cycle le corps / LNA#65
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L’évolution anatomique s’adapte à cette nouvelle règle du
jeu, en dotant les femmes de signaux érotiques antérieurs
(les seins permanents) et postérieurs (les fesses), les hommes
ayant respectivement leur sexe et leurs fesses aussi.
Mais, surtout, les sociétés humaines ont développé le travail
sur le corps, travail d’ornementation, de parure, de jeu avec
les coiffures et les vêtements, propre à l’espèce. Cependant,
avec l’agriculture et l’élevage qui entraînent l’accumulation de
biens, donc la création du mariage comme moyen de déter-
miner les enfants légitimes afin de transmettre les héritages,
les femmes seront réparties en deux groupes : les épouses,
réservées à leur propriétaire, confinées dans l’espace privé, et
n’ayant pas besoin de séduire ; les autres, à qui est laissée la
liberté d’être dans l’espace public, donc d’être séductrices.
Historiquement, certaines sociétés ont maintenu ce clivage.
La société européenne occidentale, elle, a maintenu les
épouses dans l’espace public, permettant à toutes les femmes
de séduire. Cette culture a donc développé un « travail des
apparences » particulièrement important si bien que, dès
le Moyen Âge au moins, femmes et hommes y cherchent
à plaire par les habits, les coiffures, les bijoux, les soins du
corps, le langage et les manières. La vie sociale intègre des
règles de courtisement qui valorisent le fait que les relations
entre individus intègrent la séduction.
Pour les hommes, on aura par exemple les braguettes
médiévales, les bustiers avantageux de la Renaissance, les
culottes moulantes des aristocrates, etc. Pour les femmes,
les décolletés, les tailles serrées, les corsets et les guêpières,
les hanches élargies, les soutiens-gorge pigeonnants… Pour
les deux sexes, les bijoux, les fards, les talons hauts qui
augmentent la taille et la cambrure, etc.
Puis, quand, au XXème siècle, le vêtement s’ajuste au corps des
femmes, il ne reste plus qu’à transformer le corps lui-même,
et c’est l’avènement de la chirurgie esthétique.
L’imaginaire du corps
Une autre caractéristique de l’espèce humaine vient du
développement d’un cortex cérébral qui aboutit à donner
la prééminence à l’imaginaire, à la représentation intellec-
tuelle. Ce que les individus s’imaginent va déterminer les
modalités de leurs activités.
Or, les différences sexuelles physiques ont été imaginées,
depuis les Grecs jusqu’à l’époque moderne, comme fon-
dées sur la symétrie, les femmes ayant en creux ce que les
hommes avaient en relief : aux testicules correspondaient les
ovaires, à la verge, le vagin, au gland, la vulve.
La conséquence sur le « corps à corps » était qu’il apparaissait
alors logiquement comme fondé sur l’insertion du saillant
dans le creux, et comme déterminant un « actif » qui pénètre
et un « passif » qui est pénétré. La réflexion sur la sexualité
comme sa pratique concrète en ont été particulièrement
marquées.
Aujourd’hui, la reconnaissance que le clitoris n’est pas que
sa petite extrémité saillante, mais comprend quatre racines
d’environ huit centimètres, formant un ensemble interne
aussi volumineux que la verge, amène le « corps à corps »
à tenir compte de cette nouvelle donne, et à accorder de
l’importance à d’autres jeux érotiques. Avec une autre
explication des modalités d’accession à l’orgasme chez les
femmes, d’autres règles du jeu se mettent en place, troublant
les certitudes, déstabilisant les habitudes.
Conséquences sur la sexualité contemporaine
Si la sexualité humaine n’offre plus de séquences comporte-
mentales automatiques, innées, elle doit être apprise et faire
l’objet d’un apprentissage.
Si l’autre n’a pas un rythme sexuel synchronisé automatique-
ment par la simultanéité des périodes de rut et de chaleur,
chacun doit apprendre à susciter le désir de l’autre pour
qu’il réponde au sien, aussi bien que susciter son propre
désir pour répondre à celui de l’autre. Sans conditionnement
hormonal déterminant, les techniques de séduction
deviennent prépondérantes.
Chaque adolescent doit donc faire l’apprentissage de
l’ensemble des comportements qui seront mis en jeu dans
l’accomplissement de la sexualité adulte, et chaque adulte
doit vérifier qu’il a acquis les maîtrises nécessaires à leur
réalisation.
Références:
-www.sexodoc.fr
-Élisa Brune, Yves Ferroul, Le Secret des femmes, Voyage au cœur du plai-
sir et de la jouissance, éd. Odile Jacob Poche, 2010.