défini par
un GCS ≤ 8), une normotension doit être
recherchée, afin de maintenir une pression de
perfusion cérébrale la plus proche possible
de 70 mm Hg. Les colloïdes sont préférés en
cas de choc hypovolémique initial [19]. Si la
PAS est supérieure à 90 mm Hg ou si la
perte sanguine est estimée à moins de 20 %
de la masse sanguine, les cristalloïdes peuvent
être utilisés comme soluté de remplissage.
Actuellement des solutés mixtes (mélange
de sérum salé hypertonique avec un dextran
(RecueFlow®) ou d’hydroxyéthylamidon
(HyperEs®) tendent à se développer dans
une stratégie de « small volume resuscitation »
qui vise à minimiser le volume administré pour
une même efficacité hémodynamique [20].
L’utilisation du pantalon antichoc tend
actuellement à décliner. Les différentes études
ont montré que son utilisation n’a pas été
associée à une amélioration de la survie dans
le cas des patients polytraumatisés en choc
hémorragique [21-23]. Les seules indications
actuelles sont : (1) l’immobilisation et la
contention de fractures du bassin dans le
cadre d’un choc hémorragique ; (2) un
traumatisme abdominal avec choc hémorragique sévère chez un patient en route vers le
bloc opératoire [24].
Bilan lésionnel
Après stabilisation des fonctions vitales,
un bilan lésionnel est réalisé par l’équipe
médicale. Celui-ci doit tenir compte d’éléments
anamnésiques (nature de l’accident, cinétique
probable, déformation d’un véhicule, présence
d’autres victimes graves, hauteur de la chute
etc..) (tableau 1), du mécanisme du traumatisme (décélération, choc latéral, mécanisme
d’écrasement, durée d’incarcération), et de
l’examen clinique (Tableau 4). L’examen
clinique est systématique, « de la tête aux
orteils », chez un patient dévétu. L’examen
des fonctions neurologiques, abdominales et
cardiaques sont les priorités. Les lésions
osseuses, vasculo-nerveuses périphériques
constituent un degré de priorité moindre. Les
lésions les plus graves doivent être évoquées
d’emblée jusqu’à ce qu’il existe une preuve
formelle de leurs exclusions. La présence
d’une lésion « bruyante » ne garantit pas
qu’il n’existe pas de lésions associées. Ce
piège, classique en traumatologie, n’est pas
théorique. Par exemple, une blessure par
arme à feu dans la région pelvienne ne doit
pas cacher une paraplégie ou un hémothorax
dû au trajet balistique de l’agent vulnérant.
08
Mai 2008 - N° 51
Tableau 4 : éléments anamnésiques importants
pour caractériser un patient polytraumatisé
Chute
Hauteur estimée (1 étage = 3 mètres)
Nature du sol
Partie du corps impliquée dans la réception
Présence d’un amortissement
Étiologie : volontaire, accidentelle, fuite
Accident de la Voie Publique
Déformation du véhicule
Notion de patient éjecté
Notion de patients décédés dans l’accident
Port de la ceinture
Direction du choc
Vitesse estimée
Port du casque
Temps d’incarcération
Gonflement de l’airbag
Arme à feu
Calibre
Nombre d’impacts
Suicide ou agression
La plupart des diagnostics « oubliés » en
traumatologie surviennent chez les patients
traumatisés crânien ou thoracique [25]. En
effet, chez ces patients, les lésions cardiaques,
des gros vaisseaux ou du diaphragme ne sont
évoquées qu’avec un retard qui compromet
le pronostic du patient.
Actuellement, l’échographie abdominale
réalisée par les médecins urgentistes tend à
devenir un examen à intégrer dans l’évaluation
initiale des patients polytraumatisés, dès la
phase préhospitalière [26]. La miniaturisation
des appareils et leur simplicité d’utilisation
permettent leur mise en oeuvre « au lit du
malade » même en dehors de l’hôpital.
Plusieurs observations et enquêtes de faisabilité
ont démontré la fiabilité et de cet outil dans
les mains des urgentistes pour l’évaluation
des traumatismes fermés et en particulier
dans la recherche d’épanchements intraabdominaux (figure 1) [27-29].
Après l’évaluation initiale, l’équipe
soignante doit avoir à l’esprit que l’état du patient
se situe dans une dynamique temporelle. La
nécessité de réaliser de fréquents examens
cliniques rapprochés, pouvant parfois remettre
en cause des priorités thérapeutiques ou des
diagnostics, est indispensable. Certaines lésions
gravissimes peuvent évoluer en deux temps ou
décompenser tardivement (lésion du médiastin,
fracture de rate, contusion pulmonaire).
Seules des réévaluations fréquentes et
consignées dans le dossier médical peuvent
permettre de détecter ce type de lésion et
ainsi d’instituer une prise en charge adaptée.
Orientation
Dans le contexte de la gestion d’un patient
traumatisé grave, un site d’accueil adapté à
la gravité et au type de lésions est recherché.
Les éléments anamnésiques et le résultat de
l’examen clinique doit faire préparer l’équipe
Figure 1: épanchement liquidien dans la loge de Morisson (loge hépato-rénal) lors d’un traumatisme
abdominal fermé révélé par l’échographie sur le lieux de l’accident.
Médecine d’urgence
intra-hospitalière à la réception du patient.
Ce peut être un transfert direct au bloc opératoire en cas de lésions incontrôlables et
identifiées (abdomen chirurgical et choc
hémorragique non contrôlé par le remplissage initial), une salle d’accueil des urgences
vitales (Sauv) si le patient est instable, mais
que les fonctions vitales sont contrôlées par
la prise en charge initiale ou un service d’urgence si aucune fonction vitale n’est compromise et que le patient est stable. Dans
tous les cas, l’équipe d’accueil est assurée, la
disponibilité du bloc opératoire prévue. En
cas d’instabilité hémodynamique, une réserve de produits sanguins est constituée
dans le service d’accueil du patient. L’équipe
médicochirurgicale doit idéalement se trouver présente dès l’arrivée du patient. La
bonne coordination de cette équipe et en
particulier l’identification d’un chef d’équipe
est le garant de l’efficacité de la prise en
charge intra-hospitalière du patient.
Monitorage lors de la
mise en condition
d’un patient polytraumatisé
L’explosion des techniques de monitorage
et la miniaturisation des appareils au cours
des 10 dernières années ont conduit à une
amélioration significative de la reconnaissance
des défaillances physiologiques d’un patient
traumatisé.
La réponse physiologique à un traumatisme est initiée non seulement par le
traumatisme lui-même mais aussi par la
perte sanguine. L’existence d’un choc, d’une
hypoxie, d’une acidose, d’une hypothermie,
d’une atteinte de la circulation périphérique,
d’une altération de la coagulation et de
l’immunité sont des facteurs déterminants
de la réponse physiologique. La douleur est
aussi un stimulus important dans la genèse
du stress physiologique du patient à un
traumatisme.
Clairement, les variables physiologiques
accessibles à la mesure avec des degrés de
complexités variables sont nombreuses,
permettant une diversité d’approche plus ou
moins invasive. Cependant, il est possible de
simplifier considérablement les procédés. La
stabilité physiologique d’un patient dépend
de l’adéquation entre sa consommation en oxygène et ses apports, en particulier pour les
organes vitaux. Le monitorage des fonctions
organiques déterminantes pour cet équilibre
est donc essentiel. Le transport d’oxygène
(TaO2) est le produit du débit cardiaque avec
la quantité d’oxygène disponible. La quantité
d’oxygène disponible est en grande partie le
produit de la saturation en oxygène avec la
concentration en hémoglobine. Ces variables
sont accessibles au monitorage.
Le monitorage est aussi une aide au
diagnostic et guide les protocoles de traitements.
Par exemple, lors d’un choc hémorragique,
une stratégie thérapeutique en hypotension
contrôlée ne peut s’envisager sans un accès
instantané et continu aux valeurs de la
pression artérielle par la pose d’un cathéter
en position intra-vasculaire.
Tableau 5 : signes ECG d’une contusion myocardique
Tachycardie sinusale
Bloc auriculo-ventriculaire
Bloc de branche droit
Anomalies du segment S-T (sus ou sous
décalage)
Inversion de l’onde T
Troubles du rythme supra-ventriculaire
Trouble du rythme ventriculaire
Apparition d’une onde Q (rare)
Extrasystoles auriculaires et ventriculaires
Monitorage cardiovasculaire
constatation d’une anomalie (bloc de branche,
extrasystole, trouble du rythme,..) doivent faire
évoquer une contusion myocardique (tableau 5).
La présence de ces anomalies, surtout chez le
Le monitorage en continu de la fréquence sujet jeune, est une indication à une surveilcardiaque est possible par un monitorage lance cardiaque en milieu hospitalier [30].
électrocardioscopique. Ce monitorage permet
de quantifier facilement la tachycardie, Pression artérielle
d’évaluer l’efficacité du remplissage sur la
fréquence cardiaque. Enfin, ce monitorage
La mesure de la pression artérielle par une
permet, dans le contexte du traumatisé grave, méthode non invasive (PANI) constitue
de détecter une bradycardie paradoxale ou probablement le premier geste de monitorage
secondaire à une stimulation vagale.
spécialisé sur les lieux de l’accident pour
L’ECG détecte la différence de potentiel évaluer l’état hémodynamique du traumatisé.
sur la surface cutanée générée par la migration La première conséquence d’une hypovolémie
du dipôle électrique d’origine cardiaque. sur la pression artérielle, n’est pas une baisse
L’analyse de l’ECG donne des informations de la pression artérielle systolique (PAS)
utiles sur la présence d’une éventuelle ischémie mais une remontée de la pression artérielle
cardiaque, d’arythmie, peut faire évoquer des diastolique (PAD) par la stimulation
troubles électrolytique (hyperkaliémie). La catécholaminergique provoquée par la
réalisation d’un ECG est systématique, car la stimulation du baroréflexe (figure 1).
Electrocardioscope
et électrocardiogramme (ECG)
Figure 2: réponse catécholaminergique à l’hypovolémie. La baisse de la volémie (baisse de la
pression veineuse centrale) provoque une tachycardie puis le pincement de la pression artérielle
différentielle. PVC = pression veineuse centrale ; PA = pression artérielle ; FC = fréquence cardiaque ;
DC = débit cardiaque.
Duranteau J., Br. J. Clin. Pharmac. 1992, 34 : 204204-214
Mai 2008 - N° 51
09
Médecine d’urgence
Cette remontée provoque une diminution
de la pression artérielle différentielle (Pad =
PAS – PAD) [31]. La baisse de la PAS est
retardée par rapport à la baisse du débit
cardiaque générée par l’hypovolémie
(figure 1) et peut faire craindre le passage à
la phase « sympato-inhibitrice » du choc
hémorragique qui est caractérisée par une
bradycardie et une vasoplégie paradoxale
[32]. Néanmoins, la mesure de la PA par une
méthode non invasive peut être prise en défaut
lorsque le patient a une pression artérielle
basse [33]. Certains auteurs ont proposé le
calcul du rapport FC/Pad pour prédire
l’évolution hémodynamique des traumatisés
graves. Un rapport inférieur à 3 aurait une
valeur prédictive négative de 86 % pour un
collapsus cardiovasculaire [34].
La mise en place d’un cathéter artériel,
radial ou fémoral, doit être considérée comme
une priorité au cours de la réanimation du
patient traumatisé grave [33]. Sa pose ne
nécessite que quelques minutes et ne retarde ni
la réanimation du patient ni son transfert au
bloc opératoire ; c’est probablement le monitorage qui maximalise la plus la valence
« bénéfices » par rapport aux éventuels
« risques » (perte de temps, risque infectieux
etc..). En effet, seul cet abord permet le monitorage fiable et continu de la PA et en particulier lorsque celle ci atteint des valeurs basses.
Cette mesure permet en outre de suivre l’efficacité d’une manière tout à fait fiable des
différents traitements institués au cours d’un
choc traumatique et tout particulièrement dans
le cadre d’une hypotension permissive. De
même, lors de la réanimation d’un traumatisé
crânien grave, il est illusoire d’espérer optimiser la pression de perfusion cérébrale sans ce
monitorage. La PA invasive permet en outre de
déceler « en direct » une aggravation brutale de
l’hémodynamique du patient, voire d’un arrêt
cardiaque, qui, s’il se produit sur le mode d’un
« rythme sans pouls », peut être diagnostiqué
avec retard sans ce type de monitorage. La
pression artérielle sanglante peut être posée
en milieu préhospitalier [35]. Les principales
indications lors de la prise en charge d’un traumatisé grave sont l’existence d’un choc
hémorragique, d’un traumatisme crânien grave
ou lors de la réanimation d’un arrêt cardiaque
récupéré. De manière générale, les indications
de ce monitorage doivent être larges.
Débit urinaire
Le débit urinaire reflète indirectement le
débit cardiaque, la perfusion splanchnique et
rénale. La quantification du débit urinaire au
cours d’un choc hémorragique apparaît
comme un marqueur important au cours de
la réanimation d’un patient traumatisé grave.
10
Mai 2008 - N° 51
La mise en place d’une sonde urinaire vasoconstriction périphérique et l’hypoperfusion
tissulaire rendent le signal difficilement
doit donc être d’indication large.
interprétable [37]. Dans ce cas, une mesure
de la SpO2 par voie transoesophagienne
Hématocrite et concentration en hémoglobine
apparaît plus fiable [38].
Une valeur d’hématocrite basse a des
conséquences rhéologiques qui peuvent être Capnimétrie expirée
favorables à cause de la diminution de la
viscosité sanguine, favorisant la circulation
La possibilité depuis quelques années de
périphérique. Le suivi de l’hémoglobinémie ou disposer de matériels portables de capnimétrie
de l’hématocrite est un marqueur important a considérablement modifié l’utilisation de
puisqu’il renseigne sur la cinétique de cette méthode dans le contexte de l’urgence
l’hémodilution due au remplissage vasculaire [39]. La capnimétrie est la mesure de la
et/ou au débit de saignement. Une valeur concentration de CO2 dans les gaz inspirés et
d’hématocrite autour de 25-30 % peut être un expirés [33]. La concentration de CO2 dans
objectif thérapeutique pour le remplissage. l’air expiré dépend de l’élimination pulmonaire
Enfin, une hémoglobinémie < 7 g/dL est une du CO2 (ventilation), de son transport par le
indication à un remplissage par transfusion système circulatoire (débit cardiaque) et de
sanguine.
sa production tissulaire (perfusion périphérique).
La mesure de la pression du CO2 en fin
d’expiration (PetCO2) est extrêmement utile
Monitorage de la fonction respiratoire
pour le monitorage des patients hémodynaGaz du sang
miquement instables. Outre qu’il peut servir
d’alarme pour une extubation accidentelle,
La miniaturisation de la technologie des ses variations renseignent sur l’hémodynacapteurs permet actuellement de déterminer mique du patient. En particulier, lors de la
des variables biologiques au lit du malade réanimation des arrêts cardiaques, le monito(Point of Care). Ces examens sont réalisables rage par la PetCO2 à permis de détecter de
par des micro-prélévements et le résultat est façon précoce une reprise de l’activité hémoobtenu en quelques minutes. Parmi ceux-ci, les dynamique [40]. Sa valeur instantanée est
gaz du sang sont accessibles. Les valeurs des gaz une indication de la valeur de la PaCO2 et
du sang et aussi de la lactatémie artérielle devient une variable déterminante lors de la
sont des indicateurs biologiques importants non réanimation d’un traumatisé crânien sévère
seulement pour évaluer le niveau de détresse mais [41]. En outre, la mesure de la PetCO2 est la
qui aussi constituent des aides à la décision pour méthode de référence pour la vérification de
l’instauration de traitements agressifs (ventilation la position intratrachéale de la sonde d’intumécanique...). La détermination des gaz du bation [42]. La limitation de cette méthode
sang est aussi fondamentale pour évaluer la trouve son origine dans l’existence d’un
réanimation neurologique en cas de traumatisme gradient entre la PaCO2 et la PetCO2 qui est
crânien grave. Les valeurs des gaz du sang sont souvent important chez les patients en choc
aussi un moyen d’optimiser le réglage du hémorragiques [43]. Ajuster une valeur de la
support ventilatoire d’un patient sous assis- PaCO2 (35 mm Hg chez le traumatisé crânien
grave) par la détermination de la PetCO2 est
tance respiratoire.
souvent illusoire dans ces conditions. Par contre,
la mesure en continu et surtout l’observation de
Oxymétrie pulsée
ses variations au cours de la prise en charge
L’hémoglobine oxygénée et réduite permet un monitorage indirect du débit
absorbe la lumière dans le domaine du visible cardiaque au cours de la réanimation du
et du proche infra-rouge. En comparant patient en choc traumatique.
les absorptions entre les deux formes
d’hémoglobine, on peut en déduire le taux Autres techniques
d’hémoglobine oxygénée. Les capteurs actuels
permettent de ne détecter que la composante
L’hypothermie est reconnue comme un
pulsatile (c’est à dire artérielle) de ce taux facteur de risque majeur chez le traumatisé [44].
d’hémoglobine [36]. La valeur de la SpO2 L’hypothermie entraîne, de plus, des troubles
permet d’estimer la SaO2. Chez les patients de la coagulation qui peuvent aggraver le
sains, la composante pulsatile du signal est choc hémorragique [45]. La température
d’environ 2 % de l’absorption totale, le rapport périphérique reflète la perfusion tissulaire.
signal sur bruit est donc relativement faible. La mesure est affectée par le degré de vasoEn cas d’hémodilution ou d’anémie, la constriction, et l’hypoperfusion périphérique.
valeur de la SpO2 devient peu fiable. De plus, La température corporelle peut être monitorée
chez les patients traumatisés et hypotendus, la par des sondes tympaniques, œsophagiennes,
Médecine d’urgence
rectales ou cutanées. La mesure en continue
de la température par sonde rectale ou œsophagienne peut permettre de poser l’indication
d’un réchauffement des solutés de remplissage
et/ou des gaz inspirés [46].
Doppler transcrânien (DTC)
Le DTC est une technique de Doppler
pulsé qui permet d'enregistrer le flux ou la
vitesse des globules rouges dans les gros
troncs artériels intracrâniens. Le Doppler
étudie donc la vélocité (la vitesse) des globules
rouges dans les artères de gros calibre. La
mesure du signal doppler par la fenêtre temporale
permet une mesure indirecte de la pression
de perfusion cérébrale notamment au temps
diastolique qui est la phase principale de
la perfusion cérébrale. Une diminution /
modification du signal au temps diastolique
permet de déceler une souffrance cérébrale
en général due à une hypertension intracrânienne consécutive à un œdème ou un hématome
expansif. La réalisation précoce de cet examen
rapide pourrait permettre de modifier la prise
en charge thérapeutique et d’apporter des
arguments pour l’orientation du patient vers
un centre de neurochirurgie [47].
Echodoppler transoesophagien
Ce matériel permet de déterminer précocement le profil hémodynamique des patients
hémodynamiquement instables. Le doppler
permet de mesurer à partir d’une source fixe
(sonde) en position œsophagienne, la vitesse
de déplacement des globules rouges en
mouvement. Ce matériel permet donc de
mesurer, de manière non invasive, la vélocité
du sang dans l’aorte, ce qui donne un reflet
du débit cardiaque du patient [48]. L’évaluation de cette méthode dans la prise en
charge de patients traumatisés graves est en
cours [49].
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Mai 2008- N° 51
11
Médecine d’urgence
Imagerie du polytraumatisé hors C.H.U. : impact décisionnel
Antoine Gache, François-Michel Lopez*, Jean E. de La Coussaye
Division Anesthésie-Douleur-Urgence-Réanimation CHU Nîmes
* Pôle de l'Imagerie Médicale
Le polytraumatisé est un blessé grave porteur de plusieurs lésions dont une, au moins,
met en jeu le pronostic vital à court terme. A côté de cette définition classique, il convient
de considérer comme polytraumatisé, toute personne ayant subi un traumatisme violent
quelles que soient les lésions apparentes. Le bilan lésionnel et la réanimation de ce patient
sont débutés sur les lieux de l'accident et se poursuivent aux urgences, nécessitant une
collaboration pluridisciplinaire. Dans ce cadre, la précision du bilan lésionnel dépend
largement du nombre et du type d'investigations d'imagerie médicale.
Cependant, plus la demande d'examens
est importante, plus la prise en charge est
longue, ce qui peut retarder à tort une
intervention chirurgicale, notamment d'hémostase. Ainsi, tout au long du bilan lésionnel, il •
conviendra de garder à l'esprit que le pronostic
vital s'altère proportionnellement à la quantité
de transfusion. Le polytraumatisé est ainsi •
classé schématiquement en trois catégories,
selon son état clinique et selon le type de
détresse neurologique, hémodynamique
et/ou respiratoire.
Catégorie 1
Hémorragie évidente ⇒ Bloc opératoire
Doute? ……………... ⇒ RP Face
⇒ Echo abdo
⇒ Bloc opératoire
Catégorie I
Détresse hémodynamique
Le blessé est en état de détresse extrême.
Dès son arrivée, il est admis en salle de
déchoquage ou au bloc opératoire s'il s'agit
d'une détresse hémodynamique, monitoré
avec au minimum un électrocardioscope, une
mesure automatisée de la pression artérielle,
une saturométrie, une prise de température et
le bilan sanguin est prélevé. Aux termes du
premier examen, l'existence d'une détresse
vitale limite le nombre d'investigations
complémentaires. Il faut ensuite tenter à
tout prix de stabiliser les fonctions vitales
avant de préciser les lésions.
Le malade est en collapsus cardiovasculaire qui persiste malgré le remplissage
vasculaire et la perfusion continue d'adrénaline.
L'examen du blessé recherche d'abord une
hémorragie externe qui doit être contrôlée
(plaie du scalp). En l'absence d'hémorragie
extériorisée, le premier bilan d'imagerie va
se limiter, si nécessaire, au seul cliché de
thorax de face et à la réalisation d'une échographie abdominale. Le cliché de thorax met
alors en évidence un hémothorax important
qui doit être drainé. Lorsque l'état hémodynamique reste précaire malgré la poursuite
du remplissage vasculaire et l'utilisation de
l'autotransfusion, il est classique de considérer
qu'un drain thoracique produisant d'emblée
1,5 à 2 litres ou 500 ml/h conduit à la thoracotomie en urgence. L'intervention est grevée
d'une lourde mortalité et peut mettre en
évidence une lésion de l'aorte, des vaisseaux
de la gerbe ou des vaisseaux pulmonaires,
une déchirure péricardique avec plaie du
coeur, un arrachement ou une désinsertion
des vaisseaux intercostaux voire une lésion
diaphragmatique. L'échographie abdominale
met en évidence un abondant épanchement
intra-péritonéal. Ce tableau de détresse
circulatoire impose la laparotomie immédiate.
Ailleurs, l'examen clinique oriente vers un
hématome rétropéritonéal massif (fracture du
Détresse neurologique
Le blessé est dans le coma. Après avoir
éliminé rapidement une cause hypoxique ou
hémodynamique, la profondeur du coma est
évaluée avec le score de Glasgow et des
signes de localisation sont recherchés.
L'intubation et la ventilation mécanique
permettent de protéger les voies aériennes et
de rétablir une normoxie et une normocapnie
ainsi qu'une PAM > 90 mmHg. Lorsque la
détresse neurologique témoigne d'un traumatisme crânien grave isolé, la TDM cérébrale
est alors réalisée sous sédation à la recherche
d'une lésion neurochirurgicale.
12
Mai 2008 - N° 51
bassin, hématurie macroscopique), le polytraumatisé peut être maintenu en vie par la
mise en place d'un pantalon antichoc. Cependant,
la laparotomie exploratrice ne peut être
différée ou retardée par des investigations
diagnostiques longues. Elle peut permettre
d'objectiver et de traiter une lésion intrapéritonéale, source principale du saignement.
L'HRP peut être de découverte peropératoire
et la décision d'exploration chirurgicale
repose sur plusieurs critères. Henao et Aldrete
(Surg Gynecol Obstet, 1985) proposent ainsi
un arbre décisionnel complexe basé sur l'état
hémodynamique du patient stabilisé ou non,
la localisation de l'HRP (l'HRP central est
systématiquement exploré), son caractère
expansif et/ou pulsatile après tamponnement
durant 15 minutes ainsi que son éventuelle
extériorisation à travers une brêche du péritoine pariétal postérieur. En postopératoire,
l'angiographie est indiquée devant une
reprise du processus hémorragique, de même
qu'une UIV ou mieux, une TDM en cas
d'hématome des flancs non exploré.
Détresse respiratoire
Une détresse respiratoire ne permet souvent
que la réalisation d'un cliché de thorax de face.
Lorsque la détresse respiratoire est associée
à des troubles de la conscience, le blessé
est oxygéné puis intubé. Lorsque le patient
Médecine d’urgence
est conscient, il faut d'abord éliminer une
tétraplégie haute ou un pneumothorax suffocant
ou bilatéral qui doit être ponctionné puis drainé.
Si la détresse respiratoire persiste, la radiographie de thorax oriente vers une rupture
trachéo-bronchique ou une contusion pulmonaire hypoxémiante. La première est alors
diagnostiquée par la fibroscopie ou mieux, le
bronchoscope rigide, et impose la chirurgie
en urgence après mise en place éventuelle
d'une intubation sélective. La seconde nécessite
l'intubation et la ventilation puis une fibroscopie bronchique. Enfin, si la détresse respiratoire est contemporaine de fractures costales
multiples avec ou sans volet thoracique et
d'une radiographie de thorax peu contributive,
la douleur peut être le facteur déclenchant.
Le blessé doit de prime abord être analgésié
puis intubé et ventilé en cas de persistance de
l'insuffisance respiratoire. En cas d'hémoptysie
de grande abondance, la fibroscopie réalisée
au mieux chez un malade intubé précise le
côté atteint. L'intubation sélective peut être
indiquée lorsqu' exceptionnellement l'hémorragie persiste. Celle-ci nécessite de réaliser des
opacifications vasculaires, permettant dans
certains cas une embolisation vasculaire.
Au total, la plupart des blessés classés en
catégorie 1 vont subir une intervention
chirurgicale immédiate. Ainsi, lorsqu'il existe
un choc hémorragique, rien ne doit retarder
la chirurgie d'hémostase, même si elle est
grevée d'une mortalité élevée, car il s'agit
d'un traitement de sauvetage. La radiographie
de thorax de face et/ou l'échographie abdominale ne sont réalisées qu'en cas de doute
sur la localisation du saignement ou de
suspicion de lésion associée telle un pneumothorax avec un hémopéritoine massif.
L'échographie réalisée en Smur est une technique qui paraît séduisante. Elle reste à valider.
Le bilan lésionnel devra se poursuivre dès la
sortie du bloc opératoire si l'état respiratoire
ou hémodynamique le permet.
Catégorie II
Le polytraumatisé est dans un état précaire
et donne des signes compatibles avec un
saignement actif mais plus ou moins bien
stabilisé grâce aux manœuvres de réanimation
intensive : la pression artérielle chute au
ralentissement, ou à l'arrêt, du remplissage
vasculaire. L'objectif principal est alors de
localiser l'hémorragie afin d'en réaliser le
plus rapidement l'hémostase.
L'examen clinique est alors plus approfondi, à la recherche de lésions évidentes.
Ceci donne plus de temps pour réaliser, en
salle d'urgence, un bilan paraclinique plus
complet. Dans ce cadre, certains clichés sont
Catégorie 2
But : localiser rapidement la cause de l’hypoTA (hémorragie)
⇒ RP Face
⇒ Echo abdo
⇒ Bloc opératoire
⇒ Echocardio
privilégiés. Ce sont, dans l'ordre les clichés
du thorax, du bassin voire du rachis, et
l'échographie abdominale. D'autres examens
peuvent être également réalisés dans la salle
d'urgence : ce sont la fibroscopie bronchique,
l'UIV, et surtout, l'échocardiographie-Doppler
par voie transthoracique et/ou œsophagienne,
enfin l'échographie-Doppler des gros vaisseaux.
Ils doivent cependant être limités au strict
nécessaire afin de ne pas retarder les manœuvres
d'hémostase. Au terme de ce premier bilan,
certaines lésions exigent un traitement
chirurgical urgent. C'est le cas par exemple
des lésions vasculaires, des hémopéritoines…
Ailleurs, d'autres explorations seront réalisées.
La détresse circulatoire s'accompagne de
signes cardiaques droits. Les données de la
radiographie thoracique et de l'échocardiographie sont alors primordiales. Il s'agit le
plus souvent d'une tamponnade gazeuse
secondaire à un pneumothorax suffocant.
Ailleurs, l'échocardiographie révèle un
hémopéricarde avec tamponnade qui doit
être dans un premier temps ponctionné puis
exploré. Enfin, il peut s'agir d'une contusion
myocardique responsable d'une insuffisance
cardiaque aiguë qui nécessite l'usage des
catécholamines. Plus rarement, il existe un
hémomédiastin antérieur dû à une lésion du
tronc artériel brachio-céphalique ou d'une
artère mammaire interne qui comprime les
cavités droites ou une luxation cardiaque à
travers une déchirure péricardique. Ces deux
causes imposent l'intervention chirurgicale
en urgence.
Chez ces traumatisés classés en catégorie 2,
certaines hémorragies abdominales posent un
problème de localisation. Ce sont les hémorragies rétropéritonéales. En effet, en dehors
des signes cliniques abdominaux, l'échographie
abdominale est souvent normale ou non
contributive, l'importance de l'épanchement
ne correspondant pas à l'hémodynamique
précaire. C'est dans ce cas où l'on doit évoquer
l'hémorragie rétropéritonéale. En effet,
certaines hémorragies rétropéritonéales sont
responsables d'un mauvais état hémodynamique
imposant un remplissage vasculaire important.
La persistance du saignement doit alors faire
suspecter une lésion d'une artère pelvienne
ou lombaire et conduire à l'angiographie
diagnostique et éventuellement à l'embolisation
sous couvert de la poursuite de la réanimation.
Cependant, parmi les causes d'un état hémodynamique précaire, il ne faut pas oublier
une para ou une tétraplégie qui doit être
recherchée par un examen neurologique puis
confirmée par les clichés de rachis.
Au total, le polytraumatisé classé en catégorie 2 nécessite un premier bilan en salle
d'urgence. Celui-ci aboutit à la découverte de
lésions évidentes justifiant une intervention
chirurgicale et/ou la réalisation immédiate
d'investigations au premier rang desquelles
se placent l'angiographie diagnostique et
thérapeutique (lésions hémorragiques difficilement accessibles à la chirurgie). Ailleurs le
diagnostic reste hésitant. Dans ce cadre, il ne
faut pas hésiter à répéter certains clichés
(thorax) et des échographies pour apprécier
l'évolution. Finalement, la TDM a l'avantage
de permettre une exploration relativement
complète de la tête au pelvis. Elle impose
cependant le transport d'un malade mal
stabilisé et doit être réalisée en poursuivant
la surveillance et la réanimation.
Catégorie III
Le polytraumatisé est stabilisé. L'examen
clinique oriente alors les explorations. Le
nombre et la sophistication des examens ne
sont plus limités que par le facteur temps
imposé par les interventions chirurgicales
urgentes comme par exemple le parage d'une
fracture ouverte. Il importe cependant de ne
pas méconnaître certaines lésions cachées,
en particulier vasculaires. Le mécanisme et
la violence du traumatisme d'une part, le
terrain d'autre part doivent être appréhendés,
justifiant à eux seuls la réalisation d'une
TDM dont la demande pourrait paraître, à
première vue, comme abusive. Dans ce cadre, la tomodensitométrie "corps entier" est
certainement le meilleur moyen pour réaliser
un bilan suffisamment précis en un temps
relativement court.
Mai 2008 - N° 51
13
Médecine d’urgence
Au niveau thoracique, la tomodensitométrie
et/ou l'angiographie prennent tout leur intérêt.
La priorité de l'une par rapport à l'autre dépend
de plusieurs facteurs. Lorsque le traumatisé
avait initialement une détresse circulatoire
due à un hémothorax important qui continue
à être productif, l'artériographie doit être
préférée. Elle précise au mieux les lésions
vasculaires et peut conduire à une intervention
ou à une embolisation. Cette stratégie est de
loin la moins fréquente. Lorsque le traumatisé
avait, à l'inverse, une détresse respiratoire au
premier plan, la tomodensitométrie doit être
préférée, car elle précise au mieux les lésions
pariétales, pleurales, pulmonaires et diaphragmatiques. Lorsqu'il existe un faisceau d'arguments
cliniques et radiologiques en faveur d'une
lésion aortique ou des vaisseaux de la gerbe,
l'artériographie qui était encore récemment
considérée comme l'examen de référence
peut être remplacée par une TDM de dernière
génération ou une échographie par voie
transœsophagienne si le malade est intubé et
ventilé mécaniquement. A l'inverse, lorsqu'il
n'existe qu'un élargissement du médiastin, la
tomodensitométrie est généralement suffisante.
Enfin, la priorité d'un examen par rapport à
l'autre est également fonction de chaque cas,
de l'infrastructure hospitalière et de la disponibilité des appareils.
Le bilan lésionnel des blessés porteurs de
lésions thoraciques pariétales importantes et
stabilisées par une analgésie est précisé au
mieux par la tomodensitométrie. Celle-ci
doit être réalisée en urgence dans le cadre du
polytraumatisé et ce d'autant qu'il doit subir
une intervention chirurgicale sous anesthésie
générale ou qu'il est porteur d'un emphysème
sous-cutané. Elle permet également d'évaluer
l'importance d'une contusion pulmonaire
associée.
Certaines lésions abdominales posent un
problème diagnostique et de prise en charge.
Ce sont les ruptures pancréatiques et les
perforations d'organes. Elles sont souvent
insidieuses et de diagnostic difficile. En effet,
en dehors des signes cliniques abdominaux,
aucun examen biologique n'est spécifique,
l'échographie abdominale est souvent normale
ou non contributive et l'apparition du pneumopéritoine est fréquemment retardée et
manque également de spécificité. C'est dire
l'intérêt de compléter le bilan par une TDM
qui permet de révéler une lésion pancréatique, un petit pneumopéritoine ou un rétropneumopéritoine. Cependant, la persistance
de signes abdominaux associés à une TDM
normale ou montrant des lésions peu spécifiques ne doit pas stopper les investigations.
C'est alors que l'analyse du liquide de la
ponction dialyse du péritoine prend tout
son intérêt.
14
Mai 2008 - N° 51
Enfin, le polytraumatisé doit bénéficier
d'une antibiothérapie et d'une analgésie
précoces. La crainte de masquer les signes
cliniques pouvant permettre le diagnostic
lésionnel a longtemps conduit (7), et conduit
trop souvent encore, à négliger l'analgésie du
polytraumatisé. Ce piège devrait maintenant
définitivement être évité et cette attitude
tomber dans l'obsolescence. Deux études
contrôlées (ATTARD ET AL, Br Med J 1992,
Zoltie et Cust) ont clairement montré que la
précision et la rapidité diagnostiques
n'étaient pas altérées par l'administration
d'un analgésique morphinique par voie
parentérale lors des traumatismes de l'abdomen.
Il n'existe donc aucun justificatif à retarder
ou à proscrire la prescription analgésique
dans ce contexte. Zoltie et Cust (Ann R Coll
Surg Eng 1986), insistent sur le fait qu'une
analgésie de qualité peut même faciliter la
démarche diagnostique. Elle permet en effet
d'accroître la coopération du malade, permet
l'installation optimale de membres fracturés
et facilite la réalisation des investigations
radiologiques (radiographies standard, scanner....)
et/ou échographiques.
permet le plus souvent de corriger la détresse
neurologique et/ou respiratoire grâce à
l'intubation, la ventilation mécanique voire
l'exsufflation pleurale. A l'hôpital, c'est
surtout l'état hémodynamique qui va imposer
les priorités. Lorsque le collapsus persiste malgré
le remplissage et l'adrénaline (Catégorie 1),
seule une chirurgie immédiate peut sauver le
malade. En cas de doute sur la localisation
abdominale ou thoracique de l'hémorragie,
une échographie abdominale et/ou un cliché
de thorax de face sont réalisés sur le
brancard du Smur.
Lorsque la pression artérielle reste
difficilement maintenue par les manœuvres de
réanimation (Catégorie 2), et en fonction des
données cliniques, il faut penser d'abord à
l'hémorragie thoracique (cliché de thorax),
abdominale (échographie) et enfin rétropéritonéale (cliché du bassin) si les deux
premiers examens ont manqué de pertinence.
Ces quelques examens permettent le plus
souvent de choisir la méthode d'hémostase,
chirurgicale ou angiographique. Enfin,
l'échocardiographie permet de diagnostiquer
des causes moins fréquentes.
Conclusion
Lorsque la pression artérielle reste stable
(Catégorie 3), le bilan doit être d'emblée plus
Pour résumer, la prise en charge des précis. C'est tout l'intérêt de la TDM "corps
polytraumatisés par les équipes du Smur entier".
Catégorie 3
But : - faire le bilan le plus complet et le plus rapide possible,
- détecter les lésions cachées,
- les traiter,
- et traiter l’orthopédie.
⇒ RP Face
⇒ Echo abdo
⇒ TDM
Médecine d’urgence
Hémodynamique instable
Catégorie 2
Hémothorax +++
Drainage
Stabilisation
Stabilisation Drain thor.
> 2 litres
> 500 ml/h
Hémothorax
PNO
Thorax face
Echo abdo
Remplissage vasculaire
PNO
Péritoine +
Exsufflation
BLOC
Drain tho. OK
Catégorie 3
Lésions
associées
Autotransfusion BLOC
Hémodynamique instable
Catégorie 2
Hémothorax +++
Hémothorax
PNO -
Thorax face
Echo abdo
Remplissage vasculaire
Echocardio
Contusion
PNO
Tamponnade
Péritoine Ponction
péricardique
BLOC
Inotropes
Hémodynamique instable
Hémothorax +++
Thorax face
Echo abdo
Remplissage vasculaire
Valves
Inotropes
Vasodilatateurs
BLOC
Catégorie 2
Hémothorax
PNO -
PNO
Péritoine -
Bassin et
Rachis
cervicales
Artériographie, Embolisation
Mai 2008 - N° 51
15
Médecine d’urgence
La prise en charge du traumatisme crânien:
le point de vue de l’urgentiste
Ph Dabadie1, K Sénamaud1, ME Petitjean1, K Tazarourte2.
Le traumatisme crânien grave (TCG) est un problème majeur de santé publique tant en
raison de sa fréquence que des coûts de santé qu’il engendre. Les TC graves sont la
première cause de mortalité chez l'adulte de moins de 40 ans, mais aussi de handicap et
d'années de vie perdues. La précocité et la qualité de la prise en charge dans les heures
qui suivent le TCG sont essentielles au devenir du patient
En introduction
L’incidence annuelle des TCG (définis
par un Glasgow Coma Score GCS ≤ 8, ou
avec des lésions cérébrales potentiellement
évolutives) est estimée à 8,5/100 000 patients,
avec une mortalité qui se situe aux alentours
de 35-50 % [1]. La précocité et la qualité de
la prise en charge dans les heures qui suivent
le TCG sont essentielles au devenir du
patient [2]. Dans une étude rétrospective,
devenue référence incontournable, une simple
hypotension préhospitalière (Pression artérielle
systolique -PAS- < 90 mmHg) double la
mortalité d’un TCG [3].
Des étapes majeures ont été franchies, ces
dernières années, dans la compréhension de la
pathogénie des lésions cérébrales primaires et
secondaires et dans la physiopathologie de
l'hypertension intracrânienne. La prise en
charge initiale des TC graves doit s'appuyer
maintenant sur ces résultats. Celle-ci reste
simple, standardisée, avec comme objectif
principal, dans les premières heures, la
correction des facteurs d'agression cérébrale
secondaire (hypotension et hypoxémie en
particulier). Cet objectif ne peut être atteint
qu'après une évaluation rapide, clinique
(neurologique, respiratoire et hémodynamique)
et tomodensitométrique, des patients victimes
d'un TC grave.
Des recommandations françaises pour la
pratique clinique ont été publiées en 1999 [4].
Elles restent d’actualité pour la prise en
charge des TCG. Il est bien démontré que
l’application des recommandations permet de
réduire de façon très importante la mortalité
des TCG [5]. Le système français de médicalisation préhospitalière doit permettre une
prise en charge optimale de ce type de
pathologie, et pourtant un certain nombre de
travaux tendent à montrer que la prise en
charge du TCG par le SAMU peut être
singulièrement améliorée.
1
2
La médicalisation de la prise en charge
2) des caractéristiques de la force appliquée
initiale de ces patients apparaît ainsi indis- (intensité, durée),
pensable, le plus rapidement possible, sur les
3) de l'étendue de la surface d'application
lieux de l'accident, jusqu'au transfert secondaire de la force.
des patients vers un centre de référence multidisciplinaire (réanimation, neuroradiologie,
Ces lésions directes sont focalisées et
neurochirurgie).
évolutives dans le temps. Il peut s'agir de
plaies du cuir chevelu, de fractures (embarrure,
Analyse des lésions
plaie crâniocérébrale), d'hémorragies extracérébrales (hémorragie sous-arachnoïdienne,
crânio-encéphaliques
hématome extradural), de contusions et
On distingue les lésions directes en relation hématomes intracérébraux.
avec l'impact du crâne contre l'agent traumaLes lésions indirectes sont liées à un
tisant et les lésions indirectes par mouvement déplacement rapide de la tête avec mobilisation
de la tête, secondaire à des phénomènes des masses cérébrales par rapport à la boite
d'accélération ou de décélération. Ces deux osseuse. Le mouvement de la tête est d'autant
types de lésions sont souvent associés [6].
plus important que le rachis cervical est souple
La gravité des lésions directes dépend :
et que la direction du coup passe en dehors
1) de la nature des tissus lésés et en parti- du centre de gravité de la tête. On distingue
culier de leurs propriétés viscoélastiques,
les lésions après mouvement de translation
Département Urgences Adultes – Hôpital Pellegrin – CHU Bordeaux - place Amélie Raba Léon - 33076 Bordeaux cedex
Pôle Urgence SAMU 77-SMUR -SAU- Réanimation Hôpital Marc Jacquet 77000 Melun& DAR Le Kremlin Bicêtre - CHU Le Kremlin Bicêtre 94
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Mai 2008 - N° 51
Médecine d’urgence
ou de rotation. Ces mouvements sont responsables de lésions de coup et de contrecoup au
niveau du cortex opposé, ou de lésions de
cisaillement des structures profondes à
l'origine des lésions axonales diffuses.
Pathogénie des lésions cérébrales
On distingue les lésions primaires liées au
traumatisme lui-même et les lésions cérébrales
secondaires qui peuvent se développer dès
les premières minutes et vont aggraver le
pronostic [7].
Les lésions primaires
Les lésions directes ou indirectes après le
traumatisme vont entraîner des lésions cellulaires (neuronales ou gliales) ou vasculaires
plus ou moins importantes, réversibles ou non.
Les lésions primaires peuvent être focales ou
diffuses selon les mécanismes en cause
(Schéma 1).
Les lésions secondaires
Les lésions secondaires peuvent apparaître
dans les minutes qui suivent le traumatisme
et vont toujours aggraver les lésions initiales
du tissu nerveux. Le dénominateur commun à
ces lésions secondaires est l'ischémie cérébrale
dont les causes sont à la fois intracrâniennes
(HTIC, œdème cérébral) et systémiques
(hypoxie, hypotension) [8,9].
Les mécanismes de ces lésions secondaires
sont complexes et intriqués. Le relargage de
neurotransmetteurs excitateurs comme le
glutamate, l'augmentation du calcium libre
cytosolique, la production de radicaux libres
provoquent une cascade d'évènements qui
entraînent des lésions secondaires des
membranes et des organites intracellulaires.
Celles-ci conduisent au développement d'un
œdème cérébral et modifient l'autorégulation
de la circulation cérébrale (schéma 2).
Traumatisme crânien
Lésions vasculaires
(obstruction, ouverture
de la barrière hémo-encéphalique)
Vasoparésie
Lésions cellulaires
(dépolarisation de la membrane, altération
métabolique
Oedème vasogénique
Oedème cytotoxique
Schéma 1 : Les lésions primaires
Conséquences systémiques
TRAUMATISME CRANIEN
Lésions cérébrales
(cellulaires, vasculaires)
(œdème, hématome)
Libération de neuromédiateurs (glutamate)
Augmentation du calcium intracellulaire
Production de radicaux libres, de NO, ...
Modification de la vasomotricité
Perte de l'autorégulation
Schéma 2 : Les lésions secondaires
Oedème
Hypertension intracrânienne
ISCHEMIE
CEREBRALE
RAPPEL PHYSIOLOGIQUE
Pression
Volume élevé
Pression intra-crânienne
50 mm Hg
Physiopathologie de
l’hypertension intracrânienne
Rappels de physiologie (schéma 3)
Les structures intracrâniennes sont enfermées
dans une boite inextensible. Le contenu crânien
représente 1000 à 1500 ml environ chez l'adulte
et est constitué de trois volumes : (i) le parenchyme cérébral qui a, seul, des propriétés
plastiques (70 à 80 % du volume total), (ii) le
LCR et l'eau extracellulaire (23 à 25 %), et (iii)
le volume sanguin cérébral (VSC) (5 à 7 %).
Le volume total est constant (loi de MonroeKellie) et la pression intracrânienne (PIC)
dépend des variations de ces trois volumes.
Volume normal
Pression intra-crânienne
10 mm Hg
Volume
Relation pression - volume
Schéma 3 : physiopathologie de l’hypertension intracrânienne
Mai 2008 - N° 51
17
Médecine d’urgence
Dans les conditions physiologiques, la
PIC est déterminée par l'équilibre des débits
d'admission et de sortie de l'enceinte crânioencéphalique, c'est à dire par le débit de
LCR et le débit sanguin. La PIC se définit
comme étant la pression hydrostatique du
LCR, soit en position couchée 10 mmHg
environ [10].
La circulation cérébrale a pour fonction
première d'apporter les métabolites essentiels
à la vie du neurone (oxygène et glucose). Cet
apport est assuré par un débit sanguin cérébral
(DSC) considérable (50 ml.min-1.100 g-1).
Le DSC est sous la dépendance de la pression
de perfusion cérébrale (PPC) et des résistances
vasculaires cérébrales (RVC). La PPC est
déterminée, en pratique, comme la différence
entre la pression artérielle moyenne (PAM)
et la pression intracrânienne moyenne (très
proche de la pression veineuse cérébrale) :
DSC = PPC / RVC = [PAM - PICm] / RVC
L'autorégulation de l'hémodynamique
cérébrale permet de maintenir un DSC constant,
en faisant varier le calibre vasculaire ; malgré
des variations de la PPC, le DSC reste stable
entre 50 et 150 mmHg de PAM. En dessous
de 50 mmHg, il diminue proportionnellement à
la PAM. Le DSC est également très sensible
aux variations de la PaCO2. Le CO2 (produit
du métabolisme cérébral) est l'un des agents
vasomoteur les plus actifs ; toute élévation
de la PaCO2 s'accompagne d'une augmentation
du DSC et inversement [11].
Il existe normalement un couplage entre
les besoins métaboliques liés à l'activité
neuronale et la fourniture des substrats. Si le
métabolisme cérébral augmente, le DSC
s'adapte pour assurer un apport suffisant de
substrats. Le métabolisme cérébral peut être
évalué à l'aide de paramètres fonctionnels
comme la consommation cérébrale d'oxygène
(CMRO2). Selon le principe de Fick, la
CMRO2 est égale au produit [DSC • DAVO2]
soit 3,4 ml.min-1.100 g-1 où DAVO2 est la
différence des concentrations en oxygène
dans le sang artériel et dans le sang veineux
jugulaire. La mesure des saturations en O2
du sang artériel (SaO2) et du sang veineux
jugulaire (SjO2) permet de calculer la DAVO2
et évalue indirectement le couplage débit
sanguin-métabolisme cérébral [12] :
DAVO2 = CaO2 - CjO2 = 1.34 •
[Hémoglobine] • (SaO2 - SjO2)
SjO2 = k • CMRO2 / DSC = 62 ± 7 %
L’hypertension intracrânienne
post-traumatique
Cette HTIC est liée à l'apparition d'un
nouveau volume qui va modifier l'équilibre
des pressions. Au cours et au décours d'un
traumatisme crânien, le néovolume peut
correspondre à une contusion parenchymateuse, un hématome sous-dural, extradural
ou intraparenchymateux, un œdème cérébral,
une augmentation du volume de LCR
(hydrocéphalie), ou une augmentation du VSC
par perte de l'autorégulation du DSC [13,14].
Le développement de ces lésions expansives entraîne une augmentation de la PIC.
Les modifications du VSC et du LCR
(compression du lit veineux, résorption accrue
de LCR, déplacement rostral d'un volume de
LCR) permettent dans un premier temps de
maintenir constant le volume total, mais ces
mécanismes compensateurs peuvent être
débordés et une HTIC apparaît alors.
L'augmentation de la PIC se fait selon la
courbe de Langfitt d'allure exponentielle.
Pour une même variation de volume, la PIC se
modifie peu au début (stade de compensation
spatiale) et beaucoup dans un second temps
(stade de décompensation) [15].
Autre conséquence du développement
d'une lésion expansive, des déplacements
parenchymateux, ou engagements, peuvent
se produire des zones de haute pression vers
celles de basse pression. On distingue les
engagements sous la faux du cerveau, les
engagements des lobes temporaux dans le
foramen ovale (avec compression du nerf
moteur oculaire commun et du tronc cérébral) et plus rarement l'engagement des
amygdales cérébelleuses dans le trou occipital.
Ces déplacements entraînent des lésions
ischémiques dramatiques du tronc cérébral
et de certains territoires vasculaires.
Conséquences circulatoires
et métaboliques cérébrales
La CMRO2 diminue avec la profondeur
du coma. Si le couplage DSC-métabolisme
reste fonctionnel, le DSC diminue également
de façon parallèle. En fait, après un TC
grave, ce couplage est perturbé dans plus de
la moitié des cas. On peut ainsi observer des
Ouverture des yeux
Mai 2008 - N° 51
Évaluation des traumatisés
crâniens graves
La mortalité globale à 6 mois des traumatisés
crâniens graves est de 35% environ avec des
différences importantes d'un groupe de patients
à un autre [18]. L'examen clinique et tomodensitométrique permet d'évaluer la gravité
du traumatisme et dicte la stratégie de prise
en charge initiale de ces patients. La mesure
de la PIC s'impose chez tout TC grave en
présence de signes indirects d'HTIC ou
devant des lésions cérébrales potentiellement
évolutives.
Évaluation clinique
L'examen clinique doit être complet et
systématique chez tout traumatisé crânien.
L'analyse des fonctions respiratoires et
hémodynamiques doit être immédiate car
elle impose un certain nombre de mesures
thérapeutiques en urgence (intubation et
ventilation, remplissage vasculaire, ...) [19].
L'examen neurologique évalue le niveau de
conscience et recherche des signes de
localisation (modification pupillaire, déficit
sensitif ou moteur) ou de souffrance axiale
(réflexes du tronc cérébral). Le score de
Glasgow (GCS) permet une évaluation objective
et reproductible du niveau de conscience.
Réponse verbale
Réponse motrice
4 Spontanée
5 Orientée
6 A l'ordre
3 Au bruit
4 Confuse
5 Adaptée à la douleur (localisée)
2 A la douleur
3 Inappropriée
4 Flexion d'évitement
2 Incompréhensible
3 Réponse en flexion hypertonique
(décortication)
2 Réponse en extension
(décérébration)
1 Rien
1 Rien
Le risque essentiel du traumatisme
1 Rien
crânien est la survenue d'une hypertension
intracrânienne (HTIC) incompatible avec
une PPC suffisante.
Tableau 1 : score de Glasgow (GSC)
18
situations où le DSC est en excès par rapport
à la CMRO2 (situation d'hyperhémie) et favorise
l'hypertension intracrânienne, ou au contraire,
il est insuffisant (situation de bas-débit) avec
un risque d'ischémie. La mesure de la SjO2
évalue le couplage DSC-métabolisme, et à
un niveau de coma ou de CMRO2 donné, la
SjO2 varie comme le DSC. Ainsi, en clinique,
sa mesure pourrait permettre de distinguer ces
deux situations : une hyperhémie cérébrale où
la SjO2 est élevée (> 70%), une hypoperfusion
où la SjO2 diminue (< 54%) [16,12]. Cependant,
ces modifications hémodynamiques cérébrales
sont variables dans le temps et l'espace, et on
peut observer à un instant donné des zones
cérébrales en situation d'ischémie et d'autres
en situation d'hyperhémie [17].
Médecine d’urgence
Il repose sur l'analyse des réponses oculaires,
verbales et motrices. Le GCS a l'avantage
d'être simple et permet grâce à des examens
répétés de suivre l'évolution du TC. En
revanche, sa détermination peut être difficile
voire impossible lors de certaines circonstances
(sédation, intubation, déficit neurologique
associé) et la valeur prédictive du score est
dépendante du moment de sa réalisation
[17]. La relation entre le score initial et le
devenir du patient est faible ; par contre, le
score de Glasgow évalué secondairement,
après réanimation ou intervention neurochirurgicale, est un indicateur du risque de mortalité
(76% de mortalité avec un GCS à 3, 18%
avec un GCS entre 6 et 8 ) [18]. Les traumatisés
crâniens graves correspondent aux patients
dont le GCS, est compris entre 3 et 8.
Sur une cohorte de plus de 20 000 patients,
Davis et al ont validé l’intérêt pronostic
d’une cotation d’un GCS sur le terrain corrélé à
un GCS à l’arrivée à l’hôpital [20]. Dans ce
travail, le GCS coté entre 9 et 11 prédisait
une mortalité non négligeable, ce qui faisait
dire aux auteurs que les TC modérés (GCS
9-11) devaient parfois être considérés
comme des TCG. Le mauvais usage de la
cotation du score est récurrent y compris chez
les médecins urgentistes ou anesthésistes ; dans
une population d’internes d’anesthésie réanimation, 30 % d’entre eux ne savaient pas
coter avec précision un GCS [21].
Stratégie de la prise
en charge initiale des
traumatisés crâniens graves
Facteurs d’agression cérébrale secondaire
par l'hypertonie concomitante de la souffrance
cérébrale. Dans le cadre d'un polytraumatisme,
le traumatisme thoracique associé est toujours
un facteur péjoratif.
L'intubation trachéale, et la ventilation
artificielle, sont le plus souvent nécessaires,
et recommandées, à la phase initiale [19, 26].
Elle doit être réalisée avec un aide qui
contrôle la mobilisation du rachis cervical.
L'objectif est d'obtenir une PaCO2 voisine de
35 mmHg et une normoxie [27]. L'hypocapnie
modérée permet de diminuer le DSC et donc
le VSC et la PIC. Cet effet reste possible tant
que la vasoréactivité au CO2 est conservée.
La recherche et le drainage d'un éventuel
Contrôle de la fonction respiratoire
pneumothorax doivent être systématiques
La fonction respiratoire est toujours chez ces patients ventilés.
perturbée dans le cadre des TC graves. La
liberté des voies aériennes supérieures peut Les critères de l’intubation des TCG
être compromise par une obstruction liée à
Une étude rétrospective monocentrique
une régurgitation du contenu gastrique (sang,
liquide, aliments), à un fracas des maxillaires française s’intéressant à la prise en charge des
ou à une atteinte neurologique modifiant la TCG par les SMUR montrait que la prise en
cinétique laryngée et pharyngée. La mobilité charge préhospitalière médicalisée de ces patients
de la cage thoracique est en général limitée était efficace pour la correction de l’hypoxie.
l'ischémie cérébrale dont l'origine peut être
intracrânienne ou systémique. Un certain
nombre de facteurs d'agression cérébrale
secondaire ont été identifiés et l'objectif de la
prise en charge initiale d'un TC grave est de
les corriger le plus rapidement possible afin de
prévenir l'ischémie cérébrale [22, 23, 24, 25].
Parmi ces facteurs, ceux d'origine systémique
sont accessibles dès la phase préhospitalière.
L'hypotension artérielle et l'hypoxémie sont
deux situations particulièrement fréquentes
qui doivent être évitées ; elles multiplient par 2 le
taux de mortalité des TC graves (tableau 2).
Tableau 2 : facteurs d’agression cérébrale secondaire
Facteurs systémiques
Facteurs intracrâniens
Hypoxémie (PaO2 < 60 mmHg)
Hypertension intracrânienne
Hypotension artérielle (PAsys < 95 mmHg)
Syndrome de masse (hématome, contusion)
Hypercapnie (PaCO2 > 45 mmHg)
Œdème cérébral
Hypocapnie sévère (PaCO2 < 25 mmHg)
Hydrocéphalie
Anémie
Vasospasme
Hyperthermie
Crise épileptique
Hyper- ou Hypoglycémie
Troubles métaboliques cérébraux
Si le pronostic du TC reste dépendant de
l'importance de la lésion cérébrale primaire, Troubles hydroélectrolytiques
le rôle péjoratif des lésions secondaires est
Troubles de la coagulation
bien établi. Leur dénominateur commun est
Troubles de l'hémodynamique cérébrale
Infection
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Mai 2008 - N° 51
19
Médecine d’urgence
A l’arrivée à l’hôpital, le contrôle de la
capnie (PaCO2 35-40 mmHg) était effectif
pour 43% des patients. Les valeurs moyennes
d’hypo (29% des TCG) ou d’hypercapnie
(28% des TCG) étaient respectivement de
27 mmHg et 47 mmHg. L’usage du capnographe,
dans ce travail, n’était pas systématique [28]
mais il ne permet probablement pas de prédire
un niveau adéquat de PaCO2. Lors d’une phase
de transport d’une durée prévisible de plusieurs
heures (transfert secondaire par exemple) une
analyse des gaz du sang par prélèvement
artériel peut apparaître utile [29].
Coma (GCS ≤ 8)
Détresse respiratoire
PaO2 < 70 mmHg
PaCO2 > 45 mmHg
PaCO2 < 25 mmHg
Perte des réflexes laryngés
Convulsions
Nécessité d'une sédation
Traumatisme associé (facial, thoracique, ...)
Tableau 3 : critères d’intubation des TCG
Contrôle du système cardiovasculaire
Le traumatisé crânien grave présente une
hypertension artérielle et une tachycardie
d'origine adrénergique. Ces phénomènes sont
renforcés par les stimuli nociceptifs et exacerbés
par la souffrance axiale. L'hypovolémie,
toujours présente, est liée aux pertes hémorragiques et aux séquestrations liquidiennes,
en particulier dans le tube digestif.
La correction de l'hypovolémie doit être
débutée immédiatement et ce d'autant plus
rapidement que l'utilisation des agents
sédatifs s'impose. L'association hypovolémieagents anesthésiques ou analgésiques est
toujours potentiellement dangereuse et
nécessite la surveillance rapprochée de la
pression artérielle.
Le remplissage vasculaire constitue le
traitement initial des désordres hémodynamiques
chez ces patients. Les cristalloïdes isotoniques
(NaCl 0,9 %) peuvent être utilisés en
première intention, mais les colloïdes sont
en règle nécessaires pour corriger rapidement
une hypovolémie. Les concentrés globulaires
doivent être utilisés après 20 à 30% de perte
de la masse sanguine, afin de maintenir une
hémoglobine > 10g/dl. Le plasma frais doit
être apporté pour corriger un trouble de la
coagulation (consommation excessive de
facteurs, hémorragie importante).
Dans l’étude citée plus haut, le contrôle
de l’hypotension artérielle n’était pas assuré
par les SMUR. Plus exactement 30 % des
patients arrivaient à l’hôpital avec une hypotension artérielle qui n’existait pas au début
de la prise en charge. La présence d’un choc
hémorragique concernait moins d’un patient
20
Mai 2008 - N° 51
sur 4. Les auteurs estimaient que la sédation,
administrée pour tous les patients ventilés,
était probablement en cause. En effet, celle-ci
n’était jamais titrée et adaptée à la pression
artérielle des patients et aucun des patients
concernés n’avait bénéficié de l’usage de
drogues vasopressives [28]. La discussion
recommandait la titration des drogues sédatives
et l’utilisation plus large de la noradrénaline
afin de mieux contrôler la pression artérielle.
La mesure automatisée non invasive de la
pression artérielle trouve ses limites durant la
phase de transport du patient ; elle ne permet
pas de surveiller étroitement le niveau de
pression artérielle souhaité. Sous certaines
conditions, en particulier de ne pas perdre un
temps inutile, la pose d’un cathéter artériel
par voie fémorale en préhospitalier peut se
justifier [29].
Si la lutte contre l’hypotension est une
priorité, la question se pose de l’objectif du
meilleur niveau de pression artérielle
moyenne (PAM) à obtenir. En l'absence
d'études, le niveau recommandé de PAM
dans les premières heures post-traumatiques
est de 80 mmHg. Cependant, des travaux ont
montré qu'une valeur de 80 mmHg de PAM ne
permet aucunement de distinguer, à l'arrivée
à l'hôpital, les patients à haut risque d’ischémie
cérébrale des autres [30]. En effet, une
valeur isolée de PAM ne peut prédire la
pression de perfusion cérébrale (PPC) qui ne
dépend pas que de la valeur de la PAM mais
aussi de la valeur de la pression intracrânienne (PIC) : PPC=PAM-PIC. Dans cette
étude clinique, malgré une valeur moyenne
de PAM de 80 mmHg, 40% des patients
restaient à haut risque d’ischémie cérébrale.
Les enjeux cliniques sont importants : en effet
décider d’un niveau de PAM à 100 mmHg
pour tous les patients c’est mettre à l’abri du
risque ischémique ceux qui en ont besoin
(40%) mais cela peut être aussi d’exposer
à un risque inutile d’augmentation de l’hémorragie par l’hypertension ainsi créée ceux
qui n’ont pas besoin d’un tel niveau de
PAM (60% des patients). L’utilisation du
Doppler Trans-Crânien (DTC) dès l’arrivée à
l’hôpital [31], voire dès la phase préhospitalière, pourrait permettre très rapidement une
évaluation de l’hémodynamique cérébrale du
patient et d’adapter le meilleur niveau de
PAM nécessaire au patient.
Le Gold Standard en matière d’anesthésie
par intubation est l’induction à séquence
rapide, elle est la moins délétère pour le
contrôle de l’HTIC. Elle est généralisée dans
notre pays [4, 28].
L'objectif de la sédation est la diminution
de la CMRO2 dans les mêmes proportions
que le DSC, tout en maintenant la meilleure
PPC afin d'éviter l'ischémie cérébrale. La
diminution du DSC permet la réduction du
VSC et de l'HTIC. Les agents les plus utilisés,
en première intention, sont les benzodiazépines
(midazolam) ou le gamma-hydroxybutyrate
de sodium (Gamma OH®) associés à un
morphinique (fentanyl) [33,7]. Les barbituriques
(thiopental) ne sont utilisés qu'en deuxième
intention face à une HTIC avérée et sous
contrôle de la PPC, compte tenu de leurs
effets hémodynamiques ; il en est de même
du propofol.
Il existe d'autres moyens pour contrôler
une HTIC :
L’osmothérapie
La perfusion de mannitol à 20 % (0,5
g.kg-1) est intéressante dans les situations
critiques avec engagement lié à un hématome
extracérébral. Il trouve particulièrement son
indication dans l'attente d'une décompression
neurochirurgicale.
Mydriase aréactive et osmothérapie
Les Recommandations pour la Pratique
Clinique sont sans ambiguïté [4]. Elles
préconisent l'osmothérapie (mannitol 20% :
0,20 à 1 g/Kg soit 1 à 5 ml/Kg) en urgence
devant toutes anomalies pupillaires et/ou
dégradation de l’état neurologique non
expliquée par une cause extra-crânienne.
Entre 1994 et 1998, aucun des 65 patients
pris en charge par une équipe de SMUR, en
mydriase bilatérale après traumatisme crânien
et acceptés à l'hôpital de Bicêtre n'avait bénéficié d'osmothérapie pendant le transport [28].
Ces 65 patients sont tous décédés dans les
suites quels qu'aient été les traitements ultérieurs effectués à l'hôpital (osmothérapie
et/ou chirurgie). Cette méconnaissance de
l’usage de l’osmothérapie en urgence est
retrouvée dans une étude régionale récente ;
plus d’un tiers des 96 médecins interrogés ne
connaissaient pas les indications ou n’avaient
Contrôle de l’hypertension
jamais utilisé de mannitol (à fortiori de sérum
intracrânienne
salé hypertonique) [34]. Les principales explications notées par les auteurs étaient liées à un
L'hypocapnie modérée (35 mmHg) et la défaut de formation (les médecins étaient
sédation du patient sont les deux premières pourtant majoritairement titulaires de la
mesures mises en œuvre pour contrôler une capacité de médecine d’urgence) et un avis
ambigu de la part des neurochirurgiens.
HTIC [32].
Médecine d’urgence
Les effets bénéfiques éventuels du sérum
salé hypertonique ont été évalués dans différents
modèles expérimentaux. Les effets sur la
PIC sont comparables à ceux du mannitol
[35]. Ces solutions hypertoniques pourraient
être intéressantes, en préhospitalier, pour
restaurer rapidement la volémie chez un
polytraumatisé en état de choc hémorragique.
Transfert vers un
centre spécialisé
Les TC graves doivent être pris en charge
dans un centre spécialisé bénéficiant en
permanence d'un scanner et d'une équipe
neurochirurgicale et de neuroréanimation.
Les TCG doivent être admis en priorité
dans un hôpital spécialisé en neurotraumatologie [36]. Dans l’étude de Mac Kenzie, ce
sont les sujets jeunes et victimes d’un TCG
qui bénéficient le plus de l’amélioration du
pronostic d’un accueil en “ trauma center ”.
Dans l‘étude française précédemment citée,
11% seulement des patients admis relevaient
d’un bloc neurochirurgical en urgence
mais le délai moyen d’arrivée à l’hôpital
était de 3h00 ± 1h40 [28]. Ce temps d’acheminement est d’autant plus délétère que les
SMUR ne disposent ni de DTC ni d’un monitorage hémodynamique fiable.
Une enquête non publiée de la Caisse
régionale d’assurance maladie Ile de France
portant sur le 1er semestre 2001 montrait que
parmi 250 TCG pris en charge par les SAMU,
la moitié effectuait un parcours impliquant
au moins une étape intermédiaire avant leur
hospitalisation et 25 % étaient hospitalisés dans
un hôpital ne disposant pas des capacités de
monitorage neurologique multimodal.
Devant des signes neurologiques laissant
craindre une lésion expansive chirurgicale, le
transport (toujours médicalisé) du patient doit
être réalisé le plus rapidement possible, soit
directement des lieux de l'accident, soit à
partir de l'hôpital de proximité. Dans cette
situation, l'hélicoptère est souvent le moyen
de transport le plus rapide et le plus adapté.
Dans les autres cas, la décision de transfert
est prise après un premier bilan clinique
et radiologique, réalisé dans l'hôpital de
proximité.
Concernant les TC de gravité moyenne,
leur transfert dans un centre spécialisé doit
être envisagé devant [26] :
- une altération de la conscience,
- une lésion neurochirurgicale,
- toute aggravation secondaire,
- des signes tomodensitométriques d'HTIC,
- une embarrure ou une fracture de la
base du crâne,
- un polytraumatisme.
Le SROS de 3ème génération a dû être écrit
en ce sens. Le décret du 22 mai 2006 et les
circulaires d’application de février 2007 nous
invitent à nous organiser en réseau. La filière de
prise en charge des TCG en fait partie intégrante.
Conclusion
Les résultats, appréciés par le Glasgow
Outcome Scale (GOS), de la prise en charge
des TC graves retrouvent un taux de mortalité
entre 30 et 40%, un état végétatif entre
1 et 3%, une atteinte sévère entre 10 et 20%,
une atteinte modérée entre 20 à 25 % et
enfin des bons résultats dans 20 à 25%
[37, 18, 20, 1]. Il est maintenant admis que
la prise en charge initiale de ces patients
est déterminante pour leur devenir. Le
respect de “ l’heure d’or ” fait partie
intégrante de la thérapeutique [38].
L'évaluation clinique et radiologique du
TC, le contrôle rapide des fonctions
respiratoires et circulatoires sont des
impératifs à mettre en œuvre systématiquement, sur les lieux de l'accident et
jusqu'à l'arrivée dans le centre spécialisé.
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Mai 2008 - N° 51
21
Médecine d’urgence
Les tachycardies à complexe large
A.G.M. Aya, P.G. Claret, J.E. de La Coussaye
Division Anesthésie - Réanimation - Douleur - Urgences, GHU Caremeau, Place du Pr Robert Debré, 30029 Nîmes cedex 9, France.
Les tachycardies à complexes larges regroupent un ensemble hétérogène d'arythmies
caractérisées par une fréquence cardiaque supérieure à 100 battements par minute et par un
complexe QRS dont la durée est supérieure à 120 ms. Elles peuvent être classées selon
la durée de la tachycardie (tachycardies non soutenues vs tachycardies soutenues), ou selon
l’aspect des complexes QRS (tachycardies monomorphes vs tachycardies polymorphes).
La tolérance est également un facteur primordial. En
effet, une mauvaise tolérance impose une cardioversion
en urgence.1 En revanche, lorsque la tolérance est
bonne, le pronostic péjoratif lié à certaines formes de
tachycardie à complexe large ou à leurs étiologies et les
différences de traitement selon leurs mécanismes
électrophysiologiques justifient un diagnostic rapide, et
le plus précis possible. Schématiquement, les tachycardies
polymorphes soutenues sont en règle mal tolérées et
imposent après le CEE, au même titre que celles non
soutenues, la mise en place d'un traitement pour éviter les
récidives précoces. A l'inverse, les tachycardies soutenues
bien tolérées nécessitent un diagnostic ECG le plus
complet possible pour leur traitement immédiat d'une part,
mais afin d'aider le cardiologue à en prévenir les récidives
d'autre part. Enfin, des recommandations internationales récentes regroupant les experts des sociétés savantes
américaines et européennes ont été récemment publiées,2-6
cette revue s'en inspirera donc largement.
La prise en charge des tachycardies
à complexes larges mal tolérées
Toute tachycardie mal tolérée doit être traitée de
manière urgente par choc électrique externe. La mauvaise
tolérance clinique traduit une baisse aiguë et importante
de la perfusion cérébrale du fait d’un effondrement
du débit cardiaque. Celui-ci peut être soit la conséquence directe du trouble du rythme lorsque la
fréquence ventriculaire est très élevée et limite le
remplissage ventriculaire, soit la conséquence d’une
cardiomyopathie ou d’une affection cardio-pulmonaire
limitant l’adaptation du débit cardiaque aux besoins de
l’organisme. La prise en charge comporte deux
orientations principales : réduire en urgence la tachycardie, et en prévenir les récidives (Figure 1).
Réduction en urgence de la tachycardie
Figure 1
l’opposition qui existe entre d’une part la sécurité, au
moins théorique, qu’offre une intubation en séquence
rapide utilisant étomidate ou propofol et succinylcholine. Elle présente des avantages du point de vue
de l’hématose, de la protection des voies aériennes
contre l’inhalation et de la possibilité d’une prise en
charge immédiate en cardiologique interventionnelle
pour reperfusion myocardique dans le cadre d'une
tachycardie survenant à la phase aiguë d'un
infarctus du myocarde. A l'inverse, les stimulations
sympathiques et les conséquences neuro-endocrines et
hémodynamiques de ces protocoles anesthésiques
peuvent paraître lourds pour un geste extrêmement
bref. Les propositions suivantes peuvent cependant être
formulées.8 Une anesthésie générale avec induction en
séquence rapide utilisant étomidate et succinylcholine devrait être proposée à la phase aiguë de
l'IDM et au patient dont l’état hémodynamique est
précaire et chez qui l’on ne peut espérer une amélioration hémodynamique suffisante du simple fait de la
réduction de la tachycardie, et dans les situations à haut
risque de régurgitation (obésité, grossesse, hernie
hiatale, diabète et prise récente d’aliments solides). Dans
les autres cas, une sédation pourrait être effectuée
par une injection lente et titrée de propofol à la dose
de 0,8 mg/kg (0,5 mg/kg chez le sujet âgé).
La réduction de la tachycardie mal tolérée doit être
faite par choc électrique externe (CEE). Des recommandations ont été publiées quant aux modalités de la
cardioversion transthoracique dans le traitement des
troubles du rythme mal tolérés.5,6 Ainsi, l’énergie
délivrée lors du premier choc est de 50 à 100 J en cas
de TSV ou de flutter atrial, de 100 à 200 J en cas de
FA ou de TV monomorphe, 200 J en cas de TV
polymorphe. Chez le sujet inconscient, le choc électrique
doit être appliqué d’emblée à 360 J (défibrillateur
monophasique) selon les recommandations 2005 de
prise en charge de l'arrêt cardiaque. En revanche, le
sujet conscient doit bénéficier d’une sédation ou d’une
anesthésie générale préalable, le CEE étant générateur Prévention des récidives de tachycardie
d’une douleur intense comparable à celle d’une incision
chirurgicale, même si elle ne dure qu’une seconde.7
Après réduction de la tachycardie, l’établissement
Cependant, à cause de la brièveté de la stimulation d’un diagnostic est une étape nécessaire au choix des
douloureuse, les modalités de cette sédation sont modalités de prévention des récidives de tachycardie. Les
controversées. La discorde porte principalement sur tachycardies à complexes larges mal tolérées sont les
22
Mai 2008 - N° 51
TV polymorphes (notamment la torsade de pointes) et les
tachycardies auriculaires sur syndrome de WolffParkinson-White ayant un faisceau de Kent à période
réfractaire courte, et toutes les tachycardies rapides
survenant sur cœur pathologique ou dans des conditions
de mauvais remplissage ventriculaire. Dans ce dernier
cas, l’optimisation des conditions de charge ventriculaire et les mesures de traitement spécifique à la cardiopathie sous-jacente sont des mesures indispensables
dans la prévention des récidives immédiates.
Fibrillation ventriculaire réduite
La prévention de la récidive dépend de la cardiopathie en cause. Dans le cadre de l'infarctus du myocarde,
c'est l'amiodarone avec souvent des ß-bloquants qui est
recommandée (Grade B).4 Au cours d'un orage rythmique
chez un patient porteur d'un syndrome de Brugada, c'est
l'isoprénaline ou la quinidine qui est proposée (Grade C).
Torsades de pointes
La torsade de pointes est une entité particulière de TV
habituellement non soutenue, polymorphe, associée à
un allongement congénital ou acquis de l’intervalle QT.
Elle est la conséquence d’une canalopathie de
déterminisme génétique portant sur les canaux
sodiques ou calciques (syndrome du QT long
congénital : syndrome de Romano-Ward ou syndrome
de Lange-Nielsen),9 ou de l’effet d’agents pharmacologiques allongeant la repolarisation chez les sujets
susceptibles (syndrome du QT long acquis). 10
Le syndrome du QT long congénital est en fait un
Médecine d’urgence
ensemble de syndromes ayant en commun l’allongement
de la repolarisation, et se distinguant les uns des autres par
la nature des canaux altérés, la nature de cette altération,
les circonstances cliniques de survenue des torsades de
pointes, les signes cliniques associés, le pronostic
spontané et les modalités du traitement. Le diagnostic
du QT long est basé sur la démonstration d’un
allongement significatif (> 440 msec) de l’intervalle
QT corrigé (formule de Bazett) sur l’ECG en rythme
sinusal (en dehors de la torsade de pointe). Bien que
le risque de survenue d’une torsade de pointe soit
d’autant plus important que l’intervalle QT est allongé,
c’est la dispersion spatiale de l’intervalle QT qui représente le facteur déterminant l’initiation et le maintien de
la réentrée qui caractérise la torsade de pointes.
En l'absence de traitement étiologique, les torsades
de pointes ne demandent qu'à récidiver rapidement et
à dégénérer en fibrillation ventriculaire, plus particulièrement en cas d’allongement acquis du QT, et lorsque
la réduction n’a pas été spontanée mais obtenue par un
CEE. Aussi, les bradycardies doivent être accélérées,
au besoin à l'aide d'un entraînement électrosystolique
par voie endocavitaire ou transthoracique externe à une
fréquence de 100 bpm (Grade A), à défaut avec une
administration continue d'isoprénaline (Grade B).4
L'hypokaliémie ou l'hypocalcémie doivent être corrigées
(Grade A). Le sulfate de magnésium s'est avéré très
efficace dans ce type de dysrythmie. Il est utilisé en
première intention à la dose de 1,5 à 3 g en intraveineux
lent, dose qui peut être renouvelée dans l'heure (Grade B).
Les médicaments qui favorisent l’allongement du QT
doivent être arrêtés (Grade A). En cas de récidive,
une accélération de la fréquence ventriculaire afin de
raccourcir l’intervalle QT à l’aide d’une sonde
endocavitaire d’entraînement électro-systolique doit
être envisagée (Grade B). A l’inverse, les torsades de
pointes survenant au cours des syndromes du QT long
congénital sont plutôt favorisées par une augmentation
de l’activité catécholergique. Les β-bloquants sont
parfois efficaces. Si le patient est connu pour avoir
un QT long de type 3, la lidocaïne s'est avérée
efficace (Grade C). En tout état de cause, ces
syndromes du QT long congénitaux doivent être pris en
charge par des cardiologues spécialisés. En effet,
l’échec du traitement médicamenteux amène à indiquer
la mise en place d’un défibrillateur implantable.11
Les TV polymorphes avec intervalle QT normal
Comme les torsades de pointes, ces tachycardies
sont souvent non soutenues. Elles surviennent
essentiellement au cours des cardiopathies notamment
ischémiques, mais peuvent être également idiopathiques
(TV polymorphe idiopathique, TV catécholergique).
La réduction repose sur le CEE et la prévention des
récidives immédiates sur les ß-bloquants en cas d'origine
ischémique (Grade B), dans l'attente d'une coronarographie à réaliser dans des délais courts (Grade C).
Une dose de charge d'amiodarone est également proposée
en cas de QT strictement normal (Grade C).4
Tachycardie supraventriculaire et fibrillation auriculaire
sur syndrome de Wolff-Parkinson-White
Le syndrome de Wolff-Parkinson-White se
caractérise par l’existence d’au moins une voie
accessoire de conduction auriculo-ventriculaire qui
court-circuite la voie nodo-hissienne dans le sens
oreillette-ventricule. La fréquence ventriculaire ne
dépend alors plus que de la période réfractaire
antérograde de la voie accessoire, et peut de ce fait
être très élevée. Ceci explique la mauvaise tolérance d’une
tachycardie ou d’une fibrillation auriculaire survenant
dans ce cadre pathologique, et le risque permanent
de transformation en fibrillation ventriculaire. Un
choc électrique externe immédiat doit alors être préféré
à toute autre thérapeutique (Grade B). La prévention
des récidives de tachycardie ou de fibrillation doit ensuite
être faite sur la base de la nature de ces dysrythmies. De
nombreux antiarythmiques peuvent être utilisés, dont
l'amiodarone ou éventuellement un antiarythmique
de la classe IC comme le flécaïnide. L'ablation du ou
des faisceaux accessoires notamment par radiofréquence reste la méthode de prévention du risque de mort
subite la plus appropriée chez ces sujets (Grade B).1
La prise en charge des tachycardies
à complexes larges bien tolérées
La bonne tolérance de la tachycardie laisse le
temps de la discussion diagnostique permettant ainsi
le choix des moyens thérapeutiques les plus adaptés.
Le tableau clinique et les données électrocardiographiques constituent la base de l’approche
diagnostique (Figure 1).
Diagnostic clinique
La présentation clinique est non spécifique,
variable selon la durée de la tachycardie, la fréquence
ventriculaire, l’existence d’une cardiopathie sous-jacente,
de troubles acido-basiques ou hydro-électrolytiques,
et les traitements en cours. Schématiquement,
deux situations sont possibles. La première est celle
du sujet conscient se plaignant de palpitations et de
douleurs thoraciques, attirant alors d’emblée l’attention
vers le cœur et poussant à réaliser un ECG. La
notion d’antécédents d’épisodes de syncopes, leurs
caractéristiques et les signes précédant, accompagnant
et suivant ces épisodes confortent la suspicion de
l’origine cardiaque du problème et permettent le
diagnostic différentiel notamment avec les convulsions.
Ainsi, une perte de connaissance brève (5 à 22 sec),
déclenchée par la douleur, l’exercice, la miction, la
défécation, le stress intense, précédé ou s’accompagnant de nausées et de sueurs est très vraisemblablement une syncope. La deuxième situation est celle
du sujet pris en charge pour mort subite. L’obtention
d’un tracé de scope permet de reconnaître la tachycardie à
complexe large et la priorité doit alors être donnée à la
défibrillation, reléguant au second plan la discussion
diagnostique sur le type, le mécanisme, l’étiologie, de
même que le traitement étiologique.
L’évaluation initiale comporte l’interrogatoire du
sujet et/ou de sa famille, l’examen physique, et un ECG,
surtout chez le sujet âgé.12 Une origine cardiaque
peut être suspectée lorsque la syncope survient à
l’effort ou au décubitus, lorsqu’elle survient à l'emporte
pièce, sans prodromes ou est précédée d’un flou
visuel ou de palpitations, et lorsqu’elle s’accompagne
de douleurs thoraciques ou de convulsions ou
d'antécédents personnels ou familiaux de syncope
ou de mort subite.
Diagnostic électrocardiographique
Le diagnostic électrocardiographique nécessite de
disposer d'un ECG à 12 dérivations avec un enregistrement long de la dérivation DII (DII long), et si
possible, d’anciens tracés ECG du patient. Le principal
problème est de faire la différence entre une tachycardie ventriculaire (TV) et une tachycardie supraventriculaire (TSV) avec préexcitation ventriculaire ou
avec bloc de branche acquis ou fonctionnel phase 3.
Si le patient est porteur d'un bloc de branche ayant la
même morphologie en tachycardie dans toutes les
dérivations, la tachycardie a de fortes chances d'être
d’origine supraventriculaire. Cependant, ceci n'est
pas toujours simple, d'autant que des critères habituels
de TV peuvent être pris en défaut telles la largeur de
QRS au delà de 140 msec et les déviations axiales
extrêmes. Le problème est tel qu’un enregistrement
oesophagien peut s’avérer incontournable pour différentier la TV de la TSV, en permettant la visualisation
des ondes P. En 1991, Brugada et Coll.13 ont proposé
un algorithme à partir de 554 tachycardies à
complexe large dont 384 TV et 170 tachycardies
supra-ventriculaires authentifiées par l'exploration
électrophysiologique.
1°/ L'absence de complexe RS dans toutes les
dérivations précordiales signe la TV avec une sensibilité de 21% et une spécificité de 100%. La
morphologie QR, QRS, QS, R monophasique ou
rSR ne sont pas considérés comme un aspect RS.
2°/ Lorsqu'au moins un complexe RS est présent
dans les dérivations précordiales, une largeur mesurée
du début de l'onde R jusqu'à la partie la plus profonde
de l'onde S supérieure à 100 msec signe la TV. La
sensibilité est de 66% et la spécificité à 98%.
3°/ La dissociation auriculo-ventriculaire signe la TV.
Elle n'est cependant reconnaissable sur l'ECG de surface
que dans 21% des cas. L'utilisation de ces 3 critères
donne une sensibilité de 82% et une spécificité de 98%.
4°/ Enfin, en cas de non réponse à ces 3 premiers
items, les critères morphologiques classiques des
dérivations V1 et V6 donnent une sensibilité de
98.7% et une spécificité de 96.5% pour le diagnostic
de TV et une sensibilité de 96.5% et une spécificité de
98.7% pour le diagnostic de tachycardie supraventriculaire. Ces critères morphologiques sont les
suivants. En cas de tachycardie avec un aspect de
retard droit, sont en faveur d'une TV, en V1, une
onde R monophasique ou un aspect QR ou QS, et en
V6, une onde R monophasique, un aspect QR ou QS ou
une R/S < 1 ; sont plus en faveur d'une tachycardie
supra-ventriculaire avec un bloc de branche droit un
aspect triphasique en V1 et/ou V6. En cas de tachycardie avec aspect de retard gauche, sont en faveur
d'une TV, en V1, une onde R durant plus de 30 msec
ou plus de 60 msec jusqu'au point le plus bas de
l'onde S et en V6 un aspect QR ou QS.13 Un algorithme schématique mais simple est proposé sur la
figure 1 pour aider à cette approche diagnostique.
La distinction entre TV et TSV est fondamentale, car
l’adéquation et l’efficacité des traitements notamment
préventifs en dépendent. Aussi, lorsque le diagnostic ECG
est difficile, l’on peut s’aider des manœuvres vagales
au cours de l’enregistrement de l’ECG pour évaluer
l’implication de la voie nodo-hissienne dans le mécanisme
de la tachycardie et, par conséquent, spéculer sur son type.
Celles-ci peuvent être réalisées par le massage sinocarotidien ou, en cas d'échec par l'injection d'adénosine (ATP - Striadyne®) en l'absence de contre-indication.
Ces manœuvres peuvent générer trois types de
réponses sur le plan rythmique :
- la tachycardie se ralentit transitoirement et les
ondes P sont alors bien visibles : il s'agit d'une tachycardie atriale;
- la tachycardie s'arrête brusquement : c'est le
plus souvent une tachycardie jonctionnelle ou atriale
impliquant le noeud AV ;
- la tachycardie n'est pas modifiée : c'est en faveur
d'une tachycardie ventriculaire.
Le compte des auriculogrammes et des ventriculogrammes donne également une indication sur le
type de tachycardie :
- Auriculogrammes > Ventriculogrammes : la
tachycardie est auriculaire,
- Auriculogrammes < Ventriculogrammes : la
tachycardie est ventriculaire,
Mai 2008 - N° 51
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Médecine d’urgence
- Auriculogrammes = Ventriculogrammes : la
tachycardie est jonctionnelle, mais peut aussi être atriale
avec une conduction antérograde 1 pour 1 ou ventriculaire
avec une conduction rétrograde 1 pour 1.
Tachycardie irrégulière à complexes larges et monomorphes :
La fibrillation auriculaire (FA) avec bloc de branche
Le passage en FA peut être à l’origine d’une
syncope, surtout s’il existe une cardiopathie pour
laquelle la systole auriculaire joue un rôle fondamental
dans le remplissage ventriculaire (rétrécissement
mitral, HVG concentrique…). La FA est souvent, mais
pas toujours, associée à une cardiopathie sous-jacente. La
morbidité et la mortalité de la FA sont principalement
liées à la gravité de cette cardiopathie, à la possibilité
d’un retentissement hémodynamique ou de complications thromboemboliques. Le facteur déclenchant la
FA peut être une alcoolisation aiguë, une intervention
chirurgicale, une électrisation, un syndrome coronarien
aigu, une péricardite, une myocardite, une embolie
pulmonaire ou d’autres affections pulmonaires, une
hyperthyroïdie ou d’autres maladies métaboliques.
Le mécanisme électrophysiologique de la FA est
une activité automatique auriculaire anarchique, avec
plusieurs foyers pacemakers et plusieurs circuits
concomitants de réentrée.14 Sur le plan électrocardiographique, la FA se traduit par la disparition des
ondes P qui sont remplacées par des trémulations de
la ligne de base bien visibles sur les dérivations
précordiales droites, et dont l’amplitude permet de
différencier la fibrillation à grosses mailles de la
fibrillation à petites mailles. Parfois, il n’existe aucune
activité auriculaire visible, et seule l’irrégularité de
l’intervalle RR permet d’évoquer une FA. Le caractère
large des complexes QRS est lié à l’existence contemporaine
d’un bloc de branche préexistant ou fonctionnel.
Sur cœur sain, la FA est habituellement bien
tolérée, l’accélération de la fréquence ventriculaire
restant modérée grâce au filtre nodal. La prise en
charge de la FA vise 3 objectifs : ralentir la fréquence
ventriculaire, prévenir les accidents emboliques, et
rétablir le rythme sinusal.3 La fréquence ventriculaire
peut être ralentie par l’utilisation de l'amiodarone, les
digitaliques (en cas d'insuffisance cardiaque), des
bêtabloquants et des anticalciques (diltiazem et
vérapamil) (Grade B). Les 2 dernières classes thérapeutiques ont un effet inotrope négatif et sont contreindiquées chez les patients porteurs d’une pré-excitation
ventriculaire.. Le risque d’accidents emboliques s’installe
précocement, et est cliniquement pertinent au-delà de
48H. Il justifie un traitement préventif au long cours
par AVK (Grade A). Le rythme sinusal peut être rétabli
par des moyens pharmacologiques. L'amiodarone et
les antiarythmiques de classe IC comme le flécaïnide sont
alors les agents prescrits en l'absence d'insuffisance
cardiaque (Grade A). En cas d’échec du traitement
médical, une cardioversion électrique est indiquée
(Grade C). Si elle est généralement pratiquée après 3
semaines d’anticoagulation efficace, il est possible de la
faire dans les jours suivant la survenue de la FA,
après avoir vérifié par ETO l’absence de thrombus
dans l’oreillette gauche (Grade B). Un traitement AVK
efficace doit être maintenu pendant 4 semaines après la
cardioversion (Grade C). En pratique, dans le cadre de
l'urgence, il importe surtout de ralentir la cadence
ventriculaire (ß-bloquants ou diltiazem en l'absence de
syndrome de WPW) et ce d'autant que l'on ne connaît
pas forcément le délai depuis le début de la FA.
Tachycardie régulière à complexes larges
Tachycardie supraventriculaire avec bloc de branche
Les tachycardies supraventriculaires (TSV) sont
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Mai 2008 - N° 51
représentées par les arythmies atriales (flutter auriculaires et autres tachycardie atriales) et les tachycardies
jonctionnelles.2 Elles peuvent survenir en dehors de
toute lésion décelable et sont généralement bien
supportés. Elles peuvent également être la conséquence de la plupart des cardiopathies dont elles
compliquent l'évolution, en particulier l'insuffisance
coronarienne ou cardiaque notamment de type
diastolique, les valvulopathies à type de rétrécissement ou
les cardiomyopathies hypertrophiques. Les tachycardies
atriales favorisent de plus la survenue de thromboses
auriculaires, sources d'embolies, au même titre que la FA.
La survenue d’une TSV chez un sujet porteur
d’un bloc de branche donne sur l’ECG des complexes
larges, mais sa tolérance est relativement bonne tant que le
filtre du nœud auriculo-ventriclaire est efficace. Les
tachycardies atriales s'associent souvent à une cardiopathie. Sur le plan thérapeutique, outre le choc électrique
externe toujours utilisable, leur traitement médicamenteux de réduction fait appel aux mêmes substances
utilisées lors d'une fibrillation auriculaire. La réduction
peut également être obtenue par stimulation endocavitaire ou par la stimulation électrique de l'oreillette
gauche par voie œsophagienne. Cette technique peut
être également utilisée en première intention.2 Les
tachycardies jonctionnelles ont des complexes larges
en cas de bloc de branche parfois ralentisseur, ou de
trajet antidromique. Elles sont interrompues grâce aux
manœuvres vagales, à l’administration l’adénosine ( 6 à
12 mg IV flash en respectant les contre-indications),
du diltiazem (0.2 à 0.3 mg/kg IVL) ou de l'esmolol.
L’agent le plus utilisé est le diltiazem. Du fait de sa
demi vie très brève, l’adénosine est plutôt utilisée
lorsque le patient a déjà reçu d’autres antiarythmiques.
Dans tous les cas, l’ablation par radio-fréquence
permet d’éviter les récidives de TSV.
Tachycardie ventriculaire
Une tachycardie ventriculaire peut être non soutenue
(TVNS : durée < 30 sec), soutenue (TVS : durée > 30 sec),
monomorphe ou polymorphe.4 La survenue d’une
TVNS est souvent en rapport avec une ischémie
myocardique aiguë ou un état d’hyperadrénergie. La
TVS est presque toujours le fait d’une cardiopathie
sous-jacente. Les TV naissant du ventricule gauche
sont le fait de toutes les cardiopathies du ventricule
gauche, en particulier l'infarctus ancien avec ou sans
anévrysme constitué, et les cardiomyopathies dilatées,
ischémiques ou primitives (figure 2). Les TV naissant
d'un ventricule droit pathologique sont principalement
liées à une dysplasie ventriculaire droite arythmogène.
Les TV monomorphes sont généralement liées à une
anomalie structurelle (cicatrice myocardique par
exemple) servant de substratum à un circuit de réentrée.
Les TV polymorphes sont la conséquence d’anomalies
fonctionnelles du tissu myocardique, secondaires à
une pathologie ou à l’effets de médicaments. D’une
manière générale, les TVS monomorphes sont de
meilleur pronostic que les TVS polymorphes, mais
quel que soit le type de TV, une mauvaise tolérance
hémodynamique impose le recours à un choc électrique.
Les facteurs étiologiques (ischémie myocardique
aiguë) ou favorisants (hypokaliémie, hypomagnésémie, hypocalcémie, hypothermie) doivent être
recherchés et corrigés.
La majorité des TV surviennent chez des patients
porteurs de coronaropathies. Leur gravité à la phase
aiguë de l'infarctus du myocarde justifie la surveillance du malade en réanimation. Le traitement de
l’accès de TV sur cardiopathies relèvent de l'amiodarone (par voie orale ou intraveineuse) associés aux βbloquants (par voie veineuse, notamment le propranolol) (Grade C). En milieu cardiologique, la stimulation ventriculaire par voie endocavitaire est une
méthode élégante (Grade C). La lidocaïne est
toujours indiquée en cas de TVS monomorphe dans un
contexte d’ischémie myocardique ou d’IDM (Grade C).
Le recours à la cardioversion reste possible en cas
d’échec des médicaments antiarythmiques.
Malgré le bon pronostic des TV idiopathiques, le
traitement préventif chez le sujet jeune à cœur sain
est basé sur l'ablation par radio-fréquence qui assure
la guérison. En cas de cardiopathie avec altération de
la fonction ventriculaire gauche (FEVG < 0,40)
l’implantation d’un défibrillateur automatique est
envisagée en première intention (Grade B), les médicaments antiarythmiques (bétabloquants, amiodarone,
ablation par radiofréquence) servant de complément
à la défibrillation. La dysplasie arythmogène du
ventricule droit relève du traitement par amiodarone
et β-bloquant, associés ou non (Grade C). La prévention
des récidives de TV nécessite de toutes manières une
prise en charge en milieu cardiologique.
Figure 2 :Tachycardie régulière à complexe large chez une personne ayant une séquelle d’<idm. Pas d’aspect RS dans
le precordium, dissociation AV: tachycardie ventriculaire monomorphe
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1992;262 (Heart Circ Physiol 31):H47-55.
CONSEIL DE L’ORDRE
Actualités ordinales
INFORMATION
L’Organe de l’Ordre des médecins de NOUVELLE Calédonie
est situé au 27, rue de Sébastopol – Immeuble le Central 1 –
Bureau 303 (En haut de la place des Cocotiers).
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Il est possible d’obtenir un rendez-vous l’après-midi pour
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La composition actuelle du bureau :
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Dr CHENE Patrick – Trésorier.
Pour obtenir un rendez-vous avec les membres du bureau ou
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secrétariat administratif.
Les autres membres actuels de l’Organe de l’Ordre des
Médecins sont les docteurs:
DIVANAC’H Ronan,
DES MOUTIS Robert,
GRANDMOUGIN Thierry,
LEFEBVRE Gérard,
MELLIN Bertrand
VANGHELUWE Frédéric.
Il n’y a actuellement que Dix membres qui siègent à l’Organe
de l’Ordre des Médecins au lieu de 15.
Un confrère a présenté fin 2006 un recours auprès du
Tribunal Administratif afin d’annuler les opérations électorales
qui se sont déroulées le 14 novembre 2006 pour le renouvellement
partiel des membres de l’Organe de l’Ordre des médecins de
Nouvelle Calédonie.
Cette demande d’annulation reposait sur le fait que l’Organe
de l’Ordre de Nouvelle Calédonie faisait référence pour l’élection
de 2006 à un texte du Code de la Santé Publique qui n’avait pas
été étendu à la Nouvelle Calédonie.
INFORMATION
Le recours étant reconnu fondé par le Tribunal Administratif,
les opérations électorales du 14 novembre 2006 ont été annulées.
En Février 2008 devaient avoir lieu de nouvelles élections,
celles-ci avaient été programmées ; mais après avis juridiques il
apparaît que les modalités des élections au Conseil de l’Ordre des
Médecins de Nouvelle Calédonie ne sont pour l’instant pas
définies par un texte normatif ce qui fragilise nécessairement la
validité de ces nouvelles élections.
Les membres du bureau présent ont donc préféré suspendre
les élections programmées en février 2008 dans l’attente de
l’adoption du projet de « délibération relatif à l’exercice des
professions de médecins et de chirurgiens dentistes de Nouvelle
Calédonie » qui est actuellement en cours de finalisation.
Ce projet doit déterminer la composition, le fonctionnement et
les modalités d’élection du Conseil de l’Ordre des Médecins de
Nouvelle Calédonie.
Pendant la période transitoire actuelle l’Organe de l’Ordre des
Médecins de Nouvelle Calédonie ne peut fonctionner dans des
conditions normales. Il est limité dans ses attributions à l’expédition
des affaires courantes.
De nouvelles élections seront organisées dans les mois qui
viennent et après passage du texte au Gouvernement et au
Congrès de la Nouvelle Calédonie
Nous espérons que de nombreux confrères seront volontaires
pour s’investir au sein du Bureau de l’Ordre et que des les
médecins de l’intérieur, des provinces Nord et îles, dont l’exercice
en Nouvelle Calédonie présente de nombreuses spécificités,
participeront à cette démarche.
Nous vous rappelons que l’ordre se doit d’être en perpétuelle
modernisation ; il a un rôle de conseil dans la rédaction des textes
réglementant notre exercice. De grands dossiers sont actuellement
en cours : celui de la formation continue, de la permanence des
soins, de l’informatisation du dossier médical des patients.
L’ordre doit également se présenter comme une structure de
proposition afin d’actualiser notre code de déontologie et d’étudier
la mise en place de notions telles que l’exercice sur sites multiples, le
médecin collaborateur, la mise en place d’une chambre d’arbitrage
etc... Les confrères de Nouvelle Calédonie devront aussi
accompagner la réorganisation de la Chambre de Discipline.
Les membres du Bureau actuel restant à votre disposition si
vous le souhaitez pour tout renseignement complémentaire.
Nous vous prions de croire, chers Confrères, en l’expression
de nos salutations les plus amicales et confraternelles.
Le Conseil de l’Ordre
Mai 2008- N° 51
25
A G E N C E S A N I TA I R E E T S O C I A L E - N C
Mise en place d’un forfait de soins podologiques
pour les diabétiques du grand Nouméa
dans le cadre de la prévention du risque d’amputation.
D Mégraoua - Centre d’éducation diabétique et diététique, ASS-NC
Le diabète est responsable de 2 à 3 amputations chaque
semaine en Nouvelle Calédonie.
Les soins de prévention des lésions des pieds chez les
diabétiques représentent un enjeu majeur en termes de
qualité de vie et de prévention de la morbi-mortalité, mais
également en termes d’économie de santé.
La prévention et le traitement podologique des lésions sont rendus difficiles en raison du
faible taux de remboursement des soins et de la difficulté d’accès à ces soins hors Nouméa.
L’objectif du programme est de diminuer par moitié le nombre d’amputation des membres
inférieurs chez le diabétique sur 5 ans.
Prévenir les lésions
La prévention des lésions des pieds
chez les diabétiques apparaît comme une
évidence pour tous ceux qui les prennent en
charge. On retrouve souvent le même parcours
avec initialement la guérison simple d’une
ulcération qui va récidiver puis aboutir à une
amputation et le décès quelques années après.
Quand on parle de prévention, c’est qu’il
y a un risque. En terme de malades diabétiques
le risque podologique existe : pendant leur vie,
après plus de 20 ans d’une maladie difficile à
soigner, 25% de ces diabétiques auront eu
une plaie de pied et 10% une amputation.
85% des amputations surviennent chez des
diabétiques porteurs d’une plaie chronique :
la prévention de l’amputation repose donc en
grande partie sur la prise en charge correcte
de ces plaies. Pour les prévenir, il faut dépister
les populations les plus à risque. On en
connaît les critères : neuropathie (grade 1),
avec artérite et/ou déformation (grade 2)
ou ayant un antécédent de plaie ou d’amputation (grade 3).
Il restera tous ceux qui font des plaies
parce qu’ils ne se savent pas diabétiques, ou
à risque, ou chez qui la plaie est accidentelle
et c’est fréquent. Pour ceux-là, une prise en
charge rapide est seule capable de réduire les
complications des lésions et leur coût. La
formation des patients par les soignants
(éducation thérapeutique) doit leur permettre
de ne pas sous estimer une plaie dont la
gravité et l’absence de guérison spontanée
sont des constantes.
26
Mai 2008 - N° 51
Les médecins généralistes ne verront que
rarement des plaies alors que ces lésions sont la
première cause d’amputation non traumatique
et qu’elles sont responsables de la moitié des
journées d’hospitalisation dans les services
de diabétologie.
Ainsi, le dépistage des patients à haut
risque d’amputation et leur traitement
préventif doit être réalisable partout en
Nouvelle Calédonie.
Le programme a débuté en 2007 avec la
formation des podologues de Nouvelle
Calédonie par une équipe multidisciplinaire
afin de mettre à jour les connaissances et
d’harmoniser les pratiques. L’Agence Sanitaire
et Sociale a fait venir du CHU de Nantes
Philippe SAILLANT, podologue formateur.
Le Dr LEGER du CHT a traité de la place
de la chirurgie. L’équipe du CEDD a pour
sa part enseigné le diabète et l’éducation
thérapeutique. A l’issue de la formation, 8
podologues ont été agréés par l’Agence.
Dans les suites immédiates de la formation,
la séance hebdomadaire sur le pied diabétique
au CEDD a été animée par un des podologues
agréés. Dans ce cadre, seule l’éducation des
patients est réalisée (à l’exclusion des soins)
avec pour but l’acquisition d’un savoir, d’un
savoir faire et d’un changement des comportements à risque.
Au delà, le rôle du podologue est
fondamental dans la prévention primaire
ou secondaire des ulcérations. Les soins
de podologie sont essentiels pour procéder
à l’ablation des hyperkératoses liées à des
hyperpressions locales et au traitement des
ongles. L’exérèse de l’hyperkératose est
fondamentale, car la callosité ne fait
qu’augmenter encore l’hyperpression locale
et favoriser la survenue d’une ulcération. La
fréquence des soins doit être adaptée à la
gradation du risque podologique.
La coupe des ongles
Intensifier la prise
en charge podologique
1) par la création du forfait de soins
podologiques pour le grand Nouméa :
La gradation du risque est effectuée par
le médecin traitant.
Si le diabétique est à haut risque, grade 2 et
3 (de la gradation établie par l’International
Working Group en 1999) soit environ 20%
des diabétiques, il peut bénéficier du forfait
de soins.
Le patient est adressé à un podologue
spécifiquement formé agréé via une fiche de
prescription spécifique (envoyée par l’Agence).
A G E N C E S A N I TA I R E E T S O C I A L E - N C
Le forfait comprend un bilan podologique
initial (dont le compte rendu est envoyé au
médecin prescripteur) suivi de 5 séances de soins.
A la fin des soins, le podologue envoie un
compte rendu final au médecin prescripteur
et à l’Agence Sanitaire et Sociale.
Les patients n’auront rien à débourser, le
coût du forfait étant supporté par l’Agence.
Vos patients inclus dans ce programme
sont des patients à risque, ils ont besoin des
soins qui ont été prescrits, veillez à ce qu’ils
consultent régulièrement leur podologue.
Les différentes zones à risque
Pour en savoir plus, contactez la Cellule de gestion
de l’action du Forfait de soin du Pied Diabétique
(CFPD) au 26 90 61.
Mail : [email protected]
2) par la création de vacations de
podologie dans l’intérieur et les Îles :
Ces vacations seront accessibles à tous
les diabétiques de l’intérieur et des îles sur
prescription médicale.
Elles seront réalisées dans les dispensaires
par des podologues formés agréés, équipés
de matériel de podologie transportable
(fourni par l’Agence).
Ces vacations ont un triple objectif :
éducation thérapeutique des patients, soins
de podologie et formation des professionnels
de santé.
Les consultations multidisciplinaires
du pied diabétique
Les consultations de pied diabétique sont
le dernier volet (après le dépistage et la
prévention) du dispositif visant à prévenir
les amputations chez les diabétiques. Ces
consultations sont en place au CHT Magenta
dans le service de Médecine interne et
permettent la prise en charge rapide et
spécialisée des lésions des pieds chez les
diabétiques, dès leur reconnaissance par le
médecin traitant.
Les principales caractéristiques sont :
• caractère multidisciplinaire, réunissant un
médecin (et), une infirmière et un podologue,
• coordination par un médecin diabétologue
expérimenté dans la prise en charge des
pieds diabétiques,
• possibilité d’accès direct des patients à
travers un n° de téléphone communiqué aux
médecins,
• prise en charge rapide des patients référés,
dans un délai n’excédant pas 48h à 72h,
• coopération structurée avec une unité
de radiologie, un infectiologue, un chirurgien
vasculaire, un chirurgien orthopédique.
Ces consultations établissent le bilan des
lésions, décident d’une hospitalisation ou de
La formation d’un mal perforant plantaire en 4 étapes
Pour dépister le risque de lésion des pieds il suffit de répondre à 4 questions
1. Le patient a t’il un antécédent d’ulcération chronique du pied (ayant duré plus de 3
mois) ou d’amputation ?
2. A-t-il une perte de la sensibilité ? La perte de sensibilité est définie par une mauvaise
perception du monofilament de 10 g (Semmes-Weinstein 5.07). Le monofilament doit être
appliqué à 6 endroits à la face plantaire des deux pieds : en regard de la pulpe du gros
orteil et de la tête des 1èr et 5ème métatarsiens. Lorsqu’il est appliqué correctement (cf.
encadré), il exerce une pression de 10 g sur la peau. L’application doit être répétée 3 fois sur
le même site, sans ordre déterminé. Deux fausses réponses sur trois à un même site
signent l’existence d’une neuropathie et d’un risque d’ulcération.
3. A-t-il une artérite ? Un des critères suivant suffit pour diagnostiquer l’existence d’une
artérite et prédire un risque de lésions des pieds : la non perception de 2 pouls au même
pied (pédieux et tibial postérieur) ou un antécédent de chirurgie vasculaire artérielle sur le
membre inférieur ou l’existence d’une claudication intermittente.
4. A-t-il des déformations ? Hallus valgus1, quintus varus, orteils en griffe ou en marteau,
callosités, proéminence de la tête des métatarsiens, chevauchement d’orteil, pied de
Charcot2. Ces déformations augmentent le risque de lésion en créant des frottements
et une hyperpression.
1: Saillie de la tête du 5ème métatarsien - 2: Déformation de l’ensemble du pied par neuropathie osseuse, avec une phase initiale
douloureuse puis une déformation en valgus exposant aux blessures.
Cet examen débouche sur une prévention graduée du risque de lésion
Grade
Définition
Grade 0
Ni neuropathie, ni artérite, possibilité de
déformations du pied indépendantes du diabète.
Grade 1
Neuropathie sensitive isolée, définie par la perte
de sensation au monofilament de 10 g
Grade 2
Neuropathie + déformations du pied et/ou artérite.
Grade 3
Antécédent d’amputation ou d’ulcération d’un
pied.
Prise en charge
Examen annuel des pieds.
- Examen des pieds et des chaussures à chaque
consultation par le médecin traitant*.
- Education du patient et conseils d’hygiène*.
Mesures pour le grade 1 avec en plus :
- Bilan par un podologue puis soins de podologie tous
les 2 mois*.
- En présence de callosités ou troubles statiques, prescription de semelles orthopédiques (orthèses) réalisées
sur mesure par un podologue.
- Si nécessaire, prescription de chaussures pour pieds
sensibles ou de chaussures thérapeutiques de série.
Mesures pour les grades 1 et 2 avec en plus référence
pour bilan annuel à une équipe spécialisée*.
* Ces moyens ont été validés pour réduire le risque de lésion des pieds.
Il est nécessaire d’adresser directement et
la possibilité d’un suivi ambulatoire et
revoient les patients périodiquement pour rapidement à ces consultations les diabétiques
coordonner le traitement et le suivi des à risque atteints de lésion, sans chercher à
traiter la lésion.
lésions.
Mai 2008 - N° 51
27
A G E N C E S A N I TA I R E E T S O C I A L E - N C
Mode d’emploi du monofilament de 10g
Appliquez le monofilament perpendiculairement à la surface de la peau, avec suffisamment
de force pour le courber (ceci évite de transmettre la force du poignet de l’examinateur).
■ Demandez au patient de fermer les yeux, pour qu’il ne voie pas le lieu où vous appliquez le
monofilament.
■ N’appliquez pas le monofilament sur une callosité ou un ulcère, mais à leur périphérie.
■ Appliquez le monofilament fermement, en une fois: faites attention à ne pas le faire glisser
le long de la peau et à ne pas toucher la peau de façon répétitive.
■ Appliquez le monofilament aux différents endroits sans ordre déterminé pour éviter les biais
dus à l’anticipation du patient.
■ La durée totale d’application du monofilament doit être approximativement d’une seconde et
demi : demandez au patient de répondre « OUI » ou « NON » instantanément après application
du monofilament.
■ Pour conserver le monofilament en bon état, gardez le dans son étui ou replié dans son
manche.
En conclusion
Pour mener à bien ce programme, il
nous faut des podologues motivés et formés,
des médecins disposés à grader, et un secrétariat
bien organisé.
C’est un test de notre capacité à nous
mobiliser et à faire évoluer le dispositif
de soins.
C’est aussi la démonstration concrète de la
possibilité d’adapter l’attitude thérapeutique
en fonction du degré de risque.
Nous aurons aussi pu mettre en évidence
le rôle du podologue dans cette échelle de
soins, la nécessité de sa formation, l’intérêt
d’un travail d’équipe et la nécessité d’une
éducation et d’une prévention à tous les
niveaux.
Ce programme de prévention des amputations est mis en place de façon coordonnée:
depuis le dépistage du risque par les médecins
traitants, en passant par la prévention par des
podologues, jusqu’à la prise en charge des
patients atteints de lésions par des consultations
multidisciplinaires du pied diabétique à l’hôpital.
Ce travail en équipe où chacun tient sa
place modélise ce que peut être un dispositif
de prévention efficace.
L’évaluation du programme se fera par la
mesure du nombre de diabétiques amputés
par an et le nombre de diabétiques bénéficiant
du protocole.
Information pratique
Dans le cadre de la prise en charge du diabète, votre patient va pouvoir bénéficier d’une ou plusieurs
consultations gratuites avec un pédicure-podologue.
Lors de la première consultation, le podologue fera un bilan des pieds de votre patient. Les deux
pieds seront examinés ainsi que ses chaussures.
A la fin de la première séance, un bilan vous sera envoyé et le podologue informera votre patient s’il
doit revenir poursuivre les soins ou si cela n’est pas nécessaire.
Une prescription de votre part est indispensable, un ordonnancier spécifique vous sera prochainement
adressé. L’ensemble du forfait de soins est pris en charge par l’agence sanitaire et sera réglé directement
au podologue en fin de forfait.
Ci-dessous la liste des podologues agréés :
Nouméa :
BLAMPAIN-MARBEZY Nathalie (VDC) - 28 39 40
BONNOT Wilfrid (Haut Magenta) - 27 46 58
BRUGNON Alban (Trianon) - 78 36 78
CASTET-MOULAT Janique (Centre Ville) - 28 34 88
GALVIER-MICHEL Pascale (VDC/Fbg Blanchot) - 77 82 24
Dumbéa :
GALVIER-MICHEL Pascale - 77 82 24
Mont Dore :
HARBULOT Lise-Marie - 43 12 34
28
Mai 2008 - N° 51
EXERCER AUJOURD’HUI
Pendant l’épidémie de dengue, n’oublions pas la leptospirose !
Aurélie Guigon, Cyrille Goarant
Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie
Depuis le début de l’année 2008, 50* nouveaux cas de leptospirose ont été
diagnostiqués à l’Institut Pasteur de Nouvelle-Calédonie, contre 53 cas pour
l’ensemble de l’année 2007. Cette situation nous a conduit à repréciser
le contexte clinico-biologique de cette maladie, qu’il ne faut pas oublier
même lorsque la dengue prend le dessus en terme de médiatisation.
Figure 1: cycle épidémiologique de la leptospirose
Une zoonose aux multiples vecteurs
La leptospirose est une zoonose (maladie animale transmise à l’homme
via un environnement souillé). L’infection est causée par une souche
virulente de Leptospire. Les leptospires infectent naturellement
nombre d’espèces animales, domestiques ou sauvages, chez qui
elles provoquent ou non une maladie. Les rats sont très fréquemment
porteurs et vecteurs de leptospires qu’ils disséminent via leurs urines mais
d’autres espèces animales (bovins, porcins, chiens) peuvent également
excréter des leptospires de façon temporaire ou intermittente. L’homme
est un hôte « accidentel » contaminé le plus souvent par voie indirecte,
par contact avec les milieux hydriques contaminés (rivières, zones
boueuses contaminées par les urines animales). La contamination
par contact direct avec les animaux est moins fréquente.
La transmission de la maladie est étroitement liée aux conditions
climatiques : chaleur, pluies importantes et inondations sont des
facteurs favorisants et contribuent fortement à la recrudescence des
cas de leptospirose.
Une zoonose quelquefois délicate à diagnostiquer
La période d’incubation dure en moyenne 10 jours (2-20). S’ensuit
un début brutal associant fièvre constante et élevée, frissons, syndrome
algique (céphalées et myalgies), signes cutanéo-muqueux (épistaxis
et suffusion conjonctivale), et parfois syndrome méningé. Les
formes sévères (5 à 10% des cas) sont associées à des atteintes
hépatiques et rénales (syndrome de Weil) pouvant être rapidement
mortelles. Dans ce contexte, il est admis qu’une atteinte pulmonaire
est généralement de mauvais pronostic.
sang
Leptospires
(diagnostic PCR)
LCR
urine
Contam ination
Anticorps
(sérologie)
titre faible suite à une antibiothérapie précoce
fièvre
Incubation
(2-20 jours)
semaine 1
semaine 2
semaine 3
Leptospires
Animaux
de rente
Rongeurs
Dépositaires
hydro-telluriques
Hommes
Animaux
sauvages
Animaux
domestiques
sont de loin plus fréquentes et posent le problème du diagnostic
différentiel avec d’autres pathologies, comme la dengue, la grippe
ou les hépatites virales.
Les formes frustes (syndrome pseudo-grippal pouvant
s’accompagner d’une douleur rétro-orbitale comme dans la dengue).
Les tests de confirmation
Pour confirmer un diagnostic de leptospirose, l’IPNC met à
disposition du prescripteur 2 types de tests : PCR et sérologie. Ces tests
ne se positivent pas au même moment (figure 2) et afin d’effectuer
une bonne prescription d’examens biologiques, il est indispensable
de tenir compte de la date d’apparition des signes cliniques.
- La PCR (détection de la bactérie), plus adaptée à un diagnostic
précoce, est réalisable sur sang (positive les premiers jours de la
maladie puis négative), LCR (si méningite) ou urine.
- La sérologie (recherche des anticorps), effectuée sur sang, est
adaptée à un diagnostic tardif (négatif la première semaine suivant
l’apparition des signes) et nécessite la comparaison de 2 prélèvements
espacés d’une dizaine de jours. Une séroconversion ou une augmentation des titres d’anticorps par un facteur 4 confirment le diagnostic
de leptospirose. Une antibiothérapie peut néanmoins retarder l’apparition des anticorps ou en diminuer le titre.
*: Nombre de cas au 31 mars 2008
Remerciements à : Louise Massenet ainsi qu’à Dominique Girault, Carole Manauté,
Denise Moleana, Dominique Triballi et Sylvie Troc en charge du diagnostic biologique et
Frédérique Vernel-Pauillac pour sa relecture critique
Mai 2008 - N° 51
29
ACTUALITÉS
DU COTE DE LA CPS
PACIFIQUE
Secrétariat Général de la
Communauté du Pacifique
Halte à la tuberculose dans le pacifique!
Plus de 60 professionnels de la santé en
provenance de 21 pays et territoires insulaires
du Pacifique1 (y compris de Nouvelle-Calédonie,
Polynésie française et Wallis-et-Futuna),
d’Australie, de Nouvelle-Zélande et d’organisations régionales et internationales se sont
réunis à Brisbane (Australie) du 11 au 14
mars 2008 à l’occasion de la quatrième réunion
« Halte à la tuberculose dans le Pacifique »,
co-organisée par l’Organisation Mondiale de
la Santé (OMS) et le Secrétariat général de la
Communauté du Pacifique (CPS).
L’objectif de cette réunion était de faire
le point sur les progrès réalisés par les pays
et territoires insulaires du Pacifique dans
l’application des recommandations concernant,
entre autres, le renforcement des capacités
des laboratoires, la gestion, le suivi et
l’évaluation des traitements antituberculeux.
Au cours de la réunion, les organisateurs
avaient également organisé une visite du
laboratoire de référence pour les mycobactéries
dans le Queensland (Australie), centre collaborateur de l’OMS et partenaire très engagé
dans l’initiative des laboratoires contre la
tuberculose dans le Pacifique.
L’initiative Halte à la tuberculose dans le
Pacifique a été lancée en 2001 lors de la
première réunion et a constitué le point de
départ de la réponse océanienne à la crise
de tuberculose dans la Région. Des plans
nationaux de lutte antituberculeuse ont été
élaborés dans le but d’atteindre les objectifs de
2005 contre la tuberculose qui visaient la
détection de 70 % des cas et des taux de
guérison de 85 %. A la deuxième réunion, en
2004, certains pays et territoires ont mis en
place des plans d’action dans le but d’accélérer
leur progression vers ces objectifs de 2005. A
la troisième réunion, les participants ont pu
confirmer que les objectifs de 2005 étaient
atteints dans le Pacifique et les leçons tirées
ont servi de référence dans la mise en place
de plans de travail qui visent à atteindre
l’objectif de 2010, à savoir réduire de
moitié la prévalence et le taux de mortalité
imputables à la tuberculose (rapportés en
l’an 2000).
Christelle Lepers
Contexte
Selon les estimations, 1600 nouveaux cas de tuberculose sont enregistrés chaque année dans 20
pays et territoires insulaires du Pacifique (voir liste cidessous dans la note de bas de page), ce qui nous
permet d’en déduire que la charge de morbidité
imputable à la tuberculose dans ces 20 pays et
territoires insulaires du Pacifique, à l’exception de la
Papouasie-Nouvelle-Guinée, est relativement faible.
Pourtant, dans plusieurs de ces pays et territoires,
les taux de notification des cas sont largement
supérieurs au taux de notification de l’ensemble de la
Région du Pacifique occidental qui est de 75 pour
100 000 habitants. Cette lourde charge de tuberculose, l'émergence de la multirésistance du bacille et le nombre croissant des cas de coinfection VIH-tuberculose dans plusieurs pays nous
obligent à maintenir la lutte antituberculeuse dans
le Pacifique parmi nos priorités.
Extrait du bulletin d’information Nº1 diffusé
par l’OMS et la CPS le 13 février 2008.
Pour de plus amples informations sur cette réunion, veuillez
contacter le Docteur Axel Wiegandt, Section Tuberculose du
Département Santé Publique de la CPS – Mél. : [email protected]
Tél. : (687) 26 21 42
1 : Îles Cook, États fédérés de Micronésie , Îles Fidji, Guam, Kiribati, Îles Mariannes du
Nord, Îles Marshall, Nauru, Niue, Nouvelle-Calédonie, Palau, Papouasie-NouvelleGuinée (PNG), Polynésie française, Îles Salomon, Samoa américaines, Samoa, Tokelau,
Tonga, Tuvalu, Vanuatu et Wallis et Futuna.
Le nouveau site web du Département
Santé Publique de la CPS
Le Département Santé Publique de la CPS fait peau neuve sur internet :
http://www.spc.int/php/
Ce site est en cours de construction, cependant vous y trouverez les
dernières nouvelles (en anglais dans l’immédiat) concernant les diverses
activités de la CPS en matière de Surveillance de la santé publique et
lutte contre les maladies transmissibles (telles que la dengue ou la
grippe), le VIH et les IST, la lutte contre la tuberculose, la santé et le
développement des adolescents ou encore les modes de vie sains, qui
sont menées dans les 22 pays et territoires insulaires du Pacifique.
Certaines sections du site seront également disponibles en français
dans le courant de l’année.
Restez branché !
Christelle Lepers
30
Mai 2008 - N° 51
ACTUALITÉS
DU COTE DE LA CPS
PACIFIQUE
Secrétariat Général de la
Communauté du Pacifique
Des nouvelles de la Société océanienne pour la santé sexuelle
et la médecine du VIH (OSSHHM)
La Société océanienne pour la santé
sexuelle et la médecine du VIH (OSSHHM),
qui a été créée en mars 2007 durant la
Conférence des Ministres de la santé des
pays insulaires du Pacifique, croît en taille et
en solidité tout en étant de plus en plus
reconnue dans les différents pays de la
région en tant qu’organisation professionnelle
représentative des travailleurs de la santé.
La première réunion de l’OSSHHM s’est
déroulée à Sydney, en juin 2007, en marge
de la conférence de l’International AIDS
Society, et a été officiellement enregistrée
aux Îles Fidji en qualité de société à but non
lucratif, sous le nom d’Oceania Society for
Sexual Health and HIV Medicine Limited.
L’OSSHHM s’apprête à recruter un directeur
à plein-temps qui sera basé à Suva (Fidji).
Pour le docteur Tenneth Dalipanda,
président de l’OSSHHM, l’un des objectifs
majeurs de la société est « de donner des
moyens d’action aux travailleurs de la santé de
la région en améliorant leurs connaissances,
et donc leur aptitude à mieux s’occuper de
leurs patients. En tant que spécialiste, je
souhaite aussi m’assurer de la diffusion des
connaissances fondées sur des bases factuelles.
Cela signifie passer outre les obstacles politiques
et, bien sûr, tenir compte des différents niveaux
de soins, et en comprendre les limites. En
tout état de cause, nous devons apporter ce
qu’il y a de mieux au vu des circonstances ».
Au mois de juillet cette année, l’OSSHHM
a publié ses Recommendations for HIV medicine
and sexual health care in Pacific small island
countries & territories. Une mise à jour de ce
document est attendue au début de l’année 2008.
« Dans la région, le secteur de la santé
sexuelle et de la prise en charge du VIH
compte de nombreux intervenants ainsi que
des protocoles différents pour le traitement,
mais aussi pour d’autres aspects tels que les
normes de laboratoire, le dépistage et le
conseil, » a déclaré le docteur Dalipanda.
« Nous sommes conscients que tous les pays
sont différents, et que nous ne pouvons espérer
plaquer le même modèle sur toute la région.
Il nous semble cependant que si nous rassemblons tous les pays insulaires océaniens
au sein de l’OSSHHM, nous pouvons les
unir dans la diversité, et les représenter tous
comme une seule région ». Nous n’y
parviendrons que si les travailleurs de la santé
de tous les pays se rallient à l’OSSHHM, et
appliquent ses recommandations dans toute
la mesure du possible.
L’OSSHHM compte aujourd’hui 64
membres, dont des personnes venant de 10
pays et territoires insulaires océaniens. Elle
regroupe des médecins ainsi que des infirmiers,
des conseillers, des chercheurs et des techniciens
de laboratoire.
Le docteur Dalipanda ajoute : « Nous devons
tous travailler la main dans la main, et
respecter les différences d’opinion afin de
favoriser l’évolution professionnelle. Je n’adhère
pas à l’idée qu’il existe une démarche juste,
au détriment des autres, ni au fait d’imposer
des croyances aux pays. Bien au contraire,
nous voulons rallier tous les intervenants de
la région, et veiller à travailler ensemble en
ne laissant personne sur la touche ».
L’OSSHHM a aussi pour objectif de
permettre aux travailleurs de la santé des
pays insulaires océaniens de faire entendre
leur voix sur la scène régionale et internationale. « Jusqu’à présent, ils n’ont guère eu
la possibilité d’intervenir à ce niveau comme
ambassadeurs et comme conseillers, alors
qu’ils devraient jouer un rôle à part entière
dans les débats sur la santé sexuelle et la
médecine du VIH, » a précisé le docteur
Dalipanda. « Cela signifie également tenir
compte du subtil équilibre entre se faire
entendre, et gérer une lourde charge de travail.
L’OSSHHM peut venir en aide aux travailleurs
de la santé en leur offrant un moyen de faire
entendre leur voix ».
Pour tout renseignement complémentaire, veuillez vous adresser au
docteur Tenneth Dalipanda, Tel: +677 28321 ou +677 23600 poste 317,
courriel : [email protected] ou a Nicole Gooch, Chargée de la
Communication, Section VIH et IST, CPS, Tel : +687 26 67 71, courriel :
[email protected]
Première réunion de l’OSSHHM durant la Conférence de l’IAS a Sydney
Mai 2008 - N° 51
31
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