
Cellules souches cancéreuses et instabilité génétique : un 
dangereux duo à l’origine des rechutes de cancer du sein ?
Les rechutes sont la principale cause de mortalité dans le cancer du sein, il est donc important de 
comprendre comment elles surviennent pour les combattre. Dans notre laboratoire, nous cherchons 
à identifier les cellules cancéreuses qui sont à l’origine des rechutes après radiothérapie. Celles-ci 
transmettraient d’inquiétantes informations à leur descendance… 
En France, la radiothérapie, associée à la chirur-
gie  et  à  la  chimiothérapie,  est  l’un  des  traite-
ments couramment utilisés pour traiter et guérir 
les cancers du sein. Malgré la grande efficacité de 
ce  traitement  et  souvent  après  une  période  de 
répit  de  plusieurs  années  on  peut  observer  une 
rechute  du  cancer.  Cette  rechute  est  une  résur-
gence  du  premier  cancer,  et  survient  générale-
ment  sous  la  forme  d’une  nouvelle  tumeur,  et 
parfois  de  métastases  disséminées  dans 
l’organisme.  La  nouvelle  tumeur  est  issue  de 
quelques  cellules  cancéreuses  ayant  résisté  au 
traitement initial. Au Laboratoire de Cancérolo-
gie  Expérimentale  du  CEA,  nous  étudions  les 
cellules cancéreuses mammaires qui survivent à 
la radiothérapie  :  quelles  sont  ces  cellules  résis-
tantes  ?  Comment  les  distinguer  des  cellules 
sensibles à l’irradiation ?  La tumeur « récidiviste 
» ressemble-t-elle à la tumeur d’origine, ou a-t-
elle  acquis  des  propriétés  particulières,  notam-
ment en termes d’agressivité ? 
A la recherche des cellules qui résistent à la radio-
thérapie…
Par définition, les cellules à l’origine de la rechute 
sont  des  cellules  plus  résistantes  que  les  autres, 
capables de survivre à l’irradiation et de se remet-
tre  à  proliférer  après  le  traitement.  Ces  cellules, 
connues sous le nom de « Cellules Souches Cancé-
reuses  »  (CSC,  encadré  1),  sont  étudiées  depuis 
une dizaine d’années. Pour pouvoir reconnaître et 
éradiquer  totalement  les  cellules  qui  résistent  à 
l’irradiation, il faut pouvoir trouver une protéine 
-ou  «  marqueur  »-  qui  les  différencie  des  autres 
cellules  de  la  tumeur.  Dans  un  premier  temps, 
nous avons recherché ce marqueur de résistance à 
l’irradiation  en  nous  basant  sur  différents  mar-
queurs de CSC du sein proposés dans la littérature 
scientifique.  Nous  avons  ainsi  montré  que  les 
cellules  qui  survivent  au  traitement  sont  celles 
qui ne possèdent pas à leur surface une protéine 
appelée  CD24  (Cluster  of   Differenciation  24), 
habituellement exprimée  par les  cellules sangui-
nes  mais  décrite  dans  le  cancer  du  sein  depuis 
quelques années. 
Quel  lien  entre  les  cellules  CD24-  et  la  rechute 
tumorale ?
Nous avons montré au laboratoire que ces cellules 
résistantes,  que  l’on  nommera  CD24-,  subissent 
quelques  dommages  lorsqu’elles  sont  irradiées 
mais  parviennent  à  survivre.  Au  contraire,  les 
cellules  qui  possèdent  à  leur  surface  la  protéine 
CD24  (ou  CD24+)  sont  complètement  éliminées 
par l’irradiation. Après un certain laps de temps, 
les  cellules  CD24-  ont  réparé  les  dommages  dus 
aux rayons et se divisent à nouveau pour donner 
une descendance qui sera à l’origine de la rechute 
tumorale. 
Une des caractéristiques particulières des cellules 
souches en général, et des cellules CD24- en parti-
culier, est leur aptitude à effectuer des divisions 
asymétriques : l’une des cellules filles ressemble à 
la  cellule  parentale  et  n’exprime  pas  CD24, 
l’autre cellule fille est différente et exprime CD24. 
Ainsi,  la  tumeur  «  récidiviste  »  sera  composée 
d’un  mélange  de  cellules  CD24-  et  CD24+,  et 
ressemble fortement à la tumeur d’origine. 
1- Les cellules souches cancéreuses à l’origine des 
cancers
Un  cancer  est  composé  de  différents  types  de 
cellules,  et  on  suppose  que  seul  un  très  petit 
nombre d’entre elles sont capables de résister aux 
traitements et d’être à l’origine de la rechute. Ces 
cellules sont appelées «  Cellules Souches Cancé-
reuses  »  (CSC),  à  cause  des  caractéristiques 
qu’elles  partagent  avec  les  cellules  souches 
normales  de  l’organisme.  Ces  CSC  seraient  à 
l’origine du cancer car en se divisant de manière 
incontrôlée  elles  formeraient  une  masse  tumo-
rale. De plus, les CSC survivraient mieux que les 
autres cellules tumorales aux traitements anti-
cancéreux  en  général  et  à  la  radiothérapie  en 
particulier, et sont ainsi à l’origine des rechutes 
tumorales.    De  nombreuses  recherches  sont 
aujourd’hui  consacrées  à  l’étude  des  CSC,  mais 
leur  proportion  très  faible  dans  les  tumeurs  et 
souvent  l’absence  de  marqueur(s)  fiable(s) pour 
les distinguer des autres cellules cancéreuses rend 
leur étude difficile. 
Les cellules CD24- transmettent à leur descendance 
la « mémoire » de l’irradiation
En étudiant les cellules CD24- capables de survi-
vre à l’irradiation et leur descendance, nous avons 
constaté  que  les  cellules  composant  la  rechute 
tumorale ne ressemblent pas tout à fait aux cellu-
les  de  la  tumeur  d’origine.  En  effet,  les  cellules 
descendantes  sont  génétiquement  instable 
(encadré  2)  et  se  comportent  comme  des  cellules 
irradiées alors qu’elles n’ont pas reçu elles-mêmes 
de traitement. Ainsi, les cellules filles gardent en « 
mémoire » une « empreinte » de l’irradiation reçue 
par  les  cellules  mères  et  cette  empreinte  est  à 
l’origine  de  l’instabilité  génétique  que  l’on 
observe. Cette instabilité, en favorisant les cassu-
res  des  chromosomes,  peut  mener  la  tumeur  « 
récidiviste » à acquérir des mutations de l'ADN qui 
la modifient, la rendant parfois plus agressive que 
la  tumeur  d’origine  (encadré  3).  On  a  donc  une 
situation paradoxale, aussi connue sous le nom de 
catch-22,  dans  laquelle  le  traitement,  quoique 
efficace dans la majorité des cas, peut parfois creer 
un nouveau problème et avoir un impact délétère 
sur la maladie.
Et maintenant…la suite
Grace  au  soutien  de  l’ARC,  la  suite  de  notre 
travail  devrait  permettre  de  mieux  comprendre 
les  mécanismes  qui  permettent  non  seulement 
aux cellules de résister à l’irradiation, mais aussi 
de transmettre à leur descendance une instabilité 
génétique. En comprenant le lien entre l’absence 
de  la  protéine  CD24-  et  la  résistance  à 
l’irradiation,  nous  serons  peut-être  un  jour  en 
mesure de supprimer cette résistance pour rendre 
la radiothérapie encore plus efficace. Comprendre 
pourquoi les cellules qui échappent au traitement 
sont  plus  agressives  que  les  cellules  d’origine 
permettra peut-être par la suite de mieux traiter 
la rechute lorsqu’elle survient.
Les cellules souches cancéreuses du sein définissent une 
population radiorésistante impliquée dans la mémorisation 
et la transmission de l'instabilité génomique radioinduite
Laboratoire de Cancérologie Expérimentale, CEA
Julie Bensimon
Culture in vitro de 
cellules de cancer 
du sein
Qu'est-ce que c'est???
Protéine :  les protéines sont des molécules consti-
tuées  de  chaines  d'acides  aminés.  Elles  sont  les 
produits des gènes, et permettent le fonctionnement 
de la cellule
Division  asymétrique  :  elle  permet  à  une  cellule 
mère de se diviser en deux cellules filles différentes.
Mutations  de  l'ADN  :  c'est  une  modification  de 
l'information portée par le génome d'une cellule. Le 
cancer résulte d'une accumulation de mutations qui 
rendent la cellule aggressive pour l'organisme.
Pour autant, la tumeur n’aurait-elle pas acquis de 
nouvelles propriétés sous l’effet du traitement ?