Equations aux différences finies et déterminants d`intégrales de

Equations aux diff´erences finies et
d´eterminants d’int´egrales de fonctions multiformes
Fran¸cois Loeser Claude Sabbah
Unit´e Associ´ee au C.N.R.S. D 0169
Centre de Math´ematiques
´
Ecole Polytechnique
F-91128 Palaiseau Cedex
R´esum´e Nous donnons une formule calculant le d´eterminant d’une matrice
dont les ´el´ements sont des int´egrales de formes diff´erentielles alg´ebriques mul-
tipli´ees par un produit de polynˆomes ´elev´es `a des puissances complexes. Cette
formule fait intervenir le polynˆome caract´eristique de monodromies associ´ees
`a la famille de polynˆomes consid´er´ee.
Abstract We give a formula which computes the determinant of a matrix
whose entries are integrals of algebraic differential forms multiplied by a prod-
uct of complex powers of polynomials. In this formula enters the characteristic
polynomial of some monodromies associated with this family of polynomials.
Classification A.M.S. 32C38, 39A10, 33A40
Mots-cl´es Equations aux diff´erences finies, transformation de Mellin, mono-
dromie, cycles ´evanescents
Sommaire
Introduction 2
1 Syst`emes d’´equations aux diff´erences finies et transformation de Mellin
alg´ebrique 3
1.1 Syst`emes lin´eaires d’EDF et groupe hyperg´eom´etrique . . . . . . . . . . . . 3
1.2 Transformation de Mellin alg´ebrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
1.3 LecomplexedAomoto............................. 11
2 D´eterminant du complexe d’Aomoto associ´e `a un polynˆome 14
2.1 Caract´eristique d’Euler des cycles ´evanescents . . . . . . . . . . . . . . . . 14
2.2 Fonction zˆeta “logarithmique” des monodromies en 0 et ......... 15
2.3 Leth´eor`eme................................... 17
2.4 Premi`ere emonstration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
2.5 Deuxi`eme emonstration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
3 D´eterminant du complexe d’Aomoto dans le cas g´en´eral 23
3.1 Fonction zˆeta associ´ee `a plusieurs polynˆomes . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
3.2 Restriction du complexe d’Aomoto et de son d´eterminant . . . . . . . . . . 26
3.3 Leth´eor`eme................................... 27
4 D´eterminant d’inegrales de fonctions multiformes 31
4.1 Solutions des syst`emes d’EDF de rang 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
4.2 D´eterminant d’int´egrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
R´ef´erences 38
1
Introduction
Dans un article d´ej`a ancien [2], Aomoto s’est ineress´e aux inegrales du type suivant :
I(s1, . . . , sp) = Zγfs1
1· · · fsp
pω
o`u f1, . . . , fpsont des polynˆomes sur Cn,ωest une n-forme alg´ebrique sur Cnet γest
un n-cycle `a coefficients dans un syst`eme local dont la monodromie est telle que la fonc-
tion Isoit uniforme. La remarque essentielle ´etait que ces int´egrales sont solution d’un
syst`eme lin´eaire holonome d’´equations aux diff´erences finies (EDF) par rapport aux vari-
ables s. Ce syst`eme s’obtient alg´ebriquement (par une g´en´eralisation d’un r´esultat de
Bernstein lorsque p= 1) comme la cohomologie du complexe (appel´e dans la suite com-
plexe d’Aomoto)
· · · C(s1, . . . , sp)Cids
C(s1, . . . , sp)Ci+1 · · ·
o`u dsest C(s)-lin´eaire et
ds(1 ω) = 1 +
p
X
i=1
sidfi
fi
ω
et l’action des op´erateurs de translation τi(i= 1, . . . , p) sur la cohomologie provient de
celle sur C(s1, . . . , sp). De plus, Aomoto a donn´e des exemples pour lesquels ce complexe
n’a qu’un seul groupe de cohomologie, exemples qui seront rappel´es au §1.3.
Plus r´ecemment, Varchenko [19] a calcul´e le d´eterminant d’une matrice dont les ´el´ements
sont de telles int´egrales, lorsque f1, . . . , fpsont des formes lin´eaires affines correspondant `a
un arrangement d’hyperplans r´eels ou complexes. Nous nous proposons ici de donner une
formule g´en´erale pour un tel d´eterminant, sans condition sur les polynˆomes fi. Poursuivant
l’id´ee d’Aomoto, nous remarquons que le d´eterminant `a calculer est solution d’un syst`eme
d’EDF de rang 1, `a savoir le d´eterminant de la cohomologie du complexe d’Aomoto. Par
ailleurs, les solutions d’un syst`eme d’EDF de rang 1 qui satisfont une certaine propri´et´e
de croissance `a l’infini (v´erifi´ee par le d´eterminant d’int´egrales) peuvent s’´ecrire sous la
forme
h(s1, . . . , sp)·ϕ(exp 2s1,...,exp 2sp)·cs1
1· · · csp
p·Y
LY
α
Γ(L(s)α)γL,α
avec c1, . . . , cpC,het ϕsont des fractions rationnelles de leurs arguments, Lparcourt
un ensemble fini de formes lin´eaires `a coefficients dans Zpremiers entre eux, αun ensemble
fini de nombres complexes et γL,α Z.
Nous nous proposons ici de calculer les constantes ciet les exposants γL,α en fonction
de la topologie de l’application f= (f1, . . . , fp) : CnCp. Il est remarquable que ce
d´eterminant ne d´epende que de diff´erentes monodromies locales autour des hypersurfaces
fi= 0 et fi=et pas de monodromies globales. Dans la situation ´etudi´ee par Varchenko,
cela signifie que les γL,α ont une expression combinatoire en terme de l’arrangement.
Signalons enfin que les articles [1] et [18] consid`erent des questions analogues en utilisant
seulement [8] et pas comme ici la th´eorie de Bernstein.
2
1 Syst`emes d’´equations aux diff´erences finies et transformation de Mellin
alg´ebrique
1.1 Syst`emes lin´eaires d’EDF et groupe hyperg´eom´etrique
1.1.1 Soit C[s] = C[s1, . . . , sp] l’anneau des polynˆomes `a pvariables et C(s) le corps
des fractions rationnelles correspondant. Un syst`eme rationnel holonome d’EDF est un
C(s)-espace vectoriel de dimension finie muni d’automorphismes C-lin´eaires τ1, . . . , τpqui
commutent entre eux et qui satisfont les relations
τi·sj=sj·τisi i6=j
τi·si= (si+ 1) ·τii= 1, . . . , p
Soit M(s) un tel syst`eme (de dimension r) et choisissons une C(s)-base mde M(s).
Notons Ai(s) la matrice r×rde τidans cette base. C’est une matrice `a ´el´ements dans
C(s). Les relations [τi, τj] = 0 impliquent que les matrices Aisatisfont aux relations
Ai(s+1j)·Aj(s) = Aj(s+1i)·Ai(s)
pour tous i, j = 1, . . . , p, o`u 1id´esigne le i`eme vecteur de la base naturelle de Cp. Le fait
que τisoit inversible signifie que Aiest inversible et la matrice de τ1
idans la base mest
´egale `a
Ai(s1i)1.
Par ailleurs, apr`es un changement de base de matrice B(s)GL(r, C(s)) la matrice
de τiest A0
i(s) avec
A0
i(s) = B(s+1i)·Ai(s)·B(s)1.
1.1.2 Si M(s) et M0(s) sont deux syst`emes holonomes d’EDF, il en est de mˆeme de
M(s)C(s)M0(s), HomC(s)(M(s),M0(s)), ainsi que de
det M(s)ef
=
r
^M(s)
o`u r= dimC(s)M(s). L’ensemble des classes d’isomorphisme de syst`emes de dimension 1
forme un groupe, que nous appellerons groupe hyperg´eom´etrique.
Exemple. Si p= 1, posons s=s1,τ=τ1. Une classe d’isomorphisme de syst`emes
rationnels holonomes d’EDF est la donn´eee de ϕC(s)modulo l’action des changements
de base, qui sont de la forme
ψ(s) = h(s+ 1)
h(s)·ϕ(s)
avec hC(s). Le groupe hyperg´eom´etrique est donc ´egal `a C(s)/, o`u est la
relation d’´equivalence d´efinie par les changements de base ci-dessus. Un ´el´ement du groupe
3
hyperg´eom´etrique s’´ecrit ainsi de mani`ere unique sous la forme
c·Y
αC/Z
(sα)γα
avec γαZ,γα= 0 sauf pour un nombre fini de αC/Zet de plus cC. Une
autre mani`ere d’exprimer ceci est que les ´el´ements du groupe hyperg´eom´etrique sont en
correspondance bijective avec les ´equations satisfaites par les fonctions
cs·Y
αC/Z
Γ(sα)γα.
1.1.3 La structure du groupe hyperg´eom´etrique pour p > 1 est donn´ee par la proposi-
tion 1.1.4. Le groupe hyperg´eom´etrique est obtenu comme suit : soit HG(p)(C(s))n
l’ensemble des (ϕ1, . . . , ϕp) qui v´erifient la condition d’int´egrabilit´e
ϕi(s+1j)
ϕi(s)=ϕj(s+1i)
ϕj(s)
pour tous i, j = 1, . . . , p, avec la structure de groupe induite par la multiplication terme
`a terme ; soit la relation d’´equivalence
(ϕ1, . . . , ϕp)(ψ1, . . . , ψp)
si et seulement si il existe hC(s)tel que, pour tout i= 1, . . . , p on ait
ψi(s) = h(s+1i)
h(s)·ϕi(s).
Alors le groupe hyperg´eom´etrique HG(p) est le quotient HG(p)/.
Soit Lun sous-ensemble de formes lin´eaires non identiquement nulles sur Qp`a coef-
ficients dans Zpremiers entre eux tel que pour toute telle forme L, on ait soit L∈ L
soit L∈ L. On peut par exemple choisir Lcomme suit : L(s) = Pλisiest dans Lsi et
seulement si λ1>0 si λ16= 0, λ2>0 si λ1= 0 et λ26= 0, etc. Soit Z[C/Z]l’ensemble
des applications L × C/ZZ`a support fini, muni de sa structure naturelle de groupe.
Proposition 1.1.4 Soit σ:C/ZCune section de la projection CC/Z. Alors
l’application
(C)p×Z[C/Z]→ HG(p)
qui associe `a [(c1, . . . , cp); γ]la classe d’isomorphisme du syst`eme satisfait par
cs1
1· · · csp
pY
L∈L Y
αC/Z
Γ(L(s)σ(α))γL,α
ne d´epend pas de la section σchoisie et est un isomorphisme de groupes.
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