Épilepsie et cœur Épilepsies 2010 ; 22 (3) : 187-93 Syncopes d’origine cardiovasculaire, parfois le cerveau s’en mêle Xavier Waintraub, Françoise Hidden-Lucet Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. Unité de rythmologie, département de cardiologie, hôpital Pitié-Salpêtrière Paris, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France <[email protected]> Résumé. La survenue d’une syncope est un événement clinique fréquent aux significations complexes. Elle correspond à un des motifs de consultation quotidienne aux urgences avec un coût diagnostique important. Nous allons exposer les bases physiopathologiques des syncopes, ainsi que l’actuelle classification étiologique reprise par les recommandations de la Haute Autorité de santé. Elle distingue les syncopes réflexes, les syncopes liées à une hypotension et celles d’origine cardiaque. La revue portera ensuite sur les particularités cliniques de chaque étiologie, ainsi que sur le diagnostic différentiel. On détaillera l’usage des scores diagnostiques actuellement diffusés pour assister la prise de décision à chaque stade de la démarche diagnostique. En dernier point, on reviendra sur la place de l’hospitalisation et des marqueurs d’événements. Mots clés : syncope, sémiologie, syncope vagale, syncope réflexe, arythmie, hypotension, dysautonomie Abstract. The occurrence of syncope is a common clinical event with complex meanings. It is a daily of the reasons for consultation to the outpatient clinic with a high diagnostic cost. We will explain the pathophysiological basis for syncope and the current etiological classification taken up by the guidelines edited by of the Haute Autorité de santé. It distinguishes reflex syncope, syncope associated with hypotension and those of cardiac origin. The review will then focus on the clinical features of each etiology, as well as the differential diagnosis. It will detail the use of current diagnostic scores released to assist the decision-making at each stage of the diagnostic process. As a last point we will return to the place of hospitalization and event markers. Key words: syncope, vasovagal syncope, reflex syncope, arrhythmia, hypotension, dysautonomia doi: 10.1684/epi.2010.0315 Syncope vue par le cardiologue Tirés à part : Waintraub X Les récentes recommandations européennes de l’European Society of Cardiology définissent la syncope comme une perte de connaissance brève (PCB), due à une hypoperfusion cérébrale transitoire, caractérisée par son début brutal, sa durée brève et sa récupération spontanée (Moya et al., 2009). Cette définition insiste volontairement sur le mécanisme physiopathologique, qui distingue les syncopes au sein des PCB. Cette démarche découle de l’approche éminemment clinique des PCB, la 187 première étape diagnostique reposant sur la confirmation de la syncope à l’interrogatoire. L’importance de la prise en charge des syncopes repose sur plusieurs constats épidémiologiques (leurs fréquences, le coût de santé) et pronostiques. La syncope est un des motifs de consultation fréquente au sein des services d’accueil et d’urgence. En France, on l’évalue à 1,21 % des admissions aux urgences (HAS, 2008) et à 3-5 % aux États-Unis (Kapoor, 1991). Le taux d’hospitalisation en France Épilepsies, vol. 22, n° 3, juillet-août-septembre 2010 X. Waintraub, F. Hidden-Lucet tronc cérébral à l’origine d’une augmentation du tonus sympathique et une baisse du tonus parasympathique. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. est de 58 % des consultants. Dans leur étude, Kapoor et al. (1982) évaluaient la durée moyenne du bilan hospitalier à neuf jours, avec un diagnostic pour 10 % des patients seulement. On le conçoit, le coût de l’hospitalisation et le faible bénéfice pour le patient ne se justifient pas, c’est dans ce contexte que se sont développées les unités de prise en charge des syncopes (Kenny et al., 2002). L’élévation des catécholamines circulantes va maintenir la pression artérielle systémique et la perfusion cérébrale par la vasoconstriction des systèmes splanchnique, musculocutané et rénal. L’altération de chacun des éléments de régulation aboutit à la baisse de la perfusion cérébrale et à la syncope. La valeur pronostique de la syncope est difficile à appréhender dans le contexte de l’urgence : elle peut représenter le signe avant-coureur d’une mort subite ou l’expression d’une syncope réflexe bénigne. À nouveau, l’expérience des unités spécifiques de prise en charge de ces patients a permis d’établir des scores pronostiques permettant d’aider le clinicien dans la décision difficile d’hospitaliser les patients (Colivicchi et al., 2003 ; Del Rosso et al., 2008). Classification des syncopes La classification repose sur les concepts physiopathologiques siégeant à la survenue des syncopes (tableau 1). On retient trois catégories de syncopes : syncope réflexe, syncope due à une hypotension orthostatique et syncope d’origine cardiaque (Van Dijk et al., 2009). Le risque traumatique de la syncope concerne 17 à 35 % des patients (Eagle et al., 1985), avec 5 à 7 % de fracture et 1 à 5 % d’accident de la voie publique (Blanc et al., 1989). Syncopes réflexes Il faut retenir que 20 à 30 % de la population générale feront une syncope (Manolis et al., 1990) ; pour 40 à 85 % des patients qui auront consulté, l’épisode restera isolé (Kapoor et al., 1987) ; et 36,6 % des patients n’auront pas de diagnostic étiologique au terme du bilan effectué (Soteriades et al., 2002). Elles regroupent les syncopes où les « réflexes » cardiovasculaires régulant la circulation deviennent inappropriés, en réponse à un facteur déclenchant. Il en résulte une vasodilatation et/ou une bradycardie à l’origine d’une hypotension artérielle et une baisse de la perfusion cérébrale. Physiopathologie de la syncope Elles sont classées en fonction du facteur déclenchant : syncope vasovagale (VSV) [émotion, orthostatisme], hypersensibilité du sinus carotidien, situationnelle. Il s’agit d’une hypoperfusion cérébrale globale et transitoire qui va impliquer une perturbation de la circulation cérébrale et/ou des réflexes compensateurs. On parle de forme atypique lorsque la syncope survient en l’absence de contexte, facteur déclenchant. Syncopes secondaires à une hypotension orthostatique Circulation cérébrale Elles se caractérisent par une défaillance du système nerveux autonome responsable d’un défaut de vasoconstriction artérielle. L’orthostatisme s’accompagne d’une chute de la pression artérielle et d’une hypoperfusion cérébrale. Elle s’inscrit dans le cadre de syndrome (maladie de Parkinson, atrophie multisystémique, etc.), de maladie générale (diabète, amylose, etc.) associés à une dysautonomie ou bien d’origine iatrogénique. Le débit sanguin cérébral est de 50-60 mL par 100 g/min, soit 12-15 % du débit cardiaque au repos. La pression artérielle au niveau cérébral est de 75 mmHg. Expérimentalement, une chute de la pression artérielle en dessous de 60 mmHg, soit une pression artérielle cérébrale de 40 mmHg, suffit à provoquer la syncope (Hainsworth, 2004). La durée de l’asystolie provoquant ce même effet serait de l’ordre de six à dix secondes. Syncopes d’origines cardiologiques La pression artérielle cérébrale est sous le contrôle de plusieurs mécanismes : – les résistances vasculaires périphériques (RVP) ; – la régulation du volume intravasculaire ; – l’autorégulation de la circulation cérébrale. Elles sont liées à une baisse du débit cardiaque, soit par anomalies du rythme cardiaque, soit par défaillance de la « pompe » (baisse de l’inotropisme, obstacle à l’éjection). Chez le sujet sain, lors de l’orthostatisme, il se produit un déplacement de la masse sanguine sous l’effet de la gravitation vers les parties déclives du corps (abdomen, membres inférieurs) estimé à 0,5-1 L en dix secondes. La réduction de la précharge va stimuler les barorécepteurs (glomus carotidien, arc aortique) et les mécanorécepteurs cardiopulmonaires (paroi inféropostérieure du ventricule gauche, paroi thoracique). Les mécanorécepteurs vont activer les mécanismes compensateurs en stimulant le Épilepsies, vol. 22, n° 3, juillet-août-septembre 2010 Symptomatologie des syncopes Syncopes réflexes Elles sont définies par leur facteur déclenchant clairement identifié, elles sont alors dites réflexes en réaction à une situation stéréotypée. On distingue ainsi les syncopes à la toux, à la douleur, à la miction, etc. 188 Syncopes d’origine cardiovasculaire, parfois le cerveau s’en mêle Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. Tableau 1. Étiologies des syncopes Syncope réflexe : 30-50 % Hypotension orthostatique : 10-20 % Causes cardiaques, cardiovasculaires ou vasculaires : 5-15 % Syncope vasovagale Typique Non typique Syncope par hypersensibilité du sinus carotidien Syncope situationnelle Toux, éternuements Stimulation gastrointestinale (déglutition, défécation, douleur viscérale) Miction Manœuvre de Valsalva Lever des poids Douleur intense Dysautonomie Syndromes dysautonomiques primaires (Parkinson, atrophie multisystémique) Syndromes dysautonomiques secondaires (neuropathie diabétique, amyloïde) Syncope orthostatique d’origine médicamenteuse ou/et alcoolique Hypovolémie et/ou déshydratation Hémorragie, diarrhée, insuffisance surrénalienne, insuffisance veineuse HO postprandiale Arythmies cardiaques (cause principale) Dysfonctionnement sinusal (dont la maladie de l’oreillette) Maladie du système de conduction auriculoventriculaire Tachycardies paroxystiques (supra)ventriculaires Syndromes héréditaires (QT long, Brugada) Dysfonctionnement d’un appareil implanté Arythmies d’origine médicamenteuse Cardiopathie ou maladie cardiopulmonaire structurelle : 2-5 % Valvulopathie Infarctus/ischémie aiguë du myocarde Myocardiopathie obstructive Myxome de l’oreillette Dissection aortique aiguë Péricardite/tamponnade Embolie pulmonaire/hypertension pulmonaire Syndrome de vol vasculaire sous-clavier Dans ce cadre nosologique, on inclut les syncopes VSV et l’hypersensibilité du sinus carotidien. Tableau 2. Questionnaire diagnostique des syncopes vagales (Sheldon et al., 2006) La syncope VSV représente l’étiologie la plus fréquente des syncopes. La sémiologie des syncopes VSV est marquée par l’activation du système nerveux autonome à l’origine des prodromes à type de nausées, pâleur et sueurs. Le début des syncopes VSV survient rarement après 35 ans, on observe deux pics d’incidence entre 13-16 ans et chez le sujet âgés (Van Dijk et al., 2009). Le début des symptômes survient 30-60 secondes avant la perte de connaissance, permettant au patient d’apprendre à reconnaître les prodromes et de s’allonger pour prévenir la syncope. Les prodromes sont multiples : inconfort général, bouffée de chaleur, douleurs abdominales, nausées. Il s’en suit une sensation de tête vide, vertiges, sueurs froides, baisse de l’acuité visuelle et de palpitations. La perte de connaissance devient imminente, le patient devient pâle, baille, salive, on peut observer une mydriase et une tachypnée (Wieling et al., 2009). La perte de connaissance dure 10-20 secondes. Le réveil s’accompagne d’une profonde fatigue, pâleur, de nausées, faiblesse et bâillement. Lors des tentatives de lever rapide, la syncope peut récidiver. Questions Point Existe-t-il un antécédent de bloc bifasciculaire, asystolie, tachycardie supraventriculaire ou de diabète ? Les témoins ont-ils noté une cyanose lors de la perte de connaissance ? Les syncopes ont-elles commencé après l’âge de 35 ans ? Vous rappelez-vous de la perte de connaissance ? Avez-vous ressenti des sensations de tête vide ou lipothymie après être resté longtemps assis ou debout ? Avez-vous ressenti des sueurs ou des bouffées de chaleur avant la perte de connaissance ? Avez-vous ressenti des sensations de tête vide ou lipothymie lors de douleurs ou lors d’un examen médical ? La syncope est d’origine VSV si le score est ≥ –2 –5 –3 –3 –2 +1 +2 +3 L’hypersensibilité du sinus carotidien est considérée pathologique si la syncope survient avec une circonstance favorisante (rasage, col serré) ou en cas de malaise à répétition avec une pause supérieure à trois secondes lors du massage sinocarotidien (figure 1), accompagné ou non d’une baisse de la pression artérielle systolique de plus de 50 mmHg (Moya et al., 2009). Calkins et al. (1995) identifient quatre facteurs diagnostiques d’origine VSV : l’âge, le sexe, la durée de la période de récupération et la fatigue postcritique. Syncope secondaire à une hypotension orthostatique Dans leur série, Sheldon et al. (2006) proposent un score clinique permettant de classer correctement 90 % des patients avec une sensibilité de 89 % et une spécificité de 91 % pour le diagnostic de syncope VSV (tableau 2). L’hypotension est définie par la baisse de la pression artérielle systolique de plus de 20 mmHg et/ou de la pression diastolique de plus de 10 mmHg après trois minutes d’orthostatisme. 189 Épilepsies, vol. 22, n° 3, juillet-août-septembre 2010 X. Waintraub, F. Hidden-Lucet Massage sinocarotidien droit 11 25 mm / sec 10 mm / mV 1 50 ~ 0,5 - 4011z Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. aVF V1 V2 V4 V6 Figure 1. Hypersensibilité du sinus carotidien chez une patiente institutionnalisée présentant des syncopes à répétition, le massage sinocarotidien est positif avec une pause sinusale supérieure à trois secondes. Les principales causes sont l’hypovolémie, la dysfonction du système nerveux autonome ou iatrogénique (vasodilatateurs, diurétiques). hypertrophique) – parfois il s’associe un défaut de vasoconstriction réflexe ou une vasodilatation paradoxale entretenue par les traitements cardiotropes. La syncope survient le plus souvent après une station en orthostatisme prolongé. Les prodromes correspondent à l’ischémie rétinienne et à l’installation de l’hypoperfusion cérébrale. Ils associent : troubles visuels (voile noir, baisse de l’acuité), sensation de tête vide, vertige puis perte de conscience. Plus rarement, les patients se plaignent de cervicalgies, lombalgie ou d’angor, du fait de l’ischémie musculaire secondaire à l’hypotension. Classiquement, ces symptômes apparaissent au lever et disparaissent avec le décubitus. (Wieling et al., 2009) La clinique est celle de la syncope d’Adams-Stokes à l’emporte-pièce, de début et de fin brutaux, avec un retour immédiat à un état de conscience normale. Elle se distingue des syncopes réflexes par l’absence de facteur déclenchant et de prodromes, en particulier des signes d’activation du système nerveux parasympathique. La récupération est rapide sans asthénie postcritique, avec parfois une érythrose du visage fugace. Il faut rechercher la notion de palpitations, de douleur thoracique et les antécédents familiaux de mort subite. La survenue de la syncope à l’effort ou en décubitus, l’existence d’une cardiopathie doivent éveiller le doute du clinicien sur l’origine cardiologique de la syncope (figure 2). Le dépistage de l’hypotension par la mesure en orthostatisme est parfois pris à défaut. Dans ces cas, on peut proposer des manœuvres provocatrices (alimentation, exercice physique) ou une mesure par Holter tensionnel. Dans ce contexte, il faut insister sur l’utilité de l’électrocardiogramme pour le dépistage d’une cardiopathie. Syncope d’origine cardiaque Ces syncopes se répartissent en deux grandes catégories, les causes rythmiques, bradycardie (figure 2) ou tachycardie (figure 3) et les cardiopathies structurelles. Le mécanisme est une inadéquation du débit cardiaque au débit cérébral, que ce soit par une inefficience de la « pompe cardiaque » ou par un obstacle à l’éjection (rétrécissement aortique, cardiomyopathie Épilepsies, vol. 22, n° 3, juillet-août-septembre 2010 Diagnostic différentiel : cœur ou cerveau L’errance diagnostique entre syncope et épilepsie est fréquente comme en témoigne la littérature médicale. L’évaluation des patients traités pour une épilepsie avec un EEG normal ou une résistance au traitement médicamenteux identifie 49 190 Syncopes d’origine cardiovasculaire, parfois le cerveau s’en mêle 1 mV II 1 mV Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. II Figure 2. Patient hospitalisé pour des syncopes récidivantes. Le tracé de la télémétrie met en évidence une fibrillation atriale paroxystique associée à des pauses postréductionnelles responsables des syncopes. 6144728 22Sept06 15:49:20 FC:77 Sp02:94 ID#: 0922 II Figure 3. Tachycardie ventriculaire polymorphe non soutenue, chez une patiente prise en charge par le Samu pour des syncopes récidivantes. Quels examens complémentaires ? (Edfors et al., 2008) à 71 % (Rodrigues et al., 2010) de syncope. La difficulté diagnostique réside dans la survenue lors de la perte de connaissance de myoclonies, elles surviennent chez 12 à 75 % des patients présentant des syncopes VSV (Bergfeldt, 2003). L’interrogatoire minutieux du patient et des témoins permet de distinguer syncope et épilepsie ; ces différents éléments sont repris dans le tableau 3. La hiérarchie des examens dépend du risque du patient. Les patients à faible risque lors du premier épisode ne nécessitent pas de bilan complémentaire ; la survenue de récidive implique un bilan plus complet. Le patient à haut risque doit être hospitalisé pour bilan diagnostique et thérapeutique. Il existe des scores cliniques d’usage facile, ayant démontré une bonne sensibilité et spécificité, comme le score élaboré par Sheldon (tableau 4). L’usage des enregistreurs d’événement de longue durée a modifié la prise en charge des patients. La possibilité de surveiller le rythme cardiaque sur plusieurs semaines (à hauteur d’un mois) avec les systèmes externes ou plusieurs mois avec les systèmes implantables (14-18 mois). Ces dispositifs permettent, selon les séries, de corréler les symptômes avec le rythme cardiaque chez 35 à 88 % des patients présentant des syncopes inexpliquées (Task Force members et al., 2009). Leur intérêt surpasse celui lui du holter, examen de débrouillage, lorsqu’une cause rythmique est suspectée, du fait de sa faible durée d’enregistrement (24 à 48 heures) (Fitchet et al., 2003 ; Sivakumaran et al., 2003). Quand hospitaliser un patient ? Le but de l’hospitalisation est d’établir un diagnostic et de prévenir un événement grave. Les études récentes ont développé de nouveaux outils, sous forme de score clinique, pour répondre à cette problématique. Ces scores pronostiques permettent de stratifier le risque de morbimortalité à moyen terme (Moya et al., 2009) (tableau 5). Le Tilt test garde des indications en cas d’épisode dans des circonstances à risque de traumatisme ou devant des syncopes récidivantes inexpliquées en l’absence de cardiopathies, en présence d’une cardiopathie organique avec un bilan négatif. Le corollaire d’un risque élevé étant le bilan hospitalier. Ces scores reposent sur l’existence d’une cardiopathie sous-jacente. 191 Épilepsies, vol. 22, n° 3, juillet-août-septembre 2010 X. Waintraub, F. Hidden-Lucet Tableau 3. Diagnostic différentiel épilepsie et syncope Signes cliniques suggérant le diagnostic Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. Signes lors de la perte de connaissance (tels qu’observés par un témoin) Symptômes avant l’événement Symptômes après l’événement Crise d’épilepsie probable Syncope probable Durée longue Les mouvements tonicocloniques sont habituellement prolongés et leur apparition coïncide typiquement avec la perte de connaissance Mouvements cloniques d’un hémicorps Automatismes clairs tels que la mastication, la déglutition (lors d’une crise partielle) ou l’hypersalivation Hypertonie Morsure de la langue à sa partie latérale, ou morsure de la face interne des joues Cyanose du visage Aura inconstante et variée : hallucinations visuelles, auditives, olfactives, sensitives, ou mnésiques (impression de déjà-vu), etc. Confusion prolongée (plusieurs minutes) Douleurs musculaires Durée courte Les mouvements myocloniques sont inconstants, toujours de courte durée (< 15 s) et ils commencent après la perte de connaissance Hypotonie Pâleur Nausées, vomissements, gêne abdominale, sensation de froid, transpiration Sensation de tête vide, vision trouble Absence de confusion ou de courte durée (quelques secondes) Nausées, vomissements, pâleur (à médiation neurale) Autres éléments cliniques de Antécédent familial d’épilepsie moindre valeur et évocateurs Survenue durant le sommeil de crise (faible spécificité) Perte des urines notée après l’événement Céphalée après l’événement Somnolence après l’événement Tableau 4. Score clinique permettant d’orienter le diagnostic entre syncope et épilepsie de Sheldon (Sheldon et al., 2002) Questions Tableau 5. Critères d’hospitalisation Circonstances dans lesquelles il est recommandé d’hospitaliser un patient admis pour syncope en service d’urgence Points si réponse positive Cardiopathie connue ou fortement suspectée Syncope survenue au cours d’un effort ou lors du décubitus Syncope responsable d’une blessure grave Histoire familiale de morts subites Sujets sans cardiopathie, mais avec des palpitations précédant la syncope Troubles du rythme ou de la conduction : tachycardie ventriculaire non soutenue, bloc bifasciculaire, bloc de branche complet, bradycardie sinusale (< 50 bpm) Préexcitation ventriculaire QT allongé ou court, signe de Brugada Onde T négative dans le précordium droit, onde Epsilon évoquant une dysplasie arythmogène du ventricule droit Comorbidité importante : anémie sévère, anomalie électrolytique Morsure de la langue après l’événement ? 2 Impression de « déjà-vu » ou de « jamais vu » 1 avant l’événement ? Stress émotionnel avant-coureur en rapport 1 avec l’événement ? Observation par les témoins d’une rotation 1 de la tête vers un côté durant l’événement ? Observation par les témoins d’une absence 1 de réaction suite à une sollicitation verbale, d’une posture corporelle inhabituelle, d’extrémités tremblantes, de pertes de mémoire après l’événement ? Observation par les témoins d’un état 1 de confusion après l’événement ? Position assise ou debout prolongée –2 immédiatement avant l’événement ? Sueurs avant l’événement ? –2 Position assise ou debout prolongée –2 immédiatement avant l’événement ? Épilepsie si le score est ≥ 1, Sensibilité syncope si < 1 de 94 % et spécificité de 94 % Épilepsies, vol. 22, n° 3, juillet-août-septembre 2010 L’échocardiographie se justifie en cas d’arguments en faveur d’une cardiopathie sous-jacente. L’exploration électrophysiologique endocavitaire s’adresse aux patients porteurs d’une cardiopathie avec suspicion de syncope d’origine rythmique, la rentabilité en cas d’ECG normale en l’absence de cardiopathie est quasi nulle (Linzer 192 Syncopes d’origine cardiovasculaire, parfois le cerveau s’en mêle et al., 1991). Elle vise à démasquer par la mesure des temps de conduction intracardiaque et des manœuvres de stimulation, une dysfonction sinusale, un trouble de la conduction ou une tachycardie. Fitchet A, Stirling M, Burnett G, Goode GK, Garratt CJ, Fitzpatrick AP. Holter monitoring vs tilt testing in the investigation of suspected vasovagal syncope. Pacing Clin Electrophysiol 2003 ; 26 : 1523-7. Hainsworth R. Pathophysiology of syncope. Clin Auton Res 2004 ; 14 (Suppl 1) : 18-24. Haute Autorité de santé, 2008. www.has-sante.fr/./syncopes-synthesedes-recommandations Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 24/05/2017. Conclusion Kapoor WN, Karpf M, Maher Y, Miller RA, Levey GS. Syncope of unknown origin. The need for a more cost-effective approach to its diagnosis evaluation. JAMA 1982 ; 247 : 2687-91. Le diagnostic étiologique des syncopes est une situation clinique fréquente et complexe où interagissent cerveau et cœur. La multiplicité des étiologies, la nécessité d’un interrogatoire policier et la faible utilité des examens complémentaires rendent la démarche du clinicien difficile. Il faut insister sur la bonne analyse sémiologique du patient pour démêler l’écheveau, stratifier le risque du patient et ainsi l’orienter au mieux vers le cardiologue ou le neurologue. Kapoor WN, Peterson J, Wieand HS, Karpf M. Diagnostic and prognostic implications of recurrences in patients with syncope. Am J Med 1987 ; 83 : 700-8. Kapoor WN. Diagnostic evaluation of syncope. Am J Med 1991 ; 90 : 91-106. Kenny RA, O’Shea D, Walker HF. 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