But :
Dans tout le texte, K désigne un corps et L une extension de K.
On va étudier les problèmes :
(1) Soit K un corps,
][XP K
un polynôme. Peut-on trouver une extension L de K dans
laquelle P admet au moins une racine ? Dans laquelle P est scindé ?
(2) En changeant de corps, change t’on les propriétés d’une matrice ?
I R-similitude et C-similitude
Théorème :
Deux matrices réelles A, B sont R-semblables si et seulement si elles sont C-semblables.
Démonstration :
Si
1
PBPA
)(R
n
GLP
, alors A et B sont C-semblables car
)()( CR nn GLGL
.
Réciproquement, supposons que
1
PBPA
)(C
n
GLP
.
On peut écrire
21 iPPP
1
P
et
2
P
sont réelles (pas forcément inversibles).
Comme
, on a
11 BPAP
et
22 BPAP
.
Si l’une des deux matrices réelles est inversible, on peut conclure.
Sinon, il existe
Rx
tel que
21 xPP
est inversible (réelle), et on peut encore conclure.
En effet,
)det()( 21 xPPxf
est une fonction polynomiale réelle, et n’est pas nulle car
0)det()( Pif
, donc elle prend des valeurs non nulles sur R.
II Invariance du rang
Théorème :
On a
)()( ,, LK pnpn MM
et le rang d’une matrice
)(
,K
pn
MA
est le même que l’on
considère que A est à coefficients dans K ou dans L.
Ainsi, le rang d’une matrice à coefficients dans K peut s’obtenir aussi bien à l’aide
d’opérations élémentaires à coefficients dans K que dans L.
Démonstration :
On note r le rang de A sur K. On a alors
QPJAr
avec
)()( LK nn GLGLP
et
)()( LK pp GLGLQ
donc le rang de A sur L est aussi r.
Corollaire :
Soit
0AX
un système de n équations à p inconnues à coefficients dans K de rang r.
Si
p
rp
XX K
),...(1
est une base de l’espace des solutions dans K, c’en est aussi une de
l’espace des solutions dans L.
Démonstration :
Les
i
X
sont aussi des solutions à coefficients dans L et la matrice P représentant
),...( 1rp
XX
dans la base canonique de
p
L
est aussi celle qui représente
),...( 1rp
XX
dans la
base canonique de
p
K
. P est donc de rang
rp
sur L. Autrement dit,
),...( 1rp
XX
est libre
dans le L-ev
p
L
; c’est donc une base de l’espace des solutions de
0AX
dans
p
L
puisque
cet espace est aussi de dimension
rp
car le rang de A est le même sur K et L.
III Invariance du polynôme caractéristique et du polynôme minimal
Changement de corps en algèbre linéaire
Théorème :
On a
)()( LK nn MM
et les polynômes caractéristique et minimal de
)(K
n
MA
sont
les mêmes que l’on considère que A est à coefficients dans K ou dans L.
Démonstration :
Pour le polynôme caractéristique, c’est évident…
Soit
][][ XXm LK
le polynôme minimal de A sur K et M son polynôme minimal
sur L. On a
0)(
~Am
, donc M divise m dans
][XL
.
Par ailleurs, si d est le degré de m, la famille
),...,( 1d
nAAI
est libre dans le K-ev
)(K
n
M
, donc la matrice
)(
,
2K
dn
MP
qui représente cette famille dans la base canonique est
de rang d. Mais P représente aussi la famille
),...,( 1d
nAAI
dans la base canonique de
)(L
n
M
(les deux bases sont constituées des mêmes matrices
ji
E,
). La propriété d’invariance du rang
montre alors que le rang de P sur L est aussi d donc que
),...,( 1d
nAAI
est libre dans le L-ev
)(L
n
M
, et donc A n’a pas de polynôme annulateur non nul dans
][
1X
d
L
, ce qui impose
dM deg
et donc
mM
IV Extension du I.
Théorème :
Si K est infini, deux matrices
BA,
de
)(K
n
M
semblables sur L sont semblables sur K.
L’autre sens est toujours aussi évident.
Démonstration :
Supposons A et B L-semblables. Alors le système
PBAP
est un système de
2
N
équations à coefficients dans K d’inconnues les coordonnées
)( ,ji
P
de P dans la base
canonique. Comme ce système est représenté par une matrice à coefficients dans K
(dépendants des coefficients de A et B), le rang est le même que l’on regarde les solutions
)(K
n
MP
ou dans
)(L
n
M
.
Soit
N
PP,...
1
une base de solutions du système
PBAP
dans
)(K
n
M
. La matrice qui
représente
),...( 1N
PP
dans la base canonique de
)(K
n
M
est de rang N donc la matrice qui
représente
),...( 1N
PP
dans la base canonique de
)(L
n
M
aussi. Ainsi,
),...( 1N
PP
est un système
libre de solutions de
PBAP
dans
)(L
n
M
. Comme le système est de rang N, c’en est une
base.
Autrement dit, toute solution
)(L
n
MP
de
PBAP
s’écrit
N
iii PxP 1
avec
L
i
x
.
Or, ce système a une solution inversible donc la fonction polynomiale
N
iiiN Pxxxf 1
1det),...(
n’est pas la fonction nulle sur
N
L
, ce qui veut dire que
),...( 1N
xxf
est somme de termes
N
n
N
nxax ...
1
1
(où
Ka
car s’exprimant à l’aide des
j
P
) dont au moins l’un
est non nul. On conclut en utilisant le lemme :
Lemme :
Si
],...[ 1n
XXf K
est un polynôme non nul et si K est infini, alors la fonction
polynomiale
KK
N
f:
~
n’est pas identiquement nulle.
En effet, montrons le résultat par récurrence sur N :
Le cas
1N
est connu pour K infini.
Soit
2N
, supposons la propriété vraie pour
1N
. Soit
],...[ 1n
XXf K
. On écrit
alors
d
i
i
Ni XPf 1
avec
],...[11
Ni XXP K
. L’un au moins des
i
P
est non nul.
Donc, par hypothèse de récurrence, on peut fixer
),...(11
n
aaa
tel que
d
i
i
Ni XaP
1)(
ne
soit pas le polynôme nul ; alors, comme K est infini, il existe x tel que
0)(
1
d
i
i
ixaP
, et dans
ce cas
0),,...( 11
xaaf n
ce qui achève la récurrence.
Ainsi, pour en revenir au théorème, le lemme montre que
PBAP
a une solution
inversible, disons
N
iii PxP 1
 
Ki
xni ,,1
Donc
1
PBPA
pour une matrice
)(K
n
GLP
.
V Construction de corps
Théorème :
Soit K un corps, et
][XP K
. Alors il existe une extension L de degré fini de K dans
laquelle P est scindé.
Démonstration :
Par récurrence (forte) sur
mPd deg
m est la somme des multiplicités des racines
de P dans K.
Pour
0d
, P est scindé sur K, donc
KL
convient.
Soit
1d
, supposons la propriété vraie pour tout corps K et tout
dd '
et soit
][XP K
tel que
mPd deg
. Soit R un facteur irréductible de P de degré
2r
. Alors
l’anneau quotient
])[./(][ XRX KKL
est un corps, et c’est une extension de dimension r de
K, dont
1
,...,1 r
XX
est une K-base. En plus, on a
0P
dans L donc
X
est racine de P.
Ainsi, sur L, P a une racine de plus et on peut appliquer l’hypothèse de récurrence à
][XP L
: on peut trouver une extension finie M de L, donc aussi de K dans laquelle P est
scindé.
VI Applications
Pour toute matrice
)(K
n
MA
, il existe L, extension finie de K, dans laquelle A est
trigonalisable.
Le polynôme minimal d’une matrice
)(K
n
MA
divise son polynôme
caractéristique (CayleyHamilton) ; de plus, les deux ont les mêmes facteurs
irréductibles dans
][XK
.
Démonstration :
Soit R un facteur irréductible de
A
min
dans
][XK
et L une extension finie de K dans
laquelle R est scindé. Si a est une racine de R, on a alors
0)(min a
A
, donc a est une valeur
propre de A dans L (car
A
min
est aussi le polynôme minimal de A sur L) et a est donc une
racine de
A
. Ainsi, R et
A
ne sont pas premiers entre eux dans
][XK
(on ne peut pas écrire
une relation de Bézout puisque
0)()( aaR A
) donc R, qui est irréductible, divise
A
.
D’où le résultat.
Soit
)(
,Z
pn
MM
. On suppose que
0MX
a une solution non nulle à coefficients
réels positifs. Alors il a une solution non nulle à coefficients dans N.
Démonstration :
Quitte à supprimer des colonnes de M, on peut supposer que
0MX
a une solution à
coefficients strictement positifs.
Soit
p
N
VV Q,...
1
une base de solutions rationnelles de
0MX
. Selon le corollaire du
II,
p
N
VV Q,...
1
est aussi une base de l’espace des solutions réelles de
0MX
. Par
hypothèse, il existe donc des réels
N
xx ,...
1
tels que
N
iiiVxX 1
est à coefficients strictement
positifs. Prenons pour tout
 
ni ,1
une suite
Nni nr ))((
de rationnels tendant vers
i
x
. Pour n
assez grand,
N
iii Vnr
1)(
, qui tend vers X, est un vecteur rationnel à coefficients strictement
positifs. En multipliant par un dénominateur commun des
)(nri
, on obtient une solution non
nulle à coefficients dans N.
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