Lycée franco-mexicain
Cours Olivier Verdun
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force sont instables par nature, ils évoluent, changent. Une force qui n’est plus efficace n’est
plus une force mais une faiblesse.
Le droit, au contraire, échappe au temps, car il exprime ce qui doit être et non ce qui est.
On peut certes bafouer mon droit (me priver de ma liberté, me déposséder de mon bien, par
exemple), il n’en reste pas moins mon droit. Le droit est imprescriptible. Le droit se
différencie de la force parce qu’il ne produit pas une contrainte, mais un devoir, une
obligation. A l’obéissance par contrainte s’oppose l’obéissance par obligation. Or
l’obéissance véritable ne peut s’obtenir par la contrainte : elle doit reposer sur le
consentement de celui qui obéit. C’est pourquoi l’obéissance par prudence n’est pas une vraie
obéissance : « Céder à la force est un acte de nécessité, non de volonté; c'est tout au plus un
acte de prudence ». Etre prudent, c’est tenir compte des conséquences : si je désobéis, je
subirai telle répression, j’anticipe la contrainte. Céder à la force, c'est faire acte de prudence,
de sagesse pratique. Céder, ce n'est pas faire son devoir, c'est agir selon la nécessité et non
selon le droit.
La contrainte relève de la nécessité, c’est-à-dire de l’enchaînement des causes et des effets,
tandis que l’obéissance relève de la moralité, de la liberté, c’est-à-dire des actes de volonté.
L'obligation est un impératif moral ou juridique, comme le devoir, le respect des lois ou celui
des engagements que l'on a pris. L'obligation implique des rapports avec autrui dans un cadre
fixé par des règles.
Le droit suppose une soumission volontaire, une reconnaissance, un acte d’assentiment de
l’esprit. La force, si elle peut me contraindre, ne m’oblige pas : elle n’implique pas que je me
soumette à elle en esprit. Ma soumission est le fruit de ma faiblesse ou de ma prudence. Mais
ce constat n’entraîne pas une reconnaissance légitime. La force contraint, le droit oblige.
L’obligation est une obéissance volontaire et légitime ; la soumission est le fait d’obéir à une
puissance contre son gré ; l’autorité est le pouvoir légitime d’imposer l’obéissance, de
commander à autrui (il s’agit ici d’une obéissance acceptée excluant la violence directe) ;
l’obéissance est l’acte par lequel les individus se plient volontairement à la loi ou à l’ordre
légitime.
Il faut distinguer les causes morales et les causes physiques. Ce qui est physique relève de
l'ordre des choses, de la nécessité (exemple des inégalités physiques). Ce qui est moral dépend
de la volonté. Les causes physiques génèrent de la nécessité; les causes morales génèrent du
devoir. Le devoir dirige la volonté d'un être libre; la nécessité pousse à la prudence (mieux
vaut céder sa bourse que perdre la vie !).
Transition :
Au total, la force ne fait pas droit. L’idée d’un droit du plus fort est contradictoire et
éminemment absurde. On ne cède à la force que par prudence, par contrainte ; on n’obéit
qu’aux puissances légitimes. Mais si le droit n’est pas fondé sur la force, la force ne peut-elle
pas être au service du droit ?