Filières énergétiques au cours de l*exercice intense répété

Filières énergétiques au cours de l’exercice intense répété
Production d’énergie
Lors de la contraction musculaire, la formation et la rupture répétées des pontages de l’actine et de
la myosine requièrent de l’énergie ; celle-ci est libérée par l’hydrolyse de l’ATP présent en quantité
très limitée dans le muscle Pour effectuer des exercices intenses au-delà de quelques secondes
l’organisme doit synthétiser continuellement des molécules d’Adénosine Triphosphate (ATP). Ceci est
réalisé au sein des différentes voies métaboliques : l’hydrolyse de la créatine phosphate (PCr), la
glycolyse (catabolisme du glucose), la glycogénolyse (catabolisme du glycogène) qui se déroulent
dans le cytosol sans utiliser directement de l’oxygène et enfin les phosphorylations oxydatives qui
ont lieu dans les mitochondries.
Le système ATP-PCr fournit l’essentiel de l’énergie pour un effort entre 10 et 15 secondes. Une
minute 30 secondes de repos est nécessaire pour retrouver 65% du stock de PCr. Lors de
récupérations plus courtes c’est la glycolyse anaérobie qui produit la plupart de l’énergie.
Glycolyse anaérobie ou filière anaérobie lactique :
La glycolyse anaérobie lactique correspond à la filière anaérobie lactique (Pradet, 1996). Les termes
de puissance et de capacité que nous emploierons sont classiquement utilisés dans l’entraînement
pour développer les filières énergétiques. Selon Doutreloux (2013), la puissance d’une filière
correspond à la quantité de travail fourni par unité de temps a lors que la capacité d’une filière
correspond à la quantité d’énergie disponible dans un système. Le délai d’épuisement de la
puissance anaérobie lactique est de 25 à 45 secondes alors que la capacité peut aller jusqu’à deux
minutes.
La voie de la production d’énergie de cette filière est la glycolyse. C’est un système très complexe qui
nécessite douze réactions pour dégrader le glycogène en lactate. Toutes ces réactions se déroulent
dans le cytoplasme de la cellule. La production de l’ATP par la glycolyse anaérobie s’opère par deux
voies métaboliques représentées dans le schéma en annexe 4. Chacune de ces voies implique des
réactions enzymatiques que l’exercice peut perturber.
La glycolyse : utilise le glucose apporté par l’alimentation et qui se trouve dans le compartiment
sanguin. La glycolyse va dégrader le glucose et donner deux acides lactiques.
La glycogénolyse : utilise la dégradation du glycogène en réserve dans le muscle et dans le foie.
L’hydrolyse du glycogène par la glycogénolyse donne trois ATP alors que celle du glucose n’en
produit que deux puisqu’une molécule d’ATP est initialement utilisée pour transformer le glucose en
Glucose-6-Phosphate (G-6-P) (figure en Annexe 4).
Bien qu’elle ne produise pas une quantité importante d’énergie, combinée au système ATP-PCr, la
glycolyse anaérobie permet de développer des niveaux de force très importants. En l’absence d’O2,
la glycolyse produit le pyruvate dont la transformation donne le lactate. Lorsque l’acide lactique se
sépare de son proton (H+), le composé restant se lie avec des ions sodium (Na+) ou potassium (K+)
pour former un sel appelé lactate. L’accumulation de lactate est le marqueur du métabolisme
anaérobie lactique (Lacour, Bouvat et Barthélémy, 1990 ; Péronnet, 2013) Cependant, il y a des
facteurs limitant la production de force. C’est cette libération d’H+, combinée à d’autres facteurs
limitants qui vont altérer la contraction musculaire.
Glycolyse anaérobie et métabolisme du lactate lors de sprints et d’exercices de haute intensité
répétés:
Production de lactate :
La Lactatémie
Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, la glycolyse anaérobie assure la fourniture
d’énergie combinée au système ATP-PCr au cours d’exercices intenses. Cazorla et al. (2001) montrent
que plus la concentration en lactate est importante, plus intense a été le travail musculaire. Lacour et
al. (1990) montrent une forte corrélation entre la lactatémie et la performance sur 400m. Par
conséquent, les athlètes qui réussissent le mieux sont ceux qui produisent le plus de lactate par unité
de temps et donc plus d’énergie par la voie anaérobie lactique. Péronnet (2013), nous apporte plus
de précision sur la compréhension de l’énergie provenant de la glycolyse anaérobie. Si la lactatémie
n’évolue pas ou ne varie plus au cours de l’exercice, il n’y pas de production d’énergie anaérobie.
Tous les électrons sont captés par l’O2 et l’ATP est alors d’origine aérobie. « De l’énergie anaérobie
n’est en fait produite que si le flux de lactate produit dépasse le flux éliminé, c’est le cas pour des
exercices intenses de courte durée. » (Péronnet, 2013).
Plus spécifiquement, nous appelons exercices intenses de courte durée, les répétitions de sprints et
d’exercices de haute intensité par intervalle comme cela est le cas dans le rugby. De nombreuses
recherches se sont portées sur ces types d’entraînements au cours des quinze dernières années. Ce
concept que nous développerons plus tard est défini très largement par le High-Intensity Interval
Training (Buchheit et Laursen, 2013 ; Buchheit et al. 2009). Il utilise spécifiquement le
développement de la glycolyse anaérobie lactique.
ATP Turnover
A titre d’exemple, pour des efforts maximaux répétés de 10 secondes, la glycolyse anaérobie lactique
fournit entre 55 et 75% de l’énergie (Bogdanis, Nevill, Lakomy et Boobis, 1998) et entre 36 et 48%
pour des efforts de 30 secondes (Bogdanis, 2012). Le reste de la production d’énergie est assurée par
les autres filières énergétiques qui ne sont pas négligeables.
Figure 1 : Pourcentage des filières énergétiques au cours d’un effort maximal de 30 secondes sur vélo
(D’après Bogdanis, 2012)
En l’absence d’O2, au bout de la chaîne de la glycolyse, le pyruvate se transforme en lactate. Cette
action n’est possible que par la présence de l’enzyme Lactatedéshydorgénase (LDH). Lorsque
l’intensité de l’exercice se prolonge la production de lactate augmente (Howlett, Angus, Proietto,
Hargreaves, 1998) et l’activité de l’enzyme est alors dépassée. La glycolyse s’effectue alors en
présence d’O2 puisque le pyruvate pénètre dans la mitochondrie et se transforme en AcétylCoA et
entre dans le cycle de KREBS. Lors de la répétition d’exercices intenses, on observe un ATP turnover
(Bogdanis, 2012). La lactatémie est moins importante, et la poursuite de l’effort se fait via la
glycolyse aérobie.
La puissance de la glycolyse anaérobie est donc limitée dans le temps et nécessite la présence d’O2
pour maintenir une intensité élevée au-delà de trois répétitions maximales de 30 secondes d’effort
sur vélo entrecoupées de 4 minutes de récupération (Bogdanis et al. 1995 ; Parolin et al. 1999 ;
Spriet, Lindinger, McKelvie, Heigenhauser et Jones, 1989 ; Trump, Heigenhauser, Putman et Spriet
1996 ; McCartney et al. 1986). Nous pensons que suite à un entraînement adapté, nous allons
pouvoir maintenir plus longtemps un pourcentage élevé d’énergie provenant de la glycolyse
anaérobie afin de développer la puissance et la capacité anaérobie lactique.
Facteurs Limitants :
Fatigue périphérique : Accumulation de protons H+ et acidose métabolique
Lors de la transformation du pyruvate en lactate, des protons (H+) sont libérés dans le muscle puis
dans le sang. L’accumulation de protons H+ entraîne une baisse du pH et réduit la production
d’énergie par l’inhibition des transformations du glycogène en lactate. Cette acidification va affecter
la répétition d’efforts intenses par une perturbation contractile et/ou une inhibition de la production
d’ATP au travers de la glycolyse (Girard, Mendez-Villanueva et Bishop, 2011).
Inhibition des enzymes de la glycolyse telles que l’enzyme Phosphofructokinase (PFK), le glycogène
phosphorylase (Spriet et al. 1989 ; Girard et al. 2011).
Perturbation des capacités contractiles : diminution de l’affinité de la troponine C pour le Calcium
(Ca2+) et donc perturbation des ponts d’union actine-myosine (Verges et Perrey, 2010).
Figure 2 : Accumulation de protons H+ et perturbations glycolyse fonctionnelle (Cazorla et al. 2001)
Accumulation de lactate et saturation des enzymes LDH
Bien que la production de lactate soit synonyme de performance (Cazorla et al. 2001 ; Lacour et al.
1999), elle entraîne également l’augmentation des facteurs limitants. En effet, plus la production
augmente et plus l’intensité est élevée jusqu’à un certain seuil. L’enzyme LDH est responsable de la
conversion du pyruvate en lactate. Or, l’incapacité de cette enzyme à utiliser le lactate entraîne une
baisse de l’intensité. En effet, le pyruvate entre dans le cycle de KREBS en présence d’O2 via l’enzyme
PDH et l’intensité diminue.
Fatigue centrale :
La fatigue nerveuse comprend les facteurs qui vont déterminer la diminution de contractilité
musculaire, indépendamment des facteurs intramusculaires et/ou métaboliques. Pour résumer elle
se traduit par une baisse du niveau d’activation des fibres (Lepers, 2010).
Navette du lactate :
Le lactate produit au cours de l’exercice par le muscle strié squelettique s’accumule dans le cytosol.
Le lactate est produit par les fibres glycolytiques de type II puis il est transféré dans le sang. Une
partie est transportée dans le compartiment sanguin via les transporteurs du lactate MCT
(Monocarboxylate). Il va être oxydé par le myocarde (cycle de KREBS) pour produire de l’ATP, ou va
permettre de reconstituer les stocks de glycogène hépatique. L’autre partie qui n’est pas utilisée par
le cœur et qui revient au niveau du muscle est captée par les fibres oxydatives (type I) puis oxydée
dans la mitochondrie lorsque l’intensité diminue ou à l’arrêt de l’exercice (Brooks et al., 1999).
Il existe différents systèmes de transport du lactate dans le sang :
Diffusion passive : le lactate est transporté selon un gradient de concentration. C’est-à-dire d’un
milieu où il est le plus concentré vers un milieu où il est le moins concentré, donc du muscle vers le
sang.
Transport facilité : il se fait par l’intermédiaire des monocarboxylates MCTs, (Péronnet, 2013). Le
MCT1 permet l’entrée du lactate du sang vers le muscle et se situe au niveau des fibres oxydatives.
Le MCT4 permet la sortie du lactate présent dans le muscle vers le compartiment sanguin et se situe
au niveau des fibres II. Ce transport via les MCT est responsable à 90% du flux de lactate.
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