Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Emmanuelle Cartron – CHU Nantes Anne-Chantal Hardy – CNRS UMR6297 Yann Péréon – CHU Nantes Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 • Une recherche qualitative / inductive Présentation de la recherche et de quelques résultats • Une collaboration soignants/chercheurs en sciences sociales Pourquoi accueillir des chercheurs en sciences sociales ? • Un comité de pilotage pluridisciplinaire Quelles pistes pour la recherche en soins infirmiers ? Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 ASHAM Analyse sociologique des habitudes de vie des adultes atteints de Dystrophie Myotonique de type 1 Etude financée par la Fondation Maladies Rares, avec le soutien de la Direction Générale de la Santé et de la Caisse Nationale pour la Solidarité et l’Autonomie Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Deux questions venues d’un soignant-sociologue • Comment les patients s’adaptent-ils à leur maladie ? • Pourquoi leur prise en charge semble-t-elle si compliquée ? Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Une équipe pluridisciplinaire • Sociologues : UMR 6297 Droit et changement social – Anne-Chantal Hardy – Didier Lecordier – Adeline Perrot • Soignants : Centre Référence M. Neuromusculaires Nantes-Angers – Yann Péréon – Aleksandra Nadaj Pakleza – Armelle Magot – Raphaële Chasserieau Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Le groupe de pilotage • Equipe du CRMNMR Nantes-Angers Y. Péréon, A. Magot, R. Chasserieau, C. Peseux • Associations F. Guérin-Giacalone (AFM Téléthon), N. Jan (FMR) • Représentants des soins infirmiers L. Jovic (ARSI), E. Cartron (CHU Nantes) • Les chercheurs de l’équipe A.C. Hardy, D. Lecordier, A. Perrot Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Une recherche qualitative / inductive - Partir d’hypothèses souples Aller sur le terrain Combiner différentes sources / méthodes Repenser à chaque étape le modèle conceptuel Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Deux principes Ne pas privilégier la définition médicale de la maladie Articuler les situations particulières avec des schémas de généralisation/théorisation Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Méthodes qualitatives ? • L’observation – Des consultations multidisciplinaires (15) – De l’environnement des personnes atteintes • L’entretien – Auprès de personnes atteintes et leurs proches (22) – Auprès de soignants (10) • L’étude de documents – Sites internet – Études médicales et scientifiques – Documents de support Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Quelques résultats autour de la question : qu’est-ce que la maladie de Steinert ? – Du côté des patients – Du côté des soignants Les problèmes posés par la rencontre de ces « deux » maladies Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 La DM1, c’est : - Une maladie neuromusculaire ? Une maladie chronique ? Une maladie systémique ? Une maladie génétique ? Une maladie rare ? Etc… Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Atteinte sensorielle - Cataracte souscapsulaire précoce Système nerveux central - Hypersomnolence - Atteinte cognitive - Retard mental - Troubles psychologiques Atteinte neuromusculaire - Myotonie - Myopathie Déficit moteur, ptôsis, amyotrophie distale, faciès évocateur ++ - Douleur - Hypotonie congénitale Atteinte respiratoire - Insuffisance respiratoire restrictive Atteinte endocrine - Diabète, hyperinsulinisme - Hypogonadisme - Fertilité réduite - Calvitie Atteinte cardiaque - Troubles de la conduction (BAV de 1er degré – allongement du PR) - Arythmies Risque de mort subite Muscle lisse - Constipation – diarrhée - Malabsorption - Incontinence - Douleurs abdominales Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 > 1500 triplets CTG Néonatale Forme Congénitale 300 – 1000 triplets CTG 1 mois – 10 ans 11 – 20 ans Forme infantile Hypotonie généralisée Faiblesse musculaire Détresse respiratoire Retard mental Succion / déglutition Cardiomyopathie Retard mental < 150 triplets CTG 21 – 40 ans > 40 ans Forme juvénile Forme Adulte Forme tardive Difficultés scolaires Cataracte Cataracte Atteinte cardiaque Atteinte multisystémique Anticipation Myotonie clinique / électrique Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Digression : qu’est-ce que « la vie » ? (Aristote, Agamben) Distinguer : • « la bios » :« la forme ou la façon de vivre propre à un individu ou à un groupe ». la vie vécue – Qui a un sens pour l’individu – Dans la société dans laquelle il vit – Au regard de ses propres valeurs Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 • Et « la zoë »: « le simple fait de vivre, commun à tous les être vivants (animaux, hommes ou dieux) », la vie « nue » – Physiologique – Fonctionnelle – Mesurable Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Du côté des patients Echantillon : personnes diagnostiquées à l’âge adulte – Avoir une maladie – Devenir (tomber) malade – Être malade Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Du côté des patients • Avoir une maladie – Avant le diagnostic : quand le « trait » de caractère et/ou physique n’est pas encore un « symptôme » – La maladie est nommée par le diagnostic : – Rester dans la vie « normale » Conserver sa vie Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Du côté des patients • Devenir (tomber) malade – Epuiser les moyens de rester dans la « vie normale » – Réorganiser sa vie familiale, professionnelle, relationnelle – Envisager d’entrer dans « l’autre monde » celui de la maladie ou du handicap Perte partielle de sa vie Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Du côté des patients • Devenir (tomber) malade Un processus qui dépend : - Des ressources personnes (matérielles, culturelles, relationnelles) - De l’environnement (familial, professionnel) - De l’accompagnement (associatif, soignant…) Changer sa vie pour ne pas perdre la vie Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Du côté des patients • Être malade – Réorganiser sa vie dans une autre configuration • Familiale • Professionnelle • Sociétale – Forte dépendance des ressources personnelles, familiales, socioéconomiques Refaire sa vie Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Un processus souvent long qui dépend : – Des individus – De leur entourage – Des accompagnants Mais aussi : – De l’état d’une société (démocratique, économique, sanitaire) – de la capacité des soignants et aidants à se caler sur le cheminement des patients Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Du côté des soignants • Une prise en charge organisée autour de la neurologie (nosologie de la maladie) – Centrée sur trois risques majeurs La préservation de la vie – Dans un contexte particulier L’impossibilité de sauver la vie La CMD Nantes-Angers et les recours hospitaliers mobilisables Endocrinologie Dysfonctions hormonales Gastroentérologie Dysfonctions digestives Cardiologie Risques cardiaques Pneumologie Troubles respiratoires Médecine du sommeil Troubles du sommeil Gynécologie Troubles de la fertilité Médecine de la douleur Douleurs chroniques Ophtalmologie Cataracte Génétique Transmission autosomique dominante Origine de la DM1 MPR Atteintes fonctionnelles Manifestation de la DM1 Neurologie Maladie neuromusculaire Nosologie de la DM1 Kinésithérapie Troubles moteurs Soins infirmiers Accompagnement Coordination Ergothérapie Adaptation Psychologie Troubles cognitifs/comportement Les recours des patients pour améliorer leur vie Médecine générale Médecine du travail Psychiatrie Urologie Rhumatologie Cancérologie Dermatologie AFM Yoga APF SAMSAH Phytothérapie Relaxation Homéopathie Sophrologie Shiatsu Acupuncture Natation SIAD Jardinage Marche à pied Bricolage Diététique Pétanque Aquagym Services sociaux Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Deux logiques s’affrontent • Chez les personnes atteintes : Une logique d’adaptation de la maladie à son quotidien dans un but de conservation de sa vie Le soignant peut devenir celui qui incite à perdre cette vie pour prolonger sa vie • Chez les soignants : Une logique d’opérationnalité liée au fonctionnement des institutions soignantes et centrée sur la préservation de la vie du patient Le patient peut apparaître réticent à adapter son mode de vie à la maladie, au risque de sa vie Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Deux logiques s’affrontent • Chez les personnes atteintes : À quoi bon augmenter ma durée de vie si je perds l’intérêt et le sens de ma vie ? • Chez les soignants : À quoi bon vouloir conserver son mode de vie si la conséquence est la suppression de la vie ? Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Pour ouvrir le débat… À quoi bon une recherche en sciences sociales à l’hôpital ? Comment tirer parti d’une recherche qualitative ? Avons-nous les moyens de repenser nos questions ? Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Intérêt pour les soins infirmiers Modifier l’organisation des soins Repérer les moments où le corps fait défaut Être facilitateur d’accès aux ressources Maladie chronique, génétique, rare, neuromusculaire... ou non maladie ? L’exemple de la dystrophie myotonique de type 1 Pour la recherche en soins infirmiers Proposer des pistes d’analyse des données Evaluer de nouvelles organisations de soin Observer les effets d’une recherche participative sur la pratique