Modalités diagnostiques de l’endométriose sous péritonéale postérieure A. Merlin¹, L. Zouari¹, J. Nemeth², M. Abitbol¹. ¹Service de radiologie viscérale et vasculaire, ²Service d’anatomopathologie, Hôpital Lariboisière, GHU Nord, AP-HP, Paris JFR Octobre 2006 Définition Endométriose: Implants ectopiques d’endomètre fonctionnel (c’est à dire hors de l’utérus) générant des micro-hémorragies, une réaction inflammatoire et de la fibrose. Ce tissus ectopique est activé en première partie de cycle. On distingue: L’endométriose superficielle +++ ( intra-péritonéale) Endométriome ovarien Implants péritonéaux L’endométriose profonde + (ou sous-péritonéale, c-à-d située plus de 5 mm sous le feuillet péritonéal) antérieure + et/ou postérieure ++ (= urétéro-vésicale). Taurus Ligt utéro-sacrés Rectosigmoide Cul de sac vaginal postérieur Cloison recto-vaginale Données de l’imagerie Échographie IRM Fibrose Infiltrat, Masse Hypo-échogène. Distorsion. Infiltrat, Masse Hypo-Signal T1, T2. Distorsion. Inclusion hémorragique Micro-kyste échogène ou anéchogène Spot en Hyper-Signal T1 et/ou T2 persistant en saturation de graisse Inclusion liquidienne Micro-kyste anéchogène Spot en Hyper-Signal T2 persistant en saturation de graisse Pathogénie • Théorie de la menstruation rétrograde: Régurgitation tubaire de tissu endométrial viable lors des règles. C’est la théorie communément admise. Accréditée par le caractère déclive et la répartition statistique des lésions • Théorie de la métaplasie péritonéale: Métaplasie primitive des cellules péritonéales en tissu endométrial viable activé lors des règles. • Théorie combinée à partir des 2 précédentes Répartition anatomique de l’endométriose sous péritonéale postérieure S Sacrum US T P U R V Pubis C P péritoine S sigmoïde R rectum U utérus V vessie US ligament utéro-sacré T taurus (site d’insertion utérin des US en arrière de la partie supérieure du col) C cloison recto-vaginale, sous la tangente à la lèvre postérieure du col Particularités sémiologiques • La clinique est souvent aspécifique du/des sites atteints: – Douleur pelvienne chronique – Dysménorrhée – Dyspareunie – Infertilité Elle ne permet pas de préciser si l’atteinte est Intra-péritonéale ou profonde et son siège exact. Particularités sémiologiques • La clinique est parfois évocatrice de site: Dyscinésie, rectorragies: Rectum et sigmoïde Dyspareunies profondes: Vagin • L’examen clinique est faussement négatif Dans 1/3 des cas (rectosigmoïde et ligts utérosacrés) Dans 1/5 des cas (vagin) Limites de la cœlioscopie • La cœlioscopie peut méconnaître une endométriose sous péritonéale car – La palpation et la dissection sous péritonéale per-cœlioscopie sont non systématiques. – Une oblitération fibreuse du cul de sac de Douglas limite la mobilisation utérine et masque des lésions sous péritonéale. On retiendra: • Le traitement médical freinateur est uniquement suspensif et ne peut être prolongé chez la femme jeune. • Seul le traitement chirurgical est réellement curateur s’il est exhaustif. • La cartographie préalable est cruciale: Imagerie+++ Atteintes sous-péritonéales postérieures observées à partir de 20 cas consécutifs du service (2003-2006). 15 cas prouvés par chirurgie et histologie 1 cas prouvé par chirurgie seule (non suspecté sur l’imagerie) 4 cas prouvés par une clinique et une imagerie concordantes 18 atteintes recto-sigmoïdiennes (biais de recrutement) Patientes de 24 à 51ans (moy:34 ans) 1 patiente asymptomatique. 3 patientes révélées par une occlusion (du grêle:1, du colon:2) 2 patientes révélées par des rectorragies. Site Péritoine Sous-péritonéal postérieur Sous-péritonéal antérieur Nombre Ovaire:Endométriome ovarien 7 (35%) Oblitération totale du cul de sac de Douglas 4 (20%) Taurus et/ou ligts utéro-sacrés 10 (50%) Rectum et/ou sigmoïde 18 (90%) Vagin 5 (25%) Cloison recto-vaginale 1 (5%) Vessie et/ou uretères 0 (0%) Taurus uterinus et/ou ligaments uterosacrés Premier site par fréquence Atteinte souvent combinée, par contiguïté. Infiltration tissulaire en plaque ou nodulaire +/-kystes ou spots hémorragiques à la face postérieure du col. Taurus uterinus et ligaments uterosacrés • • • • SeEev 71% SpEev 96% SeEtr 80% SpEtr 98% respectively SeEer 42-100% SpEer 67-100% Limites: champs de vue limité. US au contact d’un myome, endométriome… • Seirm 76% Spirm 83% Eev: échographie endo-vaginale, Etr: échographie trans-rectale, Eer: Echo-endoscopie rectale Echographie endovaginale, coupe paramédiane droite: ligaments uterosacré droit épaissi (4 mm) IRM, sequence T2 en axial: Ligaments uterosacré droit épaissi (flèche) et infiltration tissulaire hypodense du torus (têtes de flèche) Patiente transférée dans notre centre pour suspicion de plaie digestive durant une hystérectomie pour fibromes. Découverte per-opératoire d’une endométriose rectosigmoïdienne méconnue (flèche): une hysterectomie subtotale est réalisée. Scanner pelvien avec opacification basse: Ligaments uterosacré droit épaissi (tête de flèche) Endométriose sigmoïdienne (flèche). Il n’est pas vu de plaie digestive. Colon-rectum et colon-sigmoide: Histologie Glandes endométriosiques M SM S Stroma endométrial Mu Muqueuse M S SM Sous-muqueuse M Musculeuse Se Séreuse Se Atteinte transmurale Colon-rectum et colon-sigmoide Masse irrégulière, nodulaire ou fréquemment triangulaire à sommet antérieur Développée entre le torus utérinus et le rectosigmoide, elle envahissant la musculeuse sur sa face antérieure elle est focalement épaissie) +/- spots et micro-kystes Colon-rectum et colon-sigmoide 90% des atteintes digestives dans le cadre d’une endométriose. Préciser la distance entre la lésion et la marge anale +++ (possibilité ou non de résection anastomose) Colon-rectum et colon-sigmoide Performances de l’ imagerie, données de la littérature • SeEev 87% SpEev 97% • SeEer 82-100% SpEer 66-100% • Limites: champs de vue limité. • Seirm 75-88% Spirm 97-100% Colon-rectum et colon-sigmoide : complications • Dyschésie • Formes pseudo-tumorales, occlusions et/ou Rectorragies • Indication préopératoire majeure. Patiente transférée dans notre centre pour suspicion de plaie digestive durant une hystérectomie sub-totale pour fibromes ( suite). e TDM avec opacification basse: Endométriose rectosigmoïdienne (e). IRM (T2 fat Sat) préchirurgicale, l’atteinte rectosigmoïdienne (e) était visible alors interprétée comme un myome sous-séreux postérieur. Noter les adhérences vaginales (têtes de flèches blanches)vues également sur L’échographie endo-vaginale rétrospective. e e Patiente souffrant de dyschésie permenstruelle. Échographie endo-vaginale en coupe sagittale: Endométriose recto-sigmoïdienne et du taurus (flèches noires). Musculeuse rectale sous-jacente saine (tête de flèche) Même patiente IRM, séquence T2 dans le plan sagittal et Échographie endo-vaginale en coupe sagittale: Endométriose recto-sigmoïdienne et du torus (flèches). Endométriose vaginale associée: noter l’épaississement du cul de sac vaginal postérieur (têtes de flèche) Endométrioe rectosigmoïdienne chez une patiente de 28 ans souffrant de dyschésie permenstruelle. Échographie endovaginale: épaississement pariétal recto-sigmoïdien visible en arrière du col utérin. Patiente de 36 ans. Rectorragies. Scanner pelvien avec opacification basse: Endométriose sigmoïdienne (flèches) pseudo-tumorale. La continuité lésionelle avec une endométriose rectale typique c-à-d triangulaire à sommet antérieur (flèches) permet d’évoquer le diagnostic confirmé par coloscopie et biopsies. Lavement baryté et scanner pelvien au décours: Sténose endométriosique recto- sigmoïdienne pseudo-tumorale sévère (flèches) dont le diagnostic n’a été effectué qu’en postopératoire. Noter un diverticule simple (tête de flèche) Cul de sac vaginal postérieur • Épaississement régulier ou nodulaire • Micro-kystes et/ou spots • Diagnostic préopératoire important car son association à une atteinte rectosigmoïdienne expose au risque de fistule recto-vaginale. Cul de sac vaginal postérieur Performances de l’ imagerie, données de la littérature • SeEev 29% • Seirm 80% Spirm 93% Échographie endo-vaginale en coupe axiale: IRM, séquence T2 dans le plan axial et Endométriose vaginale (flèches). Endométriose recto-sigmoïdienne associée: noter le nodule rectal (tête de flèche) Échographie endo-vaginale en coupe axiale et sagittale Écho-endoscopie rectale en coupe axiale Atteinte vaginale (têtes de flèche blanche) Atteinte recto-sigmoïdienne (flèches blanches) Musculeuse recto-sigmoidienne normale (flèches noires) Même patiente. IRM, séquence T2 dans le plan axial Endométriose vaginale: vagin épaissi contenant des inclusions en hyper-signal Atteinte recto-sigmoïdienne (flèche noire) Cloison-rectovaginale • Masse située sous la lèvre postérieure du col. • Le + souvent en association ou continuité d’autres atteintes sous-péritonéales postérieures. Oblitération totale du cul de sac de Douglas ou “Pelvis gelé” Fibrose extensive du cul de sac de douglas ne laissant persister aucun recessus péritonéal décelable entre l’utérus, le rectosigmoide et les deux ovaires agglomérés. Bilan d’infertilité Oblitération du cul de sac de Douglas et Endométriose rectosigmoïdienne (flèches) chez une Patiente de 29 ans souffrant de douleurs pelviennes chroniques et rectorragies IRM, T1 SE IRM, T2 TSE Même patiente r: rectum, u:utérus, e: endométriome ovarien IRM, T2 TSE Même patiente en échographie endo-vaginale (axial). Endométriomes ovariens, Symphyse du Douglas Et endométriose digestive sur les dernières images Même patiente en échographie endo-vaginale (sagittal). L’atteinte recto-sigmoidienne est franchement hypoéchogène, développée dans la paroi digestive en arrière de l’utérus. Conclusion En pratique quotidienne: Toujours rechercher une endométriose souspéritonéale postérieure, Si infertilité et/ou douleurs pelviennes chroniques Si endométriose intrapéritonéale connue. Description anatomique pour traitement radical optimal. Bibliographie Synthèse: Olive DL, Schwartz LB. Endometriosis. N Engl J Med 1993; 328(24):1759-69 Répartition anatomique: American Fertility Society. Revised American Fertility Society classification of endometriosis: 1985. Fertil Steril 1985; 43:351-352 Thérapeutique: Chapron C, et al. Presurgical diagnosis of posterior deep infiltrating endometriosis based on a standardized questionnaire. Hum Reprod 2005; 20(2):507-13 Urbach DR, et al. Bowel resection for intestinal endometriosis. Dis Colon Rectum 1998 ; 41:11581164 Imagerie: Échographie endo-vaginale: Bazot M, et al. Diagnostic accuracy of transvaginal sonography for deep pelvic endometriosis. Ultrasound Obstet Gynecol 2004; 24(2):180-5 Échographie endo-rectale, échoendoscopie: Delpy R, Barthet M, Gasmi M, et al. Value of endorectal ultrasonography for diagnosing rectovaginal septal endometriosis infiltrating the rectum. Endoscopy 2005; 37(4):357-614. Ohba T, et al. Evaluation of endometriosis in uterosacral ligaments by transrectal ultrasonography. Human Reprod 1996; 11 :2014-2017 Fedele L, et al. Transrectal ultrasonography in the assessment of rectovaginal endometriosis. Obstet and Gynecol 1998; 91:448-444 Roseau G, et al. Rectosigmoid endometriosis: endoscopic ultrasound features and clinical implications. Endoscopy 2000; 32(7):525-30 Chapron C, et al. Accuracy of rectal endoscopic ultrasonography and magnetic resonance imaging in the diagnosis of rectal involvement for patients presenting with deeply infiltrating endometriosis. Ultrasound Obstet Gynecol 2004; 24: 175-9 22 Dumontier I, et al. Comparison of endoscopic ultrasound and magnetic resonance imaging in severe pelvic endometriosis. Gastroenterol Clin Biol 2000; 24: 1197-2042. Bahr A, et al. Endorectal ultrasonography in predicting rectal wall infiltration in patients with deep pelvic endometriosis: a modern tool for an ancient disease. Dis Colon Rectum 2006; 49(6):869755. IRM: Bazot M, et al. Deep pelvic endometriosis: MR imaging for diagnosis and prediction of extension of disease. Radiology 2004; 232(2):379-89.6. Kinkel K, et al. Magnetic resonance imaging characteristics of deep endometriosis. Hum Reprod 1999; 14:1080-67. Merci