Retrouver l'Histoire
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Retrouver l'Histoire
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Date de mise en ligne : samedi 21 août 2004
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Retrouver l'Histoire
L'analyse de la diaspora permet d'enlever un peu des illusions sous lesquelles une idéologie
d'extrême-droite prétend définir une sorte de race juive.... L'histoire nous permet de voir
qu'il n'y a pas de peuple juif, mais un monothéisme en expansion dont la forme fut dès
l'origine la dispersion dans de nombreux peuples avec conversion des populations locales,
comme le christianisme ou l'Islam.
Mythe et Histoire
Aujourd'hui le sionisme prétend ramener l'histoire des Juifs et du judaïsme à un mythe, la victimisation élection d'un
peuple depuis toujours à la recherche de la nation et qui aurait trouvé "sa terre sans peuple" en Israël. Les juifs de la
diaspora (dispersion) seraient en attente du "retour" puisque condamnés hors Israël à subir l'éternité de
l'antisémitisme.
Un retour sur l'histoire montre le caractère fallacieux d'un tel mythe. Pour l'historien, contraint de combiner la tradition
biblique et les techniques traditionnelles archéologiques en particulier, un fait est patent : l'histoire d'Israël, de la
Judée des temps bibliques, se confond avec celle des grands empires et royaumes de la région. Le pays de Canaan
appartient à cette zone mésopotamienne d'invasions, qui depuis Babylone, l'empire Perse, l'Egypte, les monarchies
hellénistiques, Rome, Byzance et les Turcs, jusqu'aux colonisations britanniques et Françaises s'y sont succédées. Il
s'agit d'un peuple sémite comme en témoigne sa langue hébraïque, c'est-à-dire appartenant à la zone désertique
syro-mésopotamienne avec ses zones fertiles. Tous les faits rapportés dans l'ancien testament relèvent de cette
histoire et la seule originalité d'un petit peuple de pasteurs, qui ne brille d'aucun éclat particulier, est celle de
prétendre défendre un Dieu unique. Ce qui visiblement ne préoccupe pas d'une manière centrale les grands
conquérants pour qui le tribut en hommes sur les populations vaincues était une habitude, ils bénéficiaient ainsi
d'une main d'oeuvre qui construisait monuments, temples et palais.
Même si l'on suit la bible, dont les références temporelles sont souvent sujettes à caution parce qu'elles interprètent
une identité mythique, la diaspora (dispersion) n'est pas seulement l'exil dont il est question au VI e siècle (Avant
notre ère), mais la dispersion a commencé dès le temps d'Achab (IX e siècle) et surtout lors de la destruction de
Samarie (721). L'histoire nous montre que les principaux centres de ce monothéisme originel furent Babylone (VIe
siècle), Alexandrie (IVe) Antioche (IIe) et Rome (1er). La diaspora témoigne certes des lendemains d'invasion par un
nouvel empire, avec la déportation des populations conquises, mais aussi de la profonde unicité régionale et du
déplacement volontaire de populations tribales pastorales, artisanales urbaines, dans toute la région.
De cela on peut tirer une première conséquence : Il est probable que les Juifs orientaux, arabes, ramenés de force
en Israël après la création de cet État, appartenaient à leurs pays depuis des siècles, voire des millénaires et
généalogiquement n'avaient peut-être jamais résidé en pays de Canaan.
Les Juifs ne sont pas seulement en exil par suite des déportations de conquérants, ils sont dans les nations, ils en
font partie. Ils ont longtemps pratiqué le prosélytisme monothéiste, dont le christianisme n'était au départ qu'un
avatar et donc les peuples appartenant à la diaspora aujourd'hui ne sont pas les descendants d'Abraham, surtout
que l'existence historique de celui-ci est fortement contestée. Pour certains historiens, cette référence marquerait
simplement l'origine sumérienne (donc non sémite mais perse) du mythe religieux fondateur qu'est la Genèse. Pas
plus que les peuples parlant l'arabe ne sont les descendants directs des tribus bédouines et des villes commerçantes
de caravane de l'actuelle Arabie dans lesquelles est apparu l'Islam.
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C'est une absurdité historique que d'imaginer que les juifs actuels soient les descendants d'Abraham ou même des
habitants de la terre cananéenne et doivent revenir à leur pays d'origine, parce que tous les juifs actuels pas plus
que les chrétiens ne sont originaires de ce pays. Il est plus vraisemblable de voir les descendants généalogiques
dans les Palestiniens parce que quelles que soient les transhumances volontaires ou involontaires des peuples, la
population paysanne reste sur sa terre. Comme nous venons de le voir la diaspora (dispersion) existe dès l'origine
dans le Proche-Orient, engendrant à Babylone un grand centre de rayonnement judaïque où fut inventé le talmud,
mais si l'on prend l'ère romaine, le cas est encore plus évident. Les Juifs, dispersés dans tout l'Empire, y ont un
statut d'égalité, leur religion est licite, leur statut est garanti par décrets impériaux et ils reçoivent leur part des
distributions de blé et d'huile. Les deux guerres qui ont eu lieu à Jérusalem en 71 et en 135, entraînent effectivement
l'arrivée d'esclaves en Italie, en Sardaigne et en Espagne, mais ceux-ci sont rachetés par les communautés
existantes et s'y intègrent.
Il ne faut pas oublier qu'au départ, chrétiens et juifs sont concurrents dans leur prosélytisme, d'ailleurs les prêches
des Chrétiens se font dans les synagogues, Juifs et Chrétiens ont une audience particulière auprès des esclaves,
des affranchis. Ils appartiennent à un monde local, leur culture est grecque et s'appuie sur une version grecque de la
Bible (le septante). Les synagogues, comme les temples, sont les lieux où les voyageurs d'une même confession
viennent prier, se reposer et recevoir aide et secours. Ce sont également des lieux d'études plus ou moins
prestigieux en fonction des personnalités qui s'y rassemblent et échangent leurs savoirs avec d'autres confessions.
Le terme de diaspora définit l'existence de ces relais hospitaliers qui sont aussi des foyers de rayonnement
prosélytes auprès des populations locales.
C'est seulement à partir de Saint Paul, qui est lui-même juif, que les rites juifs sont détachés des rites chrétiens. Ce
qui, en particulier grâce à l'abandon de la circoncision, consacre la victoire du christianisme sur le concurrent juif,
sans pour autant en finir avec la capacité de conversion de ces derniers. Des groupes locaux continuent d'ailleurs à
entretenir la confusion, reconnaissant l'enseignement de Jésus sans pour autant en reconnaître la nature divine. Du
Concile de Nicée (325) à celui de Constantinople (381), à peine devenu religion de l'Empereur Constantin, le
christianisme se déchire entre arianisme venu d'Alexandrie (qui affirme la suprématie exclusive de Dieu le Père) et
les autres, avec comme effet l'intervention de plus en plus poussé du pouvoir impérial dans la religion. Le fait
religieux devient politique avec l'instauration d'un culte d'État.
Les Goths et autres " barbares "sont ariens, ils ne sont pas seulement en Germanie mais en Espagne, en Afrique du
Nord et on peut s'interroger sur la manière dont ils ont "préparé" l'Islam. Clovis ne passe pas du paganisme au
christianisme, mais d'un avatar de l'arianisme au catholicisme avec la reconnaissance de son clergé. Entre temps le
judaïsme a pénétré comme le christianisme chez les Grecs, chez les Parthes, a converti massivement tout autour du
bassin méditerranéen et au-delà. Le cas le plus extraordinaire est celui du Royaume juif de Khazar (des
turco-finnois), dont le souverain s'est converti en 641, qui se trouve dans le Caucase et marque à sa manière son
indépendance face à Byzance. Il disparaît avec l'invasion tatare de 1237... On retrouve dans tout le monde romain,
et en particulier en Afrique du Nord, des tribus berbères converties au Judaïsme, Kairouan est un grand centre
d'études judaïques qui est en relation avec Babylone. Il y avait de petites principautés juives dont les ancêtres
n'avaient jamais mis les pieds en Palestine. L'expansion du Judaïsme en Afrique du Nord est donc ancienne,
parallèle à celle du christianisme, mais à partir de la conquête musulmane, elle se fait à la fois dans le sillage de
l'Islam et en contradiction, souvent en conflit avec celui-ci. Ainsi des berbères juifs, battus par les Arabes, s'enfuient
à Djerba.
Avant l'instauration de l'Islam, la religion dominante en Arabie était le paganisme [1], avec de très forts noyaux juifs
et chrétiens en particulier pour les Juifs à Médine, vers la Syrie et au Yémen. Mohamed ne fonde pas l'Islam, le
monothéisme, à partir de rien, même s'il le conçoit comme un achèvement par la parole de Dieu qui lui est venue
dans une retraite dans le désert (comme les tables de la loi pour Moïse ou la perception de son destin divin pour
Jésus). Dans les textes de la Mekke,il manifeste une unité complète avec "les gens de l'Ecriture", sa référence aux
prophètes comme Moïse, Jésus, inspirés dans leur action par la force d'en Haut est sans ambiguïté. Mais à Médine,
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il constitue un État, élabore une législation et il rentre en conflit avec des groupes précis de Juifs et de Chrétiens à
cette occasion et il s'agit de conflits précédés d'ailleurs de négociations pour que tous se fondent dans une unique
religion, autant qu'un État, qui ne met jamais en cause l'esprit de la Mekke. D'ailleurs historiquement on retrouve à
l'intérieur même de l'Islam la même tension entre l'unité et les régionalismes, doublés parfois de revendications
religieuses. C'est l'Islam politique, celui de Médine...
Alors que les différents conciles chrétiens commencent à prohiber le judaïsme, le monde musulman paraît un havre
de paix. Ainsi en Espagne, longtemps dominée par les Wisigoths ariens, la victoire du catholicisme romain se traduit
par une persécution des Juifs. La conquête arabe de 711 leur rend leur liberté. C'est une période d'essor intellectuel
et les juifs vont s'intégrer à la culture arabe scientifique, donner une grammaire à l'hébreu, inspirée de la grammaire
arabe. Cette période du califat puis des principautés berbères va donner Maimonide, dont l'oeuvre marque le
judaïsme de rationalisme. En Espagne, les Juifs ne sont pas seulement des savants mais des artisans, des
cultivateurs, des journaliers, ce qui est caractéristique d'un peuplement autochtone. Mais d'abord en Andalousie
arabe puis avec la prise de Grenade et l'unification espagnole chrétienne marque leur conversion forcée ou leur
expulsion sur demande de l'Inquisition.
L'Europe chrétienne et ses violences :
Sous les Carolingiens, des marchands juifs de Rhénanie sont les intermédiaires entre la chrétienté et l'islam. Comme
en France, les grands foyers sont Narbonne, la Champagne, Limoges. Dans le haut moyen Age on ne trouve pas de
traces de peuplement spécifique et séparé.
Mais tout va changer avec les croisades et la formation de royaumes nationaux avec des souverains de droit
divin,les Juifs sont déclarés des "étrangers déicides". Les communautés chassées d'Espagne sont accueillies dans
l'Empire Ottoman, où elles retrouvent le statut diversifié qui était le leur en Espagne, artisans, paysans, pêcheurs.
Celles chassées d'Allemagne et de France sont accueillies en Pologne où on leur accorde des terres et un statut
favorable. Les unes parlent le ladino, une sorte de Castillan médiéval, et ce judéo-espagnol va connaître un grand
essor hors de son terroir d'origine, les autres parlent le Yddish, un patois allemand. Si un certain nombre sont
régisseurs des nobles, la grande masse est composée d'ouvriers agricoles, d'artisans, de colporteurs, ils forment un
dixième de la population, mais leur situation favorable se clôt en 1648 avec les massacres des cosaques ukrainiens
qui les visent plus encore que les Catholiques polonais, cette offensive contre la Pologne dure dix ans. Encore une
fois, pour comprendre la situation des Juifs, il faut intégrer celle-ci à l'histoire nationale. Il faut savoir que partout la
religion n'est pas détachée du pouvoir politique, ne serait-ce qu'à travers le statut du prince régnant de droit divin ou
le califat. Ce qui implique au meilleur des cas une représentation des minorités religieuses aussi bien à la diète
polonaise qu'au divan impérial de Constantinople.
Autre chose est l'effet des croisades, où les cadets des familles nobles partent se conquérir des royaumes sous
couvert de libérer le tombeau du Christ en "terre sainte" mais sur le parcours s'attaquent à tout le monde musulman
et aux Juifs "déicides". En Europe, leur statut va être légalement celui d'"étrangers" que l'on soumet à des mesures
vexatoires et que l'on pille quand besoin s'en fait sentir. Saint Louis, le croisé, les oblige à porter "la rouelle". Il sont
exclus progressivement de la société par des conciles et confinés dans des quartiers séparés. Les Juifs, privés du
droit de cultiver la terre, sont amenés à accomplir une fonction économique spécifique d'aide à la consommation non
autarcique qui caractérise le passage du non marchand du haut Moyen Age au marchand du bas Moyen Age jusqu'à
l'explosion marchande de la Renaissance dans l'Europe Occidentale. Philippe le Bel, toujours à la recherche
d'argent, comme il brûle les templiers, il dépouille les Juifs de leurs biens et les chasse. C'est donc dans le contexte
médiéval du refus de l'altérité religieuse monothéiste et de la rapacité des princes chrétiens qu'il faut lire la condition
juive médiévale, comme d'ailleurs leur statut pendant les guerres de religion qui déchirent l'Europe pendant la
réforme.
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Mais là encore leur situation ne peut pas être isolée. La société médiévale débouche sur la modernité avec de
grands mouvements égalitaires, paysans, bourgeois des villes, derrière la réforme, en Allemagne mais aussi en
Angleterre, les juifs eux sont secoués par de grands mouvements messianiques ou mystiques comme ultérieurement
le hassidisme qui remet en cause le primat du sacerdotal et privilégie la piété et la charité, singulièrement en
Pologne.
Révolutions européennes et le sionisme politique
À la fin du XVIIIe siècle, au contraire on assiste en liaison avec les Lumières, puis la Révolution française, les
conquêtes Napoléoniennes, à la remise en cause du statut médiéval du Juif et son intégration à la citoyenneté
devient un mouvement irréversible, avec la séparation entre l'État et la religion chrétienne. Les Révolutions de 1848
accentueront la tendance. Sauf en Russie tsariste où à l'avènement d'Alexandre III est déclenchée une vague de
pogroms. Un mouvement qui inspirera Herzl , le Hövevë-Sion (amant de Sion) naît en Russie, mais il se heurte au
refus du Bund socialiste, plus largement des révolutionnaires, et même à celui des religieux hassidiques qui récusent
la territorialisation du "royaume de Dieu". En France, il y aura l'affaire Dreyfus alors même que l'assimilation est
comme en Allemagne réalisée. Là encore, si la division ne se situe pas totalement entre la gauche et la droite, les
forces réactionnaires s'emparent de l'antisémitisme comme d'un drapeau. Comme en Allemagne, après la défaite de
14-18, pour lutter contre les révolutions, les intérêts capitalistes soutiendront les regroupements antisémites et
livreront le pays à Hitler. L'antisémitisme, selon le mot de Bebel, devient "le socialisme des imbéciles". Alors que s'il y
a quelques capitalistes juifs, la plupart des Juifs des pays de l'est sont des ouvriers, des artisans, des petites gens et
en Allemagne, en France, des gens qui voient dans les études, le service de l'État, l'occasion d'une promotion.
Le premier congrès sioniste se tient à Bâle en 1897. L'idée est celle d'une purification ethnique acceptée au nom du
caractère obligatoire de la persécution antisémite, mais Herzl "vend" son idée en expliquant que les juifs installés en
Palestine y seront une avant-garde de l'Occident dans des terres barbares. C'est la version laïque, colonialiste des
croisades, il ne s'agit plus de conquérir le tombeau du Christ mais de porter le flambeau de la civilisation aux peuples
"barbares"dans un contexte d'expansion coloniale.
Et l'histoire a prouvé qu'effectivement aujourd'hui, l'État d'Israël ne tient que par le seul bon vouloir de l'impérialisme
des États-Unis lancé dans une croisade à relents pétroliers contre les peuples musulmans. Le paradoxe est que cet
État fondé en majorité par des Juifs européens épris d'idées socialistes, parce qu'il a voulu jouer sur la diaspora en
faisant "revenir" des Juifs orientaux qu'il a été incapable "d'assimiler", s'est retrouvé dirigé par des extrémistes de
droite, comme les forces conservatrices qui ont contribué à son financement l'ont également annexé à la réaction
capitaliste et au fondamentalisme chrétien aux États-Unis.
Pour être complet, il faudrait analyser le rôle joué par le colonialisme français en Afrique du Nord, le décret Crémieux
qui sépare les Juifs des communautés musulmanes avec lesquelles ils ont vécu jusqu'ici, en fait des citoyens
français, les guerres d'indépendance nationale et l'exode massive avec les colonialistes français après
l'indépendance, la formation comme dans l'ensemble des rapatriés d'une extrême droite revancharde contre le
monde musulman. Cette histoire n'est pas celle des Juifs, mais celle du colonialisme et de ses convulsions. Sans
cette analyse des juifs Sépharades, souvent arabes, pris dans l'histoire des nations et des peuples, on ne comprend
rien à la résurgence en France d'antagonismes pour lesquels Israël n'est qu'un prétexte.
Comme le sionisme et l'apparition d'un antisémitisme racial et plus religieux doivent être lus dans le contexte des
guerres mondiales, de l'apparition des nations et des mouvements révolutionnaires en Europe. On passe de la
religion déicide à une race dont on cherche à définir les traits distinctifs sur le plan physique et moral, en dépit de
toutes vraisemblances puisqu'il est évident que tous les types sont représentés en fonction du peuplement local . Ce
mythe racial est si puissant que quand on verra arriver en Israël des Juifs noirs, il faudra imaginer qu'ils descendent
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