QuickTi me™ and a decompressor are needed to see t his pict ure. Fin de Partie de Samuel Beckett Quelques éléments de synthèse I-Le titre Il file la métaphore du jeu et signale la phase finale dans laquelle on a perdu ou gagné. La traduction du titre par Beckett en anglais revient sur cette idée de façon encore plus explicite : Endgame C’est un titre qui peut résonner comme une remise en question du théâtre « traditionnel ». Ainsi Beckett dans son roman détourne et parodie Shakespeare (« Mon royaume pour un cheval » est emprunté à Richard III qui devient « Mon royaume pour un boueux » ( alors que les parents de Hamm vivent dans des poubelles ) Le titre fournit aussi un effet de mise en abyme : la « partie » peut faire songer aux actes et aux scènes qui découpent le texte dramaturgique traditionnel. D’ailleurs le début de la pièce ressemble à un lever de rideau (cf. l’abondance des didascalies) Il peut aussi indiquer le caractère lacunaire de la pièce : on n’a que « la fin de partie » et non la pièce entière. On se rappelle la déclaration étonnante de Hamm qui dès le début annonce la fin. De la même façon la fin de la pièce fait penser au moment où l’on baisse le rideau. Il y a de multiples effets de mise en abyme dans la pièce notamment lorsque Clov parle d’ »une foule en délire » quand il regarde vers le public avec sa lorgnette. On a aussi dans les dialogues entre les personnages beaucoup de vocabulaire appartenant au lexique du théâtre : « réplique » « aparté » etc. II-Le lieu de l’action Le lieu se caractérise par son caractère vide : une pièce , des fenêtres, avec des objets : l’escabeau, la lorgnette, le fauteuil à roulettes. La lumière y est « grisâtre » « Ca pue ». Beckett refuse donc que le lecteur puisse identifier le lieu. Le lieu peut faire songer à un refuge ( après la guerre ? ». Certains y ont vu symboliquement un crâne avec deux yeux (= les fen^tres) pour regarder le monde. D’autres critiques y ont vu une Eglise En tout cas, ce qu’il faut noter c’est que toute l’action s’y concentre. On n’en sort pas. Comme dans une tragédie classique, on a une unité de lieu et l’action se pass en huis clos. III-Le temps Contrairement à la tragédie classique qui se déroule en 24 heures ou le drame romantique qui peut étaler l’action sur plusieurs mois ( voir Ruy Blas). Beckett nous donne l’impression que le temps de l’action et la durée de la représentation se confondent. Les dialogues évoquent un passé vague notamment à travers la figure des parents : Nagg et Nell Et on voit bien dès le départ que Beckett joue avec la temporalité : HAMM. - Quelle heure est-il ? CLOV. - La même que d'habitude. Le réveil qui devrait objectivement donner une indication ne sert à rien car les personages se désintéressent de l’heure qu’il donne. HAMM. - Quelle heure est-il ? CLOV. - La même que d'habitude. […] Zéro. (p. 16) Ce qui caractérise la temporalité dans la pièce c’est la repetition : les personnages répètent les memes phrases s’inquiètent de smêmes choses ( le temps le chien etc.) Pourtant on a aussi le sentiment que la fin annoncée est pour bientôt. “Ca va finir” “ca avance” “ca ne va pas vite”. La fin est effective pour Nell qui meurt. Mais tout et toute chose semble voué à une fin: le chien a perdu une patte, Nagg a perdu sa dent, Hamm veut mourir et plusieurs fois on note des allusions à la fin du monde notamment page 65 avec le réveil qui semble sonner “le jugement dernier” Mais à travers les indications temporelles la pièce n’arrête pas de répéter que le temps passé. Fin de partie peut se résumer en définitive par la formule de Hamm : " La fin est dans le commencement et cependant on continue." (p. 89) IV_Les personnages Ils sont tous infirmes : Nell et Nagg sont culs de jatte ; Hamm ets paralysé et aveugle ; Clov est le plus valide mais sa demarche raide traduit une difficulté à se mouvoir. Il y va mal. En quelque sorte le sort de Hamm paraît le guetter. Les corps sont omniprésents dans la pièce et ils sont vus dans leur degradation. Ils donnent l’image d’une humanité défaillante et miserable. Leur identité est imprecise : notamment pas de nom proper, pas d’identité sociale. Mais leur nom a l’air d’avoir un sens : to nag= harceler en anglais/ Hamm et Clov peuvent faire songer à Hammer= le marteau et Clov = le clou. On peut aussi songer à “ham actor” qui signifie un mauvais acteur etc. Les personnages sont caractérisés par leur lien familial mais ce lien ne semble pas aller de pair avec une veritable affection . Hamm insulte souvent son père. Et clov semble être le fils adoptif de Hamm ( mais on ne sait qui est sa mere). Hamm souhaite se débarrasser de ses parents. Bref la vie est semble-t-il un fardeau. L’infirmité des personnages les rend aussi dependants les uns des autres : Hamm règne en despote sur toute la maison ; Clov émet le souhait de partir mais il semble aussi dépendre de Hamm ( il n’ pas la combinaison du buffet par exemple) et il affirme continuer à obéir à Hamm sans savoir pourquoi : "Il y a une chose qui me dépasse. Pourquoi je t'obéis toujours." (p. 97) En somme le texte fonctionne sur une relation de pouvoir qui peut faire songer aux duos de comédie entre maîtres et valets par exemple mais ici les relations sont considérablement dégradées. Le couple de Nell et Nagg donne une image dégradée du couple En clair les personnages forment une sorte de famille qui apparaît comme une image dégradée de l’humanité : y sont représentés les divers âges de la vie , les divers sexes, les divers liens susceptibles de se nouer entre les humains. Mais on a une image dégradée de la condition humaine : l’homme attend une fin qui ne vient pas Nagg s'informe à un moment donné de ce que devient son père. "Il pleure" lui répond Clov. "Donc il vit" = parodie du “cogito ergo sum” de Descartes ( Je pense donc je suis) Donc dans la pièce la manifestation de la vie c’est la peine : l’être humain est donc un être qui souffre. V-Le comique On se souvient du “Rien n’est plus drôle que le Malheur” inté”gré au dialogue d’un des personnages. On est donc en rupture avec le théâtre classique car le paradoxe de cette déclaration paraît effacer les frontières entre les genres ( ce que le drame romantique avait déjà amorcé en autorisant le mélange des tonalités = registres) Le comique de gestes dans la pièce s’apparente au burlesque ( tel qu’on le voit dans les films de Chapilin par exemple) . Exemple jeu de cClov avec l’escabeau, sortie de Nagg des poubelles, l’impossibilité de Nagg et Nell de s’embrasser. L’infirmité des personnages, leur faiblesse, leur difficulté à se mouvoir devient donc bien un des ressorts du comique. Le duo Hamm et Clov peut faire penser au duo de Clowns avec l’Auguste nez rouge, perruque chaussures immenses impertinent et bouffon. Et le clown blanc : vêtement chatoyant, masque du Pierrot lunaire ; digne et autoritaire Le comique de mots : -usage des mots familiers ou des tournures familières ou grossières : “La vache!” “Je m’en fous de l’univers” -les jeux sonore : « Le fanal est dans le canal » -les jeux de mots : Confusion entre sens propre (à propos d'une lumière) et sens figuré (à propos d'une personne). quand Hamm dit à Clov : " Laisse tomber.", Clov prend l'expression au pied de la lettre et "laisse tomber les objets qu'il vient de ramasser." (p. 77) La Parodie : -Beckett transforme des citations de Shakespeare : “Mon royaume pour un boueux” ou de Descartes ( voir plus haut) -Hamm se prend pour un narrateur et un conteur : il fait son “roman” Le comique naît donc souvent du Malheur des personages : de leur degradation, d e leurs relations mais c’est un comique qui pourrait s’apparenter à de l’humour noir : on rit de la degradations, de la mort qui attend tout être humain. Bref le spectateur est invite à rire de personages et de siituatons misérables qui renvoient à sa propre condition. VI-Les objets dans Fin de partie Pour anlyser les objets, je vous renvoie à http://courstlmathias.wordpress.com/2011/01/09/partie-2-fin-de-partie-beckett-les-objets/ BILAN On notera la façon dont Beckett peut apparaître comme l’héritier d’une tradition théâtrale : -comme dans une tragédie il utilise un huis clos -comme dans une tragédie également il peut nous donner seulement la fin de partie : la tragédie se déroule imperturbablement de la crise et de son acme ( point culminant) à son dénouement -on peut avoir l’impression que comme dans une comédie on a une famille ( voir les comedies moliéresques) mais aussi que la pièce fonctionne sur des rapports de pouvoir et de domination des uns sur les autres ( qui peut faire songer au duo maître valet de la comédie) On peut aussi songer qu’il prend le contrepied de la tradition théâtrale -Le lieu est unique mais non identifiable ; le temps de l’action correspond au temps de la representation -La pièce fonctionne sur la repetition ( memes gestes memes obsessions et le dénouement n’en est pas un : Clov vraisemblablement ne part pas et l’action telle qu’elle a lieu jusque là semble vouée à recommencer -les objets prennent une grande place ( parfois meme autant que les homes, ce qui peut faire songer à ce qui se passé dans le Nouveau Roman). Ils n’ont pas une fonction véritablement dramatique ( comme la letter chez Marivaux par exemple) mais semblent confirmer les obsessions des personages ou devenr representatives du personage lui-même. D’une certaine façon on peut se dire aussi que les personages : Nagg et Nell par exemple, Sont rendus à l’état de detritus donc d’objets. -Beckett mêle les tonalities. Il nous donne l’image d’une humanité miserable et dérisoire mais parvient à nous faire rire de cette situation. Cf Beaumarchais : “je m’empresse de rire de tout avant que d’être oblige d’en pleurer” -Il va à l’encontre de l’illusion théâtrale en nous rappelant par des effets de mise en abyme que nous sommes bien dans une pièce de théâtre et non dans la réalité.