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La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no277 - novembre 2002
Les épistaxis précédentes avaient été jugulées dans la grande
majorité des cas par tamponnement. Celui-ci avait été associé
à une pression bidigitale des narines dans 4 cas et à une cauté-
risation chimique dans 5 cas. Certains patients avaient eu
jusqu’à huit méchages successifs dans la semaine précédente et
il est à signaler que, dans 45 % des cas, ils avaient saigné peu
ou prou lors du déméchage.
La moitié des patients venaient à l’hôpital après échec d’un trai-
tement initié en dehors de l’hôpital par un autre professionnel
de santé, médecin généraliste, urgentiste, ORL de ville, infir-
mière ou pharmacien.
Le Pr D. Stoll (ORL, Bordeaux) a donné les résultats concernant
la prise en charge initiale à l’hôpital. Tous les patients ont eu une
prise de pouls et de la tension artérielle. Quinze patients avaient
une tension artérielle élevée à l’arrivée, avec une pression arté-
rielle systolique moyenne de 145 mmHg (105-200) et une pres-
sion artérielle diastolique moyenne de 83 mmHg (60-120). Un
tiers des patients ont eu une NFS, qui a révélé une anémie dans
la moitié des cas, un tiers des patients a eu un TP et 16 % un TCK.
Cinq patients avaient une pathologie systémique ; 4 étaient
hypertendus et un avait une thrombopénie ; 11 patients avaient
une pathologie nasale favorisante : 10 avaient une rhinite et un,
une tumeur endonasale. Enfin, dans 9 cas l’épistaxis pouvait
être considérée comme iatrogène ; parmi ces cas figuraient ceux
de 4 patients qui prenaient des médicaments perturbant l’hémo-
stase et ceux de 3 patients qui avaient été déméchés récemment.
Chez les patients qui étaient arrivés méchés, l’ancienneté du
méchage était en moyenne de 18 heures, les mèches utilisées
étant très diverses : Coalgan®, polyvinyle acétate (Merocel®),
mèche grasse, coton, mèche iodoformée, sonde à ballonnet. Le
praticien a fait pencher la tête du patient en avant dans 28 cas,
il lui a demandé de se moucher dans 32 cas, il a aspiré la fosse
nasale dans 17 cas, il a appliqué localement un vasoconstric-
teur dans 24 cas et pratiqué une anesthésie locale dans 19 cas.
Pratiquement tous les patients (45/50) ont eu un examen du pha-
rynx afin d’apprécier l’écoulement postérieur, mais seuls 38 ont
eu une rhinoscopie antérieure et un seul patient a bénéficié d’une
endoscopie des fosses nasales.
La moitié des patients ont été méchés à l’issue de cet examen.
Les produits utilisés étaient, là aussi, très divers : cellulose oxy-
dée (Surgicel®) (9), polyvinyle acétate (Merocel®) (7), Algosté-
ril®(2), Coalgan®(2), sonde endonasale (2), mèche de gaze (2),
coton hydrophile (1).
Cinquante minutes plus tard, l’épistaxis était tarie chez 47 pa-
tients. Elle persistait dans 3 cas qui seront détaillés plus loin.
Sur les 36 patients qui sont retournés à leur domicile, 22
n’étaient pas méchés et 14 l’étaient ; mais, sur les 14 patients
méchés, seuls 9 avaient un rendez-vous pour le déméchage, les
autres avaient reçu des instructions plus ou moins vagues. Onze
traitements locaux et 14 traitements généraux ont été prescrits :
pommade hémostatique (9), corticoïdes locaux (1), antibiotique
local (1), antibiotiques par voie générale (6), analgésique (4),
benzodiazépine (2), antihypertenseur (1), antispasmodique (1).
Les 14 autres patients ont été hospitalisés, 6 ont eu une pres-
cription d’antibiotiques, un de fer, un de substitut plasmatique
et un d’antihypertenseur.
Les points forts de cet Observatoire
•
Prendre la tension artérielle : beaucoup de patients ont une
HTA, mais il est difficile de dire si celle-ci est la cause du saigne-
ment ou seulement de sa pérennisation.
•
Faire une NFS : il est difficile d’apprécier la perte sanguine, sur-
tout si l’épistaxis s’est répétée, et on peut découvrir une anémie.
•
Faire un bilan minimal de l’hémostase : certains patients omet-
tent de dire qu’ils sont sous anticoagulants, ou leur traitement
n’est pas adapté.
•
Réfléchir avant de faire un tamponnement et choisir un produit
non agressif pour la muqueuse : avec les mèches classiques, beau-
coup de patients saignent au déméchage et la succession des
méchages/déméchages est un facteur de gravité et d’escalade
thérapeutique.
•
Après déméchage, examiner les fosses nasales : sur les 50 patients,
un homme avait une tumeur des fosses nasales.
Tableau I. Patients qui saignaient encore 50 minutes après leur prise en charge initiale.
Âge
73 ans
25 ans
40 ans
Antécédents
HTA
Aspirine
4 méchages
Saignement depuis plus de 6 h sous un 5
e
méchage
HTA
Une cautérisation chimique
7 méchages
Saignement depuis plus de 6 h sous un 8
e
méchage
Côté du saignement
D + G
G
G
Traitement initial
Surgicel
®
bilatéral
Mèches grasses
Sonde à ballonnet
Traitement secondaire
Merocel
®
bilatéral
Cautérisation
de l’artère sphénopalatine G
Embolisation